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Les Félins

Saga Alain Delon

Paris brûle-t-il ? (1966)


PARIS BRÛLE-T-IL ?

Résumé :

Août 1944, Adolph Hitler convoque le général Von Choltitz. Il lui confie le commandement de Paris avec des ordres très strictes : si les alliés débarquent avant que leur nouvelle arme de destruction arrive, il devra raser Paris. Pendant ce temps, dans la résistance française, on commence à s'impatienter de l'arrivée des alliés, et on prépare une insurrection. Jacques Chaban-Delmas le conseiller du général DeGaulle cherche à éviter cela à tout prix. Pour cela il veut faire libérer Bernard Labé un résistant qui a une grande influence sur le réseau national, mais celui-ci est tué. Le colonel Rol-Tanguy veut attaquer le premier avant les gaullistes, en effet une compétition fait rage. Et le premier qui prendra possession de Paris, contrôlera la France. Alors que tout est mis en place pour faire sauter Paris, Von Choltitz désobéi et se rend, les alliés ont décidé de foncer tout droit sur Paris, la ville est sauvée et libérée. De Gaulle entre dans Paris.

Critique :

Un nouveau film de René Clément, que Delon devait être heureux de retrouver. Cette fois-ci c'est sur un fait historique que Clément nous emmène : l'arrivée des alliés dans Paris avant que les allemands ne fassent sauter et ne détruisent la capitale. Alors même s’il y a un casting impressionnant comme dans Le Jour le Plus Long, nous sommes assez loin de ce type de film, nous ne sommes pas non plus dans Il Faut Sauver Le Soldat Ryan par exemple. Ici pas de combats épiques ou d'affrontements violents, vous verrez certes quelques scènes entre les résistants et l'armée allemande mais rien de visuellement extraordinaires, et c'est peut-être une bonne chose, car cela rend les combats plus réalistes que ceux que l'on peut voir dans la majorité des films de guerre. Ici, c'est plus psychologique et cela raconte le déroulement et le cheminement des événements qui seront à l'origine de la libération de Paris par les alliés, avant que l'armée allemande ne puissent faire sauter la ville.

Tout d'abord, la grande surprise de ce film est son casting ahurissant que ce soit du côté des Français : outre Alain Delon, nous retrouvons à nouveau à ses côtés : Jean-Paul Belmondo, et toutes les stars de l'époque ou celles en devenir : Bruno Cremer, Jean-Pierre Cassel, Claude Rich, Yves Montand, Simone Signoret, Pierre Dux, Michel Piccoli, Jean-Louis Trintignan (dans un petit rôle de salopard), Bernard Fresson, Leslie Caron, Daniel Gélin, etc. que du côté américain : Kirk Douglas dans le rôle de Patton, Anthony Perkins, Robert Stack (le fameux Eliot Ness de la série tv des années 60), Orson Wells, Glenn Ford... C'est grâce à Paul Graetz de la Paramount que René Clement se retrouve scénariste sur ce film et qui est chargé de l'adaptation du livre de Lapierre et Collins. En effet, Graetz voulait faire un film aussi prestigieux que Le Jour le Plus Long du côté Européen.

Alors commençons par préciser une chose : le film est long, mais alors très long, près de 2H40 et entièrement en noir et blanc. Et il faut avouer qu'il y a quelques passages assez longuets où il ne se passe pas grand-chose à l'écran, il y a beaucoup de dialogues, car bien évidemment on voit le point de vue et la motivation des différents protagonistes qui sont intervenus dans cette séries de faits historiques. D'ailleurs à ce propos, ceci est remarquablement retranscrit à l'écran et servit par des acteurs de talent, mais Clément est un spécialiste de ce genre de film puisque son premier était La Bataille du Rail, ainsi Gert Fröbe en général Von Choltitz fait très bien passer à l'écran son amour pour la ville de Paris qu'il ne peut se résoudre à détruire sur les ordres de son Fürher devenu complètement fou et qui contre tous les ordres et la pression subie ne cédera pas. D'ailleurs la scène où Von Choltitz revient dans son bureau et trouve deux officiers SS est une petite merveille : il s'assoit, ouvre le tiroir de son bureau tout doucement où se trouve son revolver pendant que les deux SS lui parlent, pensant qu'ils vont lui demander pourquoi il n'a pas encore obéi aux ordres du Fürher. Et non, c'est pour tout autre chose qu'ils sont venus, dans la réponse de Von Choltitz on sent d'ailleurs combien il est désabusé par la situation et sait que la guerre est perdue pour les Allemands.

Le film mêle également des inserts de vrais combats, des images d'archives en fait, qui sont plus au moins bien intégrées dans le film. Certaines ne se voient pratiquement pas, d'autres c'est plus flagrant. De mon avis personnel, on voit également la différence de stature entre les acteurs américains et français, les gagnants étant sans aucun doute les américains : dès que l'on voit Robert Stack, Douglas ou Glenn Ford tout de suite ils s'imposent à l'écran, ils ont une présence que ne possèdent pas les acteurs français qui sont pourtant excellents, mais nous ne sommes pas dans la même catégorie.

On voit donc un Paris la plupart du temps désert, mais avec ses monuments (principaux lieux montrés dans le film). D'ailleurs avec les événements qui se passe actuellement et les mouvements sociaux, je me suis surpris à dire qu'en fait les allemands auraient dû faire sauter le sénat, en effet déjà dans ce film je trouve que le lieu est désuet et vieillot et déverse un flot de luxe inutile d'un autre temps qui aujourd'hui paraît inopportun, inadéquat et totalement inutile. Mais ceci est un autre débat, les scènes de liesse lors de l'arrivée des alliés dans Paris sont, elles aussi, très bien retranscrites à l'écran : on imagine sans le moindre mal la joie de ces personnes qui pendant plusieurs années ont été sous l'occupation allemande avec tout ce que cela comportait, rationnement, couvre-feu, etc. et de voir débarquer enfin les gens qui vont les libérer, ils ne peuvent qu'être dans une allégresse totale et ça, ça se voit parfaitement sur l'écran. Là encore, grâce à l'expérience de Clément sur ce type de film.

Techniquement le film est très bien réalisé et filmé, le noir et blanc apporte en plus toujours ce petit cachet un peu « classe » par rapport à la couleur. Pour se focaliser sur Alain Delon, sa prestation est bonne, mais il est malheureusement noyé dans tout le casting prestigieux autour de lui, et n'a pas un grand rôle où nous aurions pu le voir longtemps à l'écran, c'est plutôt Pierre Vaneck qui s'en tire le mieux de ce côté-là. Dans les petits détails, je trouve dommage que Claude Rich fasse deux rôles ici : celui du Général Leclerc et le lieutenant Pierre de la Fouchardière, je trouve que ça gâche un peu l'effet. Mais bon, rien de bien méchant. La musique composée par Maurice Jarre (Lawrence d'Arabie, Docteur Jivago, Gorilles dans la Brume) le père de Jean-Michel Jarre, ne laissera pas de mon avis personnel un souvenir mémorable, dont sera pourtant tirée la chanson Paris en Colère chantée par Mireille Mathieu, mais bon personnellement elle ne me m'émerveille pas plus que cela. Le film marchera pas mal en France avec près de 5 millions d'entrées, mais ne rapporte que 500 milles dollars aux USA. On ne peut pas tout avoir. Le film n'est pas indispensable dans la filmographie de Delon, mais si vous voulez vous faire le plaisir de le revoir aux côtés de Belmondo, avant leur réunion dans Borsalino en 1970, ça peut toujours faire plaisir aux fans. 

Anecdotes :

  • Le film ne fut édité en France en DVD qu'en 2011 à cause de questions de droits. En effet, une édition DVD avait été faite en 2003 mais que pour les USA. La Paramount répara cet donc cet oubli.

  • Kirk Douglas n'accepta de jouer dans le film que si Belmondo était lui aussi dans ce film ! Ils n'auront pourtant aucune scène commune à l'écran.

  • Le film fut tourné en noir et blanc, car les autorités françaises refusèrent que de vrais drapeaux nazis flottent à nouveaux sur les bâtiments officiels de Paris. Ils n'acceptèrent que des drapeaux en noir & blanc avec la croix gammée.

  • Tourné lors du second mandat de Charles DeGaulle, le film a demandé de nombreuses autorisations. Déjà de la part des protagonistes toujours vivants à l'époque du tournage, que de la part des autorités officielles : la préfecture de Police, et le ministère de la culture et celui de l'Intérieur.

  • Le film était tourné très tôt le matin, à partir de 5H pour déranger le moins possible les parisiens. Il fut tourné juste avant les travaux d'urbanisme qui allaient changer de façon important la ville et effacer définitivement les traces de la guerre.

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