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PrésentationSaison 2

Baron noir

Saison 1



1. JUPITER



Scénario : Eric Benzekri et Jean-Baptiste Delafon

Réalisation : Ziad Doueiri

Résumé :

Le soir du débat du second tour des présidentielles, qui oppose l’ex-Président de droite Jean-Marc Auzanet au candidat de gauche Francis Laugier, Philippe Rickwaert, conseiller de Laugier, apprend qu’une perquisition va avoir lieu dans les locaux de l’office HLM du Nord. En pleine nuit, Rickwaert part effacer toutes les preuves, afin d’éviter un scandale de financement illicite de la campagne de Francis Laugier. Il compte sur le soutien du jeune Joël Donfront, syndicaliste et trésorier de l’office HLM, pour justifier de la somme disparue.

Critique :

Pour ce premier épisode, les créateurs de Baron Noir semblent vouloir hameçonner les spectateurs, par une forte intensité dramatique. Sur ce point, c’est réussi. Le coup de théâtre effectué par Philippe Rickwaert envers son chef, le candidat à la Présidentielle Francis Laugier, en direct à la télévision en plein enterrement d’un jeune militant socialiste, rend cet épisode pilote prenant et donne envie de suivre le reste de la série.

Néanmoins, la série manque pour l’instant de subtilité. Les événements de ce premier épisode sont peut-être trop « énormes », comme le suicide du militant. Et la musique, un peu lourde, accentue trop les effets dramatiques. Néanmoins, on sent que les fils de l’intrigue nous mènent quelque part. Les scénaristes de la série, Eric Benzekri et Jean-Baptiste Delafon, font preuvent d’un beau professionnalisme « à l’américaine » dans la construction de leur récit.

L’autre point fort, qui charme immédiatement, est le duo d’acteurs principal. Niels Arestrup campe une sorte de François Mitterand, froid, très intelligent, voire royal. En opposition à cette prestance, Kad Merad est l’homme du peuple, aux origines musulmanes (sur le ton de la blague, il demande aux syndicalistes si leurs merguez sont bien hallal avant de les goûter). Si Niels Arestrup est bien sûr convainquant, la surprise de la série est bien évidemment Kad Merad, qui se détache immédiatement comme le véritable personnage principal. Son jeu est totalement convainquant, simple, attachant, crédible.

Les acteurs secondaires, eux, sont moins bien exploités dans ce premier épisode. La faute, peut-être, à trop de scènes explosives ou caricaturales. Anna Mouglalis, dans le rôle d’Amélie Dorendeu, est une arriviste bourgeoise un peu trop cliché, et Eric Caruso en Mirmon trop théâtral. Mais ces deux personnages sont encore périphériques à ce stade de la série.

Dans les personnages secondaires, seul le jeune Joël (interprété par Oscar Copp) est véritablement touchant. Son rôle est marquant : il n’apparaît que dans ce pilote, mais viendra hanter les personnages de sa mort, véritable déclenchement de l’engrenage.

En somme, si la mise en scène est un peu classique, tout comme l’usage de la musique, le pilote de Baron Noir parvient à ses fins : nous hameçonner pour voir la suite de la série. Et surtout, la série paraît d’ores et déjà d’un bien meilleur niveau que les autres séries françaises. 

Anecdotes :

  • Niels Arestrup est un habitué des rôles politiques, ayant déjà joué dans Rainbow Warrior en 2006, Le Candidat en 2007, Quai d’Orsay en 2013

  • Le réalisateur Ziad Doueiri a été assistant caméra de Quentin Tarantino sur Reservoir Dogs et Pulp Fiction. On peut reconnaître dans Baron Noir une même maîtrise des plans séquences et du steadycam.

  • Eric Benzekri, co-scénariste et co-créateur de la série, hérite d’un long parcours politique. Après avoir suivi les cours de l'Institut d'études politiques de Strasbourg et la classe préparatoire de l'ENA, il rejoint le bureau national de l'UNEF et le mouvement « la Gauche socialiste » créé par Jean-Luc Mélenchon et Julien Dray. Il a également collaboré avec l'ex-ministre de l'Environnement Delphine Batho.

  • Le syndicaliste Gilles Dumont de l’usine Clamex est interprété par le vrai syndicaliste Xavier Mathieu, lorsqu’il était ouvrier de l’usine Continental de Clairoix.

  • Plusieurs journalistes interprètent leur propre rôle dans Baron Noir : Wendy Bouchard et Jean-Pierre Elkabbach d’Europe 1, Michaël Darmon et Audrey Pulvar d’iTélé.

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2. 1932

Scénario : Eric Benzekri et Jean-Baptiste Delafon

Réalisation : Ziad Doueiri

Résumé :

Francis Laugier cherche à écarter Rickwaert de la direction du PS. Pour cela, il veut donner la 13ème circonscription aux Verts, et faire perdre l’élection à Rickwaert sur ses terres. Laugier fait appel à Amélie Dorendeu pour convaincre les communistes de s’écarter de l’élection, afin de donner leurs voix aux Verts. Commence une bataille à distance entre le Baron Noir et le Président.

Critique :

Après un premier épisode où son personnage paraissait légèrement caricatural, Anna Mouglalis commence à briller dans le rôle d’Amélie dans ce second épisode. Sa voix unique, son jeu intellectuel, sa diction parfaite, incarnent parfaitement cette jeune femme bourgeoise et ambitieuse. Le contraste est d’autant plus fort avec Kad Merad, et son jeu plus naturel et populaire.

La mise en scène reste toujours un peu trop transparente. On a même droit à une ombre de perchiste, très, très voyante, dans une scène de nuit sur un parking. A se demander si ce perchiste tellement visible n’est pas une référence au personnage d’ex-perchiste (sportif) qui se présente face à Rickwaert ! Les manipulations de Rickwaert sont encore un peu brutales pour être tout à fait crédible, comme le casse des urnes.

Néanmoins, on peut dire que l’épisode 2 est globalement plus convaincant que le pilote. La course contre la monte des élections législatives est très prenante, et offre quelques beaux moments, comme Rickwaert sur le pas de la porte, prêt à retrouver sa fille pour son anniversaire, avant de décider de remonter dans sa voiture pour retrouver son opposant communiste. Plus tard, Rickwaert interrompant l’acte sexuel, faire l’amour étant sa superstition pour gagner chaque élection, pour repartir au combat. 1932 montre comment, en politique, il faut faire des sacrifices et être toujours au bon endroit, au bon moment.

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3. SOLFÉRINO

Scénario : Eric Benzekri et Jean-Baptiste Delafon

Réalisation : Ziad Doueiri

Résumé :

Pour contrer Rickwaert suite à son succès aux élections législatives, Francis Laugier impose à Amélie Dorendeu de se présenter à la tête du Parti socialiste. Laugier prépare également un chantage, pour forcer Rickwaert à soutenir Amélie. Amélie Dorendeu et Philippe Rickwaert se retrouvent tous deux les jouets du Président dans cette bataille.

Critique :

Après les quelques maladresses qui entachaient les deux premiers épisodes, Solférino tient mieux la route. On retrouve à nouveau une partie d’échec, menée à bâton rompu, et où chaque instant compte.

Le principal atout de cet épisode tient dans son réalisme. Le 1er épisode proposait des coups de théâtre un peu forts (suicide, affrontement brutal entre Rickwaert et Laugier), le second également (truquage des élections). Ces manœuvres politiques – qui peuvent se produire, malheureusement, dans notre monde réel – avaient un côté trop théâtral, trop « énormes », pour des épisodes d’exposition, où l’on découvrait encore les personnages.

Dans l’épisode 3 Solférino, les personnages sont posés. Et d’autre part, les manœuvres politiques sont plus subtiles, et donc plus crédibles. Tout se joue autour du poste de 1er secrétaire du parti, à la suite de la démission du précédent en poste, percuté par une voiture. Entre Rickwaert et Laugier commence une lutte à distance : quel sera le prochain mouvement de l’adversaire ?

Entre les deux ennemis, des femmes. Dans le rôle de Véronique, Astrid Whettnall est simplement parfaite, et touchante. Dévouée à son maire Rickwaert, elle se voit confrontée à des actes immoraux qu’elle supporte difficilement. On croit tout à fait à son personnage de femme juste, qui se bat initialement pour de vraies valeurs humanistes, et qui se retrouve prise dans des combines politiciennes honteuses.

De l’autre côté, la Reine de Laugier, Amélie, est campée par Anna Mouglalis. Dans les épisodes précédents, son personnage restait antipathique et caricatural. Elle était une arriviste bourgeoise, campée par une actrice au phrasé théâtral. Dans Solférino, transparaissent enfin ses premières failles. Obsédée par sa carrière, prête à travailler jour et nuit, Amélie ne semble pas avoir de vie. Quand le Président la réveille au milieu de la nuit, elle est seule dans son lit. Misant sa carrière sur un total dévouement au Président, elle se retrouve à devoir prendre la tête du Parti – rôle dont elle ne rêvait absolument pas. Amélie se retrouve alors, progressivement, dans le même camp que Rickwaert : ceux qui déchantent, ceux qui sont manipulés, par le président Laugier.

Parallèlement, Rickwaert doit gérer l’éducation de sa fille. En effet, celle-ci a presque laissé mourir l’un de ses camarades, mis dans le coffre d’une voiture pour s’amuser lors d’une virée entre amis. A travers cette péripétie, on pose le personnage de Rickwaert comme un vrai humaniste, porté par une haine de la classe supérieure et de la barbarie des puissants. Ayant ainsi éduqué sa fille, il est donc très déçu par son comportement.

En somme, un épisode plus subtil, efficace et prenant. Après deux épisodes peut-être trop musclés, nous commençons à vraiment nous attacher aux personnages, et vivons avec eux leurs déconvenues. 

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4. BLEU

Scénario : Eric Benzekri et Jean-Baptiste Delafon

Réalisation : Ziad Doueiri

Résumé :

Le nouveau gouvernement Laugier prépare un plan historique pour l’éducation nationale. Rickwaert accompagne le mouvement des jeunes des lycées professionnels, qui se sentent lésés par cette réforme, au travers du jeune Mehdi fer de lance du mouvement. Rickwaert change la donne, et organise un bras de fer autour de la question des jeunes issus des quartiers populaires, sans espoirs à la sortie de leurs formations professionnelles. Le camp Rickwaert propose l’instauration de quotas pour aider ces classes populaires. Laugier et son équipe tentent d’étouffer ces manifestations par tous les moyens.

Critique :

Dans Bleu, nous assistons au surprenant rapprochement amoureux de Rickwaert et Amélie. Mais leur relation n’est-elle pas qu’un outil de plus pour Rickwaert d’atteindre le Président ?

Comme l’épisode précédent, l’intrigue de Bleu est crédible et prenante à la fois. Cette fois, c’est un « bleu », un jeune des lycées pros, qui sera matière pour Rickwaert à créer le trouble dans la réforme scolaire du Président.

Niels Arestrup, dans les chaussures du Président Laugier fraîchement élu, est toujours royal. Il semble dans sa tour d’ivoire. Le jeu, froid, très calme, d’Arestrup, correspond parfaitement au personnage – encore une fois, on pense à François Mitterand.

A mi-chemin de la série, un thème devient central, celui de la duplicité. Rickwaert semble sincèrement de gauche, et sincèrement du côté des lycéens pro. Et pourtant, ne cherche-t-il pas seulement à épancher sa haine envers Laugier, en utilisant les manifestations des jeunes ? Sa relation amoureuse avec Amélie est du même acabit. Le choix de Kad Merad s’avère, depuis le premier épisode, très payant : il nous est immédiatement sympathique, et fait donc passer n’importe quel argument comme la vérité. Difficile de résister à son aplomb, et à son apparente franchise.

La série dessine également un véritable propos politique : la lutte des classes existe toujours. Mais elle est étouffée par le pouvoir, car ceux qui sont au pouvoir tombent toujours du côté de la classe « d’en haut ». Qui reste-t-il pour défendre la « France d’en bas » ? Les électrons libres, les barons noirs. Toute l’ambivalence tient dans le fait que ces électrons libres, s’ils sont un jour à la tête du pouvoir, retomberont eux aussi du côté de l’élite.

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5. GRENELLE

Scénario : Eric Benzekri et Jean-Baptiste Delafon

Réalisation : Ziad Doueiri

Résumé :

Pour en finir avec le mouvement des lycées professionnels, Laugier souhaite proposer une revalorisation de leurs stages, en négociant avec le patronat français. Rickwaert demande à Mehdi de convaincre l’ex-Président Jean-Marc Auzanet, de demander au patronnat de s’opposer à Laugier. Le jeune Mehdi refuse de s’associer à ce personnage qui représente tout ce contre il se bat. Au gouvernement, Laugier hésite fortement à accorder les quotas à ces jeunes, mais le 1er Ministre Mirmon s’oppose fermement à ces quotas, qui vont selon lui à l’encontre de la République.

Critique :

La série continue sur sa lancée. Les personnages continuent d’être approfondis, au travers des péripéties. Mirmon, austère personnage de l’entourage de Laugier, devenu 1er Ministre, est l’un de ceux qui se révèlent dans cet épisode Grenelle. Face à l’idée de quotas pour les jeunes des lycées pros, émise par Rickwaert pour contrer Laugier, Mirmon est profondément choqué. Issu d’une famille d’instituteurs et de paysans, Mirmon est fier d’être arrivé à son poste à la sueur de son front – en filigrane, il voit les immigrés comme les « profiteurs » de ces possibles quotas.

A l’opposé, le personnage de Mehdi est également creusé. Ustensile de Rickwaert pour mettre des bâtons dans les roues du gouvernement, Mehdi se retrouve à faire de plus en plus de compromis pour le Baron Noir. Quand une photo de lui serrant la main de l’ex-président de droite, paraît sur tweeter, Mehdi se sent humilié. Rickwaert lui conseille alors d’utiliser cette haine, comme une force. Se dessine alors un monde politique, qui ne fonctionne que sur la haine. Subtile analyse de notre République, où les belles idées ne suffisent pas. Pour accéder au pouvoir, il faut « avoir la haine ». Cet épisode Grenelle montre donc brillamment que les politiciens n’avancent que par désir de vengeance.

Et c’est probablement grâce à cette haine, bien utilisée, que Rickwaert est nommé Ministre du Travail, au terme de l’épisode.

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6. SHUTDOWN

Scénario : Eric Benzekri et Jean-Baptiste Delafon

Réalisation : Ziad Doueiri

Résumé :

Rickwaert est nommé Ministre du Travail dans le nouveau gouvernement Laugier. Véronique Bosso, la fidèle collaboratrice de Rickwaert, doit lui succéder à la mairie de Dunkerque. Mais Véronique souhaite la transparence sur un dossier qui pourrait remonter à Rickwaert. Philippe se retourne contre son amie, et organise une élection municipale partielle pour la faire échouer. Au gouvernement, Francis Laugier refuse de payer l’amende due à l’Europe par la France, contre l’avis de tous ses ministres. Seul Rickwaert est de son côté, pour cette grande bataille pour un nouveau traité européen. Les deux ennemis se retrouvent.

Critique :

Il y a deux types d’hommes politiques : ceux qui placent leurs haines au-dessus de leurs ambitions, et ceux qui placent leurs ambitions au-dessus de leurs haines. C’est Laugier qui rappelle cet adage à Rickwaert. Dans cet épisode Shutdown, les deux hommes se retrouvent. En effet, aculé par une dette que la France doit à l’UE, Laugier se tourne vers le seul homme qui lui semble à son niveau d’intelligence : Rickwaert. Forcément, entre deux fauves de la politique, la haine les a séparé. Mais leurs ambitions sont hautes, tellement hautes, qu’ils peuvent mettre leur haine de côté. Ces retrouvailles de Rickwaert et Laugier, autour d’un nouveau jeu d’échec à mener face à l’Allemagne et l’U.E., donnent un sixième épisode passionnant.

Parallèlement, si Rickwaert retrouve Laugier, il se fait une nouvelle ennemie : Véronique. Prenant sa place à la Mairie de Dunkerque, elle souhaite la transparence sur les affaires qui touchent Rickwaert. Après 12 ans de collaboration et d’amitié, Rickwaert n’hésite pas une seconde à se retourner contre Véronique, et à l’enferrer dans un piège habile.

Encore une fois, on admire la structure et l’intelligence du scénario de Baron Noir.

Mais on pourrait, aussi, regretter les tics de mise en scène qui deviennent visibles au bout de ce sixième épisode : musiques anxiogènes entre chaque séquence, avec comme transitions des plans vus depuis les voitures des personnages sur les villes qu’ils parcourent, ou des plans vus du ciel en drones. Bien sûr, on perçoit la symbolique de ces pastilles visuelles : ces hommes et ces femmes dirigent la France, ils la surplombent. Pourtant, à force de répétition, ce gadget visuel devient lassant. Sans cette B.O. omniprésente, et avec une mise en scène plus audacieuse, Baron Noir aurait pu lorgner du côté du réalisme et de l’âpreté de The Wire (saison 4 centrée autour des combines à la Mairie de Baltimore), ou de la subtilité d’autres grandes séries américaines modernes. On peut dire que la mise en scène de Baron Noir reste pour l’instant trop souvent conventionnelle, alors que le scénario est réellement de haut vol, tout comme le jeu des comédiens.

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7. PIANOFORTE

Scénario : Eric Benzekri et Jean-Baptiste Delafon

Réalisation : Ziad Doueiri

Résumé :

Piégé dans l’affaire du détournement de fonds, qui a servi à régler le divorce de sa femme à l’amiable avant les élections présidentielles, Laugier compte encore sur le Baron Noir Rickwaert. Rickwaert propose d’inventer la vente fictive d’un pianoforte, instrument rare et d’une grande valeur, au cousin de Laugier. Rickwaert et Laugier sont plus que jamais liés, par un pacte secret. Mais l’affaire du suicide du syndicaliste Joël Donfront, trésorier de l’office HLM, ressurgit dans les médias.

Critique :

Le monde politique et le monde intime semblent dans cet épisode Pianoforte ne pouvoir co-exister. L’épisode commence par un échange entre Laugier et son ex-femme, et, au centre, celui que Laugier surnomme en secret « Sganarelle », Philippe Rickwaert. L’image d’un couple totalement détruit par la politique transparaît.

De son côté, Rickwaert fait face au dégoût de sa fille, qui apprend les manipulations malhonnêtes de son père. Rickwaert, bénéficiant d’une relation forte avec sa fille, est tourmenté par l’image que se fait Salomé de son père.

Quant à Cyril, le jeune assistant de Rickwaert, son rapport avec la belle Fanny s’effrite depuis l’entrée de toute l’équipe au Ministère. Cyril est en effet plongé dans les dossiers, et ne renvoie aux avances de Fanny que froideur et distance.

Côté mise en scène, les musiques anxiogènes se font plus rares, laissant aux émotions le droit de s’installer naturellement. La mise en scène est plus aboutie, comme lors de cette scène introductive sous une véranda ensoleillée, symbole d’un monde paisible que Laugier a dû quitter pour embrasser le rôle de Président de la République.

Avant-dernier épisode de la saison 1, Pianoforte mêle parfaitement l’exploration des personnages à celle du monde politique, tout en conservant un suspense grâce aux multiples coups de théâtre. Le transport secret du fameux « pianoforte », ses embûches, et le retournement ultime de Laugier contre Rickwaert en direct à la télévision, nous tiennent en haleine. Laugier, après avoir utilisé l’intelligence de la bête politique Rickwaert, n’hésite pas une seconde à se retourner contre lui dès qu’il en a l’occasion et la possibilité tactique, pour couvrir son implication dans le détournement d’argent. Par leur travail, ces grands hommes politiques sont des maîtres de la tactique, de la négociation. Ce sont des grands joueurs d’échec. Baron Noir montre leur déformation professionnelle : ils entretiennent ce même rapport de manipulation et de froids calculs, dans leurs vies privées.

A ce niveau de la série, toutes les péripéties sont donc extrêmement crédibles, et les acteurs ont leurs personnages dans la peau. Une belle réussite.

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8. PARDON

Scénario : Eric Benzekri et Jean-Baptiste Delafon

Réalisation : Ziad Doueiri

Résumé :

Philippe Rickwaert est pris au piège de l’affaire de l’OHL. Tous les ministres souhaitent voir Rickwaert démissionner, par peur de voir la Gauche toute entière embarquée dans son scandale. Laugier refuse cette démission, et se concentre sur les négociations européennes, potentiel succès. L’ex-Président Auzanay travaille d’arrache-pied pour prouver l’implication du président Laugier dans l’affaire du détournement de fonds.

Critique :

Pardon montre la réaction en chaîne d’un mécanisme. Après avoir été mis en place, tous les dominos chutent. Les 7 épisodes précédents ont placés des jalons, dont les conséquences explosent à la figure des personnages dans cette conclusion. De leurs manigances, Rickwaert et Laugier payent enfin le prix. Mais aussi leurs seconds. Les assistants de Rickwaert, Cyril et Fanny, voient leurs prometteuses carrières entachées du scandale de leur chef. Véronique Bosso, l’intègre Maire de Dunkerque, se voit à jamais mêlée à cette malversation. Balleroy, l’entrepreneur véreux, et Bruno Rickwaert, propre frère du Baron Noir, se retrouvent face à la police suite à leurs compromis avec Philippe.

Une succession de coups de théâtres toujours crédibles, car pressentis au fil des épisodes de cette saison. Le scénario de Pardon montre habilement comment Rickwaert se sent dépassé, pour la première fois. Les coups-bas sortent de tous les côtés, et le Baron noir ne peut pas être partout à la fois. S’il avait le don d’ubiquité, peut-être aurait-il pu convaincre tout le monde d’étouffer l’affaire, de garder le silence… Mais il n’a pas su ferrer toutes ses proies, et dans son dos, les souris dansent, ou plutôt, reprennent leur liberté et retrouvent leur intégrité.

Baron Noir s’avère, au terme de ces huit épisodes, une série intelligente, subtile, et utile. Elle montre les mécanismes des scandales politiques français. Elle montre que nos hommes politiques peuvent parler calmement de détournements de fonds. Mais elle montre surtout l’humanité de ces hommes politiques, qui sont finalement des « monsieur-tout-le-monde ». Certes, ces hommes se mouillent dans des arrangements criminels, mais ils le font souvent pour le bien de leur parti, et de leurs idées.

Si un Président de la République semble intouchable, au-dessus des scandales qui le concernent, ce n’est pas parce qu’il est un monstre. Mais bien parce personne n’ose attaquer celui qui défend la Nation à l’étranger, et porte le pays tout entier sur ses épaules.

Quant à Rickwaert, perçu par la France entière comme le monstre qui a poussé au suicide un jeune militant socialiste, il révèle plus que jamais ses vrais sentiments. C’est au cœur de la tourmente qu’il retrouve sa fille Salomé, au cours d’un échange tendre et sincère, et aussi la femme qu’il aime – finalement, sincèrement – Amélie. Avant de probablement plonger, et de se retrouver en prison, il trouve le salut auprès de ces deux personnages féminins. La saison se conclut d’ailleurs sur la candidature d’Amélie aux Présidentielles qui auront lieues suite à la destitution de Laugier.

Comme toujours, on ne regrette qu’une chose, la musique. Elle tire les habiles scénarios de la série vers l’académisme. Ces mêmes morceaux anxiogènes, répétés tout au long de la saison, plombent les épisodes qui semblent alors coulés dans le même moule. Pour une saison 2 – que l’on espère arriver – Baron Noir devrait faire fi de cette bande originale cliché. Et aussi se permettre un peu plus d’audace dans sa mise en scène. 

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