Saison 1
1. Un mari plein de talent (The Talented Husband) 2. Aventure à Rome (The Latin Touch) 3. Le Terroriste prudent (The Careful Terrorist) 4. Un souvenir de famille (The Covetous Headsman) 7. La Flèche de Dieu (The Arrow of God) 8. L'Élément du doute (The Element of Doubt) 9. La Leçon de voyage (The Golden Journey) 10. Le Pêcheur fatigué (The Effete Angler) 1. UN MARI PLEIN DE TALENT Date de diffusion : 04 octobre 1962 (Combustible 23 : 06 octobre 1962) Une amie de Simon épouse un trouble auteur de théâtre, dont les épouses successives, toujours fortunées, ont la fâcheuse coutume de décéder prématurément. Ce qui lui permet au passage d'embaucher de confortables assurances vies. Simon mène l'enquête, aidé par Adrienne, la piquante détective des compagnies d'assurance. Il parvient à confondre l'assassin, juste avant que celui-ci ne passe de nouveau à l'acte. Roger Moore s'empare du rôle avec un naturel confondant. Dès la première image, il incarne déjà pleinement Simon Templar. Il s'agit là du grand atout du pilote car, malgré la présence de plusieurs éléments identifiants (générique, Volvo, musique, dialogue d'entrée...), la série est visiblement encore en rodage. Le scénario se montre astucieux tout en démeurant prévisible (fort heureusement le maquillage est réussi) et trop orienté vers le roman à énigme classique pour définir encore ce qui constitue la spécificité du Saint. On pense d'ailleurs souvent à Agatha Christie, plusieurs scènes semblant tournées à St Mary Mead ! Par ailleurs la réalisation reste assez morne, au sein de décors d'intérieurs passablement convenus et dépourvus de cachet, hormis ces pubs si anglais où l'on croirait voir One-Ten commander une pinte. S'y déroule également la scène la plus prometteuse de l'épisode, le savoureux dialogue avec le sympathique barman italien permettant à Simon de décrire ses idéaux et son style de vie. Surtout c'est la personnalité du méchant du jour qui détonne, certes monstrueux, mais bien davantage sordide et veule que flamboyant comme on l'aime. Il demeure assez pénible de le voir capituler ainsi quand Simon le prend sur le fait, on apprécie toujours un baroud d'honneur dans ces occasions ! Le Saint nous habituera à de balles bagarres, ici leur absence se fait cruellement ressentir. L'intervention de Simon survient d'ailleurs très tardivement dans le cours du récit. La fin se montre aussi terriblement mélodramatique, on se situe vraiment hors jeu. Demeurent de jolis extérieurs anglais, très Avengers, une interprétation de qualité, dont bien entendu Shirley Eaton, que l'on prend plaisir à voir évoluer en dehors de son rôle iconique mais bref de 007, et des références culturelles toujours plaisantes (Irma la Douce au West End, la tenue du boucher, les trains de l'époque…). De plus le pilote a la bonne idée de capitaliser sur la popularité du Saint et de nous éviter une présentation fastidieuse. Un épisode assez mineur mais contenant les prémices des succès à venir. Shirley Eaton (Adrienne) : immortalisée par son apparition dans Goldfinger (la jeune femme asphyxiée en étant peinte en or), elle participera à deux autres épisodes : The Effete Angler et Invitation to Danger. Dans ses mémoires (Amicalement vôtre), Roger Moore précise que le charmant village où furent tournées les scènes en extérieur est Cookham, dans le comté de Buckingham. Son charme lui vaut d'être une destination touristique très populaire, notamment pour ses promenades au bord de la Tamise. Moore précise également qu'un policier, passant à vélo près du tournage de l'épisode, verbalisa la fameuse Volvo P1800 pour sa fausse plaque « ST1 ». Quand Templar quitte la maison d'Adrienne, le paysage vu à travers la porte est à l'évidence une peinture (24'57''). 2. AVENTURE À ROME Date de diffusion : 11 octobre 1962 (Le Décapode : 13 octobre 1962) A Rome, Simon empêche un pittoresque chauffeur de Taxi (Marco) d'escroquer une jeune touriste américaine, Sue. Mais celle-ci est alors enlevée par des gangsters. Le chef maffieux Tony Unciello veut faire pression sur le Gouverneur Inverest, père de Susan, pour obtenir l'annulation de la condamnation à mort pesant aux Etats-Unis sur son frère. Alors que l'exécution approche, le sénateur demeure inflexible, malgré le désespoir de son épouse. Le Saint intervient et parvient, avec l'aide de Marco, à libérer la jeune femme et à faire arrêter les criminels. La Ville Eternelle se voit attribuer l'insigne honneur de représenter la première destination étrangère des nombreux voyages de Simon Templar. On remarque d'ailleurs que l'épisode débute par une plaisante balade du Saint au sein des paysages romains, tout comme, bien plus tard, Lord Brett Sinclair. L'occasion de constater que les inserts et l'évidente qualité du décor reproduisant le Colisée ne remplacent pas tout à fait les paysages naturels ! Bien davantage que l'atypique The Talented Husband, The Latin Touch va s'affirmer comme le véritable pilote de la série. En effet tous les ingrédients du cocktail composant le succès du Saint répondent ici à l'appel, sur un ton particulièrement relevé. Le classicisme avéré de l'argument policier, passablement rebattu est habilement contrebalancé par l'humour véhiculé par Simon et bon nombre de personnages secondaires. Le récit manifeste une belle énergie, ponctué de scènes habilement dialoguées, d'une introduction astucieuse jusqu'à la traditionnelle scène d'action finale, impeccablement filmée. L'exotisme accomplit son entrée en scène, charriant concomitamment des poncifs, plaisants mais relevant d'une certaine imagerie d'Epinal. La réalisation bénéficie déjà d'un somptueux noir et blanc (rien de comparable chez les épisodes d'alors des Avengers) et de décors d'intérieurs particulièrement soignés et aux évidents moyens. Il semble clair que dès le départ Lew Grade ait considéré Le Saint comme stratégique. Le vrai coup de cœur de ce polar classique mais impeccablement orchestré demeure néanmoins la distribution. Les comédiens vétérans Alexander Knox et Doris Nolan campent de manière tout à fait convaincante le dilemme et les tourments endurés par les parents de Susan, tandis que Bill Nagy interprète avec délectation un gangster archétypal. On ne se situe aux alentours du Nitti des Incorruptibles, ou de son personnage de Goldfinger. On regrettera un certain manque de présence chez Suzan Farmer, la Templar Girl du jour : elle se fait presque voler la vedette lors de la fugitive apparition de la chanteuse italienne. Bien entendu les amateurs des Avengers se régaleront de la performance de Warren Mitchell, aussi joyeusement caricatural en chauffeur de taxi romain qu'en ambassadeur soviétique. The Latin Touch a l'intelligence de lui accorder l'espace que mérite son talent humoristique, d'autant que le duo antinomique formé avec Roger Moore fonctionne à merveille. Cette percutante association assure le succès de l'épisode, auquel ne manque qu'un surplus d'originalité pour totalement enthousiasmer. Alexander Knox et Doris Nolan, les interprètes du couple Inverest, étaient également mari et femme. Warren Mitchell (l'Ambassadeur Brodny des Avengers, entre autres participations à cette série) reprendra deux fois son rôle de Marco Di Cesari, dans The Charitable Countess et The King of the Beggars. Suzan Farmer participera également à trois autres reprises aux aventures du Saint (The Sign of the Claw,The Convenient Monster et The Desperate Diplomat). L'actrice connaît une vraie popularité durant les années 60 et 70, avant de se retirer. Elle participe notamment à plusieurs films d'épouvante de l'époque, ainsi qu'à l'épisode That's Me over There, d'Amicalement vôtre. Elle fut l'épouse de Ian McShane. Roger Moore indique dans ses mémoires que le sabir italien parlé par Mitchell est en fait constitué d'un chapelet de diverses insultes locales. Moore lui apprenait ces expressions, transmises par sa future épouse, l'italienne Luisa Mattioli. Il espérait que le public ne comprenne pas la plaisanterie ! Moore précise également que les scènes automobiles était souvent diffusées inversées, les voitures ne se conduisant pas du même côté en dehors de l'Angleterre. Durant la scène d'introduction, Templar apparaît en incrustation devant une image du Colisée, avant de passer à un décor classique. Une technique pionnière à l'époque. On aperçoit brièvement l'ombre du micro (9'58''). 3. LE TERRORISTE PRUDENT Date de diffusion : 18 octobre 1962 (Le Point de Mire : 20 octobre 1962) A New York, le journaliste de télévision Lester, un ami du Saint, est parti en croisade contre un dirigeant syndicaliste corrompu, Nat Grendel. Celui-ci finit par l'assassiner en utilisant les talents en explosifs d'un exécuteur surnommé l'Ingénieur. Jenny, la fiancée désespérée de Lester, tente vainement de tuer Grendel. Le Saint remplace Lester dans son combat télévisuel, protège Jenny et finit par prendre Grendel et l'Ingénieur à leur propre piège. Un idéaliste courageux en lutte avec un homme de pouvoir qui finit par l'assassiner le héros reprenant le combat, la fiancée aiguillonnée par la vengeance… L'intrigue du jour n'est pas sans vaguement rappeler celle de l'excellent L'Un et l'Autre d'Amicalement vôtre. Mais le traitement en diffère radicalement, car là où cette série instillait une solide dose d'humour et de fantaisie, The Careful Terrorist développe un récit issu du roman noir le plus sombre. On se situe clairement dans la première partie de la série, particulièrement proche de la vision de Charteris, différant sensiblement du souvenir que les opus plus tardifs, notamment en couleurs, laisseront du Saint. Le récit se distingue par une abondance de moments particulièrement forts et glaçants, comme le sadisme consistant à exécuter le journaliste à travers sa machine à écrire piégée, ou la loi du Talion impitoyablement exercée par Templar (scène formidable). On apprécie également vivement le soin avec lequel la mise en scène et la direction d'acteurs reconstituent une atmosphère américaine plus vraie que nature (voitures, décors, attitudes…). L'atmosphère du genre imprègne tout l'épisode, avec une réelle maîtrise. L'épisode permet de définir plus précisément la personnalité du Saint, se refusant certes à la violence vulgaire, mais en définitive par moins inexorable pour autant, volontiers en marge de la Loi. L'intrigue apparaît également propulsée par le carburant indispensable au genre : des antagonistes de grande qualité : le visqueux et cupide Grendel et le pittoresque Ingénieur, amateur d'engins explosifs. Les amateurs des Avengers y reconnaitront comme un lointain cousin de Fitch, davantage volubile et satisfait, mais aussi non sexuellement pervers ! Le récit souligne habilement la lâcheté du duo, impeccablement interprété et veillant soigneusement à éviter toute prise de risque personnel. Malheureusement le bas blesse concernant le comparse du Saint, à l'humour démonstratif rapidement lassant, voire irritant, et Jenny, dont les scènes mélodramatiques et appuyées datent défavorablement l'épisode. The Careful Terrorist demeure néanmoins un polar de la plus belle eau, propre à séduire le public américain, mais aussi soulignant le pouvoir de média de masse désormais véhiculé par la télévision, alors que quelques années plus tôt Lester aurait certainement travaillé pour la presse écrite. Durant la scénette d'introduction, Simon avoue un faible pour les omelettes et indique que selon lui les meilleures sont celles d'un restaurant normand, « The Mère Poulard », où il se rend à chacun de ses séjours en France. La Mère Poulard (1851-1931) était une cuisinière établie au Mont St-Michel. Elle devient célèbre pour son omelette idéalement goûteuse et baveuse, dont son restaurant perpétue la tradition. A l'origine elle créa ce plat soufflé, cuit à feu vif après que le blanc et le jaune des œufs aient été battus séparément, pour que les pèlerins puissent se restaurer à toutes heures dans son auberge. Hoppy lit le Man Junior Annual 1962, une compilation des meilleures photos de pin ups de ce magazine masculin australien, ainsi qu'un exemplaire de Rogue, publication du même style, basée à Chicago et éditée de 1955 à 1967. Ce concurrent de Play Boy est également connu des amateurs de Science fiction pour avoir publié des nouvelles écrites par de célèbres auteurs de l'époque. La couverture indique d'ailleurs un texte sur Ray Bradbury ! Des écrivains du calibre de Damon Knight ou Fredric Brown furent également publiés. Jenny a été blessée à l'épaule, mais son manteau ne montre aucun impact de balle (21'39''). Sally Bazely (Jenny) prolongea sa carrière jusque dans les années 80. Dans The last of the Cybernauts, elle interprète Laura. 4. UN SOUVENIR DE FAMILLE Date de diffusion : 25 octobre 1962 (Mission to Montreal : 27 octobre 1962) Dans l'avion l'emmenant de New York à Paris, le Saint sympathise avec la ravissante Valérie North. Celle-ci vient retrouver son frère, perdu de vue depuis les drames de la guerre. Or la police lui apprend que son frère a été assassiné, son corps venant d'être repêché dans la Seine. Un certain George Olivant, se présente comme un ami de la famille et cherche à se lier à Valérie. En fait Olivant, ancien collaborateur nazi cherche à s'emparer de gourmettes détenues par Valérie et la victime. Celles-ci renferment le secret de l'emplacement du trésor d'un traitre vendu à l'ennemi, que leur père, résistant, avait connu. Simon se méfie rapidement d'Oliphant et mène l'enquête grâce à des amitiés parisiennes datant de la Résistance. Une action située dans la Ville Lumière, des nazis à la recherche d'un objet contenant un précieux secret issu du passé, une dimension familiale, un antagoniste classieux : de manière amusante, alors que Le Terroriste prudent évoquait quelque peu l'épisode L'un et l'autre d'Amicalement vôtre, un souvenir de famille présente lui des convergences avec Un drôle d'oiseau ! De plus la différence d'atmosphère apparaît cette fois moins marquée, cet opus là n'étant pas non plus sans quelque peu ressembler aux épisodes plus tardifs et fantaisistes du Saint. En effet cette première expédition du Saint dans notre capitale contient déjà nombre d'ingrédients caractéristiques. Les bagarres, volontiers spectaculaires, y occupent une bonne place, plus considérable qu'à l'accoutumée en cette première saison. A côté de la traditionnelle jeune femme en péril, on y découvre plusieurs joli minois (d'ailleurs connus par les amateurs des Avengers), sur une tonalité tout de même plus légère que les séductrices létales du roman noir. Les policiers se montrent pittoresques et relèvent de la comédie (quel accent français !). Sans évidemment relever des Diabolical Masterminds des Avengers, le raffiné et subtil Olivant s'émancipe, certes relativement, des figures balisées du polar. Il apporte une incontestable plus-value au récit. Evidemment le Saint demeure le Saint et, comme souvent, devient le chevalier d'une demoiselle en péril mais Valérie North bénéficie de la présence et de conviction déjà parfaitement sensible de la superbe Barbara Shelley, nous régalant ici d'un numéro nettement plus haut en couleurs que ses devancières. L'association avec un Roger Moore toujours impérial, s'avère plaisante au possible. Le scénario se montre lui plein d'entrain et tout à fait percutant dans ses rebondissements. Pour le public de l'Hexagone la grande force de The Covetous Headsman demeurera bien entendu sa tonalité parisienne, que la mise en scène exprime à merveille par de nombreux clins d'œil et des inserts forts goûteux, mais aussi quelques plans extérieurs. Une éloquente démonstration du savoir faire des équipes d'Elstree, auquel un somptueux noir et blanc rend un juste hommage. Du Saint jusqu'aux New Avengers, les séries anglaises évoqueront souvent avec talent The Most Romantic City in the World, on ne s'en lasse pas. Parfaitement divertissante en soi, cette première escapade du Saint exprime décidément les meilleures promesses quant au devenir de la série. Barbara Roscoe (l'hôtesse de l'air) accomplit plusieurs charmantes apparitions dans les séries des Sixties. Elle est ainsi la réceptionniste de l'agence matrimoniale Cœur à cœur (The Murder Market). Carol Gray (Josie Clavel) fut également un joli visage des productions de l'époque. Elle interprète Nicki, la jeune danseuse sympathisant avec Mrs Peel dans La Danse Macabre. Barbara Shelley (Valérie North), ancien modèle, est surnommée "The First Leading Lady of British Horror" pour ses nombreux rôles dans des films d'horreur, notamment pour la Hammer. Apparitions aussi dans Destination Danger, Des Agents Très Spéciaux, L'Homme à la Valise, Paul Temple, Bergerac, Dr Who etc. Elle participe également à deux épisodes des Avengers : Dragonsfield et Bons baisers de Vénus (Vénus Browne). George Pastell, figure régulière d'antagoniste étranger, participa quatre fois à la série et joua Arkadi dans Honey for the Prince. L'épisode indique que le Saint a participé à la Résistance, ce qui concorde avec le personnage littéraire, mais nettement moins avec l'âge de Roger Moore ! L'Inspecteur Quercy interviendra régulièrement au cours de la série, durant les escapades françaises du Saint, mais il sera à chaque fois interprété par un acteur différent. La photo découverte parmi les affaires de la victime aurait du être endommagée par l'eau (6'19''). Il est étonnant que, si peu de temps après avoir appris l'assassinat de son frère, Valérie se retrouve toute souriante dans un bar parisien aux côtés de Simon (12'45'') Un joli insert publicitaire est réalisé en faveur de Perrier, lors de la scène du bar (13'43''). Le Boeing de la Pan Am décolle d'Idlewild Airport. Il s'agit en fait du nom originel du grand aéroport international J. F. Kennedy, desservant New York. Il fut rebaptisé après l'assassinat du président américain, en 1963. La Pan Am y installa son hub international, le prestigieux WorldPort, en 1960. Il s'agit du bâtiment au design ultramoderne découvert dans la séquence d'introduction. Il demeure encore l'un des principaux symboles de la fabuleuse épopée de cette compagnie aérienne et apparaît dans la série actuelle Pan Am, située dans les Sixties. Le Boing se pose à l'aéroport international de Paris-Orly, que le Général de Gaulle vient d'inaugurer en 1961. Le kiosque à journaux de l'aéroport d'Orly (reconstitution totalement fantaisiste) contient plusieurs titres au format de l'époque : Le Monde L'Humanité… Jours de France fut un magazine féminin de standing, publié par Serge Dassault de 1958 à 1989. Il fut notamment diffusé dans les salles d'attente des médecins et dentistes, chez qui il était expédié gracieusement. Fiancé massivement par la publicité, il constitua ainsi l'un des premiers essais de presse gratuite. Le journal Libération que l'on aperçoit est issu de la Résistance et fut publié de 1951 à 1954. En 1973 Sartre et July en reprirent le titre pour lancer l'actuelle publication. 5. UN SINGULIER TOURISTE Date de diffusion : 01 novembre 1962 (The Removal Men : 03 novembre 1962) A Genève, Simon rencontre une famille italienne désirant émigrer en Amérique et vendre sous le manteau des diamants lui appartenant, pour financer l'installation. Le père est assassiné et les pierres volées. Le fils, Fillipo, suspecte sa belle-mère Hélène d'être à l'origine de l'affaire. Simon enquête, disculpe le négociant en diamants et découvre que Fillipo avait raison, la femme ayant agi de concert avec son amant. Aidé par un pittoresque inspecteur suisse, le Saint confond les coupables en les dressant l'un contre l'autre. L'épisode retrouve cette fois la tradition du roman noir, convenant parfaitement au héros tel qu'imaginé par Charteris. L'épisode restitue savamment l'atmosphère du policier le plus classique : grisbi, femme fatale, complot, figures du milieu... Toute une époque, ce qui rend très admissible le fait que le "couple maudit" soit à ce point daté. Le Saint s'y insère parfaitement, en prenant la place habituellement échue au privé, tout en conservant son identité anglaise. Les personnages italiens prennent quelques attitudes caractéristiques, mais demeurent exempts de caricature, contrairement aux Avengers dans La Loi du Silence. La confrontation finale s'avère remarquablement interprétée. Toutefois, si le policier suisse se montre savoureux, l'ensemble manque encore d'humour. On mesure à quel point Charteris pèse sur les débuts de la série, dont la fidélité à l'œuvre empêche la fantaisie ultérieure de s'installer dès à présent. L'amusant monologue initial de Simon ne s'en montre que plus appréciable, notamment lors d'un savoureux persiflage sur les douaniers... Durant l'entretien du Saint avec l'inspecteur Kleinhaus, le décor représentant en arrière fond Genêve et son lac s'avère saisissant, une authentique performance. On apprécie de nouveau les ouvertures sur l'époque, comme l'Aurore, à son zénith en ce début des années 60, ou les légendaires avions de la Pan Am. Barbara Bates (Hélène) vit sa prometteuse carrière progressivement détruite par une grave dépression chronique, qui la força finalement à se retirer. Il s'agit ici de son dernier rôle. Elle se suicida en 1969. L'Inspecteur Oscar Kleinhaus réapparaîtra dans l'épisode The Russian Prisonner, toujours interprété par Guy Deghy. Le tueur est interprété par David Cargill, qui tiendra un rôle équivalent dans Death Dispatch (Avengers, saison 2). La scène d'introduction contient une définition du métier de douanier caractéristique de l'ironie de Simon : If you take a guy with a well-developed sense of suspicion, give him a five-year course in "How to Make People Blush", do you know what you end up with ? A customs inspector. 6. LES PERLES DE LA PAIX Date de diffusion : 8 novembre 1962 (The Mauritius Penny : 10 novemb62)re 19 Le Saint nous raconte la captivante et très crédible histoire de son ami Brad Ryan. Ce dernier lui a emprunté une forte somme, pour financer une recherche de perles au Mexique. Mais Brad découvre sur place que son associé, Tiltman, est un escroc ayant imaginé toute l'histoire. S'en suit un affrontement durant lequel Brad perd la vue. Il donne signe de vie seulement 3 ans plus tard à sa fiancée, Joss, qui avait refusé de l'accompagner. Entre temps celle-ci est devenue une femme riche et vénale. Elle ne part le retrouver, accompagnée de Simon, que parce qu'il lui affirme avoir retrouvé les perles. Le malheureux est en fait trompé par une mexicaine, Consuelo, qui, par amour, lui fait vivre son rêve. Elle se tue au travail pour financer une opération lui redonnant la vue, tout en craignant qu'il ne soit rebuté en découvrant sa faible beauté. Le Saint va tout arranger, aux dépens de Joss. Enfin on le suppose, la chute de l'histoire demeurant ouverte. Les auteurs lancent ici le Saint dans un style inédit, loin du polar coutumier. En soit la tentative n'apparaît pas condamnable, les épisodes décalés ayant souvent constitué d'excellentes surprises au sein d'autres séries. Malheureusement l'échec s'avère ici à peu près total, le Saint se trouvant embarqué dans ce qui devient vite un récit de très mauvaise Telenovela sud-américaine. Toutes les outrances du genre s'y trouvent portés au paroxysme, tandis que sous nos yeux exorbités se déroulent un mélodrame au style antédiluvien, à la confondante naïveté et digne de la littérature populaire du XIXème siècle. Les personnages ne sont que caricatures lénifiantes, avec une interprétation plombée à l'avenant. Les poncifs sur le Mexique et ses habitants sont également affligeants, l'un des plus mauvais épisodes du Saint rejoignant ainsi son équivalent de The Twilight Zone, The Gift. Le plus triste réside dans la dénaturation de la griffe de la série : les formidables petits discours de Roger Moore au public deviennent ici un long laïus lénifiant, accompagnant un flash back empesé. Les causeries de Tonton Roger au coin du feu. On retrouve ici un élément également très daté puisque l'on reconnaît une pratique caractéristique des plus médiocres anthologies des années 50. Pour le coup Rod Serling est bien loin ! De plus l'épisode indique clairement que Joss aurait du abandonner tous ses rêves pour accompagner son fiancé, comme toute femme doit le faire et qu'il est juste qu'elle soit châtiée pour ne pas l'avoir fait. Consternant. Et puis voir Simon droguer une femme pour la dépouiller, vraiment… Un opus à la crétinerie rare, les Avengers traiteront incomparablement mieux le thème de la cécité avec Second Sight (sans même parler de Father). Erica Rogers (Joss), d'origine sud-africaine, fut avant tout une actrice de théâtre mais participa à plusieurs séries de l'époque. Elle apparaît dans quatre épisodes de la série. Bob Kanter (Brad) et Dina Paisner (Consuelo) ne firent pas carrière au-delà de quelques rôles dans les productions des années 60. L'appartement new-yorkais de Simon nous parle est le même que dans The Careful Terrorist. La porte de la demeure de Consuelo change d'apparence entre le moment où le Saint y entre (24'48'') et celui où Joss arrive (35'06''). 7. LA FLÈCHE DE DIEU Date de diffusion : 15 novembre 1962 (Death of a Great Dane : 17 novembre 1962). Le riche Herbert Wexall réunit plusieurs convives dans sa superbe résidence balnéaire des Bahamas, près de Nassau. Alors qu'il développe une relation adultère avec sa secrétaire, Pauline Stone, son épouse décide d'inviter le célèbre Simon Templar. Le cynique journaliste Floyd Vosper apparaît à la réception, ce grand spécialiste es ragots se montrant parfaitement détestable. Le soir venu, il est découvert assassiné, transpercé par une flèche. Le Saint mène l'enquête et découvre que tous les invités, et leur hôte, ont un mobile. The Arrow of God (plus Diane que Cupidon) apporte une certaine déception. L'intrigue va développer l'ensemble des rituels du Whodunit à la Hercule Poirot (exposé des mobiles, meurtre, enquête, grand final de la révélation) mais sur un mode appliqué, quasi mécanique. Le scénario bâtit le squelette mais oublie la chair. Les différents personnages apparaissent superficiels et peu relevés. Ils s'avèrent trop nombreux pour pouvoir être dessinés en profondeur, compte tenu de la durée de l'épisode. De fait l'ensemble manque singulièrement d'intensité dramatique, d'autant que la mise en scène demeure terne et dépourvue de scène d'action. Par ailleurs, la distribution, à la notable exception d'Honor Blackman et d'Anthony Dawson, ne brille pas par sa qualité. On notera aussi qu'à l'instar de nombreux héros de l'époque (Cf. Steed dans The Removal Men), les costumes touristiques du Saint sont devenus très datés. Les Dames s'en sortent nettement plus à leur avantage... La veste rayée multicolore de Wexall semble également jaillir de la garde-robe bariolée du Sixième Docteur. Roger Moore offre cependant aux télespectatrices un déshabillé n'ayant rien à envier à celui de Patrick Macnee dans Mr Teddy Bear ! Cependant; pour les amateurs des Avengers, le grand attrait de The Arrow of God réside bien entendu dans la présence d'Honor Blackman, alors même que débutent les aventures de Mrs Catherine Gale. Malheureusement la frustration est au rendez-vous. Honor n'occupant qu'un rôle secondaire, parmi tant d'autres, et ne dispose que de quelques lignes de dialogues, passablement convenues, avec Roger Moore. Très différent de Cathy Gale, comme de Pussy Galore, son personnage de secrétaire amoureuse lui permet néanmoins d'exposer une autre facette de son talent. On remarque l'excellent Anthony Dawson, qui se montre particulièrement brillant : les perfides réparties de Vosper confronté au Saint valant de loin ses meilleurs dialogues à l'épisode. Ici aussi le profil disert et ironique du journaliste diffère du sinistre et taciturne Pr. Dent de Dr No, d'où une vraie curiosité. La présence conjointe de Moore, et de ces deux acteurs, ainsi que la localisation de l'action aux emblématiques Bahamas finit par valoir à cet opus un arrière fond « 007 », diffus mais agréable. Au total un exercice de style évitant l'ennui mais demeurant par trop superficiel. Malheureusement aucune autre interprète des futures collaboratrices de Steed n'apparaîtra dans la série. Linda Thorson participera cependant au Retour du Saint, d'Ian Ogilvy (1978-1979), dans l'épisode The Roman Touch. Cette même année 1962, Robert Dawson devient l'un des premiers adversaires notables de 007 au cinéma, avec le Pr. Dent de Dr No. Il sera également la voix de Blofeld dans Bons baisers de Russie. Avec Roger Moore et Honor Blackman (Pauline Stone), l'épisode devient ainsi un amusant concentré de grandes figures de la saga James Bond ! Le scénariste se nomme également Bond, Julian Bond. On remarque qu'à la fin de l'épisode, Pauline Stone s'envole pour Londres, galamment accompagnée à l'aéroport par le Saint. Peut-être pour débuter une nouvelle vie et rencontrer un autre partenaire, qui sait ? Les faux extérieurs peints (notamment durant les scènes de plage) apparaissent particulièrement évidents. Durant la scène d'introduction, le prétendu article de Vosper apparaît clairement collé sur le journal. Le même artifice se remarquera également chez les Avengers. 8. L'ÉLÉMENT DU DOUTE Date de diffusion : 22 novembre 1962 (The Sell Out : 24 novembre) Carlton Rood est un avocat new yorkais prêt à toutes les bassesses pour que les procès des chefs de la pègre se concluent par un acquittement. Le gangster Sholto brûle l'un de ses entrepôts, pour toucher l'assurance, ce qui entraîne la cécité d'une femme de ménage et la mort d'un policier. Rood le fait innocenter, à la grande colère du Saint. Simon va inciter les deux complices à se méfier l'un de l'autre, jusqu'à ce qu'ils se détruisent mutuellement. Episode particulièrement abouti et enthousiasmant que L'élément du doute. On retrouve un admirable roman noir, à l'atmosphère américaine parfaitement reconstituée. Hormis quelques éléments datant l'épisode, comme les voitures, on a souvent l'impression de regarder un excellent épisode des Incorruptibles. Le scénario soigne particulièrement la description et la véracité des personnages, n'hésitant pas pour cela à écarter Simon durant le quart d'heure initial, soit près d'un tiers de l'épisode ! Une jolie audace qui se révèle payante, Sholto (gangster de nouveau interprété par l'épatant Bill Nagy) et Rood se montrant irrésistibles dans leur genre ! La Templar Girl du jour se montre assez irrésistible, de même que l'ensemble de l'interprétation, savoureusement archétypale. A défaut d'originale, l'intrigue, supérieurement dialoguée, se montre habilement construite, avec d'implacables ressorts. Simon n'est pas un tendre et ne se situe ici guère loin du mortel justicier des textes de Charteris. Certaines scènes de violence, notamment durant l'incendie, étonnent par leur crudité et leur réalisme percutant. On se situe loin des assassinats initiaux de haute voltige des Avengers, d'où un impact de nature différente mais incontestable. Une belle mécanique de polar, impeccablement écrite et interprétée. Sur un thème similaire (l'invincible avocat marron des bandits) on préfèrera tout de même le délicieusement anglais et fantaisiste Plaidoirie pour un meurtre des Avengers, mais il s'agit de l'un des meilleurs opus de cette série, toutes saisons confondues. Il reste d'ailleurs très amusant de comparer ces deux épisodes. Quelle mouche peut bien piquer Simon pour convier le commissaire au dîner qu'il doit partager avec la jeune femme ? Le Saint paraît décidément bien prude ! Bill Nagy avait déjà interprété un gangster, très similaire à Sholto, dans The Latin Touch, deuxième épisode de la saison. On retrouve également Alan Gifford, rejouant l'inspecteur Fernack, découvert dans l'autre aventure new-yorkaise de cette saison, The Careful Terrorist. Il n'apparaîtra plus par la suite. Carlton Rood est interprété par l'excellent David Bauer, apparu dans la plupart de séries de l'époque. Il participera à pas mois de cinq épisodes du Saint. Bauer fut ainsi l'un des Numéros 2 du Prisonnier, dans le très western Living in Harmony. Dans Chapeau Melon, il fut l'Evêque, le chef de l'organisation criminelle Bibliotek (Les Petits Miracles) et le Colonel Ivanoff (Maille à partir avec les Taties). Bauer participe aussi à Les Diamants sont éternels (Mr Slumber). L'épisode est l'occasion pour le Saint d'user de l'un de ses très rares déguisements. Pour changer d'identité il arbore une paire de lunettes, un procédé utilisé à plusieurs reprises dans les Avengers. Pour compléter l'illusion, Roger Moore prend un accent américain, un effet amusant à défaut d'être pleinement convaincant ! L'acteur retentera l'expérience dans l'épisode L'un et l'autre, d'Amicalement vôtre. 9. LE PÊCHEUR FATIGUÉ Date de diffusion : 29 novembre 1962 (Death on the Rocks : 01 décembre 1962) A Miami, Simon fait connaissance de la sublime Gloria. Ils partent pêcher dans les îles Bimini, mais Simon se méfie de l'empressement exprimé par sa compagne de voyage. Il s'avère qu'elle est mariée au riche et brutal Clinton, vite jaloux. Le Saint doit jeter à l'eau son bras droit, Vincent, venu le corriger. Gloria ne cesse pas pour autant de tourner autour du Saint et propose de s'enfuir avec lui aux Etats Unis, en avion. Vincent et Clinton sont arrêtés après avoir vainement tenté d'assassiner Simon. Le saint demeure sur ses gardes car il suspecte que Gloria lui dissimule quelque chose... Le scénario de The Effete Angler se montre plaisant, même si passablement irréaliste. Les rebondissements se succèdent, mais son idée maîtresse demeure de parvenir à allier une classique intrigue de polar à l'atmosphère estivale et décontractée du nautisme des Bahamas. Un pari gagné, car cette agrégation se perçoit comme dépourvue d'artificialité, tandis qu'aucun de ces deux aspects n'est en définitive sacrifié. Les pittoresques Clinton et Vincent se montrent fort parlants à cet égard, entre humour et vraie violence ? La vitalité et l'a personnalité de Stassino font d'ailleurs merveille à cet égard. Il en va pareillement pour le skipper, criminel mais aussi divertissant en caricature de caboteur. La mise en scène soutient parfaitement cet aspect du récit, donnant notamment lieu à une atmosphère maritime spécifiant agréablement l'épisode. La technique de la surimpression des acteurs sur un fond d'image océanique fonctionne fort correctement. On apprécie en particulier les dépaysantes scènes en extérieur, d'autant que les différents yachts d'époque se montrent fort élégants et racés. Elles ont évidemment été réalisées en Angleterre mais le noir et blanc permet d'éviter une comparaison frontale avec le bleu des eaux des Bahamas. L'habile photographie pallie également au déficit d'ensoleillement, Au total, l'illusion s'avère quasi parfaite, hormis pour les quelques arbres aperçus sur les rivages ! Mais le grand atout de The Effete Angler demeure bien entendu la superbe et incandescente Shirley Keaton, poussant ici bien davantage le jeu de la séduction que lors du pilote de la série, The Talented Husband. Outre sa beauté, son personnage s'harmonise parfaitement au propos du scénario, Gloria se montrant à la fois très vamp et femme fatale, mais aussi amusante par sa vivacité et l'évidence de ses mensonges, souligné par l'attitude d'un Saint lui même fort diverti. Il reste piquant de voir la fine mouche féminine se jouer des réflexes et des certitudes masculines, du moins tant qu'elle n'a pas affaire à Simon ! Au-delà du contexte 007, l'association entre l'actrice et Roger Moore fonctionne à la perfection, jusqu'à l'astucieux final. Il nous vaut un couple à la mémorable séduction et classieux en diable. Shirley Eaton (Gloria), immortalisée par son apparition dans Goldfinger (the Golden Girl), participera à deux autres épisodes : The Effete Angler et Invitation to Danger. Paul Stassino participe en tout à cinq épisodes du Saint, ainsi qu'à de nombreuses séries de l'époque, notamment pour sa personnalité exotique lui permettant de jouer des étrangers. Au cinéma, il est surtout connu pour son double rôle dans Opération Tonnerre. Stassinao interprète également un faux Tito dans l'épisode des Avengers The Decapode. Les îles Bimini, dépendance des Bahamas, se situent à 80 km à l'est de Miami. Elles sont en effet réputées pour leurs zones de pêche, ainsi que pour la beauté de leurs fonds marins. La proximité de Miami fait que de nombreux pécheurs américains se rendent sur place en bateau, tout comme le Saint et Gloria. Les diverses scènes de bateau furent tournées dans l'estuaire de la rivière Hamble, dans le Hampshire. Ses paysages boisés et sa navigabilité en font une zone très cotée pour les navires de plaisance, avec de nombreuses marinas. Déjà pratiqué au Moyen-âge, l'estuaire est surnommé The Heart of British Yachting. 10. LA LEÇON DE VOYAGE Date de diffusion : 06 décembre 1962 (Traitor in Zebra : 8 décembre 1962) Le Saint se rend en Espagne pour assister au mariage de l'un de ses meilleurs amis. Dans un hôtel de la Costa Brava il fait connaissance de la fiancée, Belinda Deane. Celle-ci se révèle se riche jeune femme trop gâtée, au tempérament exécrable. Désireux d'éviter une catastrophe à son ami, le Saint dérobe toutes les ressources de Belinda et entreprend avec elle une excursion forcée d'une semaine dans la nature. D'abord ulcérée, la jeune femme va progressivement apprendre les vraies valeurs et devenir une future épouse idéale. L'épisode semble vaguement s'inspirer du classique de Shakespeare La Mégère Apprivoisée, mais où la verve et la truculence seraient remplacées par la mièvrerie et un sexisme exacerbé. Avec son bucolisme naïf et édifiant, The Golden Journey apparaît dépourvu de tous les éléments caractéristiques et du charme habituel des séries d'aventures, avec une absence totale d'opposition, de scènes d'action ou de tout enjeu autre que ce simili road movie de pale facture. L'ineptie des situations ne permet guère à Robert S. Baker de briller lors de sa première réalisation. Les deux comédiens principaux se montrent néanmoins performants. Le pire demeure le machisme massif du récit, directement issu de l'œuvre de Charteris et qui apparaîtra tout de même davantage allégé et policé au fil de la série. Cette vision de la femme enfant devant être reprise en main par l'homme, au besoin brisée par une solide fessée, afin de devenir une épouse bien cadrée, rend antédiluvien l'ensemble du scénario. A côté de cette consternante misogynie, l'épisode bénéficie cependant de quelques attraits. Les guests du jour s'avèrent particulièrement plaisants, avec de divertissantes prestations des très en verve Paul Whitsun-Jones et Roger Delgado, celui-ci dépourvu de l'emblématique barbichette du Maître ! On retrouve également de nombreux et réussis extérieurs du Pays de Galles, évidemment très différents des paysages du sud espagnol, mais visuellement superbes. A l'instar de bien d'autres destinations du saint, l'évocation de l'Espagne accumule les clichés, dont l'inévitable flamenco. Mais l'ensemble demeure élégant et sans antipathie, avec notamment de superbes morceaux de guitare. The Golden Journey évite ainsi au moins le travers de l'honteux misérabilisme crapuleux de l'épisode espagnol d'Amicalement vôtre, To the Death, Baby. Après l'échec de The Pearls of Peace, cette première saison confirme néanmoins qu'elle n'a pas la main heureuse avec ses épisodes décalés ! Il s'agit du premier épisode dirigé personnellement par Robert S. Baker. Il en réalisera trois autres, tous situés durant la saison 2 (The Saint Plays With Fire, The Wonderful War et The Saint Sees it through) Erica Rogers (Belinda), était déjà apparue dans The Pearls of Peace, pour un rôle très similaire. Elle participe en tout à quatre épisodes de la série. L'acteur gallois Paul Whitsun-Jones est bien connu des amateurs des amateurs des Avengers, puisqu'il participa à quatre épisodes, interprétant notamment Charles, un supérieur de Steed (The Wringer, Man with two shadows) et Max Chessman (Room without a view). Il joue en tout dans quatre épisodes du Saint. Roger Delgado (Stay Tuned) participera également à Locate an Destroy, avant d'apparaître dans l'épisode espagnol des Persuaders, To the Death, baby. Lors de l'insert initial, la ville balnéaire supposée être espagnole est en fait italienne. Il s'agit d'Amalfi, située près de Salerne, en Campanie. La beauté de sa côte (également aperçue à la conclusion de l'épisode) et les multiples influences architecturales méditerranéennes la caractérisant lui valent d'être inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO. Les nombreux extérieurs ne sont évidemment pas situés dans la région de Torremolinos, mais au Pays de Galles. La rivière traversée et la chute d'eau sont celles de Swallow Falls, près de Betws y Coed. Les paysages montagnards sont ceux de Rhyd Ddu, dans le Gwynedd. On aperçoit notamment le Mont Snowdon, point culminant du Pays de Galles. Ces scènes sont réalisées avec d'évidentes doublures des acteurs. L'hôtel est le même que l'établissement mexicain de The Pearls of Peace (idem pour le bar). Il servira également dans Teresa. Baker raconte que Lew Grade ne fut pas satisfait de l'épisode, notamment du fait du manque total de scène d'action. A cette occasion il fut décidé que chaque épisode devrait désormais en comporter au moins une. Baker explique cette absence par le choix de la fidélité à l'ouvrage original de Charteris. 11. L'HOMME QUI AVAIT DE LA CHANCE Date de diffusion : 13 décembre 1962 (The Big Thinker : 15 décembre 1962) A Londres, le gangster Joe Luckner, surnommé Lucky, règne d'une main de fer sur le monde des paris. Il décide de racketter un bookmaker nommé O'Connor, n'hésitant pas à exécuter son associé. O'Connor, fiancé à la belle Cora, fait appel au célèbre Simon Templar. Aidé de la délurée Jane et de l'Inspecteur Claude Eustache Teal, le Saint va tendre un piège diabolique au bandit et parvenir à le faire tomber. Après le fort douteux opus précédent, la série va ici opérer une magistrale correction de trajectoire. Le récit convient ici idéalement au Saint, avec un polar de grande cuvée. L'arnaque, inépuisable source d'inspiration, fonctionne à la perfection, le fait qu'elle soit annoncée bien à l'avance n'empêchant en rien le développement d'un vrai suspense. Il demeure plaisant que cela soit en définitive la ruse qui triomphe de la force brutale, incarnée avec une étonnante intensité par Lucky. L'histoire regorge de scènes d'action, parfois d'un cruel réalisme, contribuant à survolter une intrigue déjà dépourvue de temps morts. La mise en scène démontre un remarquable sens du montage, notamment lors de la prétendue exécution. Elle bénéficie également d'un étonnant nombre de scènes extérieures, aérant le récit et soulignant joliment le retour du Saint dans la mère patrie. On savoure également à cette occasion les apparitions de la flamboyante Volvo ST1, finalement peu aperçue cette saison. Les décors intérieurs répondent également à l'appel, avec notamment le superbe appartement de Simon. On remarque toutefois que, contrairement à ceux de Lord Sinclair ou John Steed, il demeure quelque peu neutre dans sa grande élégance formelle. Cela correspond finalement à merveille à cet impénitent voyageur qu'est le Saint, pour qui la résidence londonienne ne constitue finalement qu'un temporaire port d'attache. Comme souvent lors des grands épisodes du Saint, The Man Who Was Lucky s'accompagne d'une relevée galerie de portraits, d'autant plus appréciable que l'efficace scénario parvient à parfaitement gérer un nombre important de personnages et que l'interprétation s'avère globalement excellente. Si O'connor reste un tantinet fade les gangsters archétypaux sont remarquables. Teal, sympathique et plus extraverti qu'il ne le deviendra avec Ivor Dean, apporte un humour bienvenu à l'intrigue. Sa complicité avec Simon fait déjà plaisir à voir ! On retiendra cependant avant tout l'enthousiasmant duo féminin, à l'admirable solidarité face à l'épreuve. Habilement antinomique, il joue également admirablement de l'opposition entre la forte Clara, à la tête solidement juchée sur les épaules, et la superbe et plus évaporée Jane, au cœur d'or. On apprécie deux voir ces deux dames participer plus activement qu'à l'accoutumée à l'action, sans pour autant, bien entendu, rivaliser avec le Saint. L'épisode, l'un des plus enthousiasmants de la saison, se conclue idéalement sur une ultime élégance de Simon, particulièrement en forme tout au long du récit. L'épisode voit l'apparition de l'Inspecteur Teal, appelé à participer à nombre des aventures anglaises de Simon. Cependant Teal ne sera pas tout de suite joué par Ivor Dean, Son interprète au long cours. Il est ici incarné par l'excellent Campbell Singer, le Major B de Who's Who ?. Aperçue dans la scène d'introduction, la course de lévriers (Greyhound Racing) est une discipline très populaire en Grande Bretagne, comme dans l'ensemble des pays anglo-saxons. Depuis 1926, elle donne effectivement lieu à un système de paris assez similaire à notre PMU. Après un certain déclin, à l'issue des années 60, ces courses connaissent une grande vogue ces dernières années. Les courses se déroulent en plusieurs endroits spécialisés et sévèrement encadrés par les autorités. On trouve 26 de ces « Greyhound Stadiums » dans le pays. Durant une scène en extérieur, la voiture de Lucky se gare devant une façade aux nombreuses portes fenêtres. Or, vue depuis l'habitacle, celle-ci devient un mur de briques (42'52''). Le bâtiment, situé non loin d'Estree, est désormais un Mac Donald's ! L'épisode se caractérise par un nombre inhabituellement élevé de plans extérieurs, comparé à ce que propose habituellement la série. On reconnaît ainsi plusieurs sites londoniens : Picadilly, Trafalgar Square, les nombreux cabarets de Stratton Street (surnommé Club Land), dans Mayfair etc 12. LA COMTESSE CHARITABLE Date de diffusion : 20 décembre 1962 (Death Dispatch : 22 décembre 1962) A Rome, de nombreux orphelins connaissent la misère. La Comtesse Kristina Rovagna prépare un grand bal de charité, visant à recueillir les dons de la haute société en faveur des petits nécessiteux. Mais cette ancienne strip-teaseuse et demi mondaine, anoblie par un superbe mariage, capte la majeure partie de l'argent et n'en remet qu'une fraction aux bonnes œuvres religieuses. Le Saint, qui a participé au bal, découvre le pot aux roses. Il va rétablir l'équité aux dépends de la charmante mais vénale Comtesse, avec l'aide de son ami le chauffeur de taxi Marco de Cesari. La saison se conclue sur un nouvel opus décalé, ce qui suscite d'emblée l'inquiétude, après l'échec des tentatives équivalentes précédentes (The Pearls of Peace et The Golden Journey). Or on se laisse saisir par le charme de cette véritable fable que constitue The Charitable Countess. Evidemment le spectateur sera d'emblée passablement surpris par la représentation hautement naïve et hors d'âge des orphelins, entre Oliver Twist et Sans Famille et aux antipodes du néoréalisme italien. Mais, avec un peu de bonne volonté, on se laissera gagner par la fraicheur des enfants, assez formidables de naturels. Les auteurs ont également la malice de tisser quelques savoureuses convergences entre le leader de la bande et le Saint lui-même. On oublie par ailleurs assez facilement la maigreur de l'intrigue pour admirer les formidables comédiens : Roger Moore impérial en grande tenue, Warren Mitchell toujours épatant de pittoresque en Marco de Cesari et Nigel Davenoport parfaitement convaincant dans son rôle intéressant de figure mondaine et de soupirant officiel de la Comtesse, aussi brillant que jaloux. Le charme et la vivacité de la belle Patricia Donahue emportent l'affaire, le duel souriant, empreint de séduction mais acéré, opposant la Comtesse et la Saint nous valant plusieurs scènes piquantes. Le public français y reconnaîtra avec plaisir quelques similitudes avec les confrontations de Vidocq et de la Baronne. La longue scène finale pourrait sombrer dans le démonstratif, mais se voit sauvée par l'étonnante conviction de Roger Moore. Derrière son vibrant appel aux grands de ce monde en faveur de l'enfance nécessiteuse, on devine déjà le futur Ambassadeur de l'UNICEF, ce qui confère une aura supplémentaire au récit. L'on ressort finalement séduit par cette aventure hors normes, dont la date de diffusion nous indique qu'il s'agit en définitive d'un épisode de Noël. Ainsi s'achève cette première époque du Saint, réussie malgré quelques inévitables trous d'air. Elle constitue effectivement une solide concurrence pour une saison 2 des Avengers encore en demi-teinte. Des acteurs déjà aperçus dans Aventure à Rome se retrouvent ici. C'est le cas de l'inénarrable Warren Mitchell, qui reprend son rôle de Marco de Cesari. Nigel Davenport (Aldo Petri) est connu dans le Monde des Avengers pour avoir interprété le Major Robertson (Les Chevaliers de la Mort), ainsi que Lord Barnes (Double personnalité). Le fait de fermer la porte suffit à déplacer le miroir accroché au mur, on se rend ainsi bien compte qu'il s'agit d'un décor (12). Durant cette première saison, les aventures du Saint se seront déroulées en Grande Bretagne, aux Etats-Unis (New York et Miami), en France, en Italie, en Espagne, aux Bahamas, en Suisse et au Mexique. Images capturées par Estuaire44. |
Présentation
De toutes les nombreuses et ébouriffantes séries d'aventures britanniques des années 60, Le Saint demeure l'unique à pouvoir rivaliser avec Chapeau Melon et Bottes de Cuir en termes de nombre d'épisodes (118, 71 en noir et blanc et 47 en couleur) et de longévité (six saisons, de 1962 à 1969). D'acteur reconnu (Ivanhoé), Le Saint achève de propulser Roger Moore au rang de star internationale. Conjointement à Patrick Macnee, Moore devient le comédien anglais de télévision le plus célèbre de l'époque. La série se vendit dans plus de 60 pays et devint la première production européenne à s'imposer aux Etats-Unis, là où échouèrent en définitive les Avengers. Un succès ourdi de longue date par Lew Grade, le flamboyant magnat d'ITC, dont Le Saint assura la fortune. Quelles sont les raisons d'un tel succès ? On y distingue bien entendu l'interprétation. Rarement une série s'identifiera autant à son acteur principal, tant la vitalité, la prestance, le charme suave et l'humour de Roger Moore, idéal interprète de Simon Templar, crèvent continuellement l'écran. Hormis, de temps à autres, Claude Eustache Teal (Ivor Dean) aucun autre personnage récurrent ne viendra d'ailleurs partager l'écran avec Templar. Du fait d'une parenthèse dans la production de Danger Man, Patrick McGoohan fut un temps envisagé pour le rôle, mais il déclina le rôle. L personnalité de Moore reste plus appropriée au personnage de la série, assez distinct de Drake, même si leurs aventures présentent nombre de points communs. Lew Grade souhait également exploiter la popularité, certes encore relative, de Moore aux Etats-Unis (The Alaskans, Maverick). Un choix en définitive judicieux, d'autant que l'alternative nous aurait peut être privé du Prisonnier ! D'autre part, le reste de la distribution se révèle fort relevé, avec souvent des visages connus par les amateurs des Avengers. Ainsi les fameuses Templar Girls of the Week verront défiler nombre des actrices les plus séduisantes du temps, dont Honor Blackman. La mise en scène de la série se montre également souvent tonique, tout en bénéficiant de plusieurs atouts. Le Saint constitue ainsi de loin le héros de série anglaises de l'époque voyageant le plus souvent en dehors de Mother England, ce caractère international se voyant souligné par la possession d'une voiture étrangère (la fameuse Volvo P1800), un cas unique. Le dépaysement demeure bien entendu enchâssé dans des décors, mais les équipes des studios d'Elstree sauront palier à cette difficulté par des créations souvent soignées, agréablement datées aujourd'hui. Au-delà des plateaux traditionnels, l'ensemble des techniciens et artistes d'Estree fut mobilisé sur des projets innovants, comme des tentatives pionnières d'utilisation d'écrans bleus permettant l'insertion d'arrières fonds évocateurs d'un endroit. Les inserts classiques font l'objet d'un même soin dans leur choix. Les différentes bagarres et scènes d'action (notamment automobiles) se montreront fréquemment percutantes, d'autant que la participation non doublée de Moore apporte une vraie valeur ajoutée. Les savoureuses scénettes d'introduction montrant un Roger Moore s'adresser malicieusement au public à travers le Quatrième Mur singularisent irrésistiblement la série. Il en va de même du rituel de l'auréole, précédée de la formule The famous Simon Templar !, devenu indissociable de la série. Malheureusement, lors du passage à la couleur, l'acteur disparaîtra, Moore ne réalisant plus qu'une présentation en voix off. Toutefois, la spécificité majeure séparant Le Saint de ses concurrentes réside en définitive dans sa nature de personnage littéraire. Alors que les autres héros des séries d'aventures anglaises des Sixties (hormis le Baron) doivent se créer et susciter l'intérêt ex nihilo, Simon Templar arrive sur les écrans porté par la grande popularité de l'œuvre de Leslie Charteris. Le prestige du héros, né dans les années 30 et déjà moultes fois adapté au cinéma, perdure durant les années 60. Les exploits du Saint sont alors encore publiés, il en ira d'ailleurs de même jusque dans les années 90, Charteris supervisant d'autres auteurs. Le personnage de Charteris, habille alliage du traditionnel hors la loi redresseur de torts et de la littérature de genre moderne, convient idéalement aux séries des Sixties. Outre ce tremplin médiatique, le Saint, à l'instar de 007, bénéficie de l'effet d'aubaine d'une mine de scénarios éprouvés et aisément exploitables. Toute médaille comportant un revers, Moore relate dans ses mémoires le combat acharné et quotidien que Baker eut à livrer pour affirmer l'identité de la série et l'impérieuse nécessité d'une écriture audiovisuelle, face au redoutable gardien du temple (sinon de Templar) que représenta Charteris. Au fil des années (et de l'adoption d'histoires originales) le Saint put relativement s'affranchir des seuls domaines du polar et de l'espionnage traditionnels pour naviguer vers davantage de fantaisie, sans pour autant atteindre l'imaginaire des Avengers. Robert S. Baker eut le grand mérite de parvenir à associer au projet des personnalités aussi distinctes que Charteris, Grade et Roger Moore. L'acteur, son future complice d'Amicalement vôtre, s'était antérieurement vainement intéressé au Saint et va totalement s'y investir, devant coproducteur et réalisateur sur huit épisodes, voire refusant (temporairement !) le rôle de James Bond. Sous leur houlette, Le Saint va réussir à incarner le meilleur des séries américaines du genre, tout en affirmant son identité anglaise, quelque soient les destinations exotiques de ses aventures. Simon Templar, tout comme les Avengers, va également promouvoir une vision hédoniste de l'existence, accompagnant à merveille le virage global de la société vers le consumérisme (costumes, voiture, voyages, logement, art de vivre…), sans réellement se préoccuper de l'ennuyeuse question des revenus. En définitive, la série devient une affirmation du style de vie occidental, certes idéalisé, un message propre à séduire les Etats-Unis. Cette vision ne va pas sans comporter plusieurs éléments quelque peu datés aujourd'hui. De manière certes moins outrancière que dans l'univers voisin de Ian Fleming, la représentation des diverses nationalités croisées s'accompagne le plus souvent des poncifs traditionnels, situant clairement la Grande Bretagne, symbolisée par Templar, au sommet de l'édifice. Les fameuses Templar Girls s'avèreront certes sublimes, mais aussi bien moins modernes que les partenaires de John Steed et relevant de clichés tels la damoiselle en péril ou la femme fatale. La seule absence de personnage féminin récurent consacre la supériorité virile du Saint. A la différence notable de 007, Templar demeure cependant un parfait gentleman en toutes occasions. Etonnamment victorien, il ne couche jamais avec sa partenaire féminine du jour, Charteris se montrant également moins caricatural que Fleming sur ce point, tel qu'adapté à l'écran. Enfin, même si des exceptions existent (The Man who liked lions, The Death Game, The House on Dragon's Rock), on regrettera l'absence des irrésistibles Diabolical Masterminds à la Chapeau Melon. Les adversaires de Templar, certes souvent savoureux, relevant des figures les plus traditionnelles du policier ou de l'espionnage. Nous allons traverser la majeure partie des années 60 aux côtés du sémillant Simon Templar, au long de ses voyages au long cours, si souvent toniques et distrayants. Et toujours en excellente compagnie. Un site et un forum très intéressants autour du Saint : |
Saison 6 1. Antiquités (The Gadic Collection) 2. Le Noyé (The Best Laid Schemes) 3. La Pièce d'or (Invitation to Danger) 4. L'Héritage (Legacy for the Saint) 5. Un diplomate disparu (The Desperate Diplomat) 6. Les Mercenaires (The Organization Man) 8. La Vengeance (The Time to Die) 9. Chinoiseries (The Master Plan) 10. Le Rocher du dragon (The House on Dragon's Rock) 14. Les Immigrants (The People Importers) 15. L'argent ne fait pas le bonheur (Where The Money Is) 16-17. Vendetta pour le Saint(Vendetta for the Saint) 18. Le Roi (The Ex-King of Diamonds) 19. Le Génie (The Man who Gambled with Life) 1. ANTIQUITÉS Date de diffusion : 22 septembre 1968 (The Forget Me Knot : 25 septembre 1968) Le Saint se rend à Istanbul pour assister à l’exposition d’une fabuleuse collection d’antiquités, récemment restaurée. Mais Il s’avère que Kemal, talentueux copiste, a remplacé les pièces par des copies, aidé, par sa séduisante nièce, Diya. La police suspecte le Saint, de même que Turen, richissime collectionneur fanatique qui n’hésite par à le kidnapper puis à le torturer. Simon parvient à s’évader avec l’aide de Diya, l’épouse de Turen haïssant ce dernier. Il s’associe à Ayesha quand Kemal est assassiné par un associé. Les pièces sont restituées aux autorités et le Saint dupe Turen en lui revendant à prix d’or les copies. Cette ultime saison des aventures de notre chevalier errant anglais débute par un opus de fort bon aloi. La multiplicité des forces en présence suscite de nombreux rebondissements, certes classiques, amis efficacement amenés par le scénario. Le suspense demeure constant, alors que le Saint se voit plongé dans une situation fort délicate, traqué autant par une police autrement plus brutale que l’Inspecteur Teal, et par tout un aréopage de malfrats hauts en couleur. L’intrigue, fort prenant, revête vite l’allure d’une poursuite effrénée, où Simon doit sans cesse faire feu de tout bois. La mise en scène de Freddie Francis se montre alerte, tandis que des inserts s’affranchissent de la carte postale pour nous immerger dans le si vivant Istanbul de l’époque. Les décors bénéficient de jolis colifichets et ouvrages d’art, exploitant parfaitement le thème de l’exposition. L’épisode rend de fait un bel hommage à cette ville mythique emblématique des récits policiers d’espionnage des Sixties (From Russia With Love, Topkapi) Les scènes d’action se multiplient, mais sans sacrifier une réjouissante galerie de portraits, portée par d’excellents comédiens. Parmi de nombreux seconds rôles servis par des acteurs éprouvés, Martin Benson, tout à fait dans son emploi, excelle dans le rôle d’un policier aussi rude que madré. Le clou du spectacle demeure évidemment la prestation une nouvelle fois en roue libre du fabuleux Peter Wyngarde. Celui-ci aussi génialement excessif que lors de La fête romaine, le Levantin sybarite, cruel et mégalomane succède avec succès à son alter ego romain, de même que le supplice des murs se refermant sur Simon vaut bien celui des lions. On apprécie que le récit rende justice au comédien en prenant le temps d’insérer des scènes de dialogues savoureusement théâtraux, avec le Saint ou son épouse. Georgia Brown se montre d’ailleurs tout à fait pétillante dans le rôle de la vénale et énergique Dyla, largement aussi spectaculaire que son mari et formant une partenaire à part entière du héros. Par contre Ayesha se limite à la charmante damoiselle en détresse habituelle. Antiquités sacrifie d’ailleurs à quelques autres clichés de la série (ami de Simon assassiné, félon discernable depuis la stratosphère), mais, avec son tonique alliage d’action, de charme, d’humours et d’exotisme, il constitue une parfaite mise en valeur de l’univers du Saint.
2. LE NOYÉ Date de diffusion : 29 septembre 1968 (Game : 02 octobre 1968) Sur le littoral anglais, le Saint vient en aide à la jeune Diana. Celle-ci est terrorisée, car venant de découvrir le corps de son oncle, le Capitaine Fleming, victime d’une noyade. Ce dernier était propriétaire d’une vaste flotte de pèche mais subissait les attaques d’un concurrent, Ballard. Peu de temps après, Arlène, la veuve, affirme reçoit des coups de téléphone en provenance de son défunt mari ! Les phénomènes étranges se multiplient et Arlène, nerveusement épuisée, doit être hospitalisée par le Dr. Ormsby. Le Saint mène l’enquête pour découvrir la vérité dissimulée derrière ces prétendues manifestations de l’au-delà. Le Noyé compose un superbe épisode d’atmosphère. Depuis La Quatrième Dimension jusqu’au contemporain Supernatural, les appels téléphoniques ne provenance de l’Au-delà ont toujours généré des atmosphères énigmatiques et effrayantes, et le présent opus ne déroge certes pas à la règle. La fatidique communication produit pleinement son effet introduisant une bascule dans une tonalité aux lisières du Fantastique, originale au sein de la série. Les différences scènes développant cet aspect relèvent de l’arsenal bien connu des histoires de maison hantée, mais mises en scène avec efficacité par la mise en scène de John Moxley. Celui-ci joue avec maîtrise de la musique et d’angles suggestifs. Un admirable travail de photographie en teintes froides apporte également beaucoup à l’ambiance étonnamment angoissante du récit, prolongeant d’ailleurs les nombreuses superbes scènes en extérieures ‘littoral, villages de pêcheurs). Le grand atout de l’épisode demeure la remarquable prestation de Sylvia Syms, exprimant de manière parfaitement crédible l’effroi exprimé par Arlène. Les auteurs ont l’intelligence de lui accorder de nombreuses scènes en quasi solo, sans la présence d’un Roger Moore traditionnellement si omniprésent. Un pari audacieux mais remporté haut la main, tandis que d’excellents acteurs, comme souvent également vus chez les Avengers (Gabrielle Drake, Fulton Mackay, etc.) complètent agréablement la distribution. Le scénario hésite malheureusement entre deux genres se développant en Whodunit crapuleux, alors qu’aucun des suspects envisagés n’aurait réellement intérêt à une éventuelle mise en scène. Le récit ne parvient pas dépasser cette difficulté, d’où parfois une impression d’artificialité. On reste extérieur à cet aspect jusqu’à la révélation du pot aux roses par Simon, avec un drame amoureux s’accordant in extremis à la tonalité dramatique impulsée par la réalisation.
The best-laid schemes o' mice an' men 3. LA PIÈCE D'OR Date de diffusion : 06 octobre 1968 (The Super Secret Cypher Snatch : 09 octobre 1968) Dans un casino londonien, le Saint vole à la rescousse de la belle Reb Denning, victime d’une agression. La superbe blonde lui révèle être un agent secret de la CIA et adresse au célèbre Simon Templar une invitation au danger : elle lui demande de l’aider à démasquer le réseau ennemi dont l’établissement est la couverture. Le Saint relève le défi, ce qui va le plonger dans une aventure particulièrement mouvementée. Reb va toutefois s’avérer être une redoutable arnaqueuse, désireuse de dérober le pactole du casino. Lors de ses précédentes participations à la série, Terry Nation avait su apporter du sang neuf aux aventures du Saint, catapultant Simon dans des domaines aussi novateurs au sein de la série que la Science-fiction (Le laboratoire secret), le Fantastique (Sibao) ou le film de guerre (.a griffe du tigre). Dans un premier temps on ressent donc une déception certaine en le découvrant renoncer à ce renouvellement, pour se cantonner au secteur si rebattu du policier. Mais l’auteur parvient néanmoins à apporter une précieuse touche personnelle conférant une vraie originalité au scénario d’Invitation to Danger. En effet, au lieu de développer un intrigue linéaire, il déploie de nombreux thèmes emblématiques du genre, sur un rythme effréné (l’enlèvement, la damoiselle en péril, objet mystère, l’affrontement, les malfrats, la poursuite automobile…), lors d’un ensemble de prime abord inexplicable. La suite du scénario devient une astucieuse résolution du puzzle, avec la sublime Reb comme agréable tireuse de ficelles. Nation accompagne cet aspect plaisamment énigmatique de plusieurs belles audaces en rupture ave les clichés de la série. L’ami rituel de Simon se révèle pour une fois un félon cupide. De plus le ton général reste celui d’un polar noir et violent, alors que les récits d’escroquerie étaient plutôt jusqu’ici traités sous l’angle comique, avec une complicité canaille de Simon. Rien de semblable ici, même si l’épisode joue sur l’évidente complicité entre Roger Moore et Shirley Eaton pour susciter quelques étincelles. L’actrice n’est sans doute pas la plus douée de sa génération mais sa beauté illumine réellement l’épisode. Même si les gangsters apparaissent derechef bien trop classiques, la présence de Julian Glover apporte une indéniable valeur ajoutée, Conjointement à Shirley Eaton, elle vaut un plaisant cachet 007 à l’opus, treize ans avant les retrouvailles avec Roger Moore dans Rien que pour vos yeux. Tout en refusant élégamment de se mettre en avant, Roger Moore se montre de nouveau efficace derrière la caméra, réussissant notamment plusieurs scènes d’action spectaculaires, ainsi qu’une belle poursuite automobile intégralement en extérieur.
4. L'HÉRITAGE Date de diffusion : 13 octobre 1968 (You'll catch your Death : 16 octobre 1968) Ed Brown, figure du milieu à la retraite et connaissance de Simon, décède dans l’explosion de sa voiture. Son avocat invite sa fille Penny, le Saint, ainsi que quatre rivaux à découvrir son testament filmé. Ed accorde un million de Livres au premier des présents qui parviendra à réunir un somme d’un même montant. Justement un transfert de capitaux protégé par l’Inspecteur Teal va atteindre le million. Les truands enlèvent Penny, ce qui conduit le Saint à participer au hold-up. Il parvient à démasquer Ed, bien vivant et manipulant ses concurrents pour qu’ils réalisent le travail à sa place. Pour les amateurs des Avengers, l’épisode revêtira d’amusantes convergences avec Le legs. On y trouve pareillement un baron du crime simuler sa mort pour duper ses prétendants, avec une chasse au trésor les confrontant à de multiples périls. Mais là où l’intégration de Steed et Stara se justifiait pleinement, ici on peine à comprendre le but de la présence du Saint. La prise de risques apparaît inutile, tandis que le scénario présente d’autres faiblesses. L’exposition de la situation prend beaucoup trop de temps (presque la moitié du récit), pour en suite ne déboucher essentiellement que sur la narration efficace mais très classique d’une attaque de convoi. De plus le pot aux roses se voit très vite éventé, puisque que l’on voit l’avocat placer la bombe et ensuite se conformer strictement aux volontés du prétendu défunt, l’intrigue ne tente jamais de lui attribuer un mobile crédible. Legacy for the Saint bénéficie toutefois de quelques scènes distrayantes, grâce à la rivalité amicale toujours plaisante entre Claude et Simon et surtout grâce aux trognes des pittoresques truands. La musique se montre alors ouvertement ironique et le scénario aurait sans doute du jouer pleinement la carte de la comédie. On est également sensible au charme très Sixties de la piquante Stephanie Beacham. La jeune actrice, très prometteuse, apporte un vrai chien au personnage de Penny et trouve le ton juste face à un Roger Moore toujours aussi complice de ses partenaires féminines. Outre la somptueuse Rolls-Royce d’Ed, les nombreuses allées et venues liées à l’attaque du convoi permettent au moins de découvrir de superbes voitures d’époque, filmées en extérieur dans la belle campagne anglaise. Il reste néanmoins dommage que le scénario passe à côté de son sujet.
5. UN DIPLOMATE DISPARU Date de diffusion : 20 octobre 1968 (Split ! : 23 octobre 1968) Jason Douglas, ami de Simon et diplomate d’un état africain, a disparu. Il a en sa possession 750 000 Dollars, destinées à assurer le développement de son pays. Mais il est poursuivi par un gang dirigé par le brutal Walter Faber, désireux de s’emparer du pactole. Faber enlève Sara, la fille de Jason et propose au Saint de l’échanger contre l’adresse où se cache son père. Simon parvient à libérer mais ils découvrent que Faber est parvenu à débusquer Jason à Genève. Le Saint ne peut empêcher la mort de Jason, mais met hors d’état de nuire Faber. Terry Nation parait abandonner ici abandonner tout velléité de dynamiser les aventures du Saint en leur apportant des thématiques ou des traitements nouveaux. Bien au rebours, son intrigue se résume à un assemblage minimaliste de postures maintes fois vues au cours de la série et se résumant de fait à deux simples confrontations entre Simon et la gang adverse, en Angleterre puis en Suisse. Toutefois, s’il semble prendre son parti des contraintes inhérentes aux scénarios du Saint, Nation démontre ici comment un auteur talentueux peut parvenir à sublimer un faible canevas narratif. Refusant de totalement s’insérer dans le polar traditionnel il aère le récit en l’ouvrant largement sur la modernité de l’époque, via des lieux emblématiques (boutique de mode très Mary Quant, avec l’Union Jack de rigueur, ou la Post Office Tower, bien connue des amateurs des New Avengers) ou l’électrisant par une érotisation plus accentuée que de coutume (jolie lingerie d’époque !). Surtout Nation soigne comme rarement au cours de la série la personnalisation de l’antagoniste ; Superbement incarné par Robert Hardy, Faber se montre passionnément hors normes, avec un sadisme et une brutalité affleurant sous aune apparence bonhomme et policée. Un véritable choc, d’autant que l’auteur évoque sans fard la réalité crue de la mort. Porté à un paroxysme, sa violence et son aura ténébreuse font basculer le scénario dans un pur et éprouvant thriller, bien au-delà de la simple narration des péripéties. Roger Moore joue astucieusement le jeu, rendant Simon bien plus sombre qu’il ne l’a été depuis longtemps, pour un âpre et impitoyable duel. On apprécie également la présence du spécialiste David Cargill au sein du gang, tandis que Suzan Farmer, certes cantonnée au registre habituel des Templar’s Girls, brille par son charme et son évidente complicité avec Roger Moore. Nation se trouve un puissant relais en la personne d’un Ray Austin effectuant ici sa première mise en scène pour la série. Il tire un excellent parti des décors intérieurs comme support des affrontements, amis aussi des nombreux extérieurs. The Desperate Diplomat confirme leur présence renforcée en cette saison, tandis qu’Austin les optimise pour rendre nerveuse la scène en soi classique d’échange otage/rançon. Surtout il apporte son inégalable savoir faire en matière de scène d’action, nous offrant trois scènes superbes et variées : bagarre, fusillade puis poursuite automobile. Un véritable festival, conférant là aussi une dimension supplémentaire à des confrontations de nature classique par ailleurs. On regrettera simplement la qualité étonnamment détestable de l’habituel paysage défilant pour simuler le déplacement d’une voiture, aux couleurs totalement délavées.
6. LES MERCENAIRES Date de diffusion : 27 octobre 1968 (Whoever shot Poor George oblique stroke XR40 ? : 30 octobre 1968) Dans un établissement de remise en forme situé à la campagne, Simon repère d’étranges d’individus semblant suivre un entrainement paramilitaire. Alors qu’il est approché par le chef du groupe, Roper, qui souhaite l’engager come second, le célèbre Simon Templar est également contacté par l’Intelligence Service. Il se voit demander de découvrir le fin mot de l’histoire, en association avec la charmante Kate. Le Saint découvre qu’il s’agit de mercenaires engagés pour libérer un traitre à la solde des Chinois. Ils se griment pour cela en régiment écossais. Les amateurs des Avengers trouveront ici d’amusantes convergences avec les mercenaires pseudo militaires de Commando très spécial ou avec les gardes écossais félons d’Esprit de corps. De plus l’évocation des Health Farms si populaires en Angleterre ne sera pas sans évoquer Linda Thorson. On s’amusera également de constater que Roger Moore arbore fort bien le kilt. Pour le reste l’épisode n’offre guère de motifs d’intérêt. Le Saint se retrouve en situation de parfait espion, ce qui limite l’intérêt du personnage, malgré la personnalité de Roger Moore, tout en l’enchâssant dans une histoire convenue, aux effets maintes fois vus au cours de la décennie s’achevant. De fait le récit se limite à une intrigue ultra classique d’infiltration, avec tous les clichés que cela comporte (patron crédule sympathisant avec le héros, lieutenant méfiant, péripéties supposées mettre à mal la couverture, etc.). Les interprètes des antagonistes sont de qualité, mais Caroline Mortimer compose une Templar Girl particulièrement fade. La caméra trop sage de Leslie Norman n’apporte guère de valeur ajoutée, même s’il se confirme que cette ultime saison s’ouvre largement aux extérieurs, souvent superbes. On s’étonne toutefois d’y découvrir Roger Moore perpétuellement remplacé par d’évidentes doublures, lui qui paie tellement de sa personne lors des combats et autres scènes d’action en studio.
Date de diffusion : 03 novembre 1968 (False Witness : 06 novembre 1968) A Athènes, le milliardaire Patroclos demande au célèbre Simon Templar de contrer un sosie tentant de s’emparer de sa fortune ! A Londres, le Saint se confronte à l’imposteur, mais celui-ci affirme être le véritable Patroclos ! Le Saint mène l’enquête, ce qui le conduit à s’intéresser de très près aux secrétaires des deux rivaux, toutes deux prénommées Annabel, mais très différentes l’une de l’autre. Simon débusque un trafic d’armes en partance du Pirée pour le Vietnam et démasque le seul et unique Patroclos, qui voulait en imputer la responsabilité à son sosie imaginaire. Le Saint s'attaque ici au fameux thème des doubles, très présent chez les Avengers comme chez l'ensemble des séries d'aventure de l'époque. La série a la bonne idée de le traiter avec son génie propre, celui de Roger Moore, c'est à dire sous l'angle de la comédie. Évidemment les divers artifices utilisés pour nous faire croire à l'existence réelle d'un sosie s'avèrent transparents et relèvent davantage du Boulevard. Mais l'intrigue conserve un réel intérêt car, si l'on devine rapidement l'entourloupe, l'énigme perdure jusqu’au bout quant à l'objectif poursuivi. La tonalité de vaudeville soutient énergiquement le récit, avec les va-et-vient d'un Saint toujours entre deux avions, l'humour de situation porté par le pittoresque Grégoire Aslan (quoique le double et véhément Patroclos devienne réellement lassant sur la fin) et, bien entendu, l'incontournable touche féminine. La vitalité de l'épisode doit beaucoup au charme et à l'abatage du duo Kate O'Mara/Denise Buckley, particulièrement élégantes et malicieuses. L'auteur varie suffisamment les caractères pour renouveler les effets, avec une Annabel II au caractère plus acéré que l'Annabel I. On aurait toutefois apprécié davantage d'interactions entre les deux femmes, volontiers rivales. Le Saint se montre fort heureusement beau joueur et parfait gentleman envers ces exquises arnaqueuses, permettant à la conclusion de demeurer idéalement située dans la comédie. Les seconds rôles relancent efficacement l'humour des situations et des dialogues, avec une savoureuse galerie de portraits (le journaliste fouinard, le valet obséquieux ou la vénale hôtesse). La mise en scène de Leslie Norman dynamise l'opus, avec une caméra mobile, d’intéressants extérieurs londoniens (la série s'affranchit décidément quelque peu des studios) et une bagarre finale particulièrement spectaculaire. Les décors se montrent comme souvent des plus soignés, de plus enrichis de nombreuses magnifiques peintures. La forte présence des inserts et décors aéroportuaires, ainsi que l’aspect maritime final, évoquent joliment l'appel au voyage que constitue la série, tandis que le Saint lui même se voit croqué avec malice, incapable de résister à l'appel de l'aventure, tout comme à un joli minois.
8. LA VENGEANCE Date de diffusion : 10 novembre 1968 (All Done With Mirrors : 13 novembre 1968) Alors que la journaliste Mary Ellen Brent entreprend d’écrire un livre sur lui, le célèbre Simon Templar fait l’objet de menaces de mort anonymes, puis de tentatives de meurtre. Simon s’efforce de remonter le fil de la conspiration, en retournant un comparse, mais ce dernier est vite assassiné, de même que sa petite amie. Le mystérieux adversaire du Saint enlève Mary Ellen, provoquant une ultime et mortelle confrontation dans une église désaffectée, tandis que la jeune femme est cernée par les flammes. Si elle s'en tient au commentaire hors champ lu par Roger Moore, la séquence d'ouverture renoue partiellement avec la saveur des monologues à travers le Quatrième Mur de la période monochrome, grâce aux irrésistibles regards et mimiques du comédien. Ce dernier trouve d’ailleurs une partenaire complice en la personne de Suzanne Lloyd, habituée de longue date de la série et toujours très efficace dans le registre de la comédie. Toutefois le véritable atout de cette divertissante introduction consiste à souligner par contraste la noirceur extrême du corps principal du récit, dominée comme rarement au sein de la série par l'obsession pathologique et homicide de l'antagoniste du jour. Après le soudain basculement de la découverte du serpent, les macabres et spectaculaires manifestations de l'esprit pervers apportent une tension dramatique tout à fait particulière au récit, que Terry Nation rend savamment crescendo. Il reste particulièrement troublant d'observer l'inédite nervosité d'un Simon ayant jusqu'ici quasi toujours dominé outrageusement les débats. La mise en scène du talentueux Roy Ward Baker apporte de l'impact à chaque action perpétrée par Lyall. The Time To Die, qui aurait pu s'intituler The Death Of The Famous Simon templar, donne d'ailleurs régulièrement l'impression d'avoir été réalisé par un Z.Z. Von Schnerk un tantinet moins flamboyant qu'à l'ordinaire. Une des grandes réussites de cet épisode d'atmosphère consiste d'ailleurs à s'affranchir du (relatif !) réalisme de la série pour se rapprocher de l'imaginaire des Avengers, une précieuse spécificité. Du reste, si la mort violente d'un personnage féminin ou du sang visible ne constituent pas à proprement parler un tabou chez le Saint, contrairement aux Avengers, leur occurrence demeure très rare. L'exécution de la jeune femme, d'une terrible sobriété, revêt par conséquent un grand impact dramatique. On y discerne un nouveau palier dans l'horreur avec l'éprouvant affrontement finale dans l'église se muant en brasier. La série réalise à cette occasion l'un de ses meilleurs castings, avec l'excellent Maurice Good. Inoubliable lors de la particulièrement similaire confrontation avec Cathy Gale, à l'issue de Ne vous retournez pas, l'un des plus purs récits et intenses d'épouvante des Avengers, il confère la même inquiétante obsession perverse à Lyall. Celui-ci devient dès lors l'un des rares adversaires du Saint à se hisser quasiment au niveau d'un Diabolical Mastermind. On pourra éventuellement regretter les séquences de la salle de tir, car signifiant une rupture d'intensité dramatique et une parenthèse dans l’affrontement entre les deux antagonistes. Surtout il reste dommageable que pour son ultime participation à une série à laquelle elle aura tant apporté, l'épatante actrice qu'est Suzanne Lloyd se voit confinée aux clichés coutumiers de la damoiselle en détresse. Elle avait prouvé de toutes autres aptitudes lors de précédents épisodes, notamment lors de The High Fence. Mais, tel quel, The Time To Die s'impose comme un passionnant opus hors normes des aventures du Saint.
9. CHINOISERIES Date de diffusion : 17 novembre 1968 (Legacy of Death : 20 novembre 1968) La belle Jean Lane appelle au secours le célèbre Simon Templar : son frère Tony fait l'objet d'un chantage de la part de Cord Thrandel, propriétaire d'une boite de nuit. Le Saint y met bon ordre mais découvre que Thrandel appartient à un réseau de trafiquants d'héroïne, dissimulée dans des statuettes en plastique. Par ruse il les déleste de leur marchandise, mais Thrandel enlève Jean pour en obtenir restitution. Après plusieurs péripéties mouvementées, le Saint triomphe de l'organisation et met sous les verrous son chef, Monsieur Ching.
L’épisode se montre parfaitement divertissant, avec des scènes d’action particulièrement nerveuses, filmées avec une efficacité éprouvée. On ne s’ennuie jamais, grâce à cette succession ininterrompue mais, malheureusement, il faut regretter une trop grande simplicité du scénario, un paradoxe pour The Master Plan. Il s’agit en fait simplement de faire pénétrer de l’héroïne en fraude à Londres, dissimulée dans des statuettes d’art chinois. Une trame archi classique et qui se contente aligner ses scènes d’actions sans réel liant, jusqu’à donner comme une impression de mini film à sketchs (avec également les naïves facilités scénaristiques propres aux années 60, Templar ne cessant de tomber comme par hasard sur ses ennemis au meilleur moment).
Qu’importe, le plaisir est au rendez-vous, avec un Roger Moore toujours aussi irrésistible, entre élégance, humour et vraie présence physique. L’évidence du rôle de 007 saute aux yeux (même si Templar ne tue pas), d’autant que le héros multiplie ces phrases tranchantes à l’humour acéré, caractéristiques de 007 (dialogues très percutants pour l’ensemble des personnages). Joli duo également avec la Templar Girl incarnée par la charmante Lyn Ashley, qui participera régulièrement par la suite aux aventures télévisées des Monty Python.
Outre Moore, la distribution se montre excellente, avec un solide John Turner nous valant une bagarre finale des plus impressionnantes. Roger Moore se bat comme toujours sans doublure, ce qui apporte une vraie valeur ajoutée. On remarque également Burt Kwouk, toujours aussi jouissif, mais surtout l’immense Christopher Benjamin. Ce comédien parvient à illuminer de très simples scènes (comme aller chercher des papiers dans un tiroir) par ce qu’il parvient à insuffler dans sa démarche, ses postures, ses expressions faciales quant à la personnalité veule de son personnage. Une démonstration absolument éblouissante de l’art du beau jeu.
On retrouve également avec plaisir une ambiance très Sixties, avec ces décors faisant le charme et la délicieuse patine rétro de la série, mais aussi des éléments très psychédéliques en ce crépuscule de la décennie. C’est notamment le cas pour une boîte de nuit dont le décor et les tenues arborées ne seront pas sans évoquer certains passages d'Amicalement vôtre.
10. LE ROCHER DU DRAGON Date de diffusion : 24 novembre 1968 (Noon Doomsday : 27 novembre 1968) Le médecin d’un petit village du Pays de Galles, Llanfairtrawssychnant, appelle à l’aide le célèbre Simon Templar. Des habitants auraient été attaqués par des bêtes monstrueuses. Simon découvre de troublant indices, convergeant vers le laboratoire du très secret Dr. Seldon, situé dans le manoir de Dragon’s RocK Il reçoit l’aide de Carmen, nièce de Seldon, elle-même très inquiète. Mais celle-ci est enlevée par l’une des créatures. Le Saint va découvrir que Seldon a créé une race de fourmis géantes et que celles-ci risquent de proliférer. En soi, que le Saint aborde de nouveaux rivages narratifs apparaît comme une idée positive. Une précédente tentative d’approche de la Science-fiction (Le laboratoire secret) s’était d’ailleurs soldé par un succès, grâce au savoir-faire de Terry Nation et à une habile intégration dans l’univers du Saint. Mais l’épisode choisit curieusement de se positionner en clone servile des séries B américaines des années 50, un choix particulièrement malencontreux. Il résulte tout d’abord totalement exogène au Saint, qui apparaît en permanence totalement déplacé dans cette histoire. De plus au moment où La mangeuse d’hommes du Surrey s’attache à ce genre de films, celui-ci connait déjà un déclin prononcé. Diffusé fin 1968, Le Rocher du Dragon devient lui absolument et tristement obsolète. Surtout, là où l’épisode des Avengers développait une narration plaisamment distanciée, anglaise et humoristique, le présent opus demeure d’un premier degré absolu, déclamatoire jusqu’au ridicule et accumulant absolument tous les clichés du genre, avec une pesante application. Utiliser le superbe folklore gallois aurait pu constituer une intéressante alternative (ce décor convenant bien mieux au Fantastique), mais le recours aux fourmis géantes revient au choix inepte d’une thématique purement américaine, revoyant toute la première partie du récit à l’inutile. Le film emblématique du genre, Them ! (1954), a d’ailleurs recours exactement aux mêmes bestioles, avec un tout autre souffle. A la mise en scène Roger Moore ne se montre pas particulièrement maladroit, mais il subit de plein fouet le manque de moyens de la production. Les faux extérieurs, les rochers en polystyrène, la catastrophique animation et incrustation du monstre, le cabotinage sans génie de nombreux seconds rôles achèvent de faire basculer l’épisode dans le Nanarland, hélas sans humour. Tout n’apparaît pas négatif, les panoramas gallois se montrent de toute beauté et deux excellents comédiens sauvent plusieurs scènes, ainsi que leurs personnages bâtis à force de poncifs. Anthony Bate confère une vraie présence à un caricatural savant fou, dont on sait d’entrée qu’il va infailliblement périr du fait de sa création et la délicieuse Annette André apporte une sensibilité à cette énième incarnation de la Damoiselle en péril. Toujours parfaitement en phase avec Roger Moore, elle confirme ici appartenir aux meilleurs invitées de la série. C’est pour elle que l’on peut encore se risquer à visionner cet épisode si peu reluisant par ailleurs.
11. MORT NATURELLE Date de diffusion : 01 décembre 1968 (Stop me if you've heard this One - but there were these two Fellers... : 04 décembre 1968) En peu de temps, cinq membres du conseil d’administration d’une importante société, Combined Holdings, meurent brusquement de crise cardiaque, une carte postale marquée « Balances de la Justice » étant retrouvée sur eux. L’un des survivants alerte le Saint, mais périt à son tour. Désormais Gilbert Kerby est directement menacé, Il doit devenir Lord Maire de la Cité de Londres et subit une tentative d’assassinat durant la cérémonie d’investiture. Menant l’enquête avec Anne, la fille de Kerby, le Saint découvre que le tueur estime que son père a été tué par la compagnie et qu'il se déguise en aveugle pour utiliser un bâton truqué, expulsant une aiguille empoisonnée. Les amateurs des Avengers se retrouveront ici en terrain connu, donc prévisible, avec cette succession de meurtres d’hommes liés par une communauté d’intérêt, que le protagoniste échoue régulièrement à contrer, du moins jusqu’à la conclusion. On ressent donc une forte impression de déjà-vu d’autant que, comme à l’accoutumée, on retrouve plusieurs visages connus parmi les seconds rôles. Sans devenir tout à fait électrique, l’intrigue suscite toutefois assez de rebondissements pour maintenir l’intérêt et joue habilement du Whodunit jusqu’à l’affrontement final. La mise en scène de Robert Asher se montre souvent pertinente, notamment lors des affrontements, et donne de l’impact aux scènes de mort subite, même si, fatalement, cet effet s’use au fur et à mesure des répétitions. La toujours excellente Jean Marsh surpasse en talent et présence nombre des autres Templar Girls, d’autant qu’Anne participe comme rarement à l’action, mais pas aux combats, on discerne là un tabou définitif de la série. Ceci nous vaut d’ailleurs un beau suspense en fin de parcours, quand elle se confronte à l’antagoniste (hélas assez falot par ailleurs). Ce solide, à défaut d’imaginatif, opus vaut également par le bel hommage qu’il rend à la Cité de Londres, cœur historique et vivant de la capitale britannique. Les inserts, ainsi que les nombreux extérieurs, s’avèrent de toute beauté et proposent nombre de sites emblématiques. On apprécie particulièrement les vues du superbe défilé du Lord Mayor’s Day, officiel ou excentrique, voire psychédélique, dont plusieurs chars nous précisent qu’il s’agit bien de celui de 1968. Une plaisante actualité pour les spectateurs de l’époque, car l’épisode fut diffusé trois semaines après l’évènement.
12-13. DOUBLE MÉPRISE Date de diffusion : 08/15 décembre 1968 (Have Guns, Will Haggle/They keep killing Steed : 11/18 décembre 1968) Le Saint accepte de servir de garde du corps à Amos Klein, célèbre auteur de romans d’aventures. Il a la surprise de découvrir qu’il s’agit d’une jeune femme ayant pris un nom de plume masculin. Ils sont brusquement enlevés par un gang dirigé par Warlock et sa secrétaire Galaxy. Grand admirateurs d’Amos (leurs pseudonymes sont inspirés de ses personnages), ils veulent que son imagination serve à trouver une faille dans le Complexe Hermetico, lieu hautement sécurisé du Pays de Galles, contenant des trésors. Mais ils confondent le Saint avec l’écrivain, pensant également qu’il s’agit d’un homme. Simon se garde de les détromper, afin de protéger Amos. Il va imaginer un plan, tout en veillant à faire tomber Warlock dans un piège. Tout au long de son parcours, Le Saint sera davantage apparue comme une série d’univers et d’acteurs que de scénarii. Passer au format du double épisode, ou du téléfilm, offre l’opportunité de développer un récit davantage ambitieux et la bonne nouvelle de The Fiction Makers est qu’elle va se voir pleinement saisie. Ainsi l’histoire écrite par Kruse et Junkin constitue en soi un efficace récit de film de casse. Cette sous-famille du film de gangsters connaît une certaine vogue au cours des années 60, (L’or se barre, L’inconnu de Las Vegas, voire Mission Impossible pour la variante d’espionnage, etc.) et l’épisode en reconstitue tout le sel : préparation minutieuse et tendue, réalisation à suspense, dénouement dramatique. Rien de manque à cet ensemble très prenant. Mais l’opus sait élever au dessus d’un simple argument réussi, avec l’apport très ludique des variations autour de la notion de réalité. L’idée géniale d’utiliser comme stratège un auteur de romans d’aventures très à la Ian Fleming évoquera d’excellents souvenirs aux amateurs des Avengers puisque c’est exactement de cette manière qu’est détournée l’agence QQF de Du miel pour le Prince. Ce jeu de perspectives se voit expose de manière irrésistible dès la scène d’introduction voyant le Saint commenter de manière ironique une bagarre de cinéma caricaturant... Les siennes propres ! Malgré l’emploi d’un acteur aussi emblématique que l’épatant Kenneth J. Warren, les auteurs ont la judicieuse de se lancer dans un projet aussi vertigineux qu’Epic, pour au contraire traiter le sujet sous le meilleur angle du Saint de Roger Moore : la comédie légère et distanciée (soulignée dès un générique évoquant la Linea d’Osvaldo Cavandoli). La situation débouche ainsi sur un pastiche absolument irrésistible des James Bond de Sean Connery, ici revisités par Roger Moore. L’organisation SWORD évoquant clairement le SPECTRE (avec aussi la présence du harponné d’Opération Tonnerre, Philip Locke) et l’on reconnaît de multiples références à Goldfinger (le casse, la présentation en maquette, le laser, la réalisation en uniforme, la confrontation finale, etc.). La présentation de 007 comme parangon du fantasmé se savoure avec plaisir. Les acteurs jouent totalement le jeu, en particulier Kenneth Warren, absolument irrésistible en antagoniste oscillant entre réel et imaginaire, jusqu’à se perdre et ne cessant d’observer la réalité à travers des écrans. L’un des premiers Geeks des séries télé ! Chacune dans son genre, Sylvia Syms et Justine Lord apportent charme et vivacité à un ensemble dominé par un Roger Moore idéalement dans son élément et parfait en pré James Bond. On regrettera une réalisation par contre trop similaire au quotidien de la série, y compris budgétairement (surabondance de décors en studio) mais l’exercice de style s’affirme de haute volée.
14. LES IMMIGRANTS Date de diffusion : 22 décembre 1968 Alors qu’il pêche en haute mer sur le littoral sud de l’Angleterre, le Saint découvre un cadavre flottant. Simon démasque l’existence d’un réseau faisant entrer clandestinement des Pakistanais dans le pays. Un armateur ruiné s’est reconverti dans cette activité très rémunératrice. Il s’avère que l’un des arrivants est porteur de la variole. Simon doit absolument retrouver les autres immigrants avant qu’une épidémie ne se déclenche dans la population. The People Importers démontre, si besoin en était, que les bons sentiments ne peuvent suffire en eux mêmes à générer des opus réussis. Tout à fait à l’honneur de Roger Moore, le récit entreprend de dénoncer les réseaux de négriers exploitant la misère des immigrants clandestins un sujet déjà d’actualité durant les années 60. Mais les auteurs, tout à leur sincère critique, oublient longtemps de raconter une histoire. Toute la première partie de l’épisode se résume à la description du fonctionnement sinistre du réseau, Simon Templar y demeurant aussi inerte que périphérique. Avec un propos se cantonnant à de l’imagerie d’Epinal, de plus porté par une interprétation plus faible qu’à l’accoutumée, on ne saurait y discerner qu’une médiocre valeur documentaire. Décrits comme brutaux et manquant d’envergure, les antagonistes du jour ne forment pas une opposition bien redoutable pour le Saint. Enserré dans la seconde partie du récit, le scénario se limite à quelques figures imposées bien connues, comme une caricature du style de la série. Imogen Hassal et Susan Travers (vue dans Mon rêve le plus fou) apportent un charme indéniable, mais au service de rôles très limités. Ray Austin ne trouve guère ses marques dans une mise en scène enchâssée dans des décors médiocres et développant peu d’action, hormis lors de l’affrontement final, tout en extérieurs. Il suscite enfin quelques étincelles dans un ensemble très démonstratif (sans doute parce qu’il s’agit également d’un épisode de Noël).
15. L'ARGENT NE FAIT PAS LE BONHEUR Date de diffusion : 29 décembre 1968 (The Interrogators : 01 janvier 1969) A Nice, Jenny, la fille gâtée et capricieuse du grand producteur Ben Kersh, a été enlevée. Le célèbre Simon Templar accepte de procéder à la remise de rançon. Le spécialiste des effets spéciaux des studios a installé un appareil photo dans la montre du Saint. Il s’avère que Jenny a monté toute l’affaire pour pouvoir s’enfuir avec son fiancé. Mais les tourtereaux sont trahis par leurs associés, désireux de conserver l'argent pour eux seuls. L’épisode souffre d’une intrigue minimaliste et largement prévisible tant le supposé retournement de situation de la complicité de la damoiselle complice des kidnappeurs se voit venir à des kilomètres. Il s’agit d’ailleurs d’un poncif des séries d’aventures de l’époque. D’une manière caractéristique, le procédé sera dupliqué quasi à l’identique lors de L’enlèvement de Liza Zorakin, l’un des opus les plus médiocres d’Amicalement vôtre. Le scénario ne fait ensuite que greffer quelques péripéties classiques sur ce fil conducteur, même si la trahison du spécialiste des effets spéciaux permet d’enrichir a minima les débats. On appréciera surtout la scène où il fait visiter son surprenant atelier au Saint, un passage n’étant pas sans évoquer la section Q par la profusion des gadgets pittoresques ! Comme souvent on apprécie de retrouver quelques visages aperçus dans Chapeau Melon et bottes de cuir, mais la distribution ne brille cependant pas son brio. Judee Mortan compose ainsi une Templar Girl très anodine. L’ensemble se voit dominé par un Kenneth J. Warren réellement impressionnant dans son incarnation d’un producteur yankee en soi assez cliché, brutal et impérieux. Le personnage demeure trop périphérique mais les amateurs des Avengers appréciant Epic goûteront fort de le retrouver trônant et vociférant dans le décor d’un studio de cinéma. Roger Moore dépolie une belle énergie sous la double casquette d’acteur et de réalisateur, tirant joliment parti de superbes voitures d’époque comme de nombreux extérieurs (bien plus anglais que niçois !), Where the Money Is demeurant l’un des opus de la série les plus richement dotés en la matière.
16-17. VENDETTA POUR LE SAINT Date de diffusion : 05/12 janvier 1969 (The Rotters/invasion of the Earthmen : 08/15 janvier 1969) A Naples, le Saint ne peut empêcher que son compatriote Euston soit assassiné par les hommes du chef maffieux Destamio. Arrivé en Sicile en quête de justice, il s’associe avec le chef de police pour faire tomber le criminel. Simon sympathise avec Gina, la nièce de Destamio, à qui il révèle la véritable nature de son oncle. Le gangster va tenter d’assassiner le Saint avec une voiture piégée, tout en complotant de succéder à Don Pasquali, le parrain agonisant de l’organisation. Vendetta for the Saint tourne résolument le dos aux fantaisies ludiques et innovantes de l’autre double épisode porté au cinéma, The Fiction Makers, pour aux contraires en revenir aux fondamentaux policiers de la série, sur une tonalité noire proche des écrits de Charteris. De fait l’intrigue, développée par le même duo d’auteurs, se montre volontiers classique, car recourant à nombre de clichés italiens et avoisinant des affrontements précédents du Saint. Mais le scénario n’en demeure pas moins captivant, grâce à ses rebondissements, à son suspense et à ses diverses intrigues secondaires réussies (drame familial, implication personnelle de Templar, rivalités au sein de la Famille…). Déjà très riche, le récit sait ne pas s’en tenir qu’aux péripéties pour au contraire instiller toute une atmosphère inquiétante, résultant de l’omniprésence de la pieuvre au sein de la société sicilienne. Plusieurs moments forts ponctuent l’épisode, comme la longue et spectaculaire séquence de l’évasion du Saint ou l’affrontement final. Autour d’un Roger Moore très convaincant dans cette version du Saint plus sombre qu’à l’accoutumée, la distribution se montre particulièrement relevée et apte à séduire l’amateur des Avengers. Ian Hendry réalise une prestation absolument extraordinaire, l’intensité et la présence qu’il confère au diabolique Destamio évoque clairement l’éclat jadis apporté au Dr. Keel. Son aura autorise l’épisode à jouer pleinement la carte du duel personnel entre les deux antagonistes que tout oppose. A côté de lui, on retrouve nombre de visages connus des Avengers, tous idéalement dans leur emploi, entre bien d’autres : Fulton McKay également parfait en victime lors de la mémorable séquence introductive, George Pastell, le pittoresque Arkadi de Du miel pour le prince en policier classieux et madré ou encore Aimi McDonald l’évaporée secrétaire du Retour des Cybernautes, en maitresse bafouée du gangster. Rosemary Dexter apporte aussi du charme et une touche authentiquement italienne à une Damoiselle en détresse par ailleurs classique. A côté de plateaux particulièrement soignés, Vendetta pour le Saint se détache également par ses nombreux extérieurs, mettant en valeur les sublimes sites et paysages de Malte et apportant une saveur authentiquement méditerranéenne à l’ensemble.
18. LE ROI Date de diffusion : 19 janvier 1969 (Killer : 22 janvier 1969) Episode traité dans le cadre d’Amicalement vôtre. 19. LE GÉNIE Date de diffusion : 26 janvier 1969 (The Morning After : 29 janvier 1969) En Cornouailles, le Saint fait la connaissance de deux charmantes sœurs, Stella et Vanessa, ainsi que de leur richissime père, Keith Longman. Celui-ci confie à Simon être mourant, du fait d’une maladie cardiaque et qu’il envisage de se mettre en hibernation jusqu’à ce que la médecine ait trouvé un remède. Toutefois il envisage secrètement d’utiliser le célèbre Simon Templar comme cobaye de ce procédé expérimental ! D’Adam Adamant Lives ! à Hibernatus (1969) en passant par les voyage spatiaux (2001 Odyssée de l’Espace, 1968), l’hibernation compose un thème populaire au cours des années 60. La série s’empare donc d’un thème à la mode mais de manière intelligente. L’épisode développe en effet une tonalité, étrange, issue de la rencontre cette fois fructueuse entre la Science-fiction et la série d’aventures incarnée par le Saint, sur un canevas n’étant pas évoquer clairement les Avengers. Les amateurs de cette dernière série s’amuseront ainsi beaucoup en découvrant ces très particuliers fossoyeurs en chapeau melon, ou Simon en train de déguster du champagne au beau milieu de la campagne anglaise. Le récit se ponctue d’éléments clairement identifiables, tels le village emblématique d’Aldbury et les superbes résidences anglaises, ou la référence explicite faite par à Roger Moore à Mrs Peel. Le scénario n’évite pas certains clichés (comme la fille du méchant prenant rituellement parti pour Simon), mais dose habilement l’alliage de ses divers composants, tout comme son modèle. Le savoir faire de Freddie Francis permet de filmer le tout avec réussite, au sein de décors soignés et vieillissant bien. Le réalisateur a la bonne idée d’éviter tout effet spécial hors de propos et propice à la caducité. Les deux sœurs aussi surdouées que délurées font merveille lors de leurs approches hautement excentriques de Templar, sans doute les meilleures scènes de l’opus. En particulier la tonique et amusante Jayne Sofiano se met idéalement au diapason humoristique de Roger Moore et compose une Templar Girl aussi séduisante que marquante. En Diabolical Mastermind luttant pour sa survie, Clifford Evans compose talentueusement un adversaire du Saint moins manichéen qu’à l’ordinaire, jusqu’au saisissant dénouement.
20. PORTRAIT DE BRENDA Date de diffusion : 02 février 1969 (The Curious Case of the Countless Clues : 05 février 1969) La peintre Alan Williams appelle le célèbre Simon Templar pour lui faire des révélations, mais est assassiné avant d’avoir pu lui parler. Joséphine, son amie et modèle, met le Saint sur la piste d’un tableau, le Portrait de Brenda. Il s’agit en fait du tableau de la jeune sœur du peintre, une chanteuse qui se serait suicidée avec avoir été dépouillée par un mystérieux gourou. Aidé d’une amie commune, la chanteuse pop Diana Huntley, et par les indices disséminés dans le tableau, le Saint va parvenir à démasquer le véritable coupable. Irrigué de musique pop et de vues du Swinging London, Portrait of Brenda présente le grand intérêt de nous faire mesure le parcours accompli par la série. Inaugurée alors que les Sixties débutantes étaient encore imprégnées par les années 50, comme en rend souvent compte la saison 1, en cet avant dernier épisode elle débouche sur le crépuscule de la décennie, tant du point de vue artistique que vestimentaire ou artistique. Le Saint, très en verve lors de dialogues plein d’humour, bénéfice du renfort de deux charmantes d’ailleurs totalement dans le vent du moment, même si l’on préfère la vivacité et l’expressivité de la juvénile Anna Carteret à la sensualité à fleur de peau d’Anne de Vigier. Pour sa dernière prestation Claude Eustache accomplit un sans faute et l’on apprécie vivement que le saint en prenne congé sur un élégant et amical Call me Simon. Ivor Dean aura bien mérité de la série. De fait la première partie de l’épisode se montre particulièrement riche visuellement (King’s Road) et musicalement, avec quelques agréables airs de Pop Music. Toutefois, un fois dépassé ce cap, les péripéties résultent fort convenues, avec, comme souvent, un coupable évident tant il n’a d’autre raison de figurer au scénario. Surtout l’épisode présente une contradiction : narrer une histoire totalement sinistre et crapuleuse dans un environnement coloré et joyeux contrebalançant l’atmosphère en permanence. Le gourou, filmé de manière totalement lénifiante et premier degré (pour le coup nous sommes vraiment en 1969) occupe aussi beaucoup trop d’espace, avec un Mitland en posture constamment figée. On a l’impression que l’épisode passe à coté de son sujet, le tableau instrument de la vengeance post mortem de la représentée et non pas simple dissimulation d’indices.
21. LES RIVAUX Date de diffusion : 09 février 1969 (Wish you were here : 12 février 1969) Le constructeur de voitures de courses George Hapgood demande au célèbre Simon Templar, ami de longue date, de tester son dernier modèle. Celui-ci doit participer à un grand rallye à travers l’Angleterre et il est vital qu’il parvienne à intéresser les sponsors. Mais le prototype est victime d’un sabotage. Le Saint suspecte Justin, cousin et rival de George, car celui-ci s’est associé depuis peu à Kay Collingwood, redoutable femme d’affaires n’ayant pas froid aux yeux. Le Saint va parvenir à duper les deux compères et à assurer le succès de son ami, avec avoir pris Kay comme navigatrice. On reprochera à l’épisode une trop grande impression de déjà-vu, les sports automobiles ayant déjà été traités deux fois au cours de la série. De plus The Chequered Flag (saison 4) et The Fast Women (saison 5) décrivaient des rivalités d’équipes de course sur un modus operandi avoisinant fort celui du présent opus. Toutefois l’épisode parvient à se montrer hautement distrayant. Les péripéties spectaculaires se succèdent sans faiblir portées par un l’entrain communicatif de la narration et de la mise en scène. Certes le trucage de la conduite de voiture en studio se montre toujours aussi évident (la série sera demeurée immuable là-dessus) mais l’intégration d’inserts de rallyes automobiles s’effectue avec fluidité et crédibilité. L’intrigue reste transparente de bout en bout mais le Whodunit se voit détourné dès le départ, pour devenir une piquante comédie, tant les prises de bec acidulées entre Simon et Kay regorgent d’humour incisif. Si le saint domine évidemment les débats, on apprécie d’ailleurs que la dame rende coup pour coup. Sa secrétaire passablement dessalée vaut aussi le coup d’œil. Le coup de maitre de The World Beater réside bien entendu dans le choix de l’épatante Patricia Haines comme ultime Templar Girl. Entourée d’autres visages connus des Avengers, elle apporte une rosserie et une drôlerie essentielles au succès de l’épisode. La complicité avec Roger Moore se montre fusionnelle, tandis que s’instaure une indéniable tension sexuelle. Un défilé de somptueuses automobiles vient compléter le succès de l’opus, même si l’on note de l’absence de la ST1, qui nous aura donc quitté sans tambours ni trompettes lors de Portrait of Brenda. Il en va pareillement pour cet épisode, où absolument rien n’indique qu’il s’agit du terminus de la production. Il est vrai que le Saint aura imperturbablement déroulé ses exploits, sans jamais se soucier du rythme des saisons. The World Beater n’en compose pas moins une digne conclusion pour la série d’aventures anglaise des Sixties ayant connu le plus durable des succès, grâce à son univers séduisant et à son interprète hors pair.
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