Saison 13 1. Une mémoire d'éléphant (Elephants can remember) 3. Poirot joue le jeu (Dead Man's Folly) 4. Les Travaux d'Hercule (The Labors Of Hercule) 5. Hercule Poirot quitte la scène (Curtain : Hercule Poirot's Last Case) 1. UNE MÉMOIRE D'ÉLÉPHANT
La déplaisante Mme Burton-Cox sollicite Ariadne Oliver pour que celle-ci tire au clair une sombre affaire. Les parents de la fiancée du fils de Burton-Cox ont jadis pratiqué un suicide collectif. Ariadne demande de l’aide à Poirot, mais celui-ci est déjà pris par une autre énigme, le meurtre d’un psychiatre réputé. Ariadne mène l’enquête auprès des témoins du drame de jadis, mais Poirot va s’apercevoir que les deux affaires sont liées. Si l’adaptation du livre s’effectue fort intelligemment, l’intrigue demeure curieusement alambiquée, s’appuyant sur nombre de coïncidences mais aussi d’indices évidents (perruques, chien, le 17 mars), indiquant clairement la voie. Pour peu que l’on connaisse certaines affections d’écriture d’Agatha Christie (le poids du passé sur le présent), on peut finalement assez vite conclure le puzzle. Mais l’argument principal du récit réside moins dans son sujet que dans l’organisation fort divertissante de sa narration. En effet les auteurs jouent pleinement la carte du duo antinomique d’enquêteurs formés par l’excentrique et bohême Ariadne Oliver et un hercule Poirot aussi policé et cérébral qu’à l’accoutumée. Chacune de leurs confrontations s’avère un régal, tandis que l’on prend plaisir à deviner quand leurs recherches vont converger. L’opus s’appuie également sur une jolie mise en atmosphère, à partir de lieux emblématiques savamment photographiés et mis en musique (asile psychiatrique sinistre, manoir, falaise, Paris…). Il en va pareillement pour le propre Whitehaven Mansions, dont l’importance retrouvée annonce la teneur nostalgique de cette ultime saison et les retrouvailles à venir. Comme toujours la reconstitution d’époque se montre admirable. L‘épisode repose également sur ces jeunes actrices affectionnées par la série, même si ces dernières ne parviennent pas à prendre le pas sur une Zoë Wanamaker toujours aussi dynamique, ni sur cette guest de haut niveau que compose Greta Scacchi, rendant Mrs Burton-Cox idéalement détestable. Moins fournie, la partie masculine nous vaut une belle surprise, avec un Iain Glen campant un psychiatre libidineux et s’apprêtant à devenir le Ser Jonah Mormont de Games of Thrones. Le spectateur français aura la tristesse de constater le départ de Roger Carel, toutefois remplacé par l’impeccable Philippe Ariotti. Les Quatre Grands seraient les maîtres secrets d’une conspiration visant à s’emparer du pouvoir à travers le monde entier, tout en demeurant dissimulée. Plusieurs sinistres exploits éveillent l’attention d’un journaliste et d’Hercule Poirot, dont le machiavélique assassinat d’un grand maître d’Echecs. Afin de mener son combat, le Belge simule sa mort, mais il compte aussi sur l’aide de ses amis de jadis, retrouvés après une longue absence. Evidemment les amateurs les plus fervents d’Agatha Christie se sentiront trahis par l’impressionnant tour de passe-passe scénaristique opéré par Mark Gatiss, bouleversant totalement l’optique du récit et sa conclusion. Mais il nous faut admettre qu’aves ses péripéties grandiloquentes et hors d’âge, son premier degré total et son Poirot tout à fait en dehors de son emploi, le texte particulièrement composite que constitue The Big Four apparaissait effectivement inadaptable en l’état. Avec son enthousiasme et son audace habituels, Gatiss se livre à une réécriture éclairée, visant à conserver le caractère sensationnaliste de l’ouvrage, tout en le transformant en Whodunit classique. A cette fin, il se base astucieusement sur le tueur invincible au service de la conspiration et adversaire fort propice de Poirot. Le téléfilm peut ainsi ^prendre place dans la série, tout en s’avérant très prenant. On regrettera toutefois que Gatiss se soit laissé trop entrainer lors du final, avec un abus de mélodrame et de théâtralisation. La reconstitution d’époque et la mise en scène, plus dynamique qu’à l’ordinaire, tirent un excellent parti de superbes localisations, telles Syon House, pour le tournoi d’Echecs, la résidence londonienne du Duc de Northumberland. On applaudira également une musique particulièrement évocatrice. Mais l’opus brille avant tout par la joie d’enfin retrouver les membres de la Bande à Poirot (les vrais Quatre Grands !). Hugh Fraser, Philip Jackson et Philip Jackson apparaissent en grande forme, les retrouvailles nous valent une indéniable émotion. Si on prend évidemment un plaisir particulier à découvrir Japp et Poirot mener l’enquête de concert comme aux jours jadis, on regrettera toutefois les parties congrues réservée à Hastings et Miss Lemon, qui n’aura pas, elle, l’occasion de se rattraper dans Curtain. C’est d’autant plus dommage que le rôle du journaliste occupe un espace conséquent, pour un apport bien moindre. Le reste de la distribution se montre également de qualité, comme si souvent au cours de cette série. 3. POIROT JOUE LE JEU Miss Ariadne Oliver écrit le scénario d’une Murder Party devant se dérouler durant une grande fête de charité, au manoir de Sir Stubb. Sur place, l’ambiance lui semble très tendue, jusqu’à ressentir une atmosphère diffuse de meurtre. Elle fait appel à son grand ami Hercule Poirot, qui accoure depuis Londres. Mais la jeune fille devant jouer le rôle de la victime est retrouvée réellement assassinée le jour de la fête, tandis que l’épouse de Sir Stubb disparaît. Dead Man's Folly restera avant tout associé à un lieu, Greenway, résidence familiale d’Agatha Christie, dans le Devon, où elle conçut nombre de ses œuvres. Ce choix s’avère absolument judicieux, parce que Greenway inspira effectivement Nasse House, le cadre du roman. Mais aussi par ce qu’il véhicule toute une émotion supplémentaire à ce qui demeurera l’ultime tournage de la série, Suchet ayant préféré conclure par un triomphe du Belge, plutôt que par son décès. C’est à juste titre que Poirot s’exclame qu’il s’agit du plus bel endroit qu’il ait jamais découvert en Angleterre, tant la nature environnante, nautique ou forestière, se révèle sublime, de même que les jardins et bâtiments. L’atmosphère et les agréments de la garden party relèvent encore ce radieux paradis, que l’on prend un vif plaisir à parcourir tout au long du récit. La mise en scène et la photographie savent également rendre l’ensemble inquiétant la nuit venue, une saisissante évolution. En ce haut lieu, les auteurs optent pur une grande fidélité à l’ouvrage originel, d’autant plus aisément que ce puzzle complexe, mais où tout s’emboite finalement à merveille, n’éprouve nulle nécessité de changement. Comme si souvent, les acteurs se voient choisis avec un grand sens du casting, convenant toujours idéalement aux personnages. On apprécie en particulier la prestation de Sinéad Cusack en Amy Folliat, formant un impeccable duo avec un Suchet toujours aussi parfait. Les différents indices disséminés permettent au spectateur de se forger pleinement son opinion, jusqu’à une traditionnelle séquence de révélation, à la fois sobre et émouvante. Bien entendu la reconstitution d’époque se montre remarquable. Si, pour son ultime apparition, Miss Ariadne Oliver demeure aux marges du récit principal, elle ne dispose pas moins de scènes succulentes, mettant en valeur sa revigorante excentricité et sa complicité avec Poirot. Zoe Wanamaker aura bien apporté immensément à la série. 4. LES TRAVAUX D'HERCULE Poirot et la police tendent un piège au mystérieux Marrascaud, voleur de tableaux et assassin défrayant la chronique. Mais le bandit s’échappe après avoir tué une jeune femme. Poirot sombre dans la dépression. Attendri, il accepte toutefois de retrouver l’amour disparu d’un humble chauffeur. La piste le conduit jusqu’à un palace situé dans les Alpes suisses. Poirot s’aperçoit que Marrascaud est sur place, mais aussi la Comtesse Vera Rossakoff ! L’épisode comporte la particularité de synthétiser non pas un roman, mais tout un agrégat de nouvelles. Pour assurer une indispensable unité d’action, les auteurs ont la judicieuse idée de transformer les différents protagonistes en clients de l’hôtel où se rend Poirot. Evidemment cela suppose de croire que l’ensemble d’une clientèle soit à des titres divers relié à des affaires criminelles, ce qui paraît pour le moins étonnant ! Mais après tout, nombre des textes d’Agatha Christie s’appuie sur une théâtralisation certaine, davantage ludique que véridique. De plus, cet aspect irréel se prolonge, finissant par apporter une agréable spécificité à l’opus. Il en va ainsi, de la musique, du décorum, un sublime château quasi aérien (en fait Halton House, dans le Buckinghamshire, mais aussi, malheureusement, un léger abus d’images informatiques. Les diverses références à la mythologie grecque et les profils psychologiques (Poirot quasi dépressif, esprit criminel avoisinant le serial killer) continuent à insuffler cette atmosphère parfois à la lisière du rêve, ou du cauchemar, éveillé. Du fait de sa nature composite, le récit ne parvient pas tout à fait à pallier à un préjudiciable éclatement et on y trouve sans doute trop de personnages pour que ceux-ci soient correctement développés. Mais l’épisode connaît de grands moments, comme un final intense et les retrouvailles, après tant d’années, entre Poirot et sa chère Comtesse Vera Rossakoff. Orla Brady (la Tasha Lem de Doctor Who) se montre admirable de classe et de présence, son duo avec Suchet fonctionne idéalement. Le reste de la distribution se montre plus inégal, n’évitant pas toujours le piège du démonstratif. Mais l’œil trouve sa part avec des décors somptueux, tout au long de cet épisode particulier et plaisant. 5. HERCULE POIROT QUITTE LA SCÈNE Un Poirot invalide et au soir de sa vie invite Hastings à le retrouver à Styles Court, trente ans après que leur première enquête s’y soit déroulée. Diminué physiquement, le Belge a conservé intactes toutes ses petites cellules grises. Il compte sur l’aide de son loyal ami pour l’aider à mener à bien un ultime combat : démasquer un assassin particulièrement insaisissable. Récemment veuf, Hastings arrive accompagné de sa fille, Judith. L’émotion la plus forte affleure à chaque instant de ce bouleversant champ du cygne que constitue Curtain. En premier lieu elle est bien entendue suscitée par le propre David Suchet, qui sait admirablement communiquer le déchirement qu’il ressent lui-même lors de ces adieux à un ami de longue date : rien de moins qu’un quart de siècle ! Amaigri (il a perdu 16 kg pour l’occasion) et nanti de prothèses correspondant à l’arthrose des mains de Poirot, l’acteur brille particulièrement dans un Poirot sentant venir le soir de sa vie et prêt à mener le plus douloureux de ses combats. Le méta récit devient total lors de l’ultime scène d’explications de la série, un bouleversant entretien post mortem où Poirot interpelle directement le spectateur et où le regard de Suchet perce le quatrième mur. L’opus permet de retrouver réellement Hastings, après le trop fugace aperçu de The Big Four. Toujours parfait, Fraser retrouve comme si c’était hier les intonations du loyal compagnon d’aventures du Belge. Le récit rend pleinement justice, tant à ses qualités humaines qu’à la force indéfectible de son amitié avec Poirot, qui fut aussi un irremplaçable mentor. Particulièrement sombre et venimeux, le récit peut s’appuyer une mise en scène à l’unisson, crépusculaire à souhait. L’ultime adversaire de Poirot se montre à la hauteur, par son génie maléfique, mais aussi par l’image à la fois proche et inversée qu’il apporte à Poirot : prédilection pour l’approche psychologique, mais aussi pour le meurtre, évidement ici totalement dévoyée. Les oppositions d’alter egos opposés produisent souvent de grandes histoires, l’opus n’y fait pas exception. Leur face à face final apporte une intensité supplémentaire à ce qui ne constitue certainement pas un départ en fanfare du détective, cette facilité étant heureusement refusée. Merci à Suchet pour cette grande série : oui, ce furent des jours heureux ! Images capturées par Estuaire44.
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Présentation
Réfugié en Angleterre lorsque la Belgique fut envahie par les armées du Kaiser, le policier Hercule Poirot s’est désormais installé à Londres en tant que détective privé. Au cours des années 30, ses spectaculaires succès face à des meurtres retentissants lui apportent une immense réputation et des clients souvent fortunés. S’il n’est pas un héros d’action ou un féru d’indices scientifiques, le Belge peut compter sur ses brillantes petites cellules grises et sur sa lumineuse compréhension de la psychologie humaine. Notre ami éprouve d’ailleurs une grande satisfaction de lui-même, dont il abreuve régulièrement ses contemporains. Ses nombreuses petites manies et sa qualité d’étranger font que ses interlocuteurs se méfient rarement de lui, à leur propre détriment. Chaleureux, épicurien et volontiers romantique, Poirot doit également son succès à l’excellente équipe réunie dans ses locaux de Whitehaven Mansions : son bras droit, le valeureux Capitaine Hastings, et son parfaite secrétaire, la tonique Miss Lemon. Le détective aux moustaches finement cirées peut également compter sur l’amitié, non dénuée de rivalité, de l’inspecteur principal Japp, du Yard. Né en 1920 sous la plume de la grande romancière Agatha Christie, Hercule poirot est devenu son personnage récurrent le plus fameux, avec Miss Jane Marple. Jusqu’en 1975 le Belge aura charmé, diverti, ému et enthousiasmé un lectorat toujours plus imposant et sans cesse renouvelé. La popularité d’Hercule Poirot lui valut d’apparaître sur bien d’autres supports, au cinéma dès les années 30 (incarné par Austin Trevors), ou à la radio (avec notamment la voix d’Orson Wells). Durant les années 70 et 80, il fut incarné par de grands acteurs, dont Albert Finney et Peter Ustinov. L’humour acidulé de ce dernier fit merveille au cinéma, mais aussi, déjà, à la télévision, avec plusieurs téléfilms, dont Le couteau sur la nuque (1985), avec un certain David Suchet dans le rôle de l’Inspecteur Japp. Et pourtant, pour nombre des contemporains voyant Poirot devenir personnage de bandes dessinées, dessins animés ou encore jeux vidéos, le détective demeure avant tout associé à la prestation mimétique de David Suchet, tout au long de la série au long cours d’ITV, Agatha Christie’s Poirot. Apparue à l’écran en 1989, la série va s’étendre sur près d’un quart de siècle, adaptant l’intégralité des enquêtes de Poirot, avant de s’achever en novembre 2013. Au premier rang des fondements du succès de la série, on distinguera l’intelligence de sa transposition des œuvres de Dame Agatha Christie, constituant un modèle d’adaptation de l’écriture littéraire à la télévisuelle. Si les auteurs, en parfaite identité de vue avec David Suchet, sont demeurés constants dans leur volonté de se baser uniquement sur les écrits de la Duchesse de la Mort, ils n’ont pas hésité à s’autoriser de grandes libertés pour en assurer l’adéquation à leur propre format. Au-delà des traditionnelles simplifications et réécritures ponctuelles, parfois fort conséquentes, ils vont avoir la grande idée de structurer l’ensemble de l’œuvre afin de la doter des éléments fondamentaux de toute série : un univers et des personnages pareillement permanents. La quasi-totalité des enquêtes de Poirot prennent désormais place durant les années 30, d’où une précieuse unité de ton. L’institution de Whitehaven Mansions comme décor central joue également puissamment dans ce sens. Les divers associés de Poirot apparaissent beaucoup plus régulièrement que dans les ouvrages de Christie et deviennent ainsi de véritables personnages récurrents, une situation toujours appréciée par les amateurs de série.
Agatha Christie’s Poirot demeure néanmoins fidèle sur l’essentiel, les diaboliques mécanismes de l’intrigue et le portrait psychologique des protagonistes, à commencer par le Belge lui-même. Le programme saura également évoluer, évitant ainsi toute lassitude du public. Les épisodes passeront ainsi d’un format cout de cinquante minutes à un long, autour de cent. La tonalité des récits, souvent humoristiques lors de la première période de la série, s’obscurcira progressivement, avec Curtain comme point d’orgue de ce mouvement. Une place importante se verra accordée aux thèmes de la mort et de la religion. D’une manière générale, beaucoup de ce qui était implicite chez Agatha Christie devient ici explicite, donc plus en phase avec notre époque. De nouveaux personnages effectueront leur entrée en scène, comme George le loyal valet, ou la délicieusement excentrique Miss Ariadne Oliver. Ces diverses évolutions se dérouleront avec goût et clairvoyance, le groupe de scénariste sachant intégrer de nouveaux talents, jusqu’à l’audacieux Mark Gatiss en fin de parcours. Cette ambition et cette qualité vaudront au programme le soutien de la famille d’Agatha Christie. Son petit-fils nouera d’ailleurs un lien d’amitié avec David Suchet et l’ultime tournage de la série (Poirot joue le jeu) se déroulera dans le site exceptionnel de Greenway, où l’auteure résida si fréquemment. Une reconnaissance du labeur accompli et un précieux signal pour la communauté des amateurs d’Agatha Christie.
La mise en scène apporte également son écot à la réussite de la série. Celle-ci demeure un perpétuel régal pour le regard grâce à une reconstitution d’époque particulièrement convaincante et raffinée. Costumes, véhicules et décors intérieurs manifestent une grande élégance, tandis que les divers paysages anglais urbains, ruraux où côtiers s’avèrent aussi superbes que variés. La transposition de l’action au sien des seules années 30 permet de tirer le meilleur parti du sublime Art déco caractéristique de la période. La série s’adorne d’une succession de bâtiments et d’intérieurs d’époque particulièrement suggestifs, à commencer par Whitehaven Mansions. Cette esthétique identifiant le programme apporte également beaucoup au générique, tant du point de vue des images de Pat Gavin que de la musique particulièrement évocatrice de Chris Gunning. Si l’action pure demeure rare et le rythme, tranquille, cette allure paisible correspond idéalement aux nombreux entretiens (bien davantage qu’interrogatoires) menés par Poirot. Outre qu’il met également en valeur un environnement particulièrement soigné, le procédé permet ludiquement au spectateur de se forger à loisir son opinion, à partir des éléments savamment mis à sa disposition par le scénario. Par ailleurs la mise en scène se montre souvent élégante et sait instaurer une authentique scénographie animant le rituel de la grande scène de révélation par Poirot de la solution l’énigme, l’apothéose de chaque épisode. Mais, pour la grande majorité de ses aficionados, l’atout maître d’Agatha Christie’s Poirot réside bien dans l’interprétation du Belge par David Suchet, en définitive le véritable secret de la longévité de la série. Contrairement à d’autres grands comédiens précédents, s’emparant du rôle pour lui insulter leur propre charisme ou leur personnalité, Suchet se fond dans la figure littéraire (soit le dénominateur commun de l’ensemble des lecteurs de Christie), qu’il restitue avec une admirable perfection. Son effarant travail de reconstitution physique (attitudes et démarche) lui fait également exprimer, avec saveur et véracité, la rondeur, la malice, l’humour, l’irrésistible fatuité, et parfois la colère du juste, animant Poirot et faisant de lui un personnage aussi irrésistible. La sabir franco-anglais distillé par l’acteur vient couronner un ensemble assurant un lien souvent fusionnel établi entre Suchet et son public (un récital à compléter avec la version française assurée par le formidable Roger Carel). Suchet va également s’imposer comme un excellent chef de bande, sachant mettre en valeurs les autres talents réguliers de la distribution. Il en sera de même avec les artistes invités, comptant souvent parmi les meilleurs comédiens anglais et avec lesquels la complicité s’instaure toujours. Porté par un acteur fusionnant comme rarement avec son rôle, devenu pour son public l’incarnation définitive de Poirot, une enthousiasmante reconstitution des années 30 et une réécriture très aboutie des textes d’Agatha Christie, la série nous immerge pleinement dans le petit monde si ludique d’Hercule Poirot, nous permettant pleinement de jouer au détective. Cele débute par l’énigmatique disparition de la cuisinière de Mme Mrs Ernestine Todd. |