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 saison 2Saison 4

Supernatural

Saison 3

1. Les Sept Péchés Capitaux (The Magnificent Seven)

2. Les Enfants perdus (The Kids are Alright)

3. Baraka (Bad Day at Black Rock)

4. Sin City (Sin City)

5. Il était une fois… (Bedtime Stories)

6. Le Vaisseau fantôme (Red Sky at Morning)

7. Rouge sang (Fresh Blood)

8. Le Festin du Père Noël (A Very Supernatural Christmas)

 

9. Les Reines du Sabbat (Malleus Maleficarum)

10. Faites de beaux rêves (Dream a Little Dream of Me)

11. Un jour sans fin (Mystery Spot)

12. Jus in Bello (Jus in Bello)

13. Les Ghostfacers (Ghostfacers)

14. Rejoins-moi (Long-Distance Call)

15. Le Secret de l’immortalité (Time is On My Side)

16. Les Chiens de l’enfer (No Rest for the Wicked)

 

 


1. LES SEPT PÉCHÉS CAPITAUX
(THE MAGNIFICENT SEVEN)

Épisode Mythologique

Scénario : Eric Kripke
Réalisation : Kim Manners

- So, we're eating bacon cheeseburgers for breakfast, are we?
- Well, sold my soul. Got a year to live. I ain't sweatin' the cholesterol.

Résumé :

Une semaine après l’ouverture de la porte de l’Enfer (cf. finale de la saison 2), les centaines de démons libérés parcourent le monde et sèment le chaos chacun de leur côté. Bobby, Sam, et Dean se retrouvent dans une maison où ils découvrent un macabre spectacle. Ils comprennent rapidement que les démons assassins comptent parmi les plus puissants qu’ils n’ont jamais affrontés, et ne peuvent être tués. Un couple de chasseurs est également sur leur piste. Pendant ce temps, une jeune femme blonde suit Sam à distance…

Sept monstres pour le prix d’un : le spectateur adore, les Winchester curieusement moins…

La critique de Clément Diaz : 

La saison 3 démarre tous moteurs allumés : alimenté par des dialogues tourbillonnants, une réalisation tout feu tout flamme du toujours impeccable Kim Manners, et une BO entraînante, le scénario développe une confrontation tonitruante entre les héros et une flamboyante bande de démons high class au sadisme raffiné. Bobby est évidemment une attraction supplémentaire. L’inépuisable relation Sam/Dean est au rendez-vous, avec Sam luttant pour trouver un moyen de briser le marché fatal de Dean, ce dernier étant bien décidé à être plus… Dean que jamais pendant l’année qui lui reste, numéros d’acteurs bien goûtus à la clé ! La Mythologie se développe avec l’entrée en scène d’un mystérieux personnage, un procédé scénaristique archi rebattu mais dont on ne peut nier l’efficacité. Au final, The Magnificent Seven (quel titre !) lance brillamment cette nouvelle saison.

Mesdames et messieurs : aujourd’hui, rien moins que les sept péchés capitaux en personne ! Leur mégalomanie délirante force notre trio à recourir à toutes leurs ressources. L’adjonction du duo de chasseurs dramatise les enjeux à point, notamment lors de l’effroyable séquence du bar, un des meurtres les plus horribles jamais imaginés par Supernatural. L’attaque des bros (avec l’Impala payant de sa personne) montre bien qu’ils ne se battent qu’avec l’énergie du désespoir. Bobby est au top : le voir épouvanté par ces démons ou mater une Tamara en pleine hystérie est excellent : quand Bobby parle, on la ferme, et pis c’est tout ! Jim Beaver est fantastique.

Mais le septuor n’est pas qu’une bande d’assassins sadiques, ce sont avant tout des fins psychologues qui aiment s’infiltrer dans l’âme humaine, et faire ressortir ce qu’il y a de plus noir entre eux. Trois scènes se détachent particulièrement : la scène des chaussures est d’un humour saignant très percutant. Celle très Hannibal Lecter (ou Angelus pour les amateurs de Buffy et d’Angel) où l’Envie pilonne nos héros rien qu’avec des mots aussi dévastateurs que… justes ; dans Supernatural, la vision de l’humanité n’est guère riante, et cet aperçu de la lie en chacun de nous est très dérangeante, renvoyant à nous-mêmes. Grand numéro de Josh Daugherty. Sur le même mode, le numéro du faux Isaac qui martyrise verbalement Tamara vaut aussi le détour, tout comme le monologue inénarrable de l’Orgueil, absolument jouissif. L’attaque finale se déroule à plein suspense sur 4 fronts - Dean doit se battre avec… la luxure (pourquoi n’est-on pas étonnés ?). Le deus ex machina final augure bien des surprises pour la suite de la saison. On note que l’on ne s’appesantit pas sur le triste destin des possédés, pas le temps d’ouvrir son cœur lorsqu’on est en guerre…

L’épisode vaut aussi pour nos frérots. Si Sam est toujours doloriste, Dean nous régale en étant décidé à vivre sa dernière année pleinement : junk food à tous les étages, partie à trois avec des jumelles (hilarante scène !), et dérouillage de baddies à fond la caisse. Leurs dialogues frénétiques à la Gilmore girls (ancienne série de Jared) dynamisent beaucoup leurs scènes communes. Dean effraie dans la mesure où il semble résigné à vivre seulement un an avant d’être précipité en Enfer. Mais il le fait en ayant la pêche, en étant en mode kamikaze en permanence. Dean demeure bien un grand personnage tragique, noyant son soi si sombre sous des dehors explosifs ; mais combien de temps tiendra-t-il à ce régime ? L’on est pas dupe du faux enthousiasme de la coda, le dialogue final, très amer, reste tenace. Un début en fanfare !

La critique d'Estuaire44 : 

The Magnificent Seven, un titre génial, avec la version originale du film Les Sept Mercenaires. A rebours le titre français est très littéralement Les Sept Péchés Capitaux, une différence de tonalité souvent observée au cours de la série. L’épisode signifie une une jouissive entrée en matière pour cette saison ayant bien des défis à relever à l’orée d’une nouvelle ère, le post Azazel débute. Autant l’avouer on est saisit d’emblée par la séquence récapitulative au son d’un métal en fusion comme on aime (le divin Hell Bells d’AC/DC) avec la perspective de sillonner l’immensité de l’Amérique dans une voiture de folie, tout en écoutant les bons classiques. Dès sa spectaculaire introduction, l’épisode plante le décor de la saison : considérablement plus enténébrée, multiples et périlleuses entités libérées, défiance des Chasseurs envers les Winchester, le compte à rebours fatal de Dean. Dean est tel qu’en lui-même face à l’échéance fatale, la saison aura le temps d’exploiter cette veine. Même si l’on aurait pu espérer un traitement plus approfondi des Sept Péchés (ils auraient mérité un double épisode), l’essentiel est là : tous ont droit à leur scène, souvent pétillante d’humour noir et tendant un miroir obscur à l’humanité. Mention spéciale pour l’Orgueil et évidemment pour la Luxure s’accaparant Dean !

The Magnificent Seven apparaît également comme une étourdissante démonstration du talent de Kim Manners, excellant dans l’atmosphère horrifique, les scènes chocs (brutes de décoffrage !), la direction d’acteurs ; le sens de l’image…. Quel atout pour la série ! Coup de cœur pour Tamara, avec son look afro et son pieu elle m’a fait penser à l’une des Tueuses tombées au champ d’honneur face à Spike. J’ai adoré que, quand elle se précipité hors de la maison, ce ne se soit pas pour tomber dans le piège mais bien pour planter l’ordure. Brave cœur ! On en dira pas autant pour Ruby première version, introduite dans la série avec un certain manque d’originalité. On a déjà fait ici le tour de l’essentiel du personnage au cours de cette saison (trucider les démons avec le couteau magique, disparaître dans la nuit noire et obscure). Katie Cassidy est superbe mais ne dégage pas de véritable aura, elle sera bien mieux à son affaire dans Melrose Place ou Gossip Girls. Supernatural aura été un sacré tremplin pour sa carrière comportant de nombreuses productions d’horreur. On l’a déjà dit, on va le redire, on le redira sans cesse : Bobby est fabuleux. Ce prétendu second rôle achève ici de se placer au cœur de la série. Au total un pilote de saison, proche de la perfection.

Anecdotes :

  • Il n’est pas expliqué comment Dean parvient à résister à l’influence de la Luxure.

  • Quand la famille tuée par la Paresse est découverte, la télévision diffuse un épisode de Dallas, on reconnaît Charlene Tilton dans son rôle de Lucy Ewing.

  • Identifiés par Saint Thomas d’Aquin dans sa Somme théologique, (1266-1273), les Sept péchés capitaux sont, dans la religion catholique, ceux dont procèdent tous les autres : la paresse, l’orgueil, la gourmandise, la luxure, l’avarice, la colère et l’envie. A l’origine la paresse était à considérer au sens spirituel (acédie, en termes théologiques, ou négligence de se conformer aux impératifs religieux). L’Eglise leur oppose les Sept vertus catholiques : la chasteté, la tempérance, la prodigalité, la charité, la modestie, le courage et l'humilité.

  • Quand les policiers sont sur la scène du crime au magasin de chaussures, on entend quelqu’un s’exclamer You'd better get Grissom ! Il s’agit d’un clin d’œil à la série Les Experts, diffusée par CBS sur la même case horaire que Supernatural sur CW. Bobby déclare à la Paresse : Fat, Drunk and Stupid is no way to go through life, son. Il s'agit d’une réplique fameuse du film American College (1978), de John Landis. Au bar Tamara déclare I love you à Isaac, qui lui répond I know. Il s’agit d’un clin d’œil à l’une des plus célèbres dialogues de la saga Star Wars, entre Han Solo et la Princesse Leia. What's in the box! Brad Pitt, Se7en, no ? s’exclame Dean quand il apprend l’existence des Sept. Il s’agit d’une référence à la scène clé du film Se7ven (1995), mettant en scène un épouvantable serial killer organisant ses meurtres successifs en fonction des Sept péchés capitaux. Here's Johnny ! s’exclame l’Orgueil quand il pénètre dans la pièce. Il s’agit de la fameuse réplique de Torrance dans The Shining (film régulièrement référencé au cours de la série) quand il achève de fracasser la porte à coups de hache. L’Orgueil n’allait certainement pas laisser les Bros être plus Geeks que lui !

  • Durant la récapitulation des évènements, on entend Hell's Bells, d’AC/DC. On entend Mean Little Town, des Howling Diablos, dans le bar des démons. Quand les héros se préparent à l’attaque des Sept, on entend à la radio I Shall Not be Moved, de J.B. Burnett.

  • Katie Cassidy, interprète pour la toute première fois Ruby (encore non nommée), pure jeune femme ayant de grandes ambitions dans la vie. Alors encore peu connue, après son passage dans Supernatural elle va devenir une figure régulière du cinéma d’épouvante (A Nightmare on Elm Street, 2010.). Elle connaît également une belle carrière à la télévision, tenant notamment des rôles récurrents dans Gossip Girls et dans la reprise de Melrose Place, en 2009. Elle joue actuellement Black Canary, célèbre super héroïne de DC Comics, dans la série Arrow.

  • Le terme de Candygram énoncé par Dean désigne un piège (souvent explosif) tellement peu subtil que seul un idiot pourrait y tomber dedans. Le terme a été popularisé par Le shérif en prison, western parodique totalement barré réalisé par Mel Brooks. L'Appletini est une abréviation pour “Apple martini”, un cocktail mélangeant vodka et jus de pomme. Tamara évoque les Three stooges et Four tops. Les Trois Stooges sont une troupe de vaudeville surtout renommée pour ses courts métrages slapstick réalisées entre 1928 et 1970, ils font partie intégrante de la culture audiovisuelle américaine. Les Four Tops sont un quatuor vocal américain qui depuis 1953 chante un répertoire s'étendant du jazz à la soul en passant par le rock'n'roll et la pop.
  • La scène où Ruby attaque au couteau les démons fut tournée à 120 images par seconde, permettant à Manners lors du montage de contrôler les changements de vitesse désirés (accélérés, ralentis).

  • Changements dans l’équipe : la scénariste Sera Gamble, chargée de la supervision des scénarios, est promue productrice. Elle est remplacée à sa tâche initiale par le scénariste Jeremy Carver qui fait son entrée dans la série. Carver sera par la suite le showrunner de la série à partir de la saison 8. Le scénariste Ben Edlund, producteur consultant en saison 2, ainsi que le réalisateur et superviseur de la production Phillip Sgriccia deviennent producteurs co-exécutifs. A l’inverse, John Shiban s’éloigne de la série en quittant son poste de scénariste, et passe donc de producteur exécutif à producteur consultant ; il quittera définitivement la série après la saison 3.

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2. LES ENFANTS PERDUS
(THE KIDS ARE ALRIGHT)

Épisode semi-mythologique

Scénario : Sera Gamble
Réalisation : Phil Sgriccia

- So let me get this straight. You want to drive all the way to Cicero just to hook up with some random chick?
- She was a yoga teacher. That was the bendiest weekend of my life!

Résumé :

A Cicero, en Illinois, plusieurs « accidents » mortels touchant des pères de famille se sont produits. De plus, leurs enfants commencent à se comporter de manière très inquiétante envers leurs mères. Dean revoit une ancienne conquête de neuf ans, Lisa Braeden, dont Ben, le fils de 8 ans, a de troublantes similitudes de caractère et de goûts avec lui. La jeune femme blonde ayant tué trois des sept péchés capitaux (cf. épisode précédent) fait son retour : elle a bien des choses à dire à Sam…

Quand on vous dit que les enfants pompent toute notre énergie…

La critique de Clément Diaz : 

Supernatural recourt de nouveau au thème des enfants maléfiques via l’intéressant mythe des Changelings, tout en exposant certains thèmes troublants comme l’enfant-roi - un concept très américain - ou le mystère du lien entre l’enfant et la mère qui l’a porté dans son ventre. Tandis que Sam et la blonde font avancer la Mythologie, Dean se voit confronté à une possibilité d’évasion de son sombre présent de chasseur. L’épisode développe de grands moments d’horreur développés davantage par la torture purement psychologique des enfants sur leurs mères que par des effets spéciaux néanmoins très flippants. Cependant, l’implication seulement périphérique des frères à l’affaire ne joue pas en faveur de l’épisode ; de fait, ils apparaissent presque au second plan sans qu’il y ait eu un changement de narration.

Il y a quelque chose d’inquiétant dans l’étonnante facilité qu’ont les enfants acteurs de l’épisode à jouer avec autant de naturel les démoniaques Changelings. L’effroi suscité par ses créatures est rendu violent par le contraste tranchant entre leurs actions infernales d’un coté, et de l’autre leurs dialogues d’enfants adorant leur mère. Sera Gamble se montre adroite en axant son intrigue moins sur les petits monstres que sur les mères infortunées. Cela est particulièrement vrai pour la mère de Katie s’effondrant sous nos yeux jusqu’à commettre l’irréparable… avant de voir sa porte de sortie se refermer brusquement sur elle dans un pur moment d’épouvante. Joindre l’émotion à la terreur, on retrouve bien la marque de fabrique de cette talentueuse scénariste. Le final renoue avec les explications aux poings… et au lance-flammes car Supernatural ne serait pas Supernatural sans ses louches d’excès comme on les aime ! De fait, l’épisode fait beaucoup penser au grand classique de La Quatrième Dimension qu’est C’est une belle vie où un enfant-roi sème la terreur sans espoir de l’arrêter. Le lien si intime entre un enfant et une mère se voit magistralement distordu avec l’enfant tuant son père puis se « nourrissant » de sa mère… littéralement, jusqu’à la destruction. L’épisode semble ainsi poser un regard suspicieux sur le fâcheux concept d’enfant-roi, à qui on exauce tous ces caprices, et qui finalement vous vampirise.

L’épisode trouve humour et encore de l’émotion avec le duo Dean-Ben. Il faut voir la réaction de Dean lorsqu’il percute la coïncidence des dates, et les similitudes entre lui et Ben, de plus en plus hilarantes : fan de gros son qui tâche, déjà amateur de chair fraîche, employant la manière forte quand on lui bave sur les rouleaux… mais aussi son côté désintéressé lors du final. Tout comme Dean, on se demande furieusement ce qui l’en est, d’autant que Jensen Ackles et Nicholas Elia affichent une bonne complicité bien virile. L’aventure fait réfléchir un Dean bien tenté par l’offre sous-entendue de Lisa : et s’il passait quelque temps avec elle et Ben ? Trouver un coin de repos où il aurait affection et responsabilités paternelles, n’est-ce pas tentant pour cet homme qui au fond de lui n’a jamais souhaité qu’une vie tranquille comme l’avait naguère montré What if and what should never be ? Son départ final, évidemment obligé, n’en distille pas moins une certaine mélancolie. Quant à la mystérieuse blonde, celle-ci montre une aisance dans la tchatche en balançant des répliques qui fusent non stop à un Sam un peu largué. Si le coup des révélations successives n’est guère original, elles gardent leur effet jusqu’au pétaradant cliffhanger. Si Katie Cassidy a tendance à surjouer son personnage, elle parvient à transcrire sa malice et son mystère. L’arc narratif de cette saison s’ébauche sous nos yeux, et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on a une furieuse envie d’être déjà sur l’épisode suivant !

La critique d'Estuaire44 : 

The Kids are Alright souffre d’un manque de cohérence de ses Monstres de la Semaine. Que des monstres se substituent aux enfants afin de pouvoir vampiriser la mère, tout en apparaissant selon leur vraie apparence dans la moindre surface réfléchissante ne tient pas la route, même à moyen terme. Toutefois si l’intensité demeure moindre qu’avec les Sept Péchés, la performance des jeunes acteurs parvient à insuffler un malaise allant croissant. A l’instar du film Le Village des Damnés, auquel il fait souvent songer, l’épisode joue joliment du contraste entre enfance et menace diffuse, de même qu’entre l’abomination et sa  dissimulation au sein d’une souriante et ensoleillée banlieue.

De fait on a davantage l’impression que les Bros ont débarqué moins à Sunnydale qu’à Westeria Lane, d’ailleurs Dean se voit confronté à deux redoutables Desperate Housewives lors de la scène la plus drôle de l’opus. L’épisode vaut également  par l’entrée en scène de Ben et Lisa, impeccablement interprétée par Cindy Sampson. La caricature de Dean chez Ben résulte sans doute un peu trop appuyée, mais reste pleine d’humour, là aussi le casting est parfait. L’instinct paternel de Dean évoque avec émotion sa conscience du temps qui passe, de même que son départ, il sait qu’il n’a rien d’autre à offrir à Lisa qu’un prompt veuvage. La blonde démonique continue à développer classiquement un fil rouge, mais a le mérite mettre en valeur Sam dans cet épisode où il demeure en marge.

Anecdotes :

  • Durant la fête d’anniversaire de Ben, on entend Goodnight City, de 40,000 Miles. Dans le restaurant où Sam rencontre Ruby, on entend Just for You, de Lee Lynch.

  • Lisa fait ici son apparition, elle retrouvera Dean lors des saisons 5 et 6. Elle est interprétée par la canadienne Cindy Sampson, initialement candidate au rôle de Bella, finalement attribué à Lauren Cohan. Elle apparaît régulièrement dans des productions fantastiques, comme Le Diable et moi ou Le monstre des marais.

  • Le titre original reprend celui d’une des premières chansons des The Who (1965), devenue l’un des symboles de la contre-culture des années 60. Un épisode de la série Dark Angel (2000-2002) porte également le même titre, Jensen Ackles y interprétait un personnage nommé Ben.

  • La photo de la victime vue dans le journal ne ressemble à rien au personnage de la scène pré générique.

  • Le livre lu par la jeune mère vampirisée par un Changeling est ironiquement The Historian, d’Elizabeth Kostova, roman relatant l’existence de Dracula. Le nom indiqué sur la carte de crédit proposée par Dean à Lisa est Siegfried Houdini, une référence à deux célèbres illusionnistes : Siegfried Fischbacher et Harry Houdini.

  • Eric Kripke venait juste d’être père lorsque la saison 3 débuta, et il souhaitait un épisode impliquant des enfants. La première scène qui lui vint à l’esprit fut celle où la mère de Katie à bout de forces tente de noyer son enfant maléfique en l’enfermant dans une voiture et en la faisant plonger dans un lac. Tout le reste de l’épisode découla de cette scène.
  • Kripke indique beaucoup apprécier avec le réalisateur Phil Sgriccia, qui a l’habitude d’imaginer des détails savoureux qui ne sont pas dans les script. Ainsi, lorsque Lisa sermonne Dean et Ben après que Ben ait donné un coup de pied au garçon qui avait volé son jeu vidéo, ces derniers regardent le sol tout honteux en même temps. De même, à la fête, Dean et Ben se retournent en même temps en voyant passer une mère et sa fille. Ces deux idées sont de Sgriccia.

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3. BARAKA
(BAD DAY AT BLACK ROCK)

Scénario : Ben Edlund
Réalisation : Robert Singer

- I procure unique items for a select clientele.
- Yeah. So you’re a thief.
- No... a great thief.

Résumé :

Pendant que Kubrick, un chasseur fanatique, traque Sam pour le compte de Gordon - toujours en prison - les Winchester apprennent qu’un hangar de leur père où il avait entreposé des objets de toutes sortes a été « visité ». Les voleurs ont pris une boîte contenant un objet maudit : une patte de lapin donnant à son possesseur une chance insolente, mais à l’effet secondaire pervers. Sam et Dean tentent de récupérer l’objet, mais ils ne sont pas les seuls à vouloir y mettre la main…

Où Sam s’en prend plein le carafon… RAS quoi.

La critique de Clément Diaz : 

La martingale de Supernatural consistant à reprendre des épisodes du Buffyerse et des X-Files et à les passer à sa sauce continue de fonctionner. Bad day at Black Rock apparaît en effet comme une reprise de The Goldberg variation, épisode des X-Files où la chance la plus insolente cohabite avec la poisse la plus horrifiante. Là où les X-Files viraient dans un pathos hospitalier hors sujet, Supernatural reste fidèle à son idée et maintient un mélange d’humour et de suspense. La réussite n’apparaît cependant pas complète, le scénario restant très linéaire. Cela est toutefois compensé par une vraie dinguerie des auteurs lors des scènes de chance et de poisse, et l’entrée en scène de la rouée Bela, qui dès cet épisode en fait avaler des vertes et des pas mûres à nos héros.

Le ressort comique de l’épisode est les effets absolument sidérants de la patte de lapin dès lors que son (mal)heureux possesseur déclenche sa magie. A ce titre, le gros n’importe quoi survenant lorsque Sam et Dean déboulent chez les voleurs est du 4 étoiles entre chutes improbables, maladresses impossibles, et balle magique que n’aurait pas reniée le rapport Warren… la chance aveugle de Dean lorsqu’il neutralise les deux affreux est aussi hilarante. Mais avouons-le, si on se fend la pêche devant cet épisode, c’est surtout lorsque Sam devient le punching-ball ultime (normal, c’est Sam), s’enfonçant toujours davantage dans une poisse de plus en plus catastrophique. Même si Sam en reçoit plein la gueule, le crescendo de plus en plus grinçant (mention au gag de la chaussure) finit par devenir franchement loufoque, jusqu’à évoquer les grandes slapstick comedies chères aux américains. Le spectateur jubile alors même que son héros est en danger de se faire tuer par sa mauvaise étoile.

L’autre grand atout de l’opus consiste en ses personnages secondaires. Si Gordon reste sagement derrière les barreaux, on applaudit le guesting de Michael Massee, spécialiste des rôles déviants (24 heures chrono, X-Files…), qui transcrit parfaitement le délire fanatique de Kubrick. Il rayonne à la fois de drôlerie par ses poses caricaturales mais aussi d’effroi par le dévoiement de sa mission de chasseur, à force d’orgueil et de soif de sang. Supernatural frappe encore un bon coup avec l’arrivée de Miss Bela Talbot, interprétée par une Lauren Cohan bien décidée à tirer le maximum de fun de ce réjouissant personnage. Cette voleuse de charme, impitoyable en affaires, et à la vision très large du mot « scrupule », occasionne de mémorables scènes avec nos bros, toujours à deux doigts de perdre la face contre un adversaire aussi malin qu’eux. Pour terminer, mentionnons le décor magnifique du hangar de Winchester Sr. à la fois intime et inquiétant. Il ne manque à cet épisode qu’une histoire plus fournie que cette course au trésor sans rebondissement notable - scènes de chance/poisse mis à part. On peut aussi regretter que l’épisode hésite trop entre sérieux et comédie, ne tirant franchement aucune de ses cartes et restant dans un entre-deux. Mais cet épisode léger n’en remplit pas moins son rôle d’amusante distraction.

La critique d'Estuaire44 : 

Bad Day at Black Rock se montre souvent hilarant  à la lisière de l’épisode décalé. L’idée géniale d’une chance et malchance alternativement maximales créent une succession d‘excellents gags, particulièrement propice au langage visuel. L’épisode fait très cartoon : comme Tex Avery l’avait bien compris, on rit davantage des malheurs que des heureuses fortunes, d’où un rôle de vedette pour Sam. Sa succession de catastrophes et de jérémiades le transforment en loser vraiment irrésistible. Les deux acteurs jouent totalement le jeu ! On n’oubliera cependant pas la mort horrifique du voyou, pour le coup très proche d’un Destination Finale. Les divers pieds nickelés peuplant l’écran sont pittoresques à souhait (mention spéciale à Kubrick, comme jailli d’un film des Frères Coen, impeccablement interprété par Michael Massee), tandis que Gordon prépare le retour de la vengeance qui tue. L’opus soigne décidément ses personnages secondaires (l’un des secrets d’une narration réussie) nous apporte aussi la bonne surprise de la révélation de la très entreprenante Miss Bela Talbot, bien mieux menée que celle de Ruby.

Bela se voit d’emblée définie (Bobby représentant ici un efficace catalyseur du récit) et immergée directement dans l’action, avec des actions et des dialogues qui crépitent. Le potentiel du personnage est immédiatement exploité, au contraire de la damoiselle au couteau qui coupe. La performance de Lauren Cohan semble également davantage convaincante que celle de Katie Cassidy, avec l’accent anglais qui va bien dans les séries américaines pour les félons snobs et classieux. Derrière le glamour du jeu de chat et la souris avec Dean, on apprécie que l’opposition demeure réelle, voire féroce. Dans une série comme Supernatural, Bela n’aurait pu composer une antagoniste crédible sans faire couler le sang. Pas de fleuret moucheté dans l’armurerie, plutôt du gros calibre. On aime aussi beaucoup son appartement, raffiné et de bon goût, c'est-à-dire divergeant quelque peu de la casse de Bobby ou des motels usuels des Bros.

L’extension de l’univers des Chasseurs à celui des traqueurs d’objets magiques produit d’intéressantes étincelles et une concurrence porteuse. Cela aurait pu ouvrir sur une divertissante série dérivée, avec d’autres artefacts aux effets imaginatifs, Bela a assez de potentiel pour tenir les rênes. Le seul regret laissé par l’épisode reste que l’on voit trop la ficelle selon laquelle après avoir associé Ruby à Sam, on associe maintenant Bela à Dean, d’où du grain à moudre pour chacun des héros. Un procédé efficace mais un rien mécanique.

Anecdotes :

  • L’exclamation finale de Dean (son rituel Son of a bitch !) fut improvisée par Jensen Ackles, mais finalement conservée. On peut d’ailleurs voir que Jared Padalecki contient à grand peine un fou rire.

  • Mitch Pileggi (Skinner dans X-Files) devait participer à cet épisode en étant un des deux chasseurs poursuivant Sam. Son emploi du temps entrant en conflit avec celui de la série, l'idée fut rejetée mais ce ne fut que partie reprise : Mitch jouera le grand-père maternel de Sam et Dean, Samuel, dans Au commencement (4-03).

  • On entend Women's Wear de Daniel May à la cafétéria où les Winchester rencontrent Bela. Quand ils retournent chez les voleurs pour obtenir des informations sur Bela, on entend Vaya Con Dios, de Les Paul et Mary Ford

  • Bobby utilise pour la première fois le terme idjits pour qualifier les frères, cela va devenir un leitmotiv du personnage. 

  • Bela prend le pseudonyme de Bela Lugosi, soit le nom d’un acteur d’origine hongroise qui fut une grand vedette du cinéma d’épouvante dans le Hollywood des années 30 et 40. Il est notamment resté célèbre pour son interprétation de Dracula, mais aussi pour sa complicité avec Ed Wood. L’entrepôt de John est loué sous le nom d’Edgar Cayce, un célèbre mystique américain (1877-1945), connu pour ses transes par hypnose et ses pouvoirs psychiques supposés.

  • Le titre original reprend celui d’un film de 1955, célèbre pour entremêler les codes du Western et du Film noir : Un homme est passé, en version française.

  • Lauren Cohan interprète ici pour la première fois Bela Talbot, qui participe à six reprises à la saison. Il s’agit de son premier rôle marquant à la télévision, où elle connaît depuis une très belle carrière (rôles récurrents dans The Vampire Diries, Chuck…).. Depuis 2011, elle incarne Maggie Greene dans The Walking Dead. L’accent british de Bela est naturellement le sien, Lauren Cohan a la double nationalité anglaise et américaine. Ses études se sont déroulées en Angleterre, où elle a également débuté au théâtre. Elle était initialement candidate au rôle de Ruby, finalement attribué à Katie Cassidy. Pour incarner Bela, elle a indiqué s’inspirer de Virginia Baker, le personnage joué par Catherine Zeta-Jones dans le film Haute voltige (1999).

  • Le nom de la jeune blonde apparue dans les deux épisodes précédents est révélé par Sam au début de l’épisode : Ruby.

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4. SIN CITY
(SIN CITY)

Épisode semi-Mythologique

Scénario : Robert Singer & Jeremy Carver
Réalisation : Charles Beeson

- Why don't you relax ?
- Why don't you kiss my ass ?

Résumé :

Les habitants d’une petite ville ont délaissé toute morale et cèdent à toutes les tentations proposées récemment par le puissant Trotter qui a transformé la ville en « cité du pêché ». Sam et Dean sont persuadés que des démons ont pris possession des habitants, mais leur rencontre avec une jolie barmaid va révéler une vérité plus glaçante encore. Alors que Bobby tente de réparer le Colt, il reçoit la visite de Ruby…

En vérité je vous le dis, ce serait un pêché que de manquer cet épisode…

La critique de Clément Diaz : 

 

Ce formidable huis clos incisif s’inspire autant de La Quatrième Dimension par son utilisation du Fantastique à des fins anthropologiques qu’à Buffy contre les vampires pour son mix détonnant d’humour et d’effroi. Cependant, Supernatural passe ces influences à sa propre sauce, plus sombre (et saignante), et nous offre outre une enquête à rebondissements serrés une mémorable rencontre dissertant avec maestria sur la condition humaine… et des démons via un dialogue certes très long, mais jamais lassant par sa force thématique et son tranchant formel. La Mythologie de la série en profite pour avancer. Assisté de Robert Singer, le scénariste Jeremy Carver entre à grands pas dans une série à laquelle il sera l’une des futures têtes pensantes.

L’épisode est axé sur la joute verbale entre Dean et la séduisante Casey, campée par une magnétique Sasha Barrese, jouant certes très avant la carte sexy (poses suggestives en tous genres), mais manifestant surtout un aveuglant talent d’actrice dans la puissance tranquille de son personnage. L’horreur la plus efficace demeurera toujours celle se nichant dans les sombres replis de l’âme humaine, et voir ici les démons ne jouer qu’un rôle de catalyseur, laissant les hommes se perdre de leur plein gré dans les bras trompeurs de la tentation, est bien plus fort que n’importe quel monstre. De fait, l’épisode apparaît comme une version des Monstres de Maple Street, iconique épisode de la Twilight Zone rappelant que le mal ne naît pas de démons ou autres monstres, mais bien des hommes. Pourquoi tourmenter les humains puisqu’ils sont si doués pour se détruire eux-mêmes ? dit en substance cet épisode très pessimiste sur l’humanité. L’épisode n’hésite pas à enfoncer le curseur et à pointer les troublantes similitudes entre l’humanité et les démons, dépeignant ses derniers comme ayant une foi en miroir inversé envers un « Dieu » à eux (Lucifer), détestant pourtant son royaume qu’ils sont avides de quitter… mais aussi capables d’amour fou ou de moments de faiblesse. De fait, l’épisode n’hésite pas à déranger la conscience du spectateur. La confiance naturelle de Dean se lézarde subtilement devant cet insaisissable adversaire qui casse son jem’enfoutisme quant à sa terrible échéance (remarquable finesse de jeu de Jensen Ackles).

Autour de ce duo gagnant, l’épisode brode des situations bidonnantes rappelant les plus grandes créations de Joss Whedon : Dean appréciant beaucoup cette atmosphère de stupre et de corruption, barman proportionnellement bavard au nombre de billets dans sa main, Ruby défiant Bobby de lui tirer dessus… et qui en effet lui tire dessus ! (On t’aime Bobby), Sam pataugeant comme une andouille en jetant de l’eau bénite à tort et à travers, numéros décalés du prêtre regardant avec désabusement ses fidèles sombrer dans le pêché, et dialogues crépitants à la Buffy à tempo enlevé. Mais des frissons passent lorsque Sam se met en mode Terminator devant un Dean stupéfié, comme un rappel du lancinant avertissement de « Yeux jaunes » (Azazel désormais) sur le retour de Sam. La coda électrique avec une mutine Ruby (Katie Cassidy semble avoir trouvé toutes ses marques) ne dissipe pas cette fêlure inquiétante, accentuée par la rigidité soudaine du jeu de Jared Padalecki. Une pleine réussite.

La critique d'Estuaire44 : 

  

Épisode hors des sentiers battus que Sin City, apportant de plus d’importants compléments à la mythologie de la série. Il est bien trouvé d’inverser la perspective entre des humains péchant et se damnant sans l’intervention de personne et des démons plus romantiques et – relativement - plus apaisés qu’à l’ordinaire. L’effet obtenu est plaisamment étrange, le summum se voyant atteint lors de cet impromptu entre Dean et la sublimissime Casey (irrésistible Sasha Barrese, que l’on aurait bien vu en Démon des Carrefours). Ce passage entre duel et connivence, impeccablement dialogué et tenant le spectateur en haleine, constitue le cœur de l’épisode, autour duquel il faut sans doute bâti.

Au passage on apprend ici une quantité assez stupéfiante de faits devenus depuis des éléments de base de l’univers Supernatural, comme le nom Azazel (il était temps !) ou Lucifer pointant le bout de son nez comme Créateur et Dieu des Démons, mais aussi que Sam était bien censé devenir une espèce d’Antéchrist. D’où des interrogations sur les continuelles apparitions de Ruby, ici nettement plus intéressante que d’habitude, en réparatrice de Colt et en cible de Bobby, que l’on ne défi jamais impunément. L’Humanité a-t-elle vraiment besoin de deux Winchester quand elle dispose d’un Bobby Singer ?

La distribution est impeccable avec, bien entendu, un grand coup de cœur pour Don S. Davis, pour l’un de ses tous derniers rôles. De manière amusante, on aperçoit brièvement au bar Julia Benson, qui tiendra le rôle récurrent de Vanessa James dans Stargate Universe. Un épisode Stargate dans Supernatural, Sin City est vraiment à part ! L’humeur répond également présent, notamment avec un Dean en goguette. Le seul regret provient de la dérive supposée de Sam, que l’on trouve artificiellement souligné par l’intrigue (il faut visiblement une autre intrigue que le rendez-vous prochain de Dean). Après tout il paraît simplement normal que Sam passe prestement à l’action face à Dean confronté à deux démons. Si les Bros devaient attendre à chaque démon rencontré d’être bien certain de ceci ou cela, il est fort à parier que la série n’aurait pas atteint onze saisons, et plus si affinités. Eux, leur affaire, c’est le plomb. Bon, on sait bien que le mauvais Chasseur c’est le gars qui a un fusil, il voit quelque chose qui bouge, il tire. Et le bon Chasseur, c’est le gars qui a un fusil, il voit quelque chose qui bouge, il tire, mais ce n’est pas la même chose, quoi.

Anecdotes :

  • Sin City (Ville du péché) est l’un des surnoms de Las Vegas, il s’agit aussi du tire d’une chanson d’AC/DC, groupe souvent repris dans la bande son de la série (album Powerage, 1978).

  • Lucifer et le culte que lui vouent les Démons sont ici évoqués pour la première fois. Il est également révélé que le Démon aux Yeux Jaunes se nommait Azazel.

  • On entend Run Through the Jungle, de Creedence Clearwater Revival, quand les Winchester se rendent au bar pour la première fois. Quand ils y discutent en s’inquiétant pour Richie, on entend Bad Seed, de Brimstone Howl.  Quand une dame tente de mettre le grappin sur Dean, on entend Nikki, de Sasquatch.

  • Le plan aérien montrant l’Impala roulant dans une prairie avait déjà été utilisé lors de l’épisode Skin (1.06).

  • Bobby et Ruby n’auront plus de scène en commun cette saison. Sage est la Démone qui connaît ses limites.

  • Elizabethville est surnommé Margaritaville par Sam. Margaritaville est un tube de Jimmy Buffett (1977), évoquant la douceur de vivre au soleil en sirotant des cocktails. La chanson est également célèbre pour avoir été reprise dans de très nombreuses publicités.

  • Sam s’étonne que Dean boive désormais des Hurricanes. Il s’agit d’un cocktail très doux de la Nouvelle Orléans, composé, de sirop de fruit de la passion, de jus d’agrumes et de rhum, sur glace. Il été créé dans le Quartier Français, durant les années 40.

  • Casey déclare que Dick Cheney - vice-président des États-Unis sous le deuxième mandat de George W. Bush au moment de l’épisode - a une place de parking déjà réservée à son nom en Enfer. Tout comme sa devancière X-Files, Supernatural semble de fibre plutôt démocrate !
  • Sam surnomme Dean « Hef » lorsque ce dernier se demande s’il y a des activités démoniaques dans le quartier de South Beach à Miami (réputé pour sa clientèle LGBT et son ambiance très « hot »). Hef est le diminutif de Hugh Hefner, fondateur du magazine sexy Playboy. De même, « Pabst » est le diminutif de Pabst Blue Ribbon, une marque de bière.
  • Un tueur est prénommé Tony Perkins. Une allusion à Anthony Perkins, interprète de Norman Bates dans le Psychose d’Alfred Hitchcock.
  • Sasha Barrese (Casey) reste avant tout connue pour le rôle de Tracy Garner dans la trilogie Very Bad Trip, débutée deux ans après le tournage de l’épisode. Elle parle couramment le français, car elle séjourna longtemps à Paris, où sa mère, le mannequin Katherine Barrese, accomplit la majeure partie de sa carrière.

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5. IL ÉTAIT UNE FOIS…
(BEDTIME STORIES)

Épisode semi-mythologique

Scénario : Cathryn Humphris
Réalisation : Mike Rohl

- Remember Cinderella? The pumpkin that turns into a coach and the mice that become horses?
- Dude, could you be more gay?

Résumé :

Dans un chantier de construction, trois frères sont attaqués par « quelque chose » qui les mutile sauvagement. L’unique survivant raconte à Sam et Dean qu’il s’agissait d’un être humain. D’autres meurtres bizarres ont lieu ; à chaque fois, une petite fille est sur les lieux, contemplant le spectacle avant de disparaître. Sam comprend que les meurtres sont liés à des contes de fées du folklore. Mais qui est la petite fille ?… À la fin de l’enquête, Sam va tenter de briser le marché infernal qui condamne son frère…

Des contes pour faire dodo… éternellement.

La critique de Clément Diaz : 

L’originalité de cet épisode se voit grevé en ce qu’Eric Kripke avoue ici trop sa dette envers Buffy, puisqu’il ne fait rien moins qu’en mixer deux épisodes : Nightmares (pour l’enfant malade aux pouvoirs psychiques), et Gingerbread (pour les personnages de contes pas gentils). Si le tout fait penser à une amusante version comico-saignante de la future Once upon a time, le traitement particulier de la série ne compense pas suffisamment. De plus, le scénario s’épuise rapidement, laissant place à une litanie de meurtres répétitive que nos bros n’arrêtent qu’à la fin, une situation familière aux amateurs des Avengers, mais qui pour une série contemporaine, passe comme une paresse scénaristique. Bedtime stories souffre de plus d’être mal architecturé, l’enquête s’arrêtant au bout de 30 minutes pour ensuite opérer un virage mythologique totalement déconnecté. D’où l’impression de regarder deux épisodes raccordés à coup de ficelles aussi grosses que des câbles. Malgré ce choix, Cathryn Humphris parvient à tirer d’excellentes mises en scène de meurtres, injecte une sincère émotion autour du personnage du docteur, et rafle finalement la mise lors du duo final, retrouvant une partie de l’éclat du mémorable affrontement entre Dean et la démone dans Crossroads blues.

Les auteurs ont des difficultés à mettre en place l’exposition, il faut plusieurs allers-retours consécutifs entre meurtres et interrogatoires pendant tout le 1er acte pour enfin parvenir à poser tous les enjeux, tandis que l’enquête des Weuh est réduite à la portion congrue, usant de raccourcis faciles (comment Dean trouve-t-il la maison du monstre ?). Cependant, l’épisode percute fort en rappelant explicitement toute la cruauté et le macabre afférents aux contes originaux, bien avant d’être édulcorés et dépouillés de toute dimension psychanalytique pour devenir des bluettes sucrées. C’est dans cette version « light » que Disney vendit et vend toujours ses adaptations filmées. A ce titre, l’épisode de Supernatural s’impose comme l’anti-Disney en rendant aux contes leur tranchant originel, mâtiné de son humour gore comme on l’aime toujours ; un choix bien plus tonique (mention à Hänsel et Gretel passant au hachoir, au sens propre bien entendu). Le thème de l’esprit vengeur est ici traité sous un angle plus émotionnel grâce au bouleversant mais chimérique espoir du médecin (excellent Christopher Cousins). Montrer un esprit ne pouvant trouver le repos à cause de quelqu’un en plein déni de réalité le « retenant » est une merveilleuse idée (on songe au glaçant Death ship de la Twilight Zone), permettant aux adieux finaux de vibrer d’émotion.

On apprécie qu’après avoir dominé tant d’épisodes que Dean laisse toute sa place à Sam, clairement le leader de l’enquête, se contentant de quelques vannes et de lever la paluche contre le « grand méchant loup ». Le virage mythologique retrouve les scènes de pactes diaboliques qui ont toujours réussi à la série. Sandra McCoy campe un démon aussi stoïque que perfide, connaissant très bien un Sam souffrant de la présence de Dean qu’il porte comme un fardeau. Ses dialogues sont sur le fil du rasoir. La tension grimpe à des hauteurs fulgurantes alors que Sam voit progressivement son espoir s’écrouler devant l’évidence. Son coup de sang final exprime simultanément sa défaite et que décidément, il y a quelque chose de pas clair en lui depuis qu’il est revenu. La mission « saving private Dean » semble bien sans espoir

La critique d'Estuaire44 : 

Dans un premier temps Bedtime Stories (encore un titre en or massif) se présente comme un  épisode décalé, drôle et imaginatif. Cette relecture des classiques des contes de fée à la sauce Supernatural sonne tout à fait juste. De fait, ces récits contiennent de nombreux éléments horrifiques et que les différents sketchs suscités trouvent toujours le parfait équilibre entre audace iconoclaste, respect des idées maîtresses de l’œuvre et rigolade féroce. Mention spéciale pour la maison en pain d’épice et sa charmante hôtesse. On se situe plus près de Grimm que cette relecture astucieuse de Disney que constitue Once Upon A Time. Christopher Cousins incarne avec sensibilité le médecin et poursuit l’amusante présence de figures de Stargate SG-1 après l’opus précédent (il y incarna le mari de Samantha Carter dans la trame temporelle des Aschen). On regrettera cependant que la situation se résolve trop rapidement et aisément : malgré l’émotion insufflée par cette évocation de la légende de Blanche Neige (qui dut effectivement son salut au Chasseur !), on revient en fait à un scénario classique.

 L’impression d’un atterrissage prédomine, d’autant qu’ultérieurement la série saura aller beaucoup plus loin en matière de fantaisie concernant fées et farfadets. Ici la rupture avec le danger de Formula Show que comporte le concept de Monstre de la semaine ne s’avère que partiel. L’exécution à froid du Démon des Carrefours permet à ce savoureux et sulfureux personnage de sortir par la grande porte (en attendant la relève), tout en crédibilisant quelque peu la thèse d’un Sam évoluant vers l’Obscur, guère convaincante jusqu’ici. En contraste Ruby s’affirme comme l’unique chance de Dean, cela lui confère un intérêt supplémentaire. Il est toutefois à regretter que l’aspect mythologique de l’épisode résulte à ce point disjoint du corps du récit, comme un sketch à part, on préfère qu’un loner abordant le fil rouge de la série sache plus finement entremêler ses thèmes.

Anecdotes :

  • Un troublant clin d’œil : Supernatural s’inspire on le sait de Buffy et d’X-Files. Or, dans Buffy, Warren, joué par Adam Busch, assassine Tara, jouée par Amber Benson. Or, les deux acteurs formaient alors un couple ! Dans les X-Files, Krycek (Nicholas Lea) participe à l’assassinat de Melissa Scully (Melinda McGraw), or les deux acteurs étaient aussi ensemble ! Du coup, on peut se demander si le choix de Sandra McCoy comme victime de Sam est vraiment involontaire vu qu’elle était alors fiancée à Jared Padalecki ! Les hommages de Supernatural à ces modèles prennent parfois des expressions bien étranges...
  • Sandra McCoy (le Démon des Carrefours) avait rencontré Jared Padalecki sur le tournage du film Cry Wolf, en 2005. Ils se séparèrent en 2008. Elle mène une double carrière d’actrice et de danseuse et fut une cheerleader des Los Angeles Lakers.

  • Doth protest too much if you ask me déclare le Démon des Carrefours à Sam. Il s’agit d’une citation d’Hamlet, acte 3, scène 2 : The Lady doth protest too much.
  • Dean indique avoir vu une version pornographique de Blanche-Neige (il ne précise toutefois pas laquelle), mais jamais le film iconique de 1937. Il y a aussi une allusion à Mischa Barton et son rôle dans Le Sixième Sens.
  • Les Winchester se présentent comme étant les agents Plant et Page. Jimmy Page et Robert Plant sont respectivement le guitariste et le chanteur de Led Zeppelin. Sam et Dean prennent toujours comme pseudonymes des figures du Rock.

  • Les contes référencés au cours du récit sont : Les trois petits cochons, Hansel et Gretel, le Roi Grenouille, Cendrillon, Le petit Chaperon rouge et Blanche Neige et les Sept Nains.

  • Le Démon des Carrefours apprend à Sam que le contrat passé par Dean appartient à son supérieur. Il s’agit en fait de Lilith, figure montante parmi les Démons et qui s’impose après le vide laissé par la chute d’Azazel. Elle va devenir l’ennemie récurrente des Winchester, en saisons 3 et 4. Par la suite, la direction des Démons des Carrefours et de leur lucrative activité reviendra à son bras droit, Crowley, à qui une belle carrière est promise.

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6. LE VAISSEAU FANTÔME
(RED SKY AT MORNING)

Scénario : Laurence Andries
Réalisation : Cliff Bole

- You know, Dean, when this is over, we should really have angry sex.
- Don't objectify me.

Résumé :

Plusieurs morts par noyade particulièrement improbables viennent de se produire au port de New York… mais sur la terre ! Chacune des victimes avait auparavant vu un vaisseau fantôme sur la baie. Sam et Dean doivent trouver le lien entre les victimes, mais pour se débarrasser de l’esprit assassin, ils vont devoir composer avec une vieille femme très « cougar », et avec Bela, venue ici « pour affaires »…

Quand Bela Talbot passe, les Win’ sont dans la mélasse.

La critique de Clément Diaz : 

Supernatural reprend un autre thème bien connu du Fantastique, et d’ailleurs déjà exploité par sa devancière X-Files (Død Kalm), mais choisit de le réduire à l’état de McGuffin pour construire une hilarante screwball comedy dans les règles de l’art : joutes verbales à 300 à l’heure, guerre des sexes avec domination féminine, pluie de sous-entendus sexuels, ambiance de boulevard... L’indomptable Bela fait un véritable one-woman-show, renvoyant dans le décor notre viril duo ici rapidement largué. Les amateurs d’horreur auront droit à leurs meurtres bien horribles, malgré un dénouement anticlimatique, heureusement adouci par une hilarante coda.

Les premières scènes horrifiques s’effacent vite devant une irruption retentissante de la comédie, amenée par l’explosive Bela. La dame a la rancune tenace et le challenge dans le sang. Sa prise de pouvoir sur nos deux frérots devenant vite de pauvres pantins, distancés par son efficacité et son culot, déchaîne une furia comique absolument trépidante, débutant par le coup déjà énorme de l’Impala à la fourrière (Dean passe à deux doigts de la crise cardiaque). Par suite, Bela, dans une robe noire à baver, entraîne Dean - engoncé dans un smoking qui doit bien lui mettre la honte - dans un vrai carnaval vaudevillesque, l’humiliant dix fois par minute à coup de répliques assassines (les répliques claquent à vitesse hallucinante), tout en enchaînant gags, quiproquos, et sous-entendus sexy à hurler de rire. La dame joue également de son avantageux physique pour arriver à ses fins : répartie, sensualité, absence de remords, efficacité, détermination… l’arsenal de Bela est immense. L’ultradynamique Lauren Cohan se montre d’un charme et d’un entrain irrésistible, moteur parfait de cette échevelée comédie. Dean se montre tout aussi drôle en échouant systématiquement à reprendre l’avantage. Sam est très bien accompagné, pris dans les filets d’une cougar de plus en plus entreprenante, enchaînant propositions indécentes et mains baladeuses à vitesse grand V. Grand bravo à Ellen Geer de nous tuer plusieurs fois de suite de la sorte. Leurs personnages faisant figure d’abrutis dévirilisés à côté de cette paire de dames en or, on est ravis que Jared et Jensen jouent le jeu avec un festival de mimiques exaspérées.

Par suite le virage dramatique se montre moins convaincant, le final dans le cimetière est très hâtif, se limitant à une invocation simplement perturbée par un peu de vent, le baddie n’étant même pas éliminé par notre trio. On est toutefois content que Bela ravale son ego quand l’ironie du sort lui tombe dessus, et lâchant un « I need help » du bout des lèvres, parce que bon, il faut bien que les bros sauvent un peu la face quand même ! Cela dit, Bela reste une forte tête et non, elle ne rampera pas à leurs pieds, et se paye même le luxe de s’en sortir sans la moindre excuse ; bien sûr, on devine qu’elle ne tirera aucune leçon, et continuera d’emprunter sa voie sinueuse bien parallèle au droit chemin. Ce happy end cynique conclut avec éclat cet épisode très drôle, révélateur de la place désormais plus importante de l’humour au sein de la série.

La critique d'Estuaire44 : 

Red Sky at Morning représente sans doute le meilleur épisode Bela (hormis la bouleversante conclusion arrivant bien trop vite du fait de la grande grève des scénaristes). Elle apparaît ici au meilleur de sa forme, sublime en robe de soirée et Englishness à fond les manettes, se délectant à titiller Dean, qui d’ailleurs manifeste à l’occasion du répondant. La relation passablement tordue s’instaurant entre eux deux nous vaut quantité d’hilarants échanges, avec des réparties en or massif. On apprécie que Bela n’en ressorte pas édulcorée pour autant. Son aspect Dark Side n’est jamais mis sous le boisseau, bien au contraire avec la révélation encore partielle de son passé. Le gag sacrilège de l’Impala se montre transgressif à souhait, agrémenté de l’irrésistible mine agacée des Bros face au retour de Bela. On peut estimer qu’ils auraient encore préféré retrouver Gordon, au moins avec lui ils peuvent y aller franco.

Miss Talbot demeure décidément la grande rencontre de cette saison parfois minorée. On continue de penser qu’elle aurait pu idéalement lancer une série dérivée autour des traqueurs de reliques, en Arsène Lupin du surnaturel (crossovers électriques garantis). L’opus se voit décidément marqué par des couples dysfonctionnels et hilarants, les tribulations de Sam avec le cougar mature valant le coup d’œil. Ellen Geer et Lauren Cohan sont épatantes, chacune dans son registre. L’aspect horrifique n’est pas négligé pour autant, avec des exécutions bien sordides et de très suggestives apparitions du simili Hollandais Volant. Ténébreuses ou ensoleillées, les scènes d’inspiration maritimes sont magnifiques. Elles apportent une spécificité à l’épisode, les Bros s’attachant de coutume à l’Amérique profonde, loin des côtes et de leurs mégapoles. Malgré la présence de l’eau, des effets variés empêchent tout doublon avec Dead in the Water, en saison 1.

Anecdotes :

  • La très british Bela Talbot prend un accent nettement plus américain quand elle interroge le témoin.

  • Sam surnomme Gert «Mrs. Haversham ». Cette figure du roman Les Grandes Espérances de Charles Dickens (1861) est très intéressée par le jeune héros, Pip. Sam commet toutefois une erreur, car il s’agit de « Miss » Haversham. Elle ne s’est jamais mariée, après avoir été abandonnée devant l’autel étant jeune.

  • Le sel est censé être un poison pour les esprits, mais le navire fantôme semble naviguer sans problème particulier sur l’eau de mer.

  • Dean est très amateur de massages thaï (on présume moins pour le massage lui-même que pour la « finition »).
  • Eric Kripke a indiqué qu’il s’agissait d’un des épisodes qu’il appréciait le moins cette saison. La réception globalement négative du public y est peut-être pour quelque chose, les fans n'ayant pas apprécié la grande place donnée à Bela, et plus généralement, le personnage lui-même, jugé trop « supérieur » et rosse pour les bros. Ce fut d'ailleurs une raison majeure de l'évacuation du personnage en fin de saison. Dans l’épisode The Monster at the End of This Book (4.18), le Prophète Chuck, auteur des romans Supernatural, indiquera que cette histoire n’est pas sa meilleure.

  • On découvre que Bela a provoqué la mort de ses parents, l’événement sera révélé plus en détail lors de l’épisode Time Is On My Side, cette saison.

  • Quand Dean et Bela arrivent à la réception, on entend Dream of Tomorrow, de Light Orchestral Moments Symphony. Quand Sam et Gert dansent, on entend d’abord Tango Pasion, de Daryl Griffith, puis Tango de Amor, de Bertoli Bruno.

  • Le titre original fait référence à une tradition de dictons issus de la culture populaire et concernant le ciel rouge du crépuscule ou de l’aurore. En France l’on dit notamment « Ciel rouge le soir laisse bon espoir, ciel rouge le matin, pluie en chemin ». Dans le monde anglo-saxon et dans l’environnement marin un proverbe dit également Red sky at morning, sailor's warning, red sky at night, sailor's delight. Le ciel rouge du matin est considéré comme un mauvais présage météorologique pour les marins, à l’inverse de celui du soir.

  • Parmi les mots latins prononcés par Sam lors de son invocation, on distingue « Castiel ». L’Ange du même nom va devenir un allié récurrent des Frères Winchester, à compter de la prochaine saison.

  • Ellen Geer (Gert) se fit connaître sur les planches durant les années 70. Elle y consacre la plus grande part de sa arrière, également comme directrice de théâtre ou enseignante à l’UCLA. Elle effectue néanmoins de nombreuses apparitions au cinéma (Harold et Maude, 1971) et à la télévision : Les rues de San Francisco, Drôles de Dames, Dallas, Clair de Lune, Urgences, Desperate Housewives... Elle incarne ainsi Piper âgée dans Forever Charmed, l’épisode final de Charmed (2006).

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7. ROUGE SANG
(FRESH BLOOD)

Scénario : Sera Gamble
Réalisation : Kim Manners

- Sam Winchester is the Antichrist.
- Ooh. I’d heard something about that…
- It’s true.
- … from my good friend, the Easter Bunny. Who'd heard it from the Tooth Fairy. Are you off your meds?

Résumé :

Gordon Walker s’évade de prison grâce à son complice Kubrick. Il est plus que jamais décidé à tuer Sam qu’il pense être le futur Antéchrist. Alors que Sam et Dean sont sur les traces d’un vampire qui enlève des jeunes femmes pour les transformer, ils tombent sur Walker…

Dans Supernatural, on fait le don du sang, mais celui des autres.

La critique de Clément Diaz : 

Dans le bonus du finale de la saison 2, Sera Gamble avait déclaré qu’elle voulait toujours plus de gore dans Supernatural. On ne peut pas lui reprocher de ne pas tenir ses promesses, car c’est un vrai festival qu’elle concocte à l’occasion de Fresh blood. La scénariste y va toutefois au culot et décide de centrer l’épisode sur Gordon, soit un personnage foncièrement antipathique ; ne reculant devant rien, elle force le spectateur à éprouver une certaine compassion envers cet opposant taré et assoiffé de sang (à tous les sens du terme) lorsqu’elle le précipite plus bas que les enfers. Les petits coucous d’une Bela toujours aussi peu altruiste - bon, allez, en léger léger progrès - épicent cet épisode goulu.

La visite de l’aussi pulpeuse que sympathique Mercedes McNab dans Supernatural donne une idée de la différence existant entre la série et le Buffyverse : chez Whedon, la sympathique Lucy aurait sans doute bénéficié de la compassion de la Tueuse. Par contre, chez les bros, on ne fait pas vraiment dans le sentiment, alors ils regrettent ce qui va se passer, mais ça se terminera quand même par une décapitation en bonne et due forme. Dans un rôle opposé à la loufoque Harmony, Mercedes McNab rend palpable tout le désespoir de son personnage, posant aux W2 un de ces dilemmes éthiques qui fait bien mal. Si l’épisode doit composer avec un tempo trop retenu et un certain éclatement de l’intrigue, Gordon fascine par sa volonté sincère mais dévoyée de se battre contre le Mal, sa détermination atteignant les rivages de la folie, et sa haine flamboyante envers les frérots, ferment du développement de son esprit névrotique (la face-à-face avec le vampire est une perle de dialogues au fer rouge).

Le cataclysmique rebondissement central achève de le déshumaniser en lui faisant perdre ce qui restait d’humain en lui, tout en rendant son affrontement avec les Weuh plus intense et violent. Faire voir l’épisode de son point de vue permet de s’immerger pleinement dans une folie décuplée par sa transformation, jusqu’à briser sa règle de ne pas tuer d’innocents ; signe que le monstre en lui a désormais pris le pouvoir sur ce qui pouvait rester d’humain (byebye Kubrick). Le final du hangar se montre paroxystique à souhait, la démence de Gordon transpirant à chaque mot qu’il décoche comme autant de flèches à Sam, jusqu’à une bagarre d’une saisissante violence et une exécution rentrant dans le top 10 des morts les plus sanguinolentes de la série. Sterling K. Brown exprime comme personne cette chute sans retour dans les ténèbres, il quitte la série avec tous les honneurs après cette interprétation particulièrement ravageuse.

Les quelques pointes de respiration sont données par la toujours pêchue Bela. Il est visible que Lauren Cohan s’éclate comme une gamine dans ce rôle réjouissant : la scène pré-générique est un modèle du genre, la dame ne se laissant pas impressionner par le révolver de Gordon, et lui extorquant même un sacré paquet d’oseille. Le rétropédalage la voyant regretter son erreur initiale et se débattre pour la réparer est assez gros, on sent un peu trop que les auteurs veulent orienter le personnage vers plus de sympathie, mais Cohan le fait sans perdre de son mordant à Bela. On est aussi très sensible lorsque Dean tombe enfin le masque de l’insouciance lorsque Sam le force à avouer sa terreur de son échéance fatale au cours d’une des scènes les plus remarquables entre les deux frères. Kim Manners multiplie les scènes gore à base de corps étêtés sauvagement, atteignant un taux d’hémoglobine inhabituellement élevé, y compris pour les standards de la série ; le reste du temps, sa dynamique mise en scène enferme chaque scène au sein d’ombres aussi opaques que glaçantes.

La critique d'Estuaire44 : 

Fresh Blood apporte un nouveau succès à cette troisième saison, même si décidément les Vampires de Supernatural sont plus glauques et pitoyables qu'effrayants et charismatiques. Le chef de clan résulte assez pathétique, en plus de mauvais stratège. La facilité avec laquelle Gordon sort de prison apparaît également trop expéditive. Quand c'est Faith qui fracasse sa geôle, on l’admet, mais les Chasseurs n'étant pas des entités légendaires, on apprécierait ici un peu d'explication. Idem pour l’embuscade tendue à Bela, même si on apprécie que celle-ci apporte son grain de sel, toujours aussi cynique et fine mouche. Tout ceci confirme que la thématique police/prison est globalement inopérante dans Supernatural.

Mais l'effarante prestation du toujours excellent Sterling Brown en Gordon vampirisé sauve l'affaire concernant les Fils de la Nuit. L'impact est total, d'autant qu'il s'accompagne de vue subjective et de scènes bien Gore qui tache au plafond. Le voir tuer son meilleur (seul) ami, le plus bête que méchant Kubrick, rajoute encore à l'horreur. Il est agréablement troublant et pervers que l'ultime étincelle d’humanité à laquelle il se raccroche soit sa pulsion de meurtre envers Sam. De son côté ce dernier commence enfin à devenir réellement inquiétant. Un épisode abyssal, où même l’émouvante scène autour scène de l'Impala s’inscrit dans un panorama funèbre. L’association gagnante Sera Gamble / Kim Manners fonctionne à plein et donne lieu à un opus pleinement intense.

Bien entendu l’épisode achève d’emporter l’adhésion par le revival Buffy qu’il met en place avec le guesting enthousiasmant de Mercedes McNab, qui campe une Vampire à la fois semblable et différente d’Harmony, avec une étonnante conviction pour un registre plus tragique qu’à l’ordinaire. Une nouvelle superbe prestation après celle d’Amber Benson dans Bloodlust. Le fil rouge se poursuit tout au long du récit, avec les Bros en chasse au Spider, soit le Bronze local, avant d’intervenir dans la proverbiale ruelle où le Vampire a entraîné sa victime, ou encore Sam tranchant la tête de Gordon au fil de fer, tout comme Buffy pour le Turok-Han dans Showtime.

Anecdotes :

  • L'épisode marque le décès du personnage récurrent de Gordon, décapité par un Sam un peu moins léger que d'ordinaire.

  • Mercedes McNab (Lucy) incarnait déjà une Vampire dans les séries Angel et Buffy, avec la très blonde Harmony. Mercedes McNab avait déjà travaillé avec Kim Manners sur la très divertissante série The Adventures of Brisco County Jr. (1993-1994), entremêlant Western parodique et Science-fiction. Elle conserve un bon souvenir de son expérience sur Supernatural : Kim was super, he just made me feel comfortable and at home.  And Jared and Jensen were super nice. They were really generous actors… and not to hard on the eyes !

  • Sam dit plus tard à Dean I want you to stay out of the harm’s way, une réplique évoquant curieusement un épisode d’Angel : Harm’s way, où le personnage récurrent d’Harmony Kendall, interprétée par Mercedes McNab, avait le premier rôle. Le prénom Lucy est peut-être un clin d’œil à Lucy Westenra, personnage du roman Dracula de Bram Stoker, transformée en vampire à son insu.

  • On peut voir que le sang commence à couler avant que Dean n’entaille son bras.

  • Quand Sam et Dean sortent du Spider pour chercher le Vampire, on entend Seven Minutes in Heaven, de Dave Feldstein. Quand les Winchester réparent l’Impala, on entend Crazy Circles, de Bad Company.

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8. LE FESTIN DU PÈRE NOËL
(A VERY SUPERNATURAL CHRISTMAS)

Scénario : Jeremy Carver
Réalisation : J. Miller Tubin

- Well, for Bobby, we're not dealing with the anti-Claus.
- What'd Bobby say?
- Uh, that we're morons.

Résumé :

Il y a un an, un homme déguisé en Père Noël est « aspiré » par sa cheminée sous les yeux de son fils. A l’approche de Noël, ce genre d’événements recommence. Sam et Dean émettent l’hypothèse qu’un « anti-Père Noël » est à l’origine de ses enlèvements, mais la vérité va être plus spectaculaire…

Douce nuit, sanglante nuit,
Sur le toit, Santa cuit.
Le carnage annoncé s'accomplit.
Des cadavres sur le sol s’ensuivent
C’est un Noël pourri.
C’est un Noël pourri.

La critique de Clément Diaz :


Tradition incontournable de toute série américaine qui se respecte, on est ravis que Supernatural se plie à l’exercice de l’épisode de Noël, évidemment dans son ton bien à lui (méchants cramés, meurtres gore…). Mais si le ton particulier de la série irrigue tout l’épisode, le scénario ne suit pas, son intrigue rapiécée et ses investigations vaines ne se voyant pas aidés par de longs flashbacks sur la jeunesse des bros très fastidieux. L’épisode se voit heureusement sauvé par son très décalé couple de vilains inaugurant un type d’adversaires assez allumés de Supernatural : les dieux païens cherchant à retrouver leur gloire passée depuis que le Dieu des religions monothéistes les a prié de faire place nette. L’affrontement avec les bros se révèle aussi hilarant que saignant.

Malgré les scènes d’enlèvement filmées avec une sophistication fluide par J.Miller Tubin, Le rythme poussif de l’enquête ne provoque guère d’étincelles - à l’exception d’un massacre dans les règles de l’art de Silent Night perpétré par nos bros toujours aussi poilants quand ils improvisent avec une absence complète de brio. Notre duo assure en temps normal le spectacle, mais ici il ne pétille pas le moins du monde, l’on croit voir les avatars les plus classiques des enquêteurs policiers, aux dialogues purement fonctionnels. Le scénario de Carver tournant court, on ne peut s’empêcher de penser que le scénariste Ben Edlund, d’habitude si foisonnant de bonnes idées, s’est ici fourvoyé en lui proposant de le rallonger par des flashbacks ternes sur l’enfance des Winchester, n’apportant aucune valeur ajoutée à ce que proposait Something wicked en saison 1. La corde mélodramatique se voit tirée bien trop fort autour de Sam découvrant ses traumatismes le soir de Noël, tandis que le jeune Dean ne sort pas du cadre du « frère imbuvable », là où Something wicked se montrait plus nuancé, sans que la prestation des jeunes comédiens (très bien choisis) ne soit à mettre en cause. Ces flashbacks s’étirent sur l’équivalent d’un acte entier de l’épisode, cette excroissance prend ici bien trop de place sur l’enquête, il est vraie écrite à minima.

Heureusement, la série sait s’y prendre avec ses monstres de la semaine, et avec cet aimable couple de dieux païens complètement frappés de la caboche, on trouve enfin l’étincelle que l’on cherchait désespérément depuis le début de l’enquête. Ce charmant couple fait un joyeux festival de décalages : sourires light/atelier de puzzle humain à la cave, table de Noël/invités ligotés et passés au scalpel, titre de dieux/déguisement d’habitants d’Amérique profonde intégrés sagement dans la communauté, et surtout de grosses tranches de délires pseudo-religieux, notamment sur ce « Jésus » qui a fait fondre leur business. Une fois de plus, l’on peut distinguer une influence de Buffy, car ils n’évoquent rien moins qu’Anyanka (davantage que la pince-sans-rire Illyria), démon sanguinaire rappelant souvent combien elle s’emmerde dans ce corps humain où elle est condamnée à demeurer, et ses pointes comiques sur les monstruosités qu’elle commettait jadis. Mais l’effet fonctionne parfaitement dans une série fonctionnant pas mal sur la mégalomanie des gromonstres. À l’opposé de la lourdeur des flashbacks, la coda rayonne d’une joie tranquille avec ce réveillon passé par les deux frères ensemble, dans une vibrante complicité, sans doute l’un de leurs rares moments de bonheur, et où enfin l’on sent l’esprit de Noël planer sur cet épisode.

La critique d'Estuaire44 : 

Passage incontournable que l'épisode spécial Noël, mais souvent casse-gueule, particulièrement pour les séries fantastiques. Sans atteindre le niveau d’un chef-d'œuvre comme le Amends de Buffy, le Christmas Carol du Docteur ou How the Ghosts stole Christmas des X-Files, A Very Supernatural Christmas remporte néanmoins la gageure, grâce à une introduction à la mise en scène d'une remarquable qualité mais aussi et surtout grâce au recours à l'un des meilleurs filons de Supernatural : les dieux païens. Tout en impliquant de réjouissantes références au folklore (notamment autour des sacrifices humains...), nos amis mégalomanes permettent également de laisser totalement le champ libre à l’imagination.

C'est le cas ici avec ce couple de serial killers divins totalement barrés, se complaisant dans une mordante satire de l'American Way of Life des années 50. Les acteurs jouent le jeu à fond, tandis que l'on verse franchement dans un Gore des plus hilarants, façon Grand Guignol rigolard. Joyeux Noël ! Leur mise à mort s’avère nettement plus Rock’n Roll que celle de l’arbre du Scarecrow,  en saison 1 On regrettera le mélo quelque peu à gros bouillons induit par les flash-backs, même si les jeunes comédiens se montrent performants. La scène finale, voyant les Bros se construire un (dernier) Noël de bric et de broc dans un de leurs sempiternels motels, se montre par contre très émouvante.

Anecdotes :

  • Durant le rituel païen, Sam est blessé au bras droit, mais, à la fin de l’épisode, le pansement est sur le gauche.

  • Pour une fois, La bande sonore de l’épisode se compose pour une fois de chants de Noël traditionnels : The Twelve Days of Christmas, All Because of Mr. Santa Claus, Jingle Bells, Silent Night, Joy to the World, O Come All Ye Faithful, We Wish You a Merry Christmas, Have Yourself a Merry Little Christmas.
  • Dean évoque Dick Van Dyke à propos du tueur des cheminées. Il s’agit de l’acteur qui interprétait Bert le ramoneur dans Mary Poppins. Comme indiqué sur la porte et par les peintures,  Dean et Sam résident au motel dans The Thomas Kinkade Suite. Il s’agit d’un clin d’œil à Jared Padalecki, qui devait interpréter peu de temps plus tard ce célèbre peintre pastoral (1958-2012), lors du film Christmas Cottage (2008). Le film raconte la création de cette peinture du même nom, l’une des plus célèbres de l’artiste. Le couple divin est surnommé Ozzie and Harriet par Dean. Il s’agit d’une référence à la sitcom au long cours The Adventures of Ozzie and Harriet (ABC, 1952-1966), restée fameuse pour sa représentation de la famille américaine idéale des années 50. Dean évoque également les Cunninghams, la famille protagoniste de la série Happy Days (1974-1984). En retour, Edward Carrigan compare les Winchester aux Hardy Boys, une série de romans à succès narrant les enquêtes d deux jeunes détectives, les frères Frank et Joe Hardy. La saga a été lancée en 1927 et demeure toujours publiée aujourd’hui.

  • Sam déclare que la soudaine passion de Dean pour Noël le fait ressemble à Bing Crosby. le plus succès le plus fameux du crooner est en effet White Christmas (1942). Apparaissant dans le film L’amour chante et danse, elle eut l’oscar de la meilleure chanson originale et est aujourd’hui vendue à plus de 50 000 000 d’exemplaires ce qui fait d’elle le plus grand hit jamais enregistré.

  • Les flash-backs nous révèlent l’origine de l’amulette de Dean, Sam la lui a offerte, après l’avoir reçue de Bobby et alors qu’il la destinait à John. Surnommé Samulet par les fans, l’artefact a fait l’objet d’intenses débats parmi le public de Supernatural, à propos de sa nature de la mythologie antique à laquelle elle se réfère. Dean finira par la jeter, après qu’elle ait échoué à permettre à Castiel à trouver Dieu (Dark Side of the Moon, 5.16). Lors de l’épisode 200, Dean explique son geste : It never really worked. I don't need a symbol to remind me how I feel about my brother.

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9. LES REINES DU SABBAT
(MALLEUS MALEFICARUM)

Épisode Mythologique

Scénario : Ben Edlund
Réalisation : Robert Singer

Yes, the same thing will happen to you. It might take centuries, but sooner or later, Hell will burn away your humanity. Every hell bound soul, every one, turns into something else. Turns you into us, so, yeah, you can count on it. […] That's what happens when you go to Hell, Dean. That's what Hell is. Forgetting what you are.

Résumé :

Janet Dutton meurt dans sa salle de bains en crachant abondamment sang et dents. Les Winchester comprennent rapidement que des sorcières sont à l’œuvre, mais ne réalisent pas encore qu’ils vont devoir affronter un adversaire beaucoup plus redoutable qu’ils le pensaient. Ruby intervient pour les aider, mais n’aurait-elle pas en réalité d’autres plans ?…

Ma sorcière pas-du-tout-bien-aimée…

La critique de Clément Diaz : 

Ben Edlund confirme son sens du rythme avec ce brillant épisode démarrant comme une décapante relecture de Charmed version darkside, avant de tout chambouler par un époustouflant duel des esprits dont la folle intensité compense quelques erreurs de jugement de l’auteur. Sans temps mort, l’épisode court d’un rebondissement à l’autre tout en délivrant une nouvelle avancée de la mythologie, jusqu’à un terrible twist final où un gouffre sans fond semble s’ouvrir sous les pieds de Dean...

Livre des ombres, pouvoir des trois, sorcières agissant (relativement) discrètement mais ne mesurant pas toutes les conséquences de leur pouvoir, formules poétiques, symboles cabalistiques… le mimétisme avec l’univers des sœurs Halliwell est frappant, d’autant que le trio de dames a chacune son caractère (la forte tête Tammi évoque Prue). Mais dès l’introduction où une pauv’nana casse sa pipe après avoir préalablement craché ses dents à la pelle, on comprend vite qu’on sera très loin de la vision sucrée d’Aaron Spelling. Effectivement, Singer réalise de fort juteux plans dont le côté sanglant et macabre se couple à une esthétique fort réussie (la contre-plongée via la table de verre sur le cadavre d’Amanda…), alors que l’enquête, ponctuée par la découverte de ces inquiétants « sacs de malédiction », fait montre d’une belle variété dans les différentes mises à mort, tout en maintenant un suspense constant quant à savoir si nos bros arriveront à temps à chaque tentative. Les théâtrales apparitions de Ruby menaceraient de tourner au procédé si elles n’étaient heureusement pas impeccablement minutées, tombant toujours à un moment critique, et à chaque fois fort différentes de la précédente ; on retient notamment une grosse engueulade entre elle et Dean, où elle ne trouve rien de mieux que de rembarrer un Dean hystérique la visant avec le colt, quelle badass !

L’on sait que le succès de Supernatural doit beaucoup à ses antagonistes déments, surtout féminins. Sur ce point, la démone du jour, campée avec fer et feu par la royale Marisa Ramirez, constitue une représentante de catégorie 1 tant ses pouvoirs phénoménaux et sa suintante perfidie assurent un show sans pareil (le trépas des sorcières est plaisamment ignoble). Ruby peut pour la première fois intervenir directement dans l’action (mis à part son entrée en scène dans le pilote de saison), avec une mémorable joute dialoguée puis une baston réellement sauvage, où Katie Cassidy imprime une présence plus forte qu’à son habitude. Cette fenêtre ouverte sur le monde des démons est d’autant plus captivante qu’elle s’insère très naturellement à l’action. On relève toutefois plusieurs incohérences: ainsi la démone aurait le temps de trucider 50 fois les frères, et préfère à cela dévoiler de long en large son masterplan, laissant tout le temps à Ruby de leur sauver la mise. On ne croyait pas que cet énorme cliché des années 60 était encore possible, il semble que si. On peut se demander aussi pourquoi après avoir tué les 2 premières sorcières, elle se désintéresse de la 3e, permettant à cette dernière de l’affaiblir décisivement. Enfin, même si le coup final est porté par Dean, nos frères restent finalement très périphériques à ce duel féminin. La tonnante réalisation de Singer, les dialogues d’Edlund, et l’interprétation permettent cependant de passer outre. Le meilleur est pour la fin, où Dean le fanfaron ne peut plus cacher sa panique lorsque Ruby, dans une étourdissante révélation, lui dévoile toute sa mystification, tout en donnant une vision de l’Enfer à la fois originale et abominablement effrayante. Simultanément, Ruby bénéficie d'une belle progression psychologique, avec cette émouvante révélation de son humanité qu'elle a de justesse sauvée, bouleversante alors même qu'elle crucifie Dean. Un épisode chargé à bloc.

La critique d'Estuaire44 : 

Le titre Malleus Maleficarum sonne tellement à la In Nomine Satanis ou Stella Inquisitorus, que cela suscite un coup de chapeau de la part de l’amateur de jeux de rôles à l’ancienne, à l’époque d’avant les ordinateurs, quand on jouait ensemble autour d’une table, en s’éclatant avec 2 crayons trois bouts de papier et des dés bizarroïdes. Avec des chips et du soda, aussi, beaucoup de chips, beaucoup de soda. Sinon l’épisode constitue avant tout un joyeux pastiche de Charmed (mélangée à Desperate Housewives) et autres convents wiccas, le tout à la sauce Supernatural : gorissime et joyeusement défoulatoire. Même Les Sorcières d'Eastwick sont laissées loin derrière, on rigole bien, popcorn pour tout le monde. Les portraits de ces dames résultent réellement cinglants. La démone du jour (épatante Marisa Ramirez) confirme que la disparition de sa collègue des carrefours ne signifie pas la in des piquantes adversaires féminines des frères Winchester, c’est la bonne nouvelle de l’épisode. On avouera par ailleurs un vrai coup de cœur pour le kitch ultra hispanique du Conquistador Motel, l’équipe artistique soigne décidément toujours ce rituel des décors de la série, la saison fait très fort dans ce domaine.

On s’amuse également beaucoup de l’ingéniosité de l’auteur Ben Edlund et du metteur en scène Bob Singer concernant l’incontournable chapitre des morts répugnantes et abjectes, de la vive imagination et du sens de l’image. Le subtext lesbien pimente encore les débats, notamment entre Tammy et la sorcière qu’elle laisse un temps survivre, mais surtout entre elle et Ruby. Cette dernière fait encore son numéro, un rien lassant même si elle met ici davantage la main à la pâte. On éprouve toujours du mal à s’y intéresser, même si l’on glane au passage des informations intéressantes sur les liens existant entre humains et démons. Katie Cassidy se montre convaincante lors de la séance de baston (de fait l’épisode annonce de manière amusante les combats de la Black Canary d’Arrow), mais son jeu se montre toujours aussi peu subtil. Lauren Cohan brille décidément bien davantage et l’opus ne sera pas le Red Sky at Morning de Miss Cassidy, malgré Ben Edlund. Pour Dean le salut ne viendra pas de Ruby : en même temps ce n’est pas comme si l’on n’y avait jamais cru mais cela accroît malgré tout l’intensité du drame en cours.

Anecdotes :

  • Tammi déclare qu’un nouveau leader s’élève à l’Ouest parmi les Démons, ce qui préfigure la venue prochaine de Lilith.

  • Amanda réside au 309, Mayfair Circle, un probable clin d’œil à La Saga des sorcières Mayfair, sublime trilogie d’Anne Rice (Le Lien maléfique, L'Heure des Sorcières, et Taltos). La Saga Mayfair et les Chroniques des Vampires s’entrecroisent à travers les romans Le Domaine Blackwood et Cantique sanglant. Nice dick work, Magnum déclare Tammi à Sam, une référence à la célèbre série de Tom Selleck (1980-1988). What are we thinking ? Some old craggy Blair bitch in the woods ? lance Dean à Sam, un clin d’œil au terrifiant film Le Projet Blair Witch (1999).

  • Sam et Dean se font respectivement passer pour les policiers Bachman et Turner. Il s’agit en fait des noms des membres du groupe rock canadien Bachman-Turner Overdrive (souvent désigné comme BTO), principalement en activité durant les années 70. A regular Black Sabbath, déclare Dean, ce qui peut évoquer aussi bien évoquer le sabbat des sorcières (banquet païen ou satanique, voire orgiaque) que le groupe d’Ozzy Osbourne, considéré comme le fondateur du Heavy Metal (album Paranoid, 1970) et réputé pour les thèmes mystiques de ses chansons.

  • Ruby indique sa vie humaine remonte à la Grande Peste, ce qui la situe au XIVe siècle. On estime que ce fléau a causé la mort de 25 millions de personnes entre 1347 et 1352, soit entre 30 et 50 % de la population européenne d’alors.

  • Le Malleus Maleficarum (ou « Marteau des sorcières ») est un traité de lutte contre les Sorcières, décrivant les procédures de capture, de procès et d’élimination. L’un des premiers livres diffusés massivement grâce à l’imprimerie de Gutenberg, il fut publié en 1486, par deux Dominicains désignés par le Pape Innocent VIII. Il va faire autorité durant l’apogée de la chasse aux Sorcières dans les pays protestants (notamment en Grande Bretagne), jusqu’à la fin du XVIIe siècle, même s’il fut rapidement renié par l’Église catholique et l’Inquisition espagnole.

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10. FAITES DE BEAUX RÊVES
(DREAM A LITTLE DREAM OF ME)

 

Scénario : Cathryn Humphris, d’après une histoire de Sera Gamble & Cathryn Humphris
Réalisation : Steve Boyum

You can't escape me, Dean. You're gonna die. And this. This is what you are going to become!

Résumé :

Bobby Singer a sombré dans le coma : il y fait des cauchemars horribles qui à terme pourraient le tuer ! Sam & Dean apprennent qu’il enquêtait sur la mort d’un docteur qui prétendait soigner des gens qui sont incapables de rêver pendant leur sommeil grâce au Silene undulata, une plante africaine. Ils comprennent qu’un « maître des rêves » a décidé de le tuer dans son sommeil pour couvrir ses traces ! Grâce à Bela, les Winchester rejoignent Bobby dans son cauchemar, mais leur adversaire compte également les tuer dans leur sommeil…

… ou les griffes de la nuit

La critique de Clément Diaz : 

 

Le monde des rêves est un thème-roi du Fantastique, l’esprit humain et ses secrets y voguent dans ce territoire entre la réalité et l’imaginaire ; il est difficile d’en exploiter pleinement la richesse, et Dream a little dream of me souffre d’en offrir qu’un traitement assez simplet alla Freddy Krueger. Il est visible que Kripke a voulu explorer plus avant ses personnages via ce moyen, sur le même mode que le Cauchemar de Buffy, mais on est loin du vertigineux voyage Lynchien de Joss Whedon. Mais si toute la partie consacrée à Bobby déçoit, l’épisode revient en force dans une seconde partie d’une furieuse intensité, culminant dans un soufflant duel psychologique entre Dean et lui-même. De fait, par ses codes narratifs et le thème d’un humain aux pouvoirs effrayants, le récit fait beaucoup penser à X-Files qui allait huit ans plus tard effleurer le sujet (Babylon, 10-05). Et puis, on se régale d’une Bela toujours aussi… Bela, toujours un coup d’avance sur nos bros.

Le récit est malheureusement scindé en deux parties quasi indépendantes (cauchemar de Bobby/cauchemar de Dean), donnant l’impression de deux épisodes distincts raccordés par le fil onirique. Malgré la performance aussi brillante qu’inhabituelle de Jim Beaver en Bobby effrayé et réduit à l’impuissance, la première moitié de l’épisode se traîne dans une enquête routinière, sans étincelles, même si on apprécie les aussi discrètes que vibrantes déclarations d’affection de nos héros à celui qu’ils considèrent comme leur second père, tout comme le gratuit mais hilarant rêve érotique de Sam à propos de Bela. Lauren Cohan frappe fort côté sex-appeal, mais nous rappelle en même temps que le rêve érotique de Xander dans Buffy était considérablement plus riche et lourd de sens. Steve Boyum ne peut égaler le brio de Whedon - le budget est il est vrai pas le même - mais sa mise en scène n’en demeure pas moins d’une étincelante beauté et très efficace (superbe travail sur la photographie radieuse des extérieurs de la maison de Bobby), et donne un cachet d’étrangeté. L’immersion dans le cauchemar de Bobby ne sert de prétexte que d’exhumer un trauma du passé bien cliché et un esprit contentant de rabâcher les mêmes phrases.

Le voyage dans la psyché de Dean demeure cependant bien plus relevé, alors que le serial killer du jour, 100% humain (une rareté dans Supernatural) étend son pouvoir avec un sadisme raffiné - glaçant G. Michael Gray. Face à un adversaire aux pouvoirs quasi divins qu’ils sont obligés d’affronter dans son monde, les Winchester doivent sous nos yeux inquiets tenir difficilement une telle cadence. Là où Sam s’en sort grâce à une jolie ruse, Dean doit d’abord affronter la vision de ce doux rêve d’une vie heureuse et normale avec une famille - sa dénégation à Sam ne trompe personne, soulignant au contraire son obsession condamnée à n’être jamais assouvie. Le tout culmine dans ce terrible affrontement entre les « deux Dean », un passage classique du Fantastique, mais ici porté à incandescence par des dialogues chauffés à blanc où Dean fait face à tout l’héritage maudit de son père qui a brisé sa vie et l’a transformé en soldat exterminateur fuyant humanité et émotions. Face à son démon intérieur, Dean craque enfin l’armure, et plonge dans une explosion de violence où il hurle sa peur et sa révolte contre un destin qui l’a injustement martyrisé, de son père castrateur à son actuelle échéance infernale. Jensen Ackles livre une double performance d’une puissance expressioniste à couper le souffle, l’une des plus grandioses de sa carrière d’acteur. Malgré cette victoire, la coda est une des plus noires de la série : Dean, après 10 épisodes à faire le fanfaron, a certes cessé de se fuir, mais semble plus bas que terre, tandis que le sinistre plan final, un des plus effrayants de toute la série, semble sceller la pierre de son tombeau.

La critique d'Estuaire44 : 

 

Plus proche de l’inventivité narquoise d’un Freddy Krueger que de l’architecture un brin prétentieuse d’Inception, Dream a Little Dream of Me constitue un magnifique épisode onirique (encore bravo, pour le titre original et son amusante référence). On apprécie vivement l’efficacité du scénario, qui évite tout ralentissement, mais davantage la mise en scène, absolument magistrale. Le mouvement des caméras, les angles biscornus et l’impressionnant travail de photographie (ces couleurs !) propulsent littéralement le spectateur dans le Monde du Rêve. La  première partie se montre très ludique, avec une Bela toujours aussi divertissante (et redoutable !), y compris dans les songeries de Sam. On en apprend davantage sur le passé de Bobby, la série continue de développer son univers, y compris pour le background des personnages. Bobby mériterait toutefois déjà un épisode lui étant entièrement consacré.

On en arrive ensuite au véritable sujet du récit, la confrontation entre Dean et son futur démoniaque. Grâce au talent de Jensen, qui confirme une nouvelle fois qu’il n’est pas qu’un beau gosse, aux dialogues et à la mise en scène cette fois devenue glaciale, on assiste à l’une des scènes les plus effrayantes et troublantes de la saison. Elle accroît encore les enjeux de la fin de parcours qui se dessine, alors que les mâchoires du piège commencent à se refermer sur Dean. Seul le manque de charisme de l’adversaire du jour, une fois l’illusion dissipée, est à regretter, mais il n’était de toute façon là que comme prétexte. L’un des sommets de cette saison, qui indique de plus clairement à quel point Bobby est devenu indispensable à Supernatural. Les amateurs de X-Files s’amuseront également des convergences existant avec l'épisode de la saison 10 Babylon.

Anecdotes :

  • Au bar, quand Sam s’offre un whisky, on entend Long Train Running, des Doobie Brothers. Quand Dean rêve de Lisa, on entend Dream a Little Dream of Me, des The Mamas & the Papas, qui donne aussi son titre original à l’épisode. Cette version de 1968 est aujourd’hui la plus connue, mais ce standard du jazz, enregistré pour la première fois en 1931, a été repris par de multiples grands interprètes

  • Quand Dean rend visite à Jeremy, il prend le pseudonyme Robert Plant, soit le nom du chanteur et leader de Led Zeppelin, groupe de rock anglais souvent référencé dans Supernatural. Dan y avait déjà eu recours lors de Bedtime Stories, cette saison. Take it easy, Phish, that's not why I'm here déclare Dean, une référence à Phish un groupe de Rock progressif lancé en 1983 et toujours actif aujourd’hui. Très populaire aux USA, il est considéré comme l’un des Jam Bands les plus importants depuis le psychédélique The Grateful Dead. Phish est notamment réputé pour les improvisations passablement délirantes émaillant ses concerts. So when do we go on this little magical mystery tour ? interroge Bela. Notre amie anglaise fait référence à un album des Beatles (1967), célèbre pour contenir plusieurs des chansons marquantes de leur période psychédélique (All You Need Is Love, Strawberry Fields Forever, Penny Lane…). La sortie de l’album accompagnait celle du film éponyme, contenant plusieurs de ces titres et lui-même très imbibé à l’acide lysergique  Le film fut un échec, notamment du fait qu’étant en noir et blanc, il s’avérait incapable de restituer l’expérience du LSD. Dès l’année suivante les Fab Four tournèrent la page du psychédélisme.

  • Jeremy est atteint du syndrome de Charcot-Wilbrand. Du à une lésion du lobe occipital, celui-ci se traduit par la perte de la capacité de rêver. Il peut s’accompagner d’autres troubles : l’amaurose (perte totale de la vue sans altération su système oculaire), l’achromatopsie (l’absence de vision des couleurs), ou l’agnosie (perte de la capacité de reconnaître des visages ou des objets).

  • So let's say this doc was testing the stuff on his patients Tim Leary-style, déclare Sam. Timothy Leary, psychologue des années 60, fut un fervent partisan du LSD comme traitement des troubles psychologiques et mena plusieurs expériences en ce sens à Harvard. Cette figure de la Contreculture fut également un ami proche de John Lennon et de Yoko Ono.
  • I get it. I get it. I'm my own worst nightmare, is that it? Huh? Kind of like the Superman III junkyard scene? A little mano y mano with myself ? déclare Dean. Il s’agit d’une référence au film Superman III (1983), où Clark Kent est confronté à une version maléfique de sa personnalité, du fait d’une kryptonite artificielle. Le script original voyait en fait une confrontation entre Dean et son père, mais Jeffrey Dean Morgan n'étant pas disponible, Kripke dut demander une réécriture, et c'est en pensant à cette scène de Superman III qu'il eut l'idée de remplacer John par un double de Dean.

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11. UN JOUR SANS FIN
(MYSTERY SPOT)

Scénario : Jeremy Carver, d’après une histoire de Jeremy Carver & Emily McLaughlin
Réalisation : Kim Manners

Whoever said Dean was the dysfunctional one has never seen you with a sharp object in your hands.

Résumé :

Alors qu’ils enquêtent sur la disparition d’un homme qui enquêtait sur le « Mystery spot », un lieu où les lois naturelles seraient abolies, Sam voit Dean se faire assassiner par le propriétaire des lieux ! Mais l’instant d’après, Sam se réveille le matin du même jour, Dean bien vivant à ses côtés, ce dernier n’ayant aucun souvenir de ce qui vient de se passer... Sam ne tarde pas à comprendre qu’il est tombé dans un verrou temporel qui se déclenche à chaque fois que Dean meurt. Sam tente de changer le cours des événements, mais ne parvient pas à sortir du verrou…

Supernatural, Tex Avery, même combat.

La critique de Clément Diaz : 

  

L’on tient là un des plus grands chefs-d’œuvre de la série entière. Le piège du verrou temporel consistant à revivre sans fin une même période a souvent donné des chefs-d’œuvre grâce à la diabolique machinerie de sa narration, côté comique comme le génial et désormais culte Groundhog day ou le Window of opportunity de Stargate SG-1, ou côté tragique comme le Shadow play de Twilight Zone ou le Monday des X-Files. Jeremy Carver et Emily McNaughlin vont carrément mêler comique et tragique en exploitant avec une subjuguante maestria toutes les possibilités du sujet : le burlesque (les très variées morts de Dean), le suspense (Sam vs. Le verrou, la fausse piste initiale), le tragique (Sam basculant dans ses propres ténèbres), l’humour noir (le tireur de ficelles)… jusqu’à un happy end trop dissonant pour être honnête, achevant l’épisode sur une note sombre.

Après un début ensoleillé où l’on se dit qu’on va assister à un épisode normal, la mort brutale de Dean, filmée sans filtre, provoque un véritable choc. Dès lors, on mesure tous les détails a priori anodins de la scène pré-générique - qui pour cette raison dure plus longtemps qu’à l’accoutumée : petit-déjeuner british, femme bousculée, déménageurs ronchons… qui ne cessent de changer à chaque itération du verrou temporel. Les auteurs se débarrassent rapidement de leur enquête qui ne pourrait que parasiter leur idée, et avec une habileté de maître, la première moitié de l’épisode suit une double pente simultanément comique et dramatique : les nombreuses morts de Dean (111 !!) sont aussi joliment variées que d’un absurde loufoque (même si dans le domaine des morts débiles, personne ne pourra faire mieux que l’hallucinée Dead like me), excitant des rires incontrôlables en plus de quelques gags ajoutés comme la conversation simultanée entre les bros. Les multiples hommages au Groundhog day (un tube d’Asia comme réveil-matin au lieu de Cher, Sam énumérant la vie de tous les clients du bar à force d’habitude, morts variées…) contribuent à l’amusement général. Mais de l’autre côté, Sam, brisé de voir son frère mourir encore et encore, a bientôt les nerfs à vif, sombre dans la paranoïa, et est en surtension permanente. Chaque itération du verrou l’entraîne près du point de rupture, alors même qu’il s’approche de la vérité. Une situation aussi absurde que mortelle ? Pour peu qu’on ait manqué le nom de son interprète au générique, on ne peut que se donner des claques pour ne pas avoir deviné l’évidence : seul ce diabolique farceur de Trickster pouvait avoir fait une chose pareille ! La scène où il tombe le masque permet de retrouver ce personnage aussi chaotique que son sens de l’humour si gratiné. Kim Manners est en terrain connu car il avait dirigé l’épisode de verrou temporel des X-Files, et sait donc insérer de subtiles modifications de mises en scène pour exprimer toute l’épuisante épreuve de Sam.

Mais si le Trickster est un sale gosse qui adore s’amuser à distordre la réalité avec un humour aussi meurtrier qu’absurde, il se révèle aussi un fin moraliste, mettant Sam face à lui-même. Son positionnement ne lasse pas d’étonner : ni opposant ni adjuvant de nos héros, il veut simplement interpeller Sam à accepter la dernière phase de son état quasi traumatique dû à l’échéance de son frère : la résignation, où l’on accepte pleinement qu’il n’y a plus rien à faire devant l’inévitable ; là où Sam restait coincé à la case marchandage/déni depuis le début de la saison. Une thérapie de choc, mais qui va encore plus loin : le twist voyant le verrou se briser au plus mauvais moment donne lieu à une dernière partie versant cette fois dans l’épouvante psychologique. Sous nos yeux, Sam devient un néo-Dean, impitoyable machine à tuer, assoiffé de sang, perdant toute notion de bien et de mal. Alors que la série a souvent dépeint Sam comme dernier rempart à l’humanité de Dean, Kripke nous fait savoir que cela marche dans l’autre sens, et que sans son frère, Sam n’est plus que ténèbres. Le climax de la scène si désespérée face à Bobby est un ultime coup brillant du Trickster, mettant en évidence Sam en dépendance totale vis-à-vis de son frère, et donnant corps aux paroles de Ruby qui souhaitait « préparer » Sam à la vie sans Dean. Il n’est manifestement pas prêt, et c’est bien là le génie des auteurs que de conférer au Trickster un rôle de thérapeute-révélateur (à sa manière…), ce qui lui donne une toute nouvelle aura. L’intensité fiévreuse du jeu de Jared Padalecki est d’une puissance quasi sauvage, tandis que Richard Speight Jr. injecte plus de sarcasme dans son rôle décalé avec un contrôle parfait. Rien à espérer d’une coda où tout rentre dans l’ordre, mais où Sam semble au bout du rouleau. Un chef-d’œuvre de noirceur mâtiné d’humour, et une exploitation brillantissime du thème du verrou temporel.

La critique d'Estuaire44 : 

  

Avec Mystery Spot, Supernatural sacrifie au thème incontournable pour les séries fantastiques qu'est devenu le verrou temporel. Cette figure devenue rituelle s’apprécie aussi par la finesse de son intégration à la série concernée. Il résulte astucieux qu’une programme aussi référencé que Supernatural soit celui retenant l’option la plus similaire à l’emblématique Un jour sans fin. Par ailleurs, une fois de plus on apprécie le côté Amérique profonde de l'attraction locale bizarroïde, un rituel observé aux quatre coins des USA version Country (l'excellent roman American Gods s'en fait le joyeux écho). Le mécanisme du verrou s'installe avec une rare efficacité, avec une première mort choc de Dean, absolument inattendue. Un vrai coup de poing, paradoxalement pour sa survenue commune mais aussi du fait du fil rouge de la saison en forme d’épée de Damoclès

Dans un second temps, on comprend enfin où l'épisode nous emmène, d'où un certain atterrissage dans une zone plus balisée, mais le soulagement prédomine ! On apprécie le côté psychologique particulièrement crucial, (le sombre désespoir de Sam), ainsi que le grand atout de Mystery Spot que représente le côté cartoonesque mâtiné d'humour noir déferlant sur les multiples morts de Dean, c'est à mourir de rire. Évidemment le Trickster est à la manœuvre, avec un immanquablement génial Richard Speight. L'entité apparaît toujours aussi jouissive et ambivalente envers les Winchester, un vrai régal. Cet exercice de style particulièrement abouti et hilarant qu'est Mystery Spot constitue un nouvel éloquent exemple du vent de folie que cet être totalement singulier au sein de la série est capable de faire souffler, jusqu’à emporter tout un épisode.

Anecdotes :

  • L'épisode a été filmé à Steveston, en Colombie britannique. Ce village abrite également le tournage de la série Once Upon A Time, où il devient Storybrooke. Son aspect charmant et rural lui vaut de figure dans de nombreuse séries produites à Vancouver, dont Stargate SG-1 (Nightwalkers) et The X-Files (Gender-Bender).

  • You're Travis Bickle in a skirt, pal. I'm over it, déclare le Trickster à Sam. Travis Bickle est le protagoniste totalement obsédé de Taxi Driver (1976). Quand Sam lui parle du verrou temporel, Dean réplique Like Groundhog Day, la célèbre comédie d’Harold Ramis ayant institué ce type d’histoire (Un jour sans fin, 1993). L’épisode contient plusieurs références à Groundhog Day, comme le rituel de la chanson à la radio (I Got You Babe au cinéma) ou la serveuse de la cafétéria portant le même prénom que dans le film, Doris.
  • La chanson réveillant Sam au début de chaque nouveau jour réitéré est Heat of the Moment, d’Asia. Sans doute à jamais la chanson la plus détestée de Sam, elle fut l’un des plus grands tubes de 1982, aux USA. Quand Sam passe enfin du mardi au mercredi, la radio diffuse cette fois Back in Time, d’Huey Lewis and the News. Sans doute à jamais la chanson préférée de Sam, elle est également celle que Marty McFly entend quand il se réveille et comprend qu’il est revenu de 1955 (Retour vers le Futur, 1985).

  • Même si Dean est tué 111 fois, l’épisode reste l’un des très rares de Supernatural où personne ne meurt en définitive.

  • Jared Padalecki a indiqué que l’épisode avait été conçu afin de servir de final de saison au cas où celle-ci avait dû s’interrompre définitivement du fait de la grande grève des scénaristes venant de débuter à Hollywood (novembre 2007-février 2008). Auquel cas le Trickster n’aurait pas sauvé Dean, concluant de la sorte l’aventure. Mais la production put reprendre quand la grève cessa et la fin demeura telle que nous la connaissons. Le conflit eut toutefois pour conséquence que la saison ne compta que 16 épisodes au lieu des 22 habituels. De nombreuses autres séries furent également impactées.

  • Évoqué par Sam comme faille dans notre monde du même genre que le Triangle des Bermudes, l’Oregon Vortex est en fait une attraction du même type que le Mystery Spot, située à Gold Hill, dans l’Oregon. Elle se compose de diverses amusantes illusions d’optiques édifiées à l’air libre, prétendument justifiées par des phénomènes paranormaux. L’Oregon Vortex est également évoqué par l’Agent Mulder dans l’épisode Rush des X-Files. Les États-Unis et le Canada contiennent nombreuses road-attractions similaires, destinées à attirer le touriste et très populaires jusque dans les années 60. On trouve ainsi un Mystery Spot à Santa Cruz, en Californie.

  • A propos du verrou temporel, Dean déclare : Sounds a little X-Files to me. Cette série contient effectivement un épisode consacré au sujet, Monday, réalisé par Kim Manners tout comme Mystery Spot.

  • Assistante d’Eric Kripke et des scénaristes pendant les 2 premières saisons, Emily McLaughlin travailla à la supervision des scénarios pendant cette 3e saison avant de quitter la série. Il s’agit de l’unique scénario de sa carrière.

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12. JUS IN BELLO
(JUS IN BELLO)

Épisode Mythologique

Scénario : Sera Gamble
Réalisation : Phil Sgriccia

- So, turns out demons are real.
- Ghosts are real too. So are werewolves. Vampires. Changelings. Evil clowns that eat people.
- Okay then.
- If it makes you feel better, Big Foot's a hoax.

Résumé :

Les Winchester à ses trousses pour récupérer le colt, Bela les fait tomber dans un traquenard : Sam et Dean sont arrêtés par l’agent Henriksen, qui les traque depuis 2 ans. Alors qu’il s’apprête à les transférer dans une prison de haute sécurité, le commissariat où ils sont détenus est attaqué par une armée de démons…

Loi de Winchester : voir à « loi de l’emmerdement maximal. »

La critique de Clément Diaz : 

Pure orfèvrerie de suspense haletant, et bien relayé par une mise en scène à la flamboyante énergie, Jus in bello est un véritable « page-turner » : dès la première minute, scènes d’action trépidantes, rebondissements du tonnerre, surprises, s’enchaînent à une vitesse supersonique, tout en dressant de superbes portraits de chacun des personnages, principaux ou secondaires, et en faisant entrer en scène un new player in town. La cruauté du twist final et de la terrible leçon qui en découle couronnent le travail de Sera Gamble, ici au sommet de son talent de scénariste.

La suprématie éclatante de Bela sur nos bros atteint un nouveau palier avec le piège initial, franchement jouissif. L’accumulation d’épic fails de nos héros face à cette tornade devient un sacré running gag de la saison, d’autant que Lauren Cohan continue à déchaîner l’enthousiasme par sa tchatche pétulante. Par suite, l’épisode ne cesse de gagner en virtuosité par sa manière de jouer sur tous les claviers du suspense et son enchaînement d’idées chocs et ingénieuses dignes d’un final de saison : interrogation sur comment notre fin duo va s’en sortir cette fois, paranoïa maniaque d’Henriksen (toujours aussi diplomate avec ses subordonnés…) absolument impayable en fier-à-bras expansif, attaque brutale du premier démon, et l’idée absolument géniale d’un siège de toilettes transformé en expulseur de démons - brillants réflexes d’un Sam décidément de plus en plus rusé. Ce ne sont pourtant « que » de brillants préludes à un crescendo massif pendant laquelle la résistance s’organise alors que l’armée démoniaque se presse aux portes du poste, ponctuée par l’arrivée en fanfare de Ruby qui chauffe encore les débats. Chaque rebondissement survient a tempo pour électriser encore plus une situation déjà intenable. Le climax de la bagarre finale est à perdre haleine, où Phil Sgriccia maîtrise à la perfection chaque mano a mano, atteignant son apothéose par une résolution aussi intelligente qu’inattendue. Et comme si cela ne suffisait pas, Lilith frappe les trois coups par une tonitruante entrée en scène, qui ne rougit pas de la comparaison avec son collègue aux yeux jaunes.

L’épisode ne se contente pas d’aligner les scènes spectaculaires ou mâtinées d’humour (surtout autour de la touchante Nancy…), mais dessine une belle réhabilitation d’Henriksen. Nous avons toujours vu ce personnage comme un enquiquineur désagréable, car filmé du point de vue de nos héros, mais la malicieuse scénariste, nous le présente dans sa vérité propre : policier intègre et déterminé, leader solide, animé d’une réelle flamme dans son combat contre le mal, mais se jugeant inutile dans un monde semblant foncer tête baissée dans des ténèbres de plus en plus épaisses. Par là, il apparaît comme une version de la trop souvent mésestimée Kate d’Angel (la dette de Supernatural envers Whedon n’est plus à prouver), un représentant de l’ordre sensible, émouvant, fort, mais là où Kate ne parviendra jamais à accepter le surnaturel, le vaillant policier va y arriver et se montrer aussi décisif que nos frères. Charles Malik Whitfield est redoutablement convaincant. La jeune et naïve secrétaire incarne une idée très américaine mais optimiste de la citoyenne lambda qui dépasse sa peur pour contribuer à repousser le danger, jusqu’au don de soi. Ruby, derrière son volontarisme tapageur, dévoile une autre facette de sa personnalité : sa propension au sacrifice pour le plus grand bien, mais également son peu de morale quand elle envisage rien moins que de tuer un innocent pour le même but. Si Katie Cassidy comprend que le tempérament guerrier de Ruby limite ses émotions, on avoue toutefois qu’un jeu plus souple aurait rendu plus émouvant ces révélations de sa personnalité.

La virtuosité permanente de Sera Gamble semble sans limite car elle touche également les deux frères, dans une formidable inversion de leurs personnalités : ainsi le Dean adepte des solutions franches et directes repousse sous nos yeux ébahis l’offre sanguinaire de Bela, là où Sam l’humaniste nous stupéfie par son accord implicite mais flagrant. Certes le « 100% pur Sam » doit y être pour quelque chose, mais on peut voir aussi une conséquence de la machiavélique machination du Trickster dans l’épisode précédent où Sam marchait vers des ombres encore plus opaques que celles de Dean. La révolte émotionnelle de Dean pour sauver Nancy frappe au cœur par sa force et sa sincérité, refusant d’appliquer des lois de guerre posant bien souvent des problèmes éthiques. Si dans le fond de son cœur, le spectateur lui donne raison, Gamble fait tomber un sanglant couperet final, d’une cruauté horrible, donnant ironiquement raison à Bela : à partir du moment où votre adversaire ne se pose aucune limite, vous devez vous montrer aussi impitoyable que lui. Une terrible épiphanie pour nos héros, décidément moins durs à cuire qu’on l’aurait cru, et un choc pour le spectateur contemplant impuissants les merveilleux efforts de Dean réduits à néant. Un épisode tachycardiaque, aussi intense, émouvant, que cruel.

La critique d'Estuaire44 : 

À l’occasion de Jus in Bello, la surdouée Sera Gamble (actuellement l’une des très bonnes raisons de découvrir Aquarius), trousse un remake audacieux et parfaitement abouti d’Assault on Precinct 13, le chef d’œuvre de John Carpenter (1976) voyant un commissariat pareillement assiégé par une alliance de gangs urbains. De fait l’épisode rivalise par moments avec ce film devenu culte, par l’intensité du suspense et ses péripéties menées à train d’enfer (au sens propre), mais aussi par on approche psychologique des caractères se révélant dans l’épreuve. Sera Gamble sait merveilleusement dépeindre et rendre attachant chacun des personnages du drame, soutenant ainsi l’action et conférant une force terrible à l’épouvantable dénouement. L’introduction réussie du Fantastique insuffle une dynamique supplémentaire. La série gère toujours aussi efficacement les arcs narratifs de ses personnages secondaires, l’un de ses moteurs perpétuellement renouvelés, et l’Agent Henriksen a sans doute droit à sa meilleure prestation pour son ultime épisode. On regrettera simplement le cliché voyant la jeune femme vierge et religieuse être incarnée par une actrice aussi clairement identifiée comme hispanique qu’Aimée Garcia.

Si l’on peut regretter une énième intervention miraculeuse de Ruby, avec une Katie Cassidy malheureusement toujours plus terne que Lauren Cohan, le débat moral qu’elle suscite entre les deux frères rehausse encore les enjeux de l’opus. Bela (toujours en grande forme) et Ruby ne se croiseront décidément pas. On peut le regretter (tout comme pour Vénus et Cathy en saison 2 de Chapeau Melon), mais insérer l’événement aurait trop mobilisé un scénario déjà fort rempli, Sara Gamble a raison de renoncer à une fausse bonne idée. Alors que la fin de saison avance déjà à grands pas du fait de la grande grève des guildes de scénaristes, Jus in Bello présente également l’intérêt d’introduire la suivante, avec l’arrivée d’une première figure biblique, Lilith, et un Sam toujours plus enténébré, préfigurant sa tragique dérive à venir. On avouera aussi que c’est lors de la découverte de cet épisode que notre méfiance s’est éveillée vis-à-vis de Ruby, dont les motivations évasives (détester les démons) ne cadrent pas avec la prise de risque qu’implique l’intervention dans un tel traquenard. Cela aurait pu constituer une faiblesse de l’intrigue, si la suite n’avait pas révélé une toute autre motivation.

Anecdotes :

  • Il s'agit de l'unique épisode de la saison intégrant les deux personnages féminins récurrents de la saison, Bela et Ruby. Toutefois elles ne partagent aucune scène. Il n’y aura jamais d’interaction entre elles.

  • Jus in bello, ou « justice dans la guerre » est une expression latine désignant l’idée qu’il existe une éthique même durant un conflit et que des règles doivent s’imposer aux belligérants. Ce principe est à la base de la Convention de Genève, signée en 1949. Le titre fait référence à la controverse survenue durant le siège, à propos du sacrifice de la vierge (If that’s how you win wars, I don’t want to win, dira Dean)

  • Annoncée à plusieurs apparitions, Lilith se manifeste ici pour la première fois. Elle va devenir la grande adversaire des frères Winchester jusqu’à la fin de la saison 4. Lilith est une figure de l’Ancien Testament et du Talmud, inspirée par les démons femelles des panthéons antiques du Moyen-orient. Son nom signifierait la Terreur de la Nuit. La tradition médiévale de la Kabbale en fait la première épouse d’Adam, sauvage, puis devenue dévouée à Samaël, le Serpent. Lilith a connu une certaine popularité dans les mouvements féministes des années 70 car non pas issue de la côte d’Adam, comme Eve, mais tout comme lui, de la glaise, donc son égale.

  • L’Agent Henriksen déclare au shérif Dodd : Look, I get it. You're Mayberry P.D., une référence à la série à succès The Andy Griffith Show (1960-68), dont le héros est le shérif de la charmante petite ville de Mayberry.

  • Après l’exorcisme, l'agent Henriksen déclare I shot the Sheriff, à quoi Dean répond, visiblement content de son coup, But you didn't shoot the Deputy, un clin d’œil à la célèbre chanson de Bob Marley I Shot The Sheriff (1973).

  • Les tatouages anti-possession des Frères Winchester sont montrés pour la première fois. Ils reprennent le symbole de l’amulette au même pouvoir que Bobby leur avait donné dans l’épisode Born under a bad sign (2.14). Ce tatouage est arboré par un grand nombre des fans les plus passionnés de la série.

  • Dean suggère qu’Henriksen pourrait avoir besoin de Cialis, un traitement de la dysfonction érectile chez l'homme adulte similaire au viagra.

  • Le dernier segment de l’épisode, autour de Lilith, fut conçu afin de pouvoir servir de fin de saison efficace, au cas où la grande grève des scénaristes alors en cours aurait contraint la production à y mettre un terme. La saison va pouvoir se poursuivre, mais ne contiendra finalement que 16 épisodes au lieu de 22, et la conclusion de certains arcs devra être accélérée, notamment celui de Bela Talbot.

  • Le directeur adjoint du FBI possédé par un démon est joué par Peter DeLuise, fils de Don Deluise. Lui-même acteur, il reste néanmoins surtout connu en tant que scénariste, réalisateur et producteur impatientant des séries Stargate SG-1 et Atlantis.

  • Aime Garcia (Nancy) connaît une belle carrière télévisuelle, tenant des rôles récurrents dans plusieurs séries (Jamie Batista dans Dexter) et participant ponctuellement à de nombreuses autres. De parents portoricains et mexicains, elle s’est rapidement spécialisée dans les rôles d’Hispaniques, une communauté dont elle s’est parfois faite le porte-voix à Hollywood.

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13. LES GHOSTFACERS
(GHOSTFACERS)

Scénario : Ben Edlund
Réalisation : Phil Sgriccia

Ghost! Ghostfacers!
We face the ghost when others will not. We're ghost! ghostfacers!
Stay in the kitchen when the kitchen gets hot. Ghost! Ghostfacers!
We face the nightmare, we face the dread! Ghost. Ghostfacers!
We face the faceless, we face the dead. In the haunted night, looking for the fright of out life with the after-life. When you trip and fall, into the super-natur-all.
We're who you're gonna call cause we face them all! Ghostfacers!

Résumé :

Ed et Harry, les geeks crétins amateurs de paranormal (cf. épisode « Hell House ») sont de retour ! Avec Maggie, la sœur d’Ed, Kenny, un caméraman, et Alan, un cuisinier, ils ont fondé les Ghostfacers dans le but de poursuivre leurs rêves de gloire : à savoir, se filmer en direct en train de résoudre une affaire non classée, et vendre la vidéo à une chaîne dans l’espoir qu’elle produise une téléréalité centrée sur eux et leurs enquêtes paranormales. Mais alors qu’ils enquêtent sur une maison hantée tous les 29 février, ils tombent sur Sam et Dean qui ont entendu parler de cette maison. Le septuor s’y retrouve bientôt enfermé, en compagnie d’un esprit totalement dérangé…

Ils arrivent pour sauver le monde et pour en prendre plein la gueule. Mission réussie à 50%.

La critique de Clément Diaz : 

Et voici l’épisode décalé de la saison ! Cette fois, Supernatural s’inspire d’un des épisodes les plus OVNI des X-Files (et certainement de l’histoire des séries TV) : X-Cops où des policiers de la réelle émission de téléréalité Cops collaborent avec Mulder et Scully le temps d’une enquête mémorable. S’il ne se montre pas aussi percutant que son modèle, Ghostfacers partage les mêmes caractéristiques : centralisation sur le groupe héros de la téléréalité, héros de la série originale intervenant comme des intrus, caméra à l’épaule sur le mode du Blair Witch Project, générique de la téléréalité remplaçant celui de la série, mots vulgaires bipés, gestes obscènes floutés, absence de musique… le mimétisme avec les émissions de téléréalité est poussé jusqu’à son paroxysme. La spécificité de cet épisode réside néanmoins dans un brillant équilibre entre burlesque crétin et horreur (là où Gilligan jouait sur le suspense pur), et développe en sous-main une véritable charge à l’acide contre la téléréalité et la vanité humaine dans son ensemble, rendant cet épisode très fun et divertissant moins gratuit comme on pourrait le croire. Le choix de Kripke de déléguer l’écriture à Ben Edlund, maître dans la comédie, était tout désigné.

Passée une introduction pompeuse donnant immédiatement le ton (on songe à Jonathan au début du Storyteller de Buffy), nous faisons connaissance avec ce quintette de débiles qui vont enchaîner les foirades épiques avec une détermination jusqu’auboutiste. Ed et Harry en leaders bouffons et mal préparés ont su trouver des partenaires à la hauteur avec une soeurette ronchonne, un cuisinier raté secrètement amoureux d’Ed, et un cameraman racoleur : le prélude dans leur QG miteux les présente tel qu’en eux-mêmes : orgueilleux, gesticulateurs, paniquant au moindre bruit, stratèges de niveau zéro, QI d’une quiche, cancer de la geekerie métastasé… le festival est lancé et ne s’arrête jamais. On a peine à croire que ces bras cassés vont se mesurer à des esprits sanguinaires, mais ils le font, et évidemment ils vont bien morfler pour notre plus grand plaisir sadique. Heureusement, les bros sont là pour veiller sur eux, avec l’enthousiasme délirant attendu. Que les Weuh eux-mêmes peinent davantage que d’habitude avec le monstre du jour donne une idée du carnage qui se serait ensuivi s’ils n’avaient pas été là ! Pendant toute l’enquête, l’épisode parvient à alterner scènes d’horreur et éclats de rire dans un équilibre parfait : décor lugubre, esprit en folie dure de dure, apparitions à geler le sang, suspense infernal quant à la survie de chacun, fausses alertes suivies aussitôt de vraies alertes, généreuses giclées de gore… sont contrebalancés par des Ghostfacers exacerbant leurs réactions de terreur ou accumulant les gaffes qui eux par contre nous font bien rigoler (les acteurs jouent à qui cabotinera le mieux, c’est jouissif en diable). On reste pantois devant les efforts de Phil Sgriccia, dont la réalisation subjective extrêmement agitée et frénétique ne fatigue pourtant jamais l’œil, tout en impulsant un dynamisme trépidant à l’ensemble. L’horrible trépas d’un des Facers vient nous rappeler que personne n’est à l’abri de la mort dans Supernatural, si sympathiques soyez-vous.

Mais cette grosse comédie horrifique aborde aussi des thématiques plus fines. Ainsi, en ridiculisant les Ghostfacers, l’on voit que les auteurs se moquent des stars de la téléréalité, poussées par la vanité, la soif de gloriole, l’argent facile, et prêt à toutes les vulgarités ou les pires folies pour y arriver (un point absent d’X-Cops, dont les thématiques sont ailleurs). Si cela irrigue tout l’épisode, la coda se montre particulièrement éloquente : les quatre Facers survivants exploitent sans vergogne la mort de leur compagnon dans un but promotionnel - et l’on est ravi du twist final, une exaltante perfidie de Dean mettant une fin définitive à leurs espoirs. Misogynie et homophobie sont également pointés du doigt, Maggie n’étant finalement présente qu’en temps que pomme de discorde entre Ed et Harry, leur dispute infantile à son sujet rappelant les vulgaires coups de gueule des stars de téléréalité ; tandis que le touchant Alan, sans cesse rabaissé par ses camarades, quittera ce monde sur une dernière hypocrisie d’Ed lui disant ce qu’il a envie d’entendre pour s’en sortir. Chacun des Facers se montre d’un individualisme et d’un manque total de solidarité envers les autres. Pourtant, l’on ne parvient pas à détester ce groupe, en réalité pris au piège non de la méchanceté mais de leur bêtise, et par les trompeuses sirènes d’un rêve américain réalisé en deux temps trois mouvements. En apparence simple galéjade déphasée, Ghostfacers est finalement un des épisodes les plus grinçants de la série.

La critique d'Estuaire44 : 

Cette chronique est dédiée à la mémoire d'Allan J. Corbett, 1985-2008, le Roi de l’Impossible restera à jamais dans nos cœurs.

Ghostfacers compose une cinglante parodie d’une téléréalité alors en plein essor, constitue un vrai cas d'école de l'art toujours malaisé de la contre programmation. Alors que l'on le martyre de Dean approche toujours inexorablement et que la tonalité de la saison s'assombrit sans cesse, nous proposer un épisode aussi décalé et humoristique est aussi audacieux que terriblement casse gueule. Le pari résulte à l'évidence gagné tant l'épisode regorge de prouesses et d'excellentes idées. Encore davantage qu'en saison 1, Les Facers eux mêmes sont absolument hilarants, en caricatures de Geeks adulescents, passionnés mais totalement inopérants sur le terrain, mais aussi imbus d’eux-mêmes et avides de célébrités (le profil typique des candidats à ce genre d’émission). Les crispations avec les Bros (évidemment en particulier avec Dean) se montrent vraiment électriques.

La photographie et le montage caméra sur l'épaule se montrent époustouflants d'adresse. Quel rythme et quel sens de l'image ! Les auteurs y vont vraiment à fond, tant mieux, ils ont tout compris. Le réalisateur a visiblement parfaitement intégré le meilleur de Blair Witch Project. Ben Edlund a également l'excellente idée de jouer du contraste confronter les Nullos à ce qui reste sans doute l'une des affaires les plus glauques et sinistres de SPN, s'aventurant très loin dans la démence. Du coup on s'éclate toujours plus au fur et à mesure que l'on descend le grand escalier de l'horreur et qu'ils en prennent plein le carafon. Irrésistible. On apprécie également l'ultime pirouette nous faisant revenir au format classique de la série, dans l'Impala. Une élégante façon de refermer la parenthèse et d'en revenir aux affaires. Un génialissime épisode décalé.

Anecdotes :

  • Les deux têtes pensantes (…) des Ghostfacers sont Harry Spengler et Ed Zeddmore. Ils portent le même nom que Egon Spengler and Winston Zeddmore, deux membres des Ghostbusters, au cinéma. Ed et Harry ont tout d’abord rencontré les frères Winchester dans l’épisode Hell House (1.17).

  • Le thème des Ghostfacers, entendu lors de l’ouverture de l’épisode, a été composé par Christopher Lennertz et Ben Edlund.

  • Dans l’Impala, les Bros éoutent We're an American Band, de Grand Funk Railroad. Quand les Ghostfacers préparent leur équipement, on entend Hocus Pocus, de Focus. La chanson entendue à la fête des fantômes est It's My Party, de Leslie Gore.

  • L’épisode fut diffusé le 24 avril 2008, soit deux mois après le précédent. En fait il est le premier à succéder à la grande grève des scénaristes et il fustige la télé réalité scriptée, dont la montée en puissance menaçant les fictions traditionnelles fut l’une des causes du conflit.

  • Le décorum de la séquence d’ouverture de l’épisode (superbes fauteuils devant une cheminée dans un décor très haute société britannique) est le même que celui de la présentation traditionnelle de l’émission Masterpiece Theatre, diffusée depuis 1971 sur PBS, le réseau public américain. Elle recouvre le plus souvent d’adaptations télévisées de grands classiques de la littérature anglaise, souvent réalisées par la BBC. Au théâtre sont venus s’agréger d’autres styles au fil des années, dont les récits à énigmes et des textes contemporains. Le style très reconnaissable de cette émission phare de PBS a été parodié à plusieurs reprises notamment lors de l’épisode Storyteller (7.16) de Buffy contre les vampires avec la narration initiale cette fois assurée par Andrew.

  • Le style simili documentaire de l’émission proprement dite des Ghostfacers évoque clairement celui du docudrama Ghost Hunters (Les Traqueurs de Fantômes), suivant les enquêtes d’un groupe de pseudo enquêteurs du Paranormal. L’émission est diffusée de puis 2004 sur Syfy et l’a été en France du D8. D’autres émissions du même genre existent : Ghost Adventures, The Dead Files ou encore la française R.I.P. (Recherches, Investigations, Paranormal), diffusée sur D17 etW9.

  • La fête d’anniversaire macabre reprend l’idée du film d’horreur culte Happy Birthday to me (1981). La même équipe de production canadienne réalisa simultanément My Bloody Valentine, qui participa lui-aussi à la vogue des Slasher Movies durant les années 80. Un remake, My Bloody Valentine 3D, fut filmé en 2008, durent la grève des scénaristes, avec la participation de Jensen Ackles.

  • L'épisode est considéré comme le pilote de la web série brossant la geste des Facers (Ghostfacers, 2010) et tournée sur le même mode de téléréalité.

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14. REJOINS-MOI
(LONG-DISTANCE CALL)

Scénario : Jeremy Carver
Réalisation : Robert Singer

I just talked to an 84-year-old grandmother who's having phone sex with her husband. Who died in Korea. […] Completely rocked my understanding of the word necrophilia.

Résumé :

Harcelé au téléphone depuis deux semaines par une ex-compagne décédée, Ben Waters accède à sa demande, « la rejoindre », et se suicide. Plusieurs habitants dans le voisinage ont reçu des appels de parents décédés qui leur ont tous demandé de se tuer pour les rejoindre ; chose étrange, le numéro utilisé est toujours le même, mais n’est plus en service depuis 100 ans ! Sam et Dean enquêtent, mais la situation se complique quand Dean reçoit un coup de téléphone de… son père.

Un monstre qui gonfle la facture téléphonique ? Ça, c’est diabolique !

La critique de Clément Diaz : 

L’épisode évoque celui du même nom de la Twilight Zone, dont il reprend l’argument (un parent décédé demandant à un vivant de se tuer pour le rejoindre). Mais il faut avouer que l’excellent Jeremy Carver semble bien moins à son aise sur ce sujet que sur le piège temporel précédent, ne parvenant pas à dépasser une intrigue convenue de départ : prévisibilité intégrale des situations, monstre sans personnalité, effets faciles et répétitifs, action comme cache-misère… le sujet de l’épisode se prêtait à l’émotion (comme chez Charles Beaumont), ou la terreur psychologique, mais ne marche clairement pas dans le suspense visuel, in fine la « ligne éditoriale » de Kripke, ce qui condamne d’entrée la tentative de Carver.

Malgré une introduction fort effrayante, l’épisode rabâche sans cesse son unique ressort surnaturel : les coups de téléphone de « l’au-delà », variée seulement lors de la séquence de l’ordinateur (manifestement pompée sur Ghost, mais bon…). On ne croit pas un seul instant à un appel de John, ce qui ruine le suspense général de l’épisode. La fausse piste du téléphone d’Edison eut pu fonctionner si elle avait été maintenue plus longtemps au lieu d’être rapidement expédiée en une scène. De fait, l’on assiste à une scission de l’intrigue en deux où chacun des bros part de son côté ; or l’expérience nous apprend souvent que séparer un duo d’héros dans une enquête la prive de sa dynamique, tout en rendant difficile la cohabitation des deux segments. Long distance call n’y échappe pas, le rythme s’effondrant dès que Sam rend visite à la fille harcelée. De fait, Carver se voit obligé de dénouer ses récits par de l’action pure, sans résolution agencée. L’absence de personnalisation des rôles secondaires est un autre problème, chez des victimes transparentes ou un monstre-du-jour certes bien ignoble, mais qui à part ouvrir les crocs et se friter avec Sammy ne dégage absolument rien. Ce serait un moindre mal si son action parlait pour lui (comme le Djinn de What is and what should never be), mais la répétition à satiété de son plan ne joue pas en sa faveur.

On apprécie quelques traits épars : alors même leur père a été crématisé il y a 2 ans, les Weuh parviennent encore à se disputer à son propos (niveau famille dysfonctionnelle, ils sont clairement en haut du panier), l’employé du téléphone accro au X et nos bros en durs de durs à cuire suscitent quelques rires, tandis que la critique d’une société hyperconnectée et ne pouvant se passer des outils de communication affleure sous le discours du monstre. L’épisode reste cependant le trou d’air de la saison.

La critique d'Estuaire44 : 

Long Distance Call traite d'un des grands classiques du Fantastique, l'appel en provenance d'outre tombe, de l’épisode de La Quatrième Dimension du même nom à Poltergeist II (1986) en passant par Making Contact (1985). On apprécie que Supernatural s’empare pleinement du sujet, en y apportant sa touche particulière. Foin de quête spirituelle ou d'émoi psychologique (hormis la relation filiale entre John et Dean, déjà examinée sous toutes les coutures), mais  place à un Monstre de la Semaine résolument efficace. En effet, entre le cynisme de son procédé, son sourire si aiguisé et son humour à froid, le roi du téléphone constitue un bel adversaire. Derrière ces péripéties, le récit brosse l’amer portrait toujours d’une Humanité toujours enfermée dans la solitude, malgré le développement des moyens de communication.

Par ailleurs la présence de plus en plus tangible de la date fatale se voit également bien rendue, il est poignant de voir avec quel empressement Dean s’accroche à n’importe quel espoir, de ce point de vue l’épisode met déjà en orbite l’arc final. Encore que Dean pourrait encore résulter davantage désespéré : après tout que son âme soi dévorée pourrait constituer un moyen d’échapper à l’Enfer (oui, être un tantinet psychopathe ne fait jamais de mal). On aime toujours quand une série télé nous entraîne dans des endroits originaux ou insolites et ce central téléphonique reste une belle trouvaille, de même que son opérateur totalement fondu. Un épisode solide, souffrant d'un certain classicisme de sa chasse au monstre le rendant parfois prévisible.

Anecdotes :

  • Dean vante à Stewie les mérites de son site fétiche, BustyAsianBeauties, évoqué pour la première fois dans Tall Tales et devenu une running joke de la série.

  • Les bros se font passer pour des policiers nommés Raimi et Campbell, une référence à Sam Raimi et à son acteur fétiche Bruce Campbell (Evil Dead, Xena la Guerrière…). Campbell fut également l’un des acteurs initialement envisagés par Kripke pour le rôle de John Winchester.

  • Sur le message de son répondeur, Dean indique se nommer Herman Munster. Il s’agit en fait du chef de famille de la série Les Monstres. Celui-ci évoque clairement la créature de Frankenstein, tout comme le Lurch de la série rivale, La Famille Addams.

  • La voix de John est bien assurée par Jeffrey Dean Morgan, crédité au générique comme Special Guest Star.

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15. LE SECRET DE L’IMMORTALITÉ
(TIME IS ON MY SIDE)

Épisode Mythologique

Scénario : Sera Gamble
Réalisation : Charles Beeson

I’ll see you in Hell…

Résumé :

Un docteur sadique et immortel enlève plusieurs personnes pour leur prélever des organes plus ou moins vitaux. Alors que Sam et Dean le pourchassent, Bobby contacte ce dernier : Rufus Turner, un chasseur parano, a retrouvé la trace de Bela. Sam continue d’enquêter sur le docteur dans l’espoir de lui soutirer le secret de l’immortalité qui rendrait inopérant le pacte de Dean, tandis que ce dernier va voir Turner, qui va lui révéler le secret de Bela…

Supernatural accueille aujourd’hui Frank Einstein…

La critique de Clément Diaz : 

Time is on my side (c’est moi ou un prix est décerné pour le scénariste qui trouvera le titrequitue ?) est le type même de l’épisode commençant modéremment pour ensuite monter dans un crescendo fulgurant jusqu’à un final d’anthologie, ici un des plus glaçants de toute la série. Les deux histoires de l’épisode doivent cohabiter, mais contrairement à l’épisode précédent, une cohérence est assurée par le sablier du destin de Dean dont le sable a bientôt fini de s’écouler, atténuant la sensation. Si l’horreur physique de l’enquête du jour est bien fignolée, c’est bien pour la conclusion-choc de l’arc Bela que l’épisode réussit son coup, avec une double confrontation finale d’une intensité dantesque.

L’intrigue du docteur attire l’attention par ses meurtres bien sanguinolents. Mention à l’ablation chirurgicale du cœur (idée géniale du cardiomètre), un des plus gros moments de gore total de toute la série, joyeusement immonde (il se confirme que l’auteure est encore plus sanguinaire que son patron, l’élève dépasse le maître). Si l’enquête sur le mad doctor reste schématique - l’intérêt de l’histoire s’axe davantage sur Bela - la personnalité totalement perverse du docteur y pallie amplement, avec un Billy Drago halluciné. Cette variation sur le thème de Frankenstein n’est pas sans évoquer le Some assembly required de Buffy mais en plus horrifique et malsain. On éprouve un vrai plaisir quand un Dean très inspiré se débarrasse de lui avec des raffinements de cruauté (on songe au châtiment d’Arvin Sloane à la fin d’Alias). Mais le docteur agit aussi comme révélateur des ténèbres de Sam, qui à son tour ne veut rien moins que violer les lois de la nature pour sauver son frangin. À ce titre, la dispute entre Dean et Sam, habituellement le « raisonnable », se montre d’une grande intensité, le premier préférant les flammes éternelles que de devenir un de ces monstres qu’il ne cesse de combattre (l’affaire Gordon est encore fraîche). Sam, toujours plus fuyant et adepte des solutions extrêmes, est plus inquiétant que jamais, tandis que Dean touche par son abnégation à rester fidèle à soi-même, fut-ce son éternité soit en jeu.

C’est cependant pour la clôture de The Bela Talbot affair que l’épisode culmine à ses cimes. Supernatural, assumant toujours ses influences, fait hurler de rire tous les X-Philes de la Terre (et au-delà) en donnant un rôle d’informateur pas commode à Steven Williams, qui incarnait le misanthrope Mr.X, l’informateur le moins… souriant on va dire, de Fox Mulder ! Sa longue scène avec Dean se montre passionnante par la présentation de ce chasseur paranoïaque misanthrope, demandant à Dean une sacrée dose de patience pour le voir cracher la vérité morceau par morceau. La confrontation Dean/Bela se montre électrique, leur tension, pour aussi antagoniste qu’elle soit, n’est curieusement pas dénuée de tension sexuelle : dialogues bruts, interprétation tendue, gros plans continuels, haine transpirant du visage de Jensen Ackles… la scène atteint une concentration de suspense inouïe, tandis qu’est dévoilé le secret de Bela. C’est cependant pour sa coda, chef-d’œuvre absolu de terreur glacée, que Time is on my side demeure incontournable (ah, le fatal décompte des minutes), lorsqu’explose la tragédie de Bela, qui par son individualisme, son orgueil, et surtout sa fierté à ne pas demander de l’aide, cloue son propre cercueil, et s’effondrant doucement devant l’inéluctable (magnétique Lauren Cohan), une vraie justice poétique. Jamais plan final n’aura exprimé un couperet de guillotine plus tranchant que ce bruit de porte fracassée… Tout semble aussi perdu pour Dean, et les chiens de l’enfer arrivent maintenant pour réclamer leur proie…

La critique d'Estuaire44 : 

C'est avec un impact total que Time is on my side (un titre très Doctor Who) frappe les trois coups d’un grand final  idéalement mis en orbite (le rôle par excellence d’un avant dernier épisode). La théorie folle retenue par Sam souligne éloquemment l'étendue de son désespoir et nous vaut une de ces intenses confrontations fraternelles ayant émaillé la saison. Le Dr Zombie est vraiment un méchant de haut vol, d'autant que les auteurs ne mégotent pas sur leurs effets et qu'il se voit interprété par le toujours génial Billy Drago. La scène de l'enterrement du frigo demeure sans doute l'un des plus horrifiques de Supernatural, tendance Contes de la Crypte. Les Winchester ne rigolent pas, nous oui. Les guests apparaissent d'ailleurs remarquables, puisque Steven Williams réussit une magistrale entrée en matière pour Rufus. Une histoire à la Buffy (Some Assembly Required, 2-02) avec une figure emblématique des X-Files, rarement la série aura aussi clairement affiché son double héritage.

On retiendra cependant avant tout les bouleversants et au combien dramatiques adieux de Bela, après que la séquence du Colt eut porté à son paroxysme cette captivante relation d'attraction/répulsion l'unissant à Dean. Tout le flashback et la conversation téléphonique entre elle et Dean (et sa conclusion) résulte absolument magistrale d'interprétation et de mise en scène. Jusqu’au bout Lauren Cohan aura défendu son personnage avec éclat, Le spectateur en a réellement le souffle coupé. On note d'ailleurs que Bela reste également la grande victime de la grève des scénaristes, son passionnait parcours se voyant abrégé (trop d'informations et de péripéties concentrées sur un unique épisode), alors que, contrairement à Ruby et Dean, elle ne reviendra plus par la suite. Avec le Colt, c'est le dernier espoir envisageable pour Dean qui s'évanouit, tandis qu'il vient d'avoir un aperçu pour le moins éloquent de son futur (très) immédiat. Tout est en place pour un éprouvant final, jusqu'au bout du suspense.

Anecdotes :

  • L’épisode marque la disparition de Bela Talbot, que l’on ne reverra plus par la suite, alors que nous en sommes à la saison 11. Kripke a indiqué que malgré le potentiel du personnage, la décision de la faire mourir était due à la difficulté d’avoir à justifier à chaque fois d’une rencontre au sein d’une série itinérante, mais aussi à son manque de popularité au sein du public de la série. Les fans tenaient à ce que Supernatural demeure exclusivement la série de Dean et Sam, l’épisode ayant le plus développé la présence de Bela, Red sky at morning, était celui ayant été le plus mal accueilli.

  • Le titre original Time is on my side est celui d’une chanson initialement interprétée par le tromboniste de jazz Kai Winding est son orchestre (1963). La version la plus connue en demeure toutefois la reprise effectuée par les Rolling Stones l’année suivante. Le succès rencontré par ce tube devait leur ouvrir les portes du marché américain, avec l’album 12 X 5, essentiellement composé de reprises. La chanson a également été employée dans le film Le Témoin du Mal (1998), où elle était sifflotée par un démon nommé Azazel (comme les Yeux jaunes), chaque fois qu’il possédait l’une de ses victimes.

  • Quand Sam étudie les empreintes digitales, Dean rétorque Okay, great. My man Dave Caruso will be stoked to hear it. Il s’agit d’une référence à cet acteur marquant des séries policières (Capitaine Furillo, New York Police Blues, Les Experts : Miami...). Lors de l'absolument foldingue The French mistake (6-15), Dean et Sam parodieront d'ailleurs Horatio Caine en répétant plusieurs fois le fameux rituel du chef des experts de Miami en enlevant/remettant leurs lunettes noires au milieu d'une « punchline ».

  • Quand il déclare qu’il va lui aussi pendre la pilule magique, Dean déclare : What is this, Sid and Nancy ? Il s’agit du leader des Sex Pistols, Sid Vicious et de sa fiancée Nancy Spungen, grands consommateurs de stupéfiants. En 1978 Nancy était découverte assassinée dans la chambre d’hôtel de Sid ce dernier décédait quatre mois plus tard d’une overdose.

  • Ici incarné par Billy Drago, grand spécialiste ès vilains (Les Incorruptibles, Charmed, X-Files Brisco County...), le bon Dr. Tom Benton est une légende urbaine issue du folklore américain. Vers 1816, de retour d’études menées en Allemagne, ce bon docteur du New Hampshire aurait mené des expériences sur l’immortalité, conduisant d’abord à la mort d’animaux, puis d’autochtones. Ces travaux maudits l’auraient conduit à devenir une espèce de mort vivant dont des apparitions furent relevées par des habitants de la région tout au long du XIXe et du XXe siècles, prélevant des vies pour alimenter la sienne.

  • Tiera Skovbye, la jeune Bela, reviendra dans la série jouer Honor dans Rock and a hard place (9-08). Curieusement, sa sœur cadette, Ali, jouera un rôle dans Plucky Pennywhistle's Magical Menagerie (7-14).
  • Dean déclare Yeah, zombie with skills, Dr. Quinn, Medicine Zombie, un clin d’œil à la série Dr. Quinn, femme médecin (1993-1998). Son actrice principale, Jane Seymour (la Solitaire de 007), avait également joué la mère du personnage de Jensen Ackles dans Smallville, Jason Teague, le petit ami de Lana en saison 4. Jason fut tué par une chute de météorites à la fin de cette saison, alors que Jensen avait été embauché pour la suivante, mais il quitta Smallville pour Supernatural.

  • L’excellent Steven Williams (Rufus Turner) avait préalablement travaillé avec Kim Manners dans 21 Jump Street (le Capitaine Fuller) et, bien entendu, dans les X-Files, où il incarnait X, le glacial informateur de Fox Mulder. Il apparaît également dans The Equalizer, Stargate SG-1, Véronica Mars... Rufus va participer à six épisodes de Supernatural, dont un retour en saison 11, lors de l’épisode Safe House.

  • Lors de l’épisode The Real Ghostbusters (5.09), Becky, la grande fan des romans Supernatural, révélera qu’en fait Bela n’a pas remis le Colt à Lilith, mais au bras droit de celle-ci, Crowley. Alors chef des Démons des Carrefours, il est appelé à devenir le Roi de l’Enfer et l’ennemi récurrent des Frères Winchester, mais aussi leur associé occasionnel. Il leur rendra d’ailleurs le Colt lors de l’épisode suivant, Abandon All Hope.

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16. LES CHIENS DE L’ENFER
(NO REST FOR THE WICKED)

Épisode Mythologique

Scénario : Eric Kripke
Réalisation : Kim Manners

HELP! NO! SOMEBODY HELP ME! SAM!! SAAAAAAAM!!!!!

Résumé :

Il ne reste plus que 30 heures de vie pour Dean. Sam convoque Ruby pour lui demander son aide, mais Dean n’a pas confiance en elle et l’emprisonne dans un piège à démons pour lui voler son couteau, seule arme pouvant vaincre Lilith. Dean, Sam, et Bobby lancent une attaque désespérée contre Lilith et ses sbires, mais les chiens de l’enfer sont maintenant tout proches…

The road so far...
Bienvenue à Supernatural fast-food. Plat du jour : un Dean cru, saignant, tout frais éviscéré…

La critique de Clément Diaz : 

Impitoyable course à la mort alimentée par l’énergie du désespoir, No rest for the wicked (encore un titre massif) est parcouru de bout en bout par un souffle tragique, pierre de touche d’une saison toujours plus inéluctable. Cet ultime sursaut condense action, émotion, horreur avec un rare impact, tout en exprimant un sombre fatalisme chez un Dean ne cessant de passer de la révolte à la résignation. Lilith dirige les débats par sa perversité foisonnante, donnant au duel final et sa coda d’apocalypse toute l’intensité nécessaire pour rendre KO le spectateur littéralement assommé par la violence envahissant l’écran.

Kripke reste fidèle à la bonne vieille recette Anasazi X-Filesienne : le finale s’articule autour d’une kyrielle de scènes toutes plus haletantes les unes que les autres. À partir de la prémonitoire introduction, un sentiment d’urgence sans espoir déverse toute sa frénésie, jusqu’à diviser les deux frères : Sam est prêt à faire un pacte ambigu avec Ruby, même si cela doit le transformer en serviteur de ténèbres, là où Dean refuse de prendre une porte de sortie qui le condamnerait. L’amour fraternel, soubassement de la série, s’exprime d’une manière particulièrement forte et déchirante alors que les frères sont prêts à tout pour l’autre (leur duo chanté dans l’Impala), mais cela s’étend aussi à l’amour paternel lorsque Bobby ne veut pas laisser ceux qu’il considère comme ses fils s’amuser sans lui avec Lilith ; c’est simple et beau. Le retour de Ruby s’effectue avec un grand impact, consommant ouvertement la terreur de Dean, qui ne va cesser de descendre un escalier sans fin vers l’horreur alors que les démons forment un cercle de plus en plus rapproché autour de lui. Chaque poussée du crescendo parvenant à rendre la situation plus terrible pour lui, mais aussi pour Sam, dont la passivité volontaire ne se montre pas moins douloureuse, sa peur l’empêchant de prendre un ascendant qui pourtant serait décisif, comme il le réalisera hélas trop tard.

Supernatural raffole des enfants démoniaques, une des figures les plus dérangeantes qui soit par cette incarnation de l’innocence devenue outil du démon. Elle nous offre à cette occasion un des plus splendides représentants de cette espèce avec Lilith, dans un remake avoué de It’s a good life, un des épisodes les plus effrayants de La Quatrième Dimension. On retrouve la figure de cet enfant-roi semant la terreur dans une respectable petite famille, jouet de ses caprices abominables et mortels. La pure petite fille s’y montre aussi gratuitement sadique qu’Anthony Fremont ; l’épisode ne rougit en rien de la comparaison avec son modèle, surtout grâce à Sierra McCormick, incarnation vivante de ce cauchemar éveillé, et au juste focus sur sa famille se délabrant toujours davantage.

Mais c’est dans ses cinq dernières minutes que le finale déchaîne un furieux pandémonium, lors d’un tonitruant twist final achevant de crucifier les derniers grammes d’espoir des frères - Katie Cassidy signe sa meilleure performance, on aura rarement vu autant de folie dans le jeu d’une actrice - La mutilation sauvage de Dean (quelle mise en scène !) se montre si gorissime qu’elle traumatisera même les mordus du genre, surtout qu’elle est couplée à la démence de la démone et à l’impuissance révulsée de Sam. Le plan final achève de couler dans le marbre ces pures 42 minutes de cauchemar. L'anxiogène réalisation de Kim Manners, au sommet de son talent de conteur horrifique, termine de faire de No rest for the wicked un des finales les plus ouvertement choquants de la télévision.

La critique d'Estuaire44 : 


No rest for the wicked constitue bien le final épique et sur le fil du rasoir que l’on espérait ; outre le coup de génie de renoncer au happy end trop facile, les auteurs se montrent remarquablement sadiques, cette fois non pas envers les Winchester, mais bien envers le spectateur. Parce ce que le prodige de l’épisode, par sa narration et son timing, consiste à ce que jusque bout, avec une totale véracité, on peut (et on veut) y croire. Un remarquable travail, nous faisant demeurer en haleine jusqu’à l’effroyable dénouement. Alors oui, la situation est objectivement désespérée, mais après tout ce sont les Winchester, ils marquent des points et le vieux Bobby, toujours si rusé, entre dans la danse. Les diaboliques scénaristes ont l’habileté de concentrer sur sa conclusion toute l’essence de ce final vers lequel converge toute la saison, afin d’encore en optimiser l’impact, au bout du suspense. Plusieurs excellentes scènes viennent encore rehausser le succès de cet ébouriffant final, comme les scènes d’adieux dignes mais bouleversantes entre les deux frères, ou le cri du cœur de Bobby (la famille ne s’arrête pas au sang). Même la Ruby de Katie Cassidy, enfin réellement expressive, tient là son meilleur épisode. On aime comment, après une tirade absolument magnifique, Dean décide tout de même de balancer par dessus bord la dignité chevaleresque, pour se battre jusqu’au bout. C’est ça, un Chasseur, pas un Perceval en armure et oriflamme.

Sous nos yeux éberlués, Lilith nous gratifie également d’un savoureux pastiche de l’un des meilleurs épisodes de The Twilight Zone, It’s A Good Life, poussant jusqu’à son terme le concept d’enfant démoniaque ! On s‘y croirait, même si l’on n’y retrouve pas les fantasmagories horrifiques issues de l’imagination de ce qui demeure un enfant. Lilith se contente de terminer ses victimes, ce qui concorde d’ailleurs avec l’univers Supernatural. La saison n’allait évidemment pas prendre congé sans le petit moment Gore au coin du feu et l’atroce mort de Dean se pose un peu là dans ce domaine, un vrai coup de poing pour le spectateur. Ils l’ont fait ! Petite pensée pour Bela. Bon, on se doute bien que le Dean sera bien de retour sur nos écrans, mais tout de même. Le pouvoir ressuscité bien tardivement de Sam introduit également la période à venir. Seul (léger) regret, la vision de l’Enfer ne s’imposait pas, dans ce domaine l’imagination vaut toujours mieux que la démonstration (comme avec Bela).

Anecdotes :

  • La famille terrorisée par Lilith se nomme Fremont, tout comme celle de It’s a Good Life, l’épisode de La Quatrième Dimension inspirant clairement cette séquence.

  • Le dessin des Chiens de l’Enfer aperçu dans le livre est une œuvre de Todd Lockwood intitulée Cerbère (1994). Lockwood est un illustrateur de Fantasy, connu pour ses participations aux manuels et romans du jeu de rôle Donjons et Dragons, à diverses magazines spécialisés, ainsi qu’au jeu de cartes Magic : l’Assemblée. Cerbère est le dessin qui a véritablement lancé sa carrière, lui valant des distinctions prisées des amateurs, tels le World Fantasy Art Show Award et Chesley Award.

  • Katie Cassidy quitte ici la série, mais Ruby sera de retour en saison 4, ayant trouvé un nouveau vaisseau de chair. Elle sera désormais incarnée par Geneviève Cortese, future épouse de Jared Padalecki.

  • No Rest for the Wicked est le titre d’un album d’Ozzy Osbourne (1995). Dans un premier temps, l’épisode devait s’intituler No Quarter, tout comme l’une des chansons emblématiques de Led Zep (1973).
  • La voiture de police porte le numéro 54, un clin d’œil à la sitcom Car 54, Where Are You ? (1961-1963), autour de deux policiers patrouillant dans le Bronx.

  • Le permis de conduire de Dean est au nom d’Hagar, Sammy Hagar est un chanteur et guitariste de hard rock, membre du groupe Van Halen.

  • Carry On my Wayward Son, de Kansas, accompagne la traditionnelle séquence de The Road So Far, récapitulation de la saison. Dans l’Impala, Sam et Dean entonnent le Wanted Dead or Alive, de Bon Jovi. Elle est issue de l’album Cross Road (1994), un possible clin d’œil au Démon des Carrefours.

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 saison 3Saison 5

Supernatural

Saison 4

1. La Main de Dieu (Lazarus Rising)

2. Anges et Démons (Are You There, God? It's Me, Dean Winchester)

3. Au commencement (In The Beginning)

4. Métamorphose (Metamorphosis)

5. Film d’épouvante (Monster Movie)

6. Le Mal des fantômes (Yellow Fever)

7. La Légende d’Halloween (Its the Great Pumpkin, Sam Winchester)

8. Le Puits aux souhaits (Wishful Thinking)

9. Souvenirs de l’au-delà (I Know What You Did Last Summer)

10. Disgrâce (Heaven and Hell)

11. Entre les murs (Family Remains)

12. Comme par magie (Criss Angel Is A Douchebag)

13. L’Esprit vengeur (After School Special)

14. Le Venin de la sirène (Sex and Violence)

15. De l’autre côté (Death Takes a Holiday)

16. Le Premier Sceau (On the Head of a Pin)

17. Nés pour chasser (It's a Terrible Life)

18. Le Prophète (The Monster at the End of This Book)

19. Trois Frères (Jump the Shark)

20. Le Pénitent (The Rapture)

21. Le Diable au corps (When the Levee Breaks)

22. Le Réveil de Lucifer (Lucifer Rising)

 


1. LA MAIN DE DIEU
(LAZARUS RISING)

Scénario : Eric Kripke

Réalisation : Kim Manners

- Dean. Your chest was ribbons. Your insides were slop. And you've been buried four months. Even if you could slip outta Hell and back into your meatsuit...

- I know. I should look like a Thriller video reject.

Résumé :

Quatre mois après son horrible trépas et sa chute en Enfer (cf. épisode précédent), Dean Winchester se réveille, vivant, et le corps intact dans sa tombe. Après s’être dégagé, il retrouve la trace de Bobby et Sam (alors prenant du bon temps avec une jolie fille) et enquêtent sur l’identité de l’entité ayant réussi à accomplir un tel prodige. Ils vont aller de surprises en surprises…

Où vous n’aurez plus envie d’appeler votre cher(e) et tendre « mon ange ».

La critique de Clément Diaz : 

L’ouverture de cette quatrième saison se tenait face à un défi : comment légitimer la résurrection de Dean ? Eric Kripke y parvient haut-la-main avec une enquête palpitante parsemée de révélations tonitruantes développant deux arcs de la saison promettant énormément ; mais le récit sait ne pas sacrifier le relationnel, plus que jamais le cœur de cette série. Si le retour gagnant d’un réjouissant personnage à la personnalité encore mystérieuse nous ravit, c’est bien entendu pour la spectaculaire entrée en scène de Castiel, porté par un magnétique Misha Collins déjà en pleine possession de ce rôle fascinant que l’épisode frappe d’entrée un coup massif.

Les sept premières minutes de l’épisode recèlent la substantifique mœlle du talent monstrueux de Kim Manners. Sans presque aucun dialogue, il nous fait partager l’état de choc, l’incompréhension, la faiblesse, de Dean lors de sa résurrection, d’une manière certes proche de la fameuse scène du cercueil de Kill Bill 2 mais aussi du début de la saison 6 de Buffy. Si l’on peut préférer le contenu plus horrifique des modèles, la caméra de Manners, très lente, presque fixe nous fait plonger dans un temps presque arrêté, inquiétant. Par suite, les scénaristes montrent qu’ils n’ont rien perdu de leur virtuosité en rendant les scènes de retrouvailles aussi comiques (Bobby et Sam tentant chacun de tuer Dean) qu’émouvantes (la réalisation de l’incroyable vérité). Le numéro d’adresse de Kripke est de concilier un tempo beaucoup plus retenu que l’habitude de la série pour nous faire rentrer dans la tête de nos personnages ici beaucoup plus sonnés qu’à l’ordinaire, et une succession démente de scènes-chocs, chacune imprimant une force horrifique ou menaçante.

À ce titre, la double crémation oculaire se montre particulièrement atroce, tandis que ces moments où la terre tremble témoignent du savoir-faire de l’équipe technique de la série, toujours prompte à nous en mettre plein la vue avec très peu de moyens. Voir les démons infernaux être autant terrorisés par le new boss in town en dit long sur l’impact de l’inconnu, tandis que le twist de l’identité de la jolie fille est également un joli coup d’audace. Lorsqu’on connaît la suite, on ne peut que sourire quand Genevieve Cortese (aujourd’hui Mme Padalecki) fait son entrée en tant qu’amante du personnage de Jared Padalecki ! Mais indépendamment de l’anecdote, c’est de voir cette sorte de coach préserver un mystère bien à elle qui fascine, l’on se doute bien qu’il y a anguille sous roche.

La grande révélation finale était attendue au tournant ; l’on ne peut que se rendre à l’évidence : après nous avoir mis au bord de la crise de nerfs, Kripke parvient à trouver une solution aussi démesurée qu’élégante, tout en plaçant immédiatement la barre très haut pour ce que le personnage doit apporter à la série. Kripke se montre d‘une exigence assez audacieuse, mais Castiel va bien se révéler comme un atout brillantissime de la série. Et cela commence dès son entrée aussi impériale qu’inquiétante, d’une intensité survoltée grâce aux angles de mises en scène parfaits de Manners : travelling vertical nous le faisant découvrir, légère contre-plongée inclinée alors qu’il dévisage Dean, plan américain pour l’effet spécial des ailes… mais aussi grâce à l’électricité statique déployée par un Misha Collins extrêmement intériorisé, mais à la présence physique éblouissante. Après la tragédie intimiste d’In my time of dying et la décharge d’adrénaline de The Magnificent Seven, la série continue d’affirmer son brio pour les season premiere ! Une saison qui démarre déjà au sommet, et dont on trépigne d’impatience à l’idée de voir la suite !

La critique d'Estuaire44 : 

Lazarus Rising ne se contente pas de représenter un parfait lancement de saison, mais va instaurer un véritable reboot de l'univers de la série. Kripke s'extirpe de la classique dichotomie d'un pilote (scénario du jour Vs.mise en place du décor) en biffant purement et simplement la première option. Un choix audacieux (l’épisode se limite au retrouvailles puis à un enquête express) mais lui permettant de contenir une quantité astronomique d'informations, tout en modulant à loisir son timing. Après le terriblement suggestif gros plan sur l'oeil de Dean contemplant l'Enfer, sans doute l’une des images la plus anxiogène de la série, l'épisode peut ainsi nous offrir toute la magnifique séquence quasi muette du retour de Dean, impeccablement mise en scène par Kim Manners et interprétée avec intensité par Jensen Ackles.

 Comme Dean reprend vie dans son cercueil, sans personne pour l'aider à en sortir, les amateurs de Buffy remarqueront au passage qu'un Angel of the Lord ne s'en sort guère mieux qu'une apprentie sorcière. On aime beaucoup le réalisme montrant le Héros américain pillant sans aucun état d'âme un magasin, le Tao de la survie reste bien la Bible des Chasseurs. On apprécie par ailleurs  l’émotion des diverses retrouvailles, avec, comme souvent dans Supernatural, l'humour surgissant envers et contre tout (l'Impala profanée, l'eau bénite).

Le récit a la cruelle intelligence d'instiller dès ce moment le poison du mensonge entre les, deux frères, d'ailleurs bientôt nantis de coachs pour le moins antagonistes. La dérive de Sam est déjà parfaitement explicite, avec une Ruby II pour laquelle, pour diverses raisons, on éprouve déjà un gros coup de cœur (et puis, avec le recul, cette entrée en scène de Geneviève Cortese est évidemment très amusante). La quintessence, le centre de gravité de l'épisode demeure cependant l'avènement de Castiel, annoncé avec éclat par des scènes à la fois terrifiantes et originales dans la série (dont la crémation des yeux, moins stylisée que pour le Métatron des X-Files, nous sommes bien dans Supernatural). La rencontre avec Dean, s’avère spectaculaire et impeccablement dialoguée.

Chapeau bas devant la prestation du formidable Misha Collins, à qui il suffit d'apparaître pour doter instantanément Castiel de mystère, immanence et charisme. Quelle entrée ! Et encore, l'humour est encore absent mais il reste intéressant de redécouvrir Castiel avant qu'il ne devienne « Cas », l'ami des  Bros, pour les bons et les mauvais jours. Il indique déjà la vraie nature des Anges dans Supernatural. Non des angelots avec Lyre dorée et auréole, mais plutôt des tueurs ailés surpuissants, avec, tout là-haut, un Père si longtemps énigmatique et distant, voire absent, bien davantage qu’aimant et compatissant. Le décor est idéalement planté pour cette saison 4. Castiel va déployer ses ailes et hisser Supernatural jusqu'à de nouveaux sommets.

Anecdotes :

  • On apprend que Bobby a pour second prénom Steven.

  • Le tigre peint sur le mur de la chambre de Sam est la m^me que celle présente sur le van d’Andy dans l’épisode Simon Said (2.05).

  • Sur le journal que lit Dan dans la station-service, on voit que nous sommes le 18 septembre 2008, soit la date de diffusion de l’épisode.

  • Pour la première fois la fameuse séquence du The road so far ouvre la saison, jusque là elle ne figurait que lors du dernier épisode d’une période.

  • Genevieve Cortese reprend ici le rôle de Ruby, jusque-là tenu par Katie Cassidy. La majorité de ses scènes se déroulera en duo avec Jared Paladecki, avec qui l’amour va naître. Le couple s’est marié le 24 septembre 2010 et a eu deux enfants depuis. Genevieve Cortese est également connue pour sa participation aux séries Wildfire (2005-2008) et FlashForward (2009-2010).

  • Misha Collins devient ici l’Ange Castiel. Cas répond toujours à l’appel alors que nous approchons du terme de la saison 11, après avoir connu moultes et moultes aventures et mésaventures. Immensément populaire auprès des fans le considérant depuis longtemps comme le quasi troisième héros de la série, Cas va faire l’objet de toute une vague fanfictions autour de la nature exacte de la relation le liant à Dean (le Destiel). Dans le commentaire de l’épisode Au commencement (4-03), Eric Kripke déclare que le costume de Castiel emprunte à celui de John Constantine dans les comics Hell Blazer, dont il est grand fan ; mais il évoque aussi le fameux imper élimé de l'inspecteur Columbo.

  • Très actif sur Twitter et durant les conventions,  Misha Collins a pleinement participé au lien très fort existant entre la série et son public. Après de brillantes études en sciences sociales, il a intégré l’équipe de la Maison Blanche chargée de gérer son personnel, sous l’administration Clinton. Se consacrant ensuite à l’écriture de poésies et à sa carrière de comédien, Misha Collins a notamment participé à Charmed, 24h Chrono, Urgences, Nip/Tuck, Ringer

  • Quand Misha Collins auditionna, il s’imaginait que c’était pour un rôle de démon, car les Anges n’étaient pas encore apparus dans la série. Leur entrée en scène va conduire la série à connaître un fil rouge biblique, ce qui n’était pas le cas lors des trois premières saisons.

  • Selon la tradition ésotérique, Castiel est l’Ange du Jeudi. Supernatural était alors diffusé le jeudi soir.

  • L’Amulette de Dean  lui est rendue, après que Sam l’ait portée durant l’intersaison.

  • Le titre de l’épisode fait référence à Lazare de Béthanie, ressuscité par Jésus-Christ (Évangile selon Jean, chapitre 11).

  • Dean prend comme pseudonyme Wedge Antilles quand il cherche à repérer le téléphone de Sam, il s’agit d’un clin d’œil à l’un des membres de l’Alliance rebelle dans Star Wars.

  • Durant la séquence The Road So Far, on entend You Shook Me All Night Long d’AC/DC. Quand Dean arrive à la station service, on entend In the Shadow of the Valley, par Lost Weekend Western Swing Band Quand Dean et Bobby trouvent Sam, on entend Fight Son des The Republic Tigers. Quand Dean évacue l’iPod de Sam de l’Impala, celui-ci diffuse Vision de Jason Manns. Quand Sam revient du dîner, on entend I'm So Blue, de Katie Thompson et Martyn Laight.

  • À la station service, Dean s’empare d’un exemplaire de Busty Asian Beauties. Sa passion pour ce magazine et son site internet est une plaisanterie récurrente de la série depuis l’épisode Tall Tales (2.15).

  • Changements dans l’équipe : Sera Gamble, productrice et scénariste, est promue superviseur de la production. Le scénariste Jeremy Carver, qui travaillait à la supervision des scénarios, en devient le superviseur principal, son ancien poste étant assuré par une nouvelle recrue, la scénariste Julie Siege, en collaboration avec la scénariste Cathryn Humphris. John Shiban quitte définitivement la série.

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2. ANGES ET DÉMONS
(ARE YOU THERE, GOD? IT'S ME, DEAN WINCHESTER)

Scénario : Sera Gamble, d’après une histoire de Sera Gamble & Lou Bollo

Réalisation : Phil Sgriccia

- You built a panic room ?

- I had a week end off.

Résumé :

Plusieurs chasseurs ont été retrouvés assassinés, les tripes arrachées. Sam, Dean, et Bobby comprennent que les responsables sont les fantômes des victimes que les chasseurs n’ont pas réussi à sauver et qui se vengent ainsi. Bientôt, pas moins de cinq fantômes se mettent à les harceler. Toujours incrédule à l’existence des Anges (sans parler de Dieu), Dean va apprendre pourtant de Castiel le but ultime de Lilith…

Mieux que la rave party, la ghost party : apportez vos tripes, on vous en débarrasse au vestiaire.

La critique de Clément Diaz : 

L’épisode me paraît souffrir de deux faiblesses d’écriture : l’épisode commence par le marronnier de la litanie de meurtres que notre trio n’arrive pas à empêcher (un cliché bien connu des amateurs des Avengers), puis enchaîne sur la réitération incessante d’une seule idée, celle des fantômes apparaissant toutes les minutes pour tourmenter nos héros ; leur numéro finit par lasser très vite alors qu’il est répété ad nauseam. Cependant, on apprécie le triple call-back de ces anciens personnages de la série revenus ici faire un petit coucou, la découverte de la cave de Bobby (parano un jour, parano toujours), tandis que la Mythologie de cette saison continue de se développer grâce au toujours rigolard Castiel.

Malgré de joyeux moments gore réalisés sans doute par des maquilleurs ayant sniffé de l’héro et fait bamboula toute la nuit précédente, on éprouve une certaine peine à s’immerger dans une histoire où notre trio ne fait que courir d’un cadavre à l’autre. Une fois ce trop long temps d’exposition achevé, le duo Gamble-Bollo parvient à électriser l’ensemble grâce au triple retour d’Henriksen, de Ronald (le geek malchanceux de Le polymorphe, saison 2), et de cette bonne vieille Meg. Si Ronald et les deux petites filles (oui, les gars, on a compris que vous connaissiez Shining par cœur) ne font que de la figuration et qu’Henriksen se contente de quelques phrases fourre-tout, les auteurs parviennent heureusement à rentabiliser l’atout Meg par un détour malin : ce n’est plus la démone auquel on a affaire, mais à la jeune femme dont elle avait pris le corps, et qui vit son destin scellé quand Dean balança son corps par la fenêtre dans Daeva (saison 1).

Ce faisant, l’épisode ouvre une fenêtre sombre sur la nécessité pour nos frères de verrouiller leurs cœurs, pour ne pas se préoccuper du trépas des humains dont ils tuent les démons ayant pris possession d’eux, faute de quoi, la culpabilité les briserait irréversiblement. Dans le rôle de cette jeune femme morte par la maladresse de nos frères et hurlant vengeance, Nicki Aycox change brillamment de registre (et d’apparence !) et apporte intensément lors de ses duels. Le raccordement inattendu à la Mythologie par Bobby puis Castiel élève encore les débats quant aux enjeux de la saison. La bataille finale, quoique correctement filmée par l’expérimenté Phil Sgriccia, ne fait toutefois que jouer sur l’apparition/disparition des spectres et à des fusils mécaniquement déchargés, bridant grandement l’adrénaline souhaitée. Cependant, voir Sam de plus en plus sec et saignant nous montre également qu’il va falloir le surveiller lui aussi, on sent que mine de rien, les ténèbres commencent à le gagner, rendant la présence de Ruby d’une anxieuse ambiguïté.

L’épisode trouve sa valeur grâce au Dean show : le voir piquer une crise quand cet athée convaincu se trouve face à la possibilité de l’existence de Dieu nous vaut une scène de déni vraiment hilarante, qui touche au gag gratiné quand il apprend le lendemain l’existence de Lucifer (ça fait beaucoup à digérer là !). Bien entendu, la réapparition de Castiel lors de la longue coda entraîne une petite explication bien saignante. Cette vision des anges comme des soldats exterminateurs qui ont laissé amour divin et compassion au vestiaire pour désentripailler les démons est certes très bizarre, mais cela donne un décalage assez amusant entre le comportement attendu et celui réel du personnage. D’autant que bon, le livre de l’Apocalypse nous décrit bien une guerre entre démons et anges, alors on comprend que ces derniers tirent un peu la gueule. Castiel dégage cependant une véritable inquiétude, relativisant grandement le combat de nos frérots, simple petit détail d’une guerre beaucoup plus importante se préparant, et franchement angoissant quand il menace Dean de le renvoyer à la poêle à frire là tout en bas. Castiel semble tout aussi impitoyable et sans pitié que ceux qu’il combat (les temps de guerre…). Avec une Ruby plus fragile, « gentille », l’inversion de Kripke voyant les démons plus sympathiques - du moins en apparence - que les anges ne manque décidément pas d’air ! Le grand roulement de tambours sur la menace Lucifer achève cet épisode sur une note de suspense fort bienvenue. Les enjeux de la saison sont maintenant posés !

La critique d'Estuaire44 : 

Are You There, God? It's Me, Dean Winchester déçoit par la faiblesse de son histoire du jour. Dean paniqué à l'idée d'être l'Elu et la St Barthélémy sanguinaire des Chasseurs sont certes des concepts prometteurs, d’autant que leur parano solitaire les transforme logiquement en cibles solitaires. Hélas le coup des fantômes revendicatifs attaquant les prétendus responsables de leur mort devient très vite ultra répétitif, tant le même circuit se réitère encore et encore. D’ailleurs les auteurs vont désespérément tenter de pimenter la sauce avec divers artifices plus ou moins convaincants, comme des réapparitions plus rapides qu’à l’ordinaire, ou surtout l’emploi de personnages rn call-back. Mais ce procédé aussi devient répétitif itou, puisque seulement 4 personnages tournent en boucle encore et encore, et pas forcément les plus captivants des trois premières saisons, hormis Meg.

La plus intéressante (et mieux interprétée) des visiteurs en fait cependant trop dans le mélo avec cette histoire de petite sœur. On lui doit pourtant la plus forte scène de la séquence, avec la révélation du visage sombre de Sam. Ca fait froid dans le dos, Ruby a bien bossé, la gueuse. Bobby trouve la clé de l’énigme, avec une vitesse et une aisance vraiment trop ahurissantes pour ne pas devenir artificielles, Giles est dans les cordes. Hormis la découverte du nouveau décor récurrent qu’est la géniale cave-bunker du dit Bobby (promise à de nombreuses merguez parties), on se dit que tout cela va être un coup pour rien. Mais c’est alors que survient la grandiose scène de conclusion, confirmant que a) Misha Collins est le casting du siècle, b) ces rencontres Dean/Castiel vont devenir l’un des atouts majeurs de la saison, c) c’est parti pour l’Apocalypse, comme à Sunnydale, mais là celle du Livre de la Révélation selon St Jean. L’épisode confère son fil directeur à la saison, avec Lilith ayant entrepris de faire tomber les Sceaux afin de libérer la bête, Lucifer en personne. L’intervention de l’Ange du Rire Franc et Joyeux demeure toutefois trop tardive pour compenser les faiblesses du récit.

Anecdotes :

  • L’épisode est co-écrit par Lou Bollo, le principal directeur des cascades de la série. Bollo co-écrira un autre épisode de la saison, Le puits aux souhaits, et apparaîtra dans son propre rôle dans le totalement barré Arrêt sur image (saison 6).

  • Nicki Aycox (Meg 1) apparaît ici pour la dernière fois.

  • If you're gonna shoot, shoot. Don't talk déclare Bobby à Dean après vaporisé Donald. Il s’agit d’une reprise d’une des célèbres répliques du film Le Bon, la Brute et le Truand.

  • Le titre original est une reprise de celui du best-seller de Judy Blume Are You There, God ? It's Me, Margaret (1970). Le roman raconte l’histoire d’une jeune fille dont les parents sont de deux religions différentes, juive et chrétienne. Margaret se demande pour quelle religion elle va opter, au moment où elle devient femme.

  • I thought Angels were supposed to be guardians : fluffy wings, halos. You know, Michael Landon.Not dicks déclare Dean à Castiel. Il s’agit d’une référence à la série Les routes du Paradis (1984-1989), où Landon interprétait un Ange parti à la rencontre des Humains.

  • Le poster présent dans la cave de Bobby représente l’actrice Bo Derek, dans le film Elle de Blake Edwards (1970).

  • Durant la séquence récapitulative, on entend Lonely Is the Night, de Billy Squier.

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3. AU COMMENCEMENT
(IN THE BEGINNING)

Scénario : Jeremy Carver

Réalisation : Steve Boyum

Sammy, wherever you are, Mom is a babe!… I'm going to hell. Again.

Résumé :

Castiel entraîne Dean en 1973 où il rencontre ses parents, alors tout jeunes, ainsi que la famille de Mary. Il réalise qu’il va participer aux événements qui ont déclenché la malédiction des Winchester lancée par Azazel. Il va alors mettre tout en œuvre pour changer le cours du temps. Mais était-ce bien le but de Castiel ?…

Définition d’ « Ange du Seigneur » : Seigneur du Temps sans TARDIS. Ouais, on comprend pourquoi le Castiel il a toujours une tronche d’enterrement.

La critique de Clément Diaz : 

Le grand flash-back dans la vie des héros est aujourd’hui un passage obligé pour les séries télévisées. Cependant, Supernatural y imprime une brillante originalité, semblant démarrer comme un remake fun de Retour vers le futur avant de bifurquer vers des eaux plus ambitieuses. En effet, nous ne pouvons croire un instant que Dean parviendra à modifier le passé, car cela annulerait les trois premières saisons comme nous les connaissons (même la spécialiste en contorsions scénaristiques qu’est Dallas a limité les frais à une saison). Jeremy Carver, déjà auteur du génial Mystery spot, confirme son aisance dans le thème du voyage temporel et va substituer au « est-ce que ? » le « comment ? » et construire un suspense avant tout émotionnel, centré sur un Dean déchirant dans sa poursuite désespérée à empêcher l’inéluctable. La superbe écriture de Mary et Samuel Winchester, mais aussi d’un Azazel plus pourriture que jamais, légitime cette orientation alors même que l’action est menée sans temps mort. In the beginning est bien un modèle d’efficacité narrative à l’américaine, sachant émouvoir par des personnages sans cesse plongés dans une action trépidante.

Au lieu de la virtuose superposition comédie/drame de Mystery Spot, Carver opte pour une non moins virtuose progression dramatique, démarrant dans la comédie, puis passant par le suspense, puis l’horreur, pour aboutir à la terreur pure, portée à un degré tellement élevé que la coda en gardera des marques. De fait, le trompe l’œil initial voyant Dean et John faire connaissance reste humoristique, et c’est alors qu’en un seul plan, tout bascule avec l’attaque de Mary, éjectant de facto John à l’arrière-plan. Dès lors, l’épisode captive le fan par une chaîne de rebondissements explosifs, avec la véritable situation de Mary (magnifiquement incarnée par la sublime Amy Gumenick, à la ressemblance idoine avec Samantha Smith), superbement émouvante dès lors qu’elle fait le vœu d’un avenir loin des souffrances des chasseurs, condamné hélas à ne jamais se réaliser, puis l’irruption d’Azazel, toujours roi des marchés de dupes, ainsi que l’énorme twist du dernier acte, et le pacte final, tout en insérant des scènes d’action propres à exciter les nerfs. Les X-Philes s’étaient déjà régalés de l’apparition de l’Homme à la Cigarette (L’Épouvantail, 1-11), autant dire que la venue de Mitch Pileggi ne pouvait que susciter une standing ovation. Bourru mais généreux, et jouant de son impressionnante présence physique, Pileggi n’est pas qu’un guest appelé spécialement pour créer l’événement, mais aussi un casting affûté pour jouer ce patriarche sombre, impitoyable, mais inarrêtable, finalement assez voisin de Skinner, d’autant que par sa manie de ne pas respecter ses ordres tout en suivant le même objectif, Dean prend des allures de Mulder ! La partition demandée à Pileggi a beau être extrêmement étendue, l’acteur la transcende par sa fascinante puissance de jeu.

Si la vivacité courageuse de Mary illumine l’épisode d’une lumière claire, la lumière sombre est apportée en grandes pompes par ce damné félon d’Azazel, qui ajoute au démoniaque une certaine lubricité poisseuse. Ses marchés pervers broient des vies humaines avec une mortelle efficacité. À ce titre, le coup de poignard et l’horrible serment final se montrent d’un sadisme raffiné, tandis que ses assassinats glacials nous rappellent combien ces yeux jaunes s’illuminant soudainement ont su nous effrayer. Après 12 saisons, Azazel, le premier Big Bad de la série, demeure toujours une des plus intenses créations de Supernatural. Même mort, il continue d’éprouver nos frères au-delà du supportable. Bien sûr, on peut penser que Castiel aurait pu s’y prendre plus simplement, mais vu son caractère, il est patent qu’il privilégiera plutôt les méthodes hardcore pour former son padawan ! Avec cinq minutes seulement à l’écran, Misha Collins rayonne d’intensité à chaque apparition, et l’on comprend sans peine que ce personnage au départ simple ajout d’une saison, ait rapidement été promu au rang de personnage majeur de la série. Le cliffhanger, pour aussi simple qu’il soit, n’en est pas moins à sensation !

La critique d'Estuaire44 : 

In the Beginning débute par le départ en catimini de Sam d'un de ces motels estampillés SPN, pour une nuit de turpitudes diverses et variées avec la Ruby. La scène, entièrement muette, s'avère remarquable par le malaise qu'elle suscite déjà. Il y a quelque chose de pourri au royaume des Winchester. Et d'un coup d'un seul Castiel apparaît et propulse Dean dans le tout premier de ces similis crossovers entre Supernatural et Retour vers le Futur, qui verront les Bros voyager de manière très similaire à Doc et Marty. Les auteurs ont d'ailleurs l'élégance d'insérer un clin d'oeil sympathique à la mythique DeLorean, c'est judicieux. Le grand mérite de l'épisode consiste à ne pas se contenter de surfer sur une idée originale et rigolote mais de s'en servir pour passer progressivement de la comédie réussie (les 70's joyeusement caricaturaux, l'arrivée de l'Impala) à une réécriture magistrale et terriblement assombrie de la mythologie même de Supernatural : la malédiction familiale des Winchester. Pour cela le récit use de plusieurs idées fulgurantes, comme un John totalement en dehors de la Chasse et une Mary au contraire immergée dans cet univers, une fabuleuse inversion de perspective, que la parfaite interprétation rend poignante (lumineuse Amy Gumenick).

On adore, par ce que sonne tellement juste, que Dean ne s'arrête aux diverses conséquences d'une modification des évènements, la famille avant tout c'est tellement lui. Évidemment cela échoue (même le Docteur a dû en payer le prix lors de Waters of Mars), malgré la ludique réapparition du Colt, car Azazel s'avère un adversaire toujours aussi jouissif, digne du formidable Big Bad qu'il aura été deux saisons durant. Et là un casting idéal achève de rendre l'épisode enthousiasmant, avec un immense Mitch Pileggi, aussi parfait dans le rôle de Samuel que de celui d'Azazel, champagne ! La conclusion apparaît aussi inexorable que tragique, un travail particulièrement abouti. Lors de cette relecture de l’univers Supernatural on voit bien quel point cette série parvient à optimiser absolument tous les outils à s disposition, y compris sa propre mythologie. Castiel est lui aussi excellent en Homme Mystère, tout au long du récit. Si impénétrables sont les Voies du Seigneur, tortueuses sont celles de l'Ange et cela sert idéalement l’intrigue (Misha Collins toujours aussi magnétique). Toutefois il sait être explicite à l’occasion : quand il indique à Dean que s'il ne stoppe pas Sam, c'est lui qui le fera, on comprend qu'il faut y aller, là, tout de suite maintenant. On se projette dans l’épisode suivant à l’unisson de Dean.

Anecdotes :

  • D’après le journal, Dean rencontre John le 30 avril 1973. La une fait référence à la démission de John Ehrlichman et Bob Haldeman, proches conseillers du Président Nixon, dans le cadre de l'affaire du Watergate. Nixon lui-même sera contraint à la démission le 09 août 1974.

  • Quand Dean discute avec John à la cafétéria, on entend Ramblin' Man, de The Allman Brothers Band. Quand John et Mary sont au restaurant, on entend Go for Your Self, de Kenny Smith and the Loveliters  Quand John raccompagne Mary chez elle on entend One More Day, également de Kenny Smith and the Loveliters. Quand Dean dit au-revoir à Mary on entend Music, d'Henry Turner's Crystal Band.
  • John évoque l'USS Enterprise car effectivement le téléphone portable de Dean ressemble beaucoup  ceux utilisés par Kirk et son équipage dans Star Trek.

  • John est surpris d’apprendre que Cher et Sonny ont rompu.  En 1973, ils forment encore un couple uni et très populaire. Cette année-là, leur émission de variétés The Sony and Cher Comedy Hour remporte un Emmy Award.

  • Dean prend Van Halen comme nom d’emprunt. Il ne prend guère de risques, Van Halen a certes été fondé en 1972, mais ne sortira  son premier album qu’en 1978.

  • Le prix de vente de l'Impala, indiqué sur son pare-brise, s'élève à 2 204 $, ce qui en 2016 correspond à un prix de 11 965 $.

  • Publié en 2010, le roman Supernatural: Heart of the Dragon montre Castiel envoyer Sam et Dean en 1969 afin de porter assistance à la famille Campbell, dont la vie de Chasseurs nous est dévoilée.

  • La voiture « empruntée » par Dean afin de suivre John est une Ford Pinto. Or cette voiture ne sera commercialisée qu’en 1980, alors que l’action se déroule en 1973.

  • Amy Gumenik (Mary jeune) est apparue dans plusieurs séries télévisées mais se consacre avant tout  au théâtre et à la danse. Elle interprète actuellement la super vilaine Cupid dans la série Arrow.

  • Mystérieusement ressuscité, Samuel Campbell, toujours interprété par Mitch Pileggi, deviendra l’un des personnages réguliers de la saison 6.

  • L’origine des prénoms de nos héros est explicitée : les parents de Mary (donc les grands-parents maternels de Sam et Dean) s’appelaient Samuel et Deana. Deana est aussi le prénom de la femme de Kripke ; selon ses dires, elle s’impatientait de ne pas avoir de personnage à son nom dans la série après trois ans d’existence, alors qu’il avait nommé des personnages d’après déjà tout son entourage !

  • Lorsqu’il voit Castiel après qu’il l’ait fait voyager dans le passé, Dean lui dit Angels get their hands on somme DeLoreans ! Il s’agit bien sûr d’une référence à la voiture mythique servant de machine à voyager dans le temps de Marty McFly et Doc Brown dans la trilogie Retour vers le futur réalisée par Robert Zemeckis. L’épisode en partage plusieurs points communs : scène dans le café, rencontre avec les parents, fils charmé par sa mère jeune femme, tentative de changer le cours du temps, docteur dénommé Brown…clins d’œil qui sont l’œuvre de Carver.

  • Dean se déguise en prêtre, il avait déjà eu recours à ce déguisement (avec Sam) dans Télékinésie (1-14).

  • Commentaire d’épisode :

                Eric Kripke indique apprécier Jeremy Carver pour sa maîtrise des dialogues, qu’il juge supérieure aux siens et à ceux de Robert Singer dans ce domaine.

                Dans la première version de son scénario, Jeremy Carver avait imaginé que tous les clients du café seraient en tenues bariolées (et configurations capillaires à l’avenant) typiques des années 70, et en train de faire la fiesta. Dean devait se distinguer en faisant du skate-board sur la BO de Saturday night fever. À la vue de ce franc délire, Kripke somma promptement Carver de renoncer à cette idée pour cause de contraintes financières et de temps du département costumes ! Carver put toutefois garder le serveur givré. Pour les mêmes raisons financières et de temps, Carver dut supprimer une scène d’action de Mary et quelques répliques spirituelles de sa part.

                L’histoire de cet épisode avait déjà été élaborée en saison 3, et devait y être incluse. La grève des scénaristes de 2007 en empêcha alors la production. En cette même saison, l’équipe bloquait quant à apporter une justification crédible permettant le voyage temporel ; l’arrivée de Castiel fournit à Kripke un excellent alibi.    Originellement, John devait être au centre de l’histoire avant que Mary ne prenne finalement plus d’importance, jusqu’à le laisser en périphérie. Quant au twist voyant Mary être un chasseur et non John, il était présent à l’esprit du créateur dès le pilote.

                Jeremy Carver écrivit l’épisode la semaine précédant l’accouchement de sa femme de leur petite fille, ce qui le mit dans un état particulier. Il dut cependant demander un congé parental ensuite, et ce furent Eric Kripke et Ben Edlund qui réécrivirent un nombre considérable de fois le monologue d’Azazel face à Dean, car constituant l’origine de la malédiction des Winchester, tout en devant demeurer parfaitement crédible en regard de tout ce que la série avait alors raconté. Carver dut également jouer sur du velours à propos de Castiel car le tournage du premier épisode n’ayant pas encore commencé, il n’avait aucune idée de son apparence ni de sa personnalité.

                Kripke dit avoir eu du mal à faire comprendre à Jensen Ackles la boucle temporelle fermée de l’achat de l’Impala :  aucun des deux événements 1. John achète sous les conseils de Dean la Chevrolet en 1973, 2. Dean remonte le temps en 2007, ne se déroule avant ou après l’autre : c’est un cercle temporel sans antériorité ni postériorité. Le thème de la boucle temporelle sans avant ni après fut notamment exploité dans le célèbre La Jetée de Chris Marker (1962) et son faux remake L’armée des douze singes réalisé par Terry Gilliam.

                La scène de combat entre Mary et Dean fut tournée sans doublures : Jensen Ackles était maintenant plus assuré pour les scènes de combat tandis qu’Amy Gumenick a une formation de danseuse de ballet qui la rendait efficace pour les chorégraphies de combat, un atout qu’exploita le réalisateur Steve Boyum, lui-même ancien danseur.

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4. MÉTAMORPHOSE
(METAMORPHOSIS)

Scénario : Cathryn Humphris

Réalisation : Kim Manners

It's already gone too far, Sam. If I didn't know you, I would want to hunt you.

Résumé :

Une crise éclate entre Dean et Sam : l’utilisation de ses pouvoirs de ténèbres et sa fréquentation de Ruby entraînent Sam sur une pente dangereuse, ce que Dean ne supporte pas. Ils doivent toutefois mettre de côté leur conflit pour surveiller Jack Montgomery, un Rugaru, c’est-à-dire un monstre ayant tout de l’humain mais qui n’a pas conscience d’en être un. Or, Jack a environ trente ans, âge où le Rugaru qu’il est commence à ressentir une faim dévorante et inassouvie : qu’il dévore un morceau de chair humaine, et il se transformera à jamais en monstre anthropophage. Dean et Travis, un chasseur qu’ils connaissent bien, veulent le tuer par prévention, car aucun Rugaru n’a pu résister à cette envie, mais Sam souhaite le convaincre à résister à ses pulsions pour éviter d’en venir à cette extrémité…

Bouffons-nous les uns les autres.

La critique de Clément Diaz : 

 

À ses débuts, Supernatural offrait souvent des versions d’épisodes d’X-Files encore trop inféodées à leurs modèles, avant de trouver finalement son identité propre. Malheureusement, Metamorphosis constitue un éloquent retour arrière car constituant un succédané sans imagination d’Appétit monstre, un épisode malin d’X-Files - la chair crue remplaçant les cerveaux - mais sans l’éclat de la narration enlevée de Vince Gilligan. Cathryn Humphris offre cependant suffisamment de scènes-choc pour permettre à maestro Kim Manners (tiens, aussi le réalisateur d’Appétit monstre), de composer un digne chant du cygne par une surenchère gore juteuse, tandis que la platitude générale de l’intrigue est relevée par l’émotion du personnage de Jack et de troublantes questions éthiques.

Même si l’on ne compare pas cet épisode avec son modèle, le premier loner (bon, semi-loner) de la saison n’est guère convaincant, la faute à un cruel manque d’action : aucun cadavre avant une demi-heure, allers-retours sans résultat de Montgomery répétant sans cesse le même numéro « Me want food, me want food » (c’était la minute 30 Rock fan), nos bros ne faisant rien sinon l’espionner longuement ou parler tranquillement avec Travis. Alors que Montgomery pourrait devenir incontrôlable à tout moment, le personnage de Travis est trop peu creusé pour qu’il importe dans l’histoire (son trépas ne fait ni chaud ni froid), évacuation de l’épouse qui fait que l’épisode oublie de boucler une de ses intrigues (alors qu’un débat éthique sur quant à supprimer sa progéniture aurait pu tonifier l’ensemble), crescendo trop indolent - le passage avec le dragueur lourd n’apporte rien... le calvaire de Montgomery eût pu davantage toucher si l’épisode avait été filmé de son point de vue, ce qui aurait été certes pompé sur Appétit monstre, mais aurait au moins assuré une immersion plus prégnante.

Même le duel final manque de suspense (on se doute que Dean ne va pas finir en matière fécale d’un cannibale) et se voit résumé à une petite flambée, très loin du feu de joie attendu. Heureusement, grâce à la lumière bleu glacée de Serge Ladouceur et l’épatante réalisation de Manners, une atmosphère sinistre parvient à passer, notamment lors des sommets gore de l’épisode, avec gros sillons épais de sang, cadavres à demi-dévorés, et maquillage horrifique de Jack, tout barbouillé du sang de sa victime, accentués par le jeu brillamment névrotique de Dameon Clarke.

Les tourbillonnements éthiques de l’épisode en font sa valeur. Ainsi, Sam dévale tranquillement sa pente de ténèbres, pensant (sans doute à tort) qu’il peut garder le contrôle. Ruby, en étant toujours plus proche de Sam, ne fait que grandir l’inquiétude, elle n’a rien à gagner de son alliance avec ses héros, et l’on attend un coup fourré qui ne saurait manquer de surgir. Dans une position très ange exterminateur (au sens figuré, voir Castiel pour le sens propre), Sam tente d’utiliser des outils démoniaques pour le Bien, exhumant un vieux dilemme que l’on retrouve d’ailleurs avec la dernière saison d’Angel, le vampire tentant d’utiliser à des succès très irréguliers la machinerie diabolique de Wolfram & Hart pour le Bien. L’inquiétude de Dean est saisissante, et leurs disputes successives expriment bien tout le poison de cette situation, mais aussi leur angoisse commune : les quatre mois d’enfer solitaire pour Sam, la peur de perdre son frère pour Dean. Les auteurs semblent avoir levé le pied sur les happy ends, car on a du mal à être convaincu du serment de Sam qui promis juré n’utilisera plus ses pouvoirs.

On est également remué par la question de tuer « préventivement » un homme dont il est certain qu’il ne pourra résister à ses pulsions, dans une optique très Minority Report. Si la morale est sauve (Montgomery meurt après son assassinat), l’on voit qu’il n’y avait aucun bon choix : par sa ferveur à vouloir tout arranger, Sam met en danger des innocents, tandis que Travis et Dean souhaitaient tuer un homme encore innocent à ce moment-là. Travis irait même jusqu’à tuer un fœtus héritier de cette malédiction ; décidément la vie de chasseur demande beaucoup de délestage en matière d’humanisme. Ce dilemme irrésolu hante encore le spectateur après le générique de fin, permettant à cet épisode de rester quand même mémorable.

La critique d'Estuaire44 : 

 

Metamorphosis a l'excellente idée de placer assez tôt dans la saison l'inévitable crise de la révélation du lien Ruby/Sam et du développement du pouvoir de celui-ci. Cela permet d'éviter de figer la situation, tout en libérant la place pour la thématique du retour du Cornu. Tout le passage sonne juste, comme si souvent au sein de la fratrie, mais se voit surtout rondement mené, ce qui autorise le développement efficace d'une intrigue autonome, une bonne surprise. Le drame est noué, se montrant prometteur pour le reste de la saison. On apprécie l’intensité apportée par les acteurs, mais aussi que Ruby joue d’autres armes que martiales, cela renouvelle le personnage (ou son Incarnation, comme on le dirait à la BBC). Le vieux complice de John s'insère également à point nommé, permettant de bien visualiser l'abîme séparant le jeune homme du précédent At the beginning, du prédateur impitoyable que deviendra John Winchester, le grand Chasseur de démons. Le saut d’un épisode à l’autre s’avère réellement glaçant.

L'histoire du Rugaru, sans se départir d'un certain classicisme, parvient à susciter plusieurs effets réussis, notamment par un parallèle finement élaboré avec la situation de Sam, mais aussi de l'écho que cette situation éveille chez Dean, nettement plus sensibilisé que lors de Heart (2.17), face à la louve garou. La mise en scène se révèle aussi intense que sinistre, tout en s'ornementant d’un arsenal Gore massif, y compris à l'échelle de Supernatural. Âmes sensibles, s'abstenir : le grand Kim Manners est à la manœuvre pour son ultime mise en scène. Excellente interprétation, avec un intéressant guesting de Joanna Kelly, juste avant qu'elle ne devienne la covedette de Warehouse 13 et parfaitement convaincante sur un registre très différent de cette production guillerette et légère.

Anecdotes :

  • Pour la première fois, Dean surnomme Castiel « Cas ».

  • En saison 5, l’épisode Abandon All Hope se déroulera également à Carthage (Missouri).

  • This doesn't get you off the hook, you know. No, no. Think diamonds. Think Kobe size déclare l’épouse de Jack quand celui-ci veut s’excuser. Elle fait référence au basketteur Kobe Bryant, qui offrit à sa femme un diamant estimé à 4 millions de dollars, en 2003.

  • Quand Jack est au bar, on entend Phillip's Theme, de Hound Dog Taylor and the HouseRockers
  • Lors d’un plan rapproché, sans doute une archive, l’Impala arbore sa plaque originale, KAZ 2Y5. Dans le reste de l’épisode, on en reste à sa plaque actuelle CNK 80Q3.

  • Kim Manners, réalisateur et producteur ayant immensément apporté à la série (de même qu’au X-Files), signe ici sa 17e et ultime mise en scène. Il décède quatre mois après la diffusion de l’épisode, le 25 janvier 2009, après avoir perdu sa bataille contre le cancer du poumon.

  • Le Rugaru (ou Rougarou) est une figure proche du Loup-garou appartenant au folklore francophone du Québec. La transformation est nocturne, sans lien avec la pleine lune.

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5. FILM D’ÉPOUVANTE
(MONSTER MOVIE)

Scénario : Ben Edlund

Réalisation : Robert Singer

- So, you guys are like Mulder and Scully or something, and the X-Files are real?

- No, "The X-Files" is a TV show. This is real.

Résumé :

Sam et Dean arrivent à Canonburg, en Pennsylvanie : un témoin prétend avoir vu Dracula en personne assassiner une jeune femme. D’autres meurtres sont commis par un loup-garou qui n’en a pas les caractéristiques et une momie se réveillant d’un cercueil bidon ; notre duo, assisté d’une accorte serveuse, enquête sur cette affaire totalement barrée…

Ça a le QI d’une quiche, ça bouffe des pizzas, et ça se dit Fils de la Nuit…

La critique de Clément Diaz : 

En 1986, Clair de Lune lançait un énorme pavé esthétique avec The dream sequence always rings twice, épisode reprenant dans un mimétisme complet les codes d’un genre : le film noir des années 40, noir et blanc inclus. Exemple suivi par de nombreuses séries dont X-Files, qui signa un énorme chef-d’œuvre avec Post-modern Prometheus, épisode noir et blanc reprenant les codes des comics anciens et des films sur Frankenstein. Supernatural, habituée à faire des versions personnelles des modèles X-Filesiens, prend un risque redoutable en créant sa version de ce magnifique joyau télévisuel, mais le pari résulte gagné tant la beauté de la mise en scène de Robert Singer impressionne de bout en bout.

Surtout, l’épisode évite la comparaison avec la tragi-comédie émotionnelle des X-Files en choisissant purement et simplement de faire une parodie des films d’horreur de la Hammer, gonflant à l’hélium les clichés du genre jusqu’à les faire exploser de burlesque, faisant se télescoper dans un décalage à pleurer de rire une histoire de style ancien avec une forme très contemporaine, tout en alignant des saynètes de pur non-sense. L’épisode apparaît tout aussi proche du classieux épisode de bichromie d’X-Files que de Bad Blood, autre classique de la série de Chris Carter lançant des missiles d’acide sur les histoires de vampire (et incluant également un livreur de pizza). Ben Edlund, un des scénaristes les plus allumés de série télé, et auteur attitré des épisodes loufoques de Supernatural, parvient encore à battre ses records comiques dans cette totalement jetée histoire.

Bichromie, générique dans le style de l’âge d’or de la Hammer, musique symphonique avec orgue spectaculaire… bienvenue dans un film d’horreur semblant classique, mais dès le premier gag de la pancarte, l’on comprend rapidement que l’on va avoir affaire à l’un de ces épisodes décalés si goûteux de la série. Sans égaler tout à fait la maestria de Carter, Singer maîtrise les jeux d’ombres, les angles biscornus, le hors-champ, l’utilisation ad hoc d’une musique orchestrale grandiloquente, magnifie un impressionnant manoir avec salle de tortures… mais surtout, il peut compter sur Edlund qui en plus d’enchaîner les dialogues brillants (dont une énorme vanne sur X-Files), s’empare du bréviaire de la Hammer et en aligne absolument tous les clichés, mais avec des verres grossissants dévastateurs : des apparitions théâtrales des différents monstres à la blonde capiteuse (pulpeuse et sympathique Melinda Sward dont on apprécie la grande participation à l’action), tout y passe, au karcher.

Chaque scène attendue se voit caricaturée avec un humour absurde à la Monty Python : enquête joyeusement débile par les natures différentes du monstre (et ses fournisseurs), irruption de la terrifiante Toccata en ré mineur pour orgue de Bach pour une péripétie bien ridicule, eau de rose parodique avec Dean racontant la douloureuse histoire de sa vie (j’en avais les larmes aux yeux… de rire bien sûr), sans oublier la classique facilité scénaristique voyant le méchant être interrompu au moment d’exécuter le héros (Singer dilatant bien la scène pour nous achever) et remettant aux calendes grecques son exécution.

Mais la source quasi infinie de comique demeure bien le méchant de l’histoire lui-même. Outre que son identité fait l’objet d’un excellent twist central, ce Dracula de pacotille maquillé et habillé avec un mauvais goût certain est un démiurge mégalo 100% pur sang, aux répliques assassines, et aussi sanguinaire que pathétique qu’hilarant. Le cliché absolu du trauma d’enfance - pompé senza vergogna sur le Fantôme de l’opéra -  se voit ainsi passé à la centrifugeuse tandis que l’on demeure longtemps sur les sommets d’imbécillité atteints par le personnage par ses obsessions totalement délirantes, ou par des scènes véritablement sous coke comme celle du livreur de pizza, un des plus grands moments de n’importe quoi de la série ! Même sa mort est une énorme blague. Todd Stashwick carbure à l’acide à chaque scène, et devient un challenger de valeur pour être le roi de Cabotinageland.

Mais ce Dracula frappé n’est pas seulement loufoque, mais aussi le porte-parole d’Edlund sur la magie du Septième Art, tellement plus grand et passionnant que la vie. Edlund avait déjà exprimé sa foi en l’industrie du cinéma dans Hollywood Babylon, ici, c’est envers l’art lui-même. « Dracula » n’est pas satisfait de sa vie de paria, alors il transcende sa malédiction en modelant la Vie selon les codes du cinéma, comme Z.Z. von Schnerk magnifie la vie (et la mort) d’Emma Peel dans le Caméra Meurtre des Avengers pour trouver un sens à sa vie. Il se rêve en héros de film pour compenser son rejet de la société, comme Andrew voyait Sunnydale comme une scène géante pour oublier son passé d’assassin dans Buffy. Il donne ainsi une émotion derrière les tempêtes de rire qu’il déchaîne à chaque minute. Caractéristiquement, l’épisode est bien plus fou que l’ordinaire des Winchester, qui ici jouent pleinement le jeu, avec une prime pour un Dean en roue libre totale dans une ville où filles torrides et bière coulent à flots (la scène du « repucelage » est à se plier en seize !). Un épisode follement jubilatoire ! Et un des plus grands chefs-d’œuvre de la série.

La critique d'Estuaire44 : 

Après tout un arc narratif majeur, sombre et éprouvant, Supernatural a l'excellente idée d'octroyer une pause au spectateur, avec cet épisode décalé suprêment réjouissant qu'est Monster Movie. L'idée de convertir la série au format des classiques des films d'horreurs s'avère finement jouée, particulièrement grâce au sein apporté à la production (noir et blanc, angles de caméra, décors et maquillages très à la manière de, générique original, musique génialement grandiloquente, etc.). Outre la mise en scène, le mimétisme s’étend également à la narration, avec un rythme relativement lent correspondant très exactement à celui de ces films, considérablement plus déclamatoires que ceux qui existent aujourd’hui. Jensen Ackles, particulièrement à l’honneur ici, a également tout d’un jeune premier de RKO Pictures ! Le recours à l'Oktober Fest apporte un farfelu supplémentaire bienvenu, tandis que l'on admire ce qui demeurera sans doute le meilleur calembour de la série (Pennsylvanie/Transylvanie).

Le meilleur de l’humour réside dans la prestation hallucinante et hallucinée de XXX, l'acteur incarnat le méchant du jour, qui met un talent fou à jouer les ringards absolus, c'est franchement irrésistible. A cet égard, on se dit qu’une belle carrière l’attend chez Z.Z. von Schnerk, tant les amateurs des Avengers songeront à la grande réussite de caméra meurtres tout au long de cet autre grand épisode dédié au cinéma et à sa magie. L’humour iconoclaste, parfois aux lisières de l’absurde, de Ben Edlund débouche en effet sur un sublime hommage au pouvoir d’évocation du Septième Art, avec ce portrait aussi original qu’en définitive émouvant de ce monstre cherchant à se sublimer à travers ses archétypes. Les autres seconds rôles (la radieuse Jamie, Ed l’Immense). S’il demeure l’un des meilleurs épisodes décalés de Supernatural, on pourrait regretter une moindre virtuosité narrative et visuelle que lors du fabuleux Prométhée post moderne des X-Files, son évident modèle. Mais, outre que la barre se voit ainsi posée singulièrement haut, la formidable référence faite à la série de Chris Carter achève d’emporte l’adhésion.

Anecdotes :

  • Todd Stashwick (Dracula) est un artiste particulièrement éclectique. Avant de réussir une belle carrière à la télévision, il s’était fait connaître au théâtre et dans l’improvisation. Il est également un auteur de Comics et de jeux vidéo. Contrairement à ce que l’épisode pourrait faire croire, il est un végétarien convaincu. Il indique également être un véritable Geek amateur de Fantastique et de Science-fiction.

  • Il s’agit de l’unique épisode en noir et blanc de la série, tourné en hommage aux films d’épouvante gothiques du Hollywood de jadis. Le générique en reprend également les codes.

  • Les monstres sont issus de ces films, la Momie apparaissant pour la première fois dans la série.

  • Les noms de personnages comportent plusieurs clins d’œil aux protagonistes de ces films, ou aux romans les ayant inspirés.

  • Les Winchester se présentent comme étant les Agents Angus et Young. Angus Young est le guitariste d’AC/DC, groupe régulièrement présent dans la bande son de la série.

  • Le Goethe Theatre est une référence à Johann Wolfgang von Goethe, créateur de Faust (1808).

  • On entend plusieurs airs de polka à l’Oktoberfest : Bratwurst Polka, de Lars Kurz, Hofkirchner Polka, de Mühlviertler Musikanten & Werner Brüggemann et Alpine Polka, de Gerhard Narholz.

  • Le morceau joué à l’orgue par Ed est la Toccata et fugue en ré mineur, BWV 565, de Jean-Sébastien Bach (1703). Il s’agit d’une des œuvres pour orgue le plus réputées au monde. Sa complexité fait qu’elle sert souvent à tester l’ensemble des mécanismes de ces instruments.

  • It was beauty killed the beast déclare le pseudo Vampire blessé à mort. Il s’agit de la fameuse ultime réplique de King Kong (1933).

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6. LE MAL DES FANTÔMES
(YELLOW FEVER)

Scénario : Andrew Dabb & Daniel Loflin

Réalisation : Phil Sgriccia

- We just wanna see the results of Frank's autopsy.

- What autopsy?

- The one you're gonna do.

Résumé :

Trois hommes en parfaite santé physique ont été retrouvés morts, d’une crise cardiaque inexplicable. Il semble que les victimes aient souffert de crises de peur de plus en plus intenses jusqu’à en mourir. La situation se complique quand Dean commence à en souffrir les premiers effets. Dean réduit à la quasi-impuissance, Sam a moins de 48 heures avant que le cœur de son frère lâche…

Nom : Dean Winchester. Profession : chasseur de monstres, occasionnellement scream queen.

La critique de Clément Diaz : 

La peur, domaine-roi des séries fantastiques, demeure un des plus fascinants sujets humains. C’est donc avec ambition que deux nouveaux scénaristes, Daniel Loflin et Andrew Dabb, auteur appelé à prendre une place considérable dans la série, donnent naissance à leur premier opus au sein de la série. Cependant, les peurs de Dean vont s’exprimer surtout visuellement, un parti pris logique pour l’horreur typique de la série, mais incomparablement moins riche que les peurs les plus effrayantes : celles se nichant au plus profond de nous, et qui n’est que la portion congrue de cet épisode. De fait, l’épisode, malgré de bons effets et un excellent Jensen Ackles, mise plutôt sur un humour sur la corde raide et ne se montre pas aussi effrayant que pouvait l’être Nocturne de la série Alias, chef-d’œuvre de terreur pure et qui, lui, misait à fond sur les peurs intimes de l’héroïne. Yellow fever (encore un titre sensationnel !) est malgré tout efficace tout en dramatisant en passant les enjeux de la saison.

L’épisode démarre très fort sur Dean paniqué à la vue d’un… Yorkshire avec un ruban rose, aussitôt suivi par une scène d’autopsie d’un humour gore que n’aurait pas désavoué X-Files ! Par suite, l’épisode va traiter les peurs de Dean sous un double angle : le suspense par le compte à rebours létal, et l’humour par les réactions de panique d’un des héros les plus durs à cuire des séries TV. De fait, l’un empêche le développement complet de l’autre, mais ce périlleux équilibre reste plutôt bien assuré grâce au talent protéiforme d’Ackles et la mise en scène justement diverse de Phil Sgriccia.

Cependant, l’on avoue qu’on rigole plus qu’on ne tremble dans les trente premières minutes, Jensen Ackles étant visiblement ravi de jouer complètement hors du personnage en le montrant froussard, parano maladif, allant jusqu’à se biturer pour se donner du cœur au ventre ; à la clé plusieurs scènes vraiment hilarantes comme la scène chez l’amateur de serpents, Dean roulant très lentement ou demandant une chambre au premier étage par peur des hauteurs… le festival semble sans fin ; en point d’orgue, sa fuite précipitée dès qu’il voit l’esprit et son mémorable cri lors de l’ouverture du casier, deux pépites de rigolade d’or pur. Mais l’humour fait que le suspense a du mal à s’inviter. De plus, Sam semble se montrer bien peu concerné par l’affaire, alors qu’il était autrement plus expansif en saison précédente, ce qui nuit quelque peu à l’émotion. Il faut vraiment attendre le dernier acte quand deux yeux jaunes apparaissent pour que l’horreur commence à reprendre le dessus.

On retiendra le moment le plus fort de l’épisode qui est finalement la scène d’horreur la moins visuelle et la plus psychologique : le grand coup de gueule de Dean sur sa condition de chasseur, balançant toute sa haine de son « métier » et toute l’absurdité de cette activité, « anormale » par rapport à l’existence du commun des mortels, tellement moins dangereuse et rassurante, avec son frère comme unique compagnie, ce qui même avec le plus grand amour fraternel au monde, donne de sporadiques conflits parfois violents et épuisants. Le côté industrieux de leur entreprise apparaît comme particulièrement éprouvant, et humanise grandement le personnage. Le duo Loflin-Dabb a manifestement tout compris d’entrée à la série. Dès lors, les mâchoires de la peur semblent engloutir Dean définitivement tandis que le twist final se montre particulièrement anxiogène. Sierra McCormick confirme que bien qu’enfant à l’époque, elle savait se montrer aussi terrifiante que tout acteur confirmé : son harcèlement écrasant contre un Dean dans les affres de l’agonie met les nerfs à vif, tandis que le mano a mano final se montre haletant à souhait avec une idée bien tordue et pas franchement éthique de Sam qui laissera même troublé Bobby (ah, Jim, Jim, mais qu’est-ce qu’on ferait sans toi ?).

Supernatural continue de creuser son chemin de noirceur avec des codas désormais de moins en moins riantes : Dean a beau être sorti du cauchemar, le frisson glacial de fin (une idée en or) ne donnera aucun réconfort au spectateur. Aussi, on ne boudera pas la surprise inattendue du « bonus » de l’épisode : un show de Jensen Ackles sur Eye of the Tiger à se rouler par terre et appelé à devenir culte parmi les fans ! Ce cassage spécial de 4e mur n’avait plus eu d’équivalent depuis le final de la saison 4 de Clair de Lune, qui se terminait aussi sur un bonus : Herbert Viola chantant une version délirante de Wooly Bully. Tiens, mais ça tombe bien, Curtis Armstrong, son interprète, fera plus tard son entrée dans la série dans le rôle du Métatron. À croire que c’était prédestiné...

La critique d'Estuaire44 : 

Yellow Fever reprend avec succès l’excellente idée déjà développée dans Bad Day at Black Rock : réaliser non pas un épisode décalé, mais bien un récit suivant l’ordonnancement classique, tout en en rendant l’élément fantasmatique suffisamment farfelu pour que l’on se situe à la lisière. L’imagination transgressive s’appuie ainsi sur des ressorts narratifs éprouvés, forçant à l’efficacité. On pourra certes regretter une plus grande mono définition de l’humour que lors du précédent opus, où la malchance extrême de Sam autorisant des figures virtuoses à la Destination Finale, Ben Edlund reste difficilement égalable sur ce registre. Ici l’unique ressort comique (ou quasi) repose sur la réaction sur paniquée de Dean face aux évènements. Le risque réside dans la répétitivité, mais l’épisode contourne ce péril grâce à d’excellentes idées, dont le joyeux parallèle entre Hellhound et petit chien mignon, ou encore une Lilith très en forme, bien qu’onirique.

Mais l’atout de l’épisode demeure l’étonnant numéro de Jensen Ackles, absolument hilarant de bout en bout, un vrai stand up (génialement prolongé par la désarmais mythique interprétation de Eye of the Tiger). C’est désormais officel : jensen aura vraitout fait pour cette série. La complicité avec Jared joue aussi pleinement, on pourra difficilement affirmer après cet épisode qu’il s(agit d’acteurs fades. On aime aussi quand, régulièrement, Supernatural nous entraîne dans des endroits originaux et consubstantiellement américains, c’est ici le cas avec cette impressionnante scierie. Tout comme Monster Movie souffrait d’une comparaison avec Prométhée post-moderne, le fabuleux X-Cops montre davantage d’audace et de finesse scénaristiques sur un sujet quasi similaire à celui de Yellow Fever, mais qu’importe, l’exercice de style demeure hautement réussi et parfaitement réjouissant.

Anecdotes :

  • L’épisode marque l’entrée d’Andrew Dabb dans l’équipe de scénaristes de la série. Après avoir écrit 32 épisodes et occupé diverses fonctions (producteur, supervision des scénarios), il devient – à l’exception du créateur Eric Kripke en saison 6 – le premier auteur non showrunner à écrire un final de saison (Alpha and Omega, 11-23), avant d'être nommé lui-même showrunner de Supernatural à l’issue de la saison 11, aux côtés de Robert Singer.

  • Improvisée par Jensen Ackles en cours de tournage, la séquence Eye of the Tiger (de Survivor) fut finalement conservée par Kripke, après avoir fait rire toute l’équipe de production.

  • Bobby parle couramment le japonais. Sa réponse à Sam signifie « depuis avant ta naissance ».

  • Sam et Dean se font passer pour les Agents Tyler et Perry. Steven Tyler (chanteur) et Joe Perry (guitariste) sont des membres fondateurs du groupe Aerosmith, en 1970.

  • Dean dit écouter en boucle les cinq mêmes albums dans sa voiture.

  • On apprend que Sam a de fréquentes flatulences quand il mange (voilà, c’est Sam).

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7. LA LÉGENDE D’HALLOWEEN
(ITS THE GREAT PUMPKIN, SAM WINCHESTER)

Scénario : Julie Siege

Réalisation : Charles Beeson

Zombie-ghost orgy, huh? Well, that's it. I'm torching everybody !

Résumé :

Deux jours avant Halloween : un homme meurt après avoir avalé 4 lames de rasoir ayant mystérieusement apparu dans des bonbons. Veille d’Halloween : une adolescente meurt immergée dans de l’eau ayant subitement bouilli. Dans les deux cas, un sac de malédiction a été retrouvé ; pourtant aucune des deux victimes n’avait d’ennemi. Lors de leur enquête, Sam et Dean reçoivent la visite de Castiel et d’Uriel, un autre ange : quelqu’un va essayer le soir d’Halloween d’invoquer un des plus puissants démons de l’enfer ainsi que toute une armée derrière lui, et ils ont reçu des ordres divins pour le moins… expéditifs.

Pour votre Ange personnel, nous avons le modèle tire-la-gueule, et le modèle tire-vraiment-la-gueule.

La critique de Clément Diaz : 

La scénariste Julie Siege, qui ne restera que deux saisons, compose le premier de ses moult chefs-d’œuvre avec le détour obligé des séries fantastiques : Halloween. On admire toujours cette bonne vieille recette, celle du Red Museum des X-Files, consistant à nous dire, eh les gars, c’est qu’un loner, reposez-vous, ah non en fait, on va virer dans la grosse Mythologie à mi-parcours, haha, elle est bonne ma blague (léger désaccord des Weuh). L’épisode parvient en effet à rassembler en 42 minutes une captivante enquête sachant plaquer ses twists fracassants à tempo, tout un discours sur la justice et le libre-arbitre par rapport à la religion développé avec une grande réussite philosophique et émotionnelle, une nouvelle poussée en avant de la Mythologie de la série qui approfondit les portraits des Anges (décidément peu festifs en temps de guerre), tout en dramatisant encore davantage les relations entre deux frères, avec enfin un focus sur Sam après toute une période consacrée essentiellement à Dean. Une telle concentration propulse un scénario gonflé aux amphets, magistralement servi par Charles Beeson, décidément un des meilleurs réalisateurs de la série. Cet éblouissant début de saison nous confirme qu’après trois bonnes saisons en crescendo, la saison 4 joue en virtuose sur tous les claviers de la Mythologie et de ses codes visuels et narratifs.

Avec une ironie mordante, Siege s’amuse à reprendre toutes les attractions d’Halloween pour les tourner en catastrophe : les bonbons cachant des rasoirs (une légende urbaine américaine régulièrement ressortie), le bassin de pommes cramant le visage d’une pauvre adolescente (la contreplongée de Beeson est désarmante d’effroi), la fiesta dans le cimetière qui devient cimetière pour ceux qui font la fiesta, voire même sous un angle mineur les conséquences de ne pas donner aux enfants les friandises demandées sous peine de retour de flamme hilarant (pour le public, pas pour Dean, hein). L’excellente Ashley Benson se montre joliment perverse dans un rôle à double face, bien plus attrayant que l’aseptisée Hanna Marin de Pretty little liars. Mais l’enquête rebondit soudainement quand les Anges s’en mêlent. Si Castiel n’est pas assez sympa pour vous, vous risquez de recevoir une sévère douche froide avec son pote Uriel, adepte des méthodes radicales, et pas franchement fan des bros. Cela dit, on adore voir les frères ne pas se laisser démonter par leurs supérieurs (Dean insinuant qu’Uriel « en a une petite » est sans prix), quels dialogues ! Il est surtout bouleversant de voir Sam et Dean s’opposer franchement à eux pour défendre la vie des humains face à une « justice divine » certes logique quantitativement, mais injustifiable moralement. Il ne s’agit pas là d’une attaque antichrétienne comme on a pu le penser (On connaît depuis Faith le respect de Supernatural envers les religions), mais d’une gonflée désacralisation des Anges, vus avant tout comme des guerriers devant user de méthodes extrêmes pour contrer les plans du Diable (ce qui quand on lit l’Apocalypse de Saint Jean, n’est pas si absurde que ça).

Si Uriel est ok avec ça, Castiel exprime des doutes abyssaux pour quelqu’un de son rang, partagé entre devoir envers son patron et le respect pour les hommes. À ce titre, la magnifique coda le voyant avouer un vrai amour pour les créatures forgées par Dieu que sont les hommes, et soulagé de la décision de Dean, adoucit cette amertume. Ce n’est pas le moindre exploit de Kripke de développer une vision particulièrement vitriolée des Anges et de Dieu, mue par les obligations dramatiques de la série et non par antithéisme. Le résultat est une grandiose extension du domaine de la lutte : la menace Lucifer ne cesse d’augmenter tandis que Lilith travaille en sous-main, obligeant tous les protagonistes principaux à être au plus près de la bataille. Uriel promet de jolies complications à l’avenir.

L’intrigue du jour n’est qu’une simple course-poursuite, mais quelle poursuite ! Émaillée de scènes-chocs comme celle frissonnante du masque, ou de l’invocation de Samhain recelant deux twists consécutifs à effet maximal, l’immersion dans l’action est totale, culminant avec une double bataille entre Dean d’un côté et Sam de l’autre. Le difficile exorcisme de Sam, qui à cette occasion semble basculer un cran de plus dans les ténèbres, est bien près de tout faire disjoncter tant la tension est à son comble. Incarné avec conviction par Don McManus, Samhein se montre un adversaire de taille, nos deux héros ne parvenant à triompher qu’après avoir été jusqu’au bout de leurs forces. Plusieurs voyants rouges viennent de s’allumer, et il semble bien que la saison se dirige à pas de géants vers une flamboyante apocalypse. Un épisode non seulement riche en lui-même mais qui promet de même beaucoup par la suite.

La critique d'Estuaire44 : 

La première réflexion que suscite le particulièrement riche Its the Great Pumpkin, Sam Winchester est « Bon Dieu, mais c’est bien sûr, il n’y avait encore pas eu d’épisode Halloween dans Supernatural ». Cela ne nous avait pas frappé, sans doute par ce que la série elle-même est un Halloween permanent, virtuose et sur vitaminé. Tout l’aspect Halloween est divertissant en diable, entre humour sarcastique et morts atroces bien jouasses, avec le recours bien trouvé à la sorcellerie telle qu’entrevue la saison passée (très bon le gros plan vu de l’intérieur de la bouche et les masques immondes !). Hélas, Ashley Benson, la jeune actrice interprétant la sorcière, minaude sans manifester une réelle présence. On se dit alors que l’on est parti pour un bon épisode à la manière de la saison 1, un Search and Kill des familles, agrémenté par le côté celtique et ce lycée où rode le mal (souvenirs, souvenirs), quand explose la méga bombe avec l’arrivée surprise de Castiel et du souriant Uriel (spécialiste es « purifications » de masse). Le duo est tellement Good Cop/Bad Cop qu’il en devient franchement amusant.

On adore la scène où celui qui n’est pas encore Cas se décide finalement à serrer la main de Sam le Corrompu. Beaucoup de choses se débloquent à ce moment-là, comme une grande porte qui s’ouvre. Castiel confirme à quel point il électrise un scénario classique de Supernatural, tandis que le méga plan des deux Shérifs célestes et la saine réaction des Winchester introduit déjà la thématique du libre arbitre, appelé à devenir si important dans la série. Tout le final face à Samain entremêle joyeusement humour gore (Dean énorme face aux zombies) et pur Effroi (Sam laissant s’exprimer the Démon en lui), un grand moment. On retiendra cependant les deux ultimes confrontations angéliques, très différentes, comme parfaites développements de l’action principale. Cet épisode particulièrement dense demeurera celui où Castiel débute son cheminement personnel, une évolution malaisée mais captivante, que la série va entreprendre de nous raconter.

Anecdotes :

  • Lors du jeu de pommes dans le bassin d’eau, on entend Just as Through withYou de Nine Days. Durant la fête au cimetière on entend Bomb, de Triple 7.

  • Dean se présente comme étant l’Agent Seger. Seger et un important chanteur et guitariste de Rock, ses chansons ont été à plusieurs fois reprises en France par Johnny Hallyday. Les deux frères se présentent ensuite comme les Agents Geddy et Lee, les noms du chanteur et du bassiste du groupe Rush.

  • Sam déclare For us, everyday is Halloween. Il s’agit d’un clin d’œil au tube du même titre du groupe de métal industriel Ministry (1984). la chanson est très populaire chez les Gothiques américains.
  • Le titre est une référence à celui d’un des albums des Peanuts : It's the Great Pumpkin, Charlie Brown.

  • La gravure censée représenter Samain est en fait l’ouvre de Gustave Doré et illustre La Divine Comédie de Dante, sans aucun lien avec la mythologie celtique.

  • Samain est en fait le nom de l’antique fête celtique célébrant le passage de la saison lumineuse à la sombre, mais aussi du monde des vivants à celui des morts. Elle est effectivement l’ancêtre de l’actuelle Halloween.

  • Tracy est interprétée par Ashley Benson, qui allait bientôt se faire connaître pour le rôle d’Hannah Martin dans la série Pretty Little Liars (2010-2017).

  • Les différentes traditions ésotériques décrivent Uriel comme un Ange situé très haut dans la hiérarchie angélique, parfois même comme un quatrième Archange aux côtés de Michaël, Raphaël et Gabriel (Lucifer n’est plus compté parmi eux).

  • La mort de la jeune fille déguisée en infirmière est un clin d’œil au film Halloween II (1981). A l’hôpital, Michael y tue pareillement une infirmière en la noyant dans un jacuzzi dont l’eau bouillante lui brûle aussi le visage.

  • Lorsque Sam fait une réflexion sur la nourriture, Dean l’appelle sarcastiquement « Betty Crocker », le nom d’un personnage publicitaire de la société agroalimentaire General Mills existant depuis les années 1920. Dean évoque également Babe Ruth (1895-1948), considéré comme le plus grand joueur de baseball de tous les temps aux USA, connu pour son impressionnante force de frappe. 3e meilleur record du nombre de coups de circuit (714), il a établi 194 nouveaux records, dont 53 n’ont pas encore été battus.

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8. LE PUITS AUX SOUHAITS
(WISHFUL THINKING)

Scénario : Ben Edlund, d’après une histoire de Ben Edlund & Lou Bollo

Réalisation : Robert Singer

- Aren't you the guys from the Health Department?

- Yeah. And florists on the side.

- Plus FBI. And on Thursdays, we're teddy bear doctors.

Résumé :

Une jeune femme surprise sous sa douche par un fantôme timide, des immenses traces de pas attribués à Bigfoot, la créature légendaire, une fiancée collante jusqu’à l’asphyxie, un petit garçon effrayant tous ses camarades… Cet inventaire à la Prévert constitue l’enquête du jour pour nos Winchester, qui se demandent bien dans quel délire ils ont mis les pieds…

Je souhaite que Supernatural dure au moins 12 saisons… Yeeeeeeah, ça a marché !

La critique de Clément Diaz :


Ben Edlund au scénar dit logiquement gros épisode barré. Effectivement, le scénariste nous régale d’un épisode gentiment fêlé, à l’allure très nonchalante, faisant l’effet d’une légère ivresse, celle qu’on a après avoir bu une coupe de champagne de trop. Cette bulle de légèreté fait du bien dans une saison marquée par une bataille à distance contre Lucifer en personne, d’autant qu’elle ne se montre pas gratuite : le sujet et les péripéties s’inscrivent dans un ton très moral éminemment Twilight Zone sur l’inépuisable thème de la lampe magique (on pense beaucoup à The man in the bottle dont l’humour est très similaire). S’il ne montre pas l’intelligence caustique du Je Souhaite des X-Files, peut-être l’avatar le plus réussi de ce thème, l’épisode sait ne pas être artificiel et ironise sur la recherche de la facilité et l’impatience humaines, ici responsables de vœux certes exaucés mais se retournant contre les demandeurs.

À un tempo tranquillement retenu mais jamais longuet, l’épisode mise sur une atmosphère fêlée plutôt que sur le gag frénétique caractérisant les épisodes comiques de Supernatural. On lâche quelques fous rires tout en ayant toujours le sourire aux lèvres, avec quelques scènes totalement frappadingues comme l’ours en peluche - présageant l’hilarant Ted de Seth MacFarlane - qui entre deux vulgarités nous régale de la tentative de suicide la plus WTF des séries fantastiques (même le Spike de Buffy est battu), le Casper plus bête que méchant, le Benoît Brisefer local, et en point d’orgue une mort très à la Beep-Beep et Coyote ! On aime beaucoup le cas principal, un remake de l’excellent The Chaser de La Quatrième Dimension, avec un homme peu gâté physiquement obtenant les faveurs d’une jolie femme attachante… trop attachante (la sublime Anita Brown cabotine délicieusement), scènes de couple grinçantes et enlevées au menu ! Là aussi, le « profiteur » est décrit plus comme désespéré que manipulateur, souhaitant abandonner cette mascarade, mais trop lâche pour y arriver. Heureusement, il y a nos Weuh…

Le crescendo inquiétant des vœux permet la dramatisation toujours nécessaire dans un épisode comique. Moral mais pas moraliste, on apprécie qu’Edlund adopte un regard tendre envers ceux s’approchant du puits de souhaits de l’épisode, dans l’acception inverse des démons des carrefours (l’épisode est un des très rares de la série où personne ne meurt à la fin). Les « victimes » sont tous des personnes souffrant d’une vie difficile (rejet de la gent féminine, solitude d’une petite fille, harcèlement) et souhaitent donc une « compensation immédiate » via des souhaits automatiques. Dans la grande tradition de La Quatrième Dimension, les souhaits se retournent contre ceux qui les ont émis, avec une ironie acide, Edlund et Bollo n’excusant pas pour autant ce choix de céder à la tentation et exaltant une idée très américaine de se construire soi-même en prenant le temps qu’il faut. Vouloir défier les lois de l’univers, même dans le Fantastique, demeure dangereux. De même, ils pointent le travers humain à prendre des mesures excessives pour conserver un bonheur illusoire, jusqu’à l’injustifiable (le vœu d’assassinat).

Malgré leurs défauts, Dean et Sam se montrent plus sages, le second ne tentant pas sa chance, et le premier se contentant d’un délicieux sandwich (pêché de gourmandise qu’il paie rapidement…). L’épisode marque également l’évolution de Sam, désormais immergé à plein dans une vie qu’il a accepté et où il ne désire plus retourner en arrière, même si on lui en offrait la possibilité. Or, Dean, après What is and what should ever be, et plus récemment In the beginning, troquerait volontiers son présent « héroïque » contre un présent « normal ». La différence entre les deux frères est sans cesse accentuée, pour le meilleur mais beaucoup pour le pire, leurs points de vue différents sur la Vie ayant débouché jadis sur de terribles conflits, et qui ne s’arrêteront sans doute pas. Dean refusant de parler de son séjour infernal à Sam creuse une nouvelle fêlure entre eux deux, alors même que ces souvenirs le hanteront pour toujours. Une coda dramatique terminant justement cet épisode foufou.

La critique d'Estuaire44 : 

Scénario finalement très à la Twilight Zone pour Wishful Thinking, avec cette fontaine aux souhaits fournissant miracle sur miracle. L’anthologie de Rod Serling recèle plusieurs histoires au tour du thème du cadeau apparemment enchanté, mais en fait piégé, avec une conclusion se teintant de morale. On retrouve ici le même dispositif, avec des idées d’intérêt divers. Le billet gagnant à la loterie ou la flèche de cupidon ne sortent guère de l’ordinaire. Mais le récit bénéficie néanmoins de plusieurs excellentes idées, comme le Big Foot (excellentes vannes) ou, l’éclair de cartoon à la Tex Avery, ou, surtout, le passage totalement délirant du Teddy Bear animé par une adorable petite fille et se révélant totalement suicidaire et nihiliste. Cultissime.

Le traitement global de l’histoire demeure tout de même assez léger, évacuant trop vite l’aspect de formidable arme potentielle que représente la source pour les Bros (je souhaite que Lilith meure). De plus, l'histoire des souvenirs torturés de Dean tombe ici quelque peu à contre temps. La rupture de ton semble trop marquée avec le corpus central du réccit, et commuer un épisode décalé en un mythologique reste plus acrobatique qu’à partir d’un loner standard. Le talent comique des deux comédiens principaux, toujours aussi complices, assure néanmoins le spectacle tout au long du récit. Amusant guesting de Ted Raimi, le Joxer de Xéna, parfaitement à son affaire ici.

Anecdotes :

  • Ted Raimi (Wesley) est frère du producteur et réalisateur Sam Raimi. Il participe souvent aux productions de son frère, interprétant notamment Joxer dans les aventures de Xéna, Hoffman dans la trilogie Spider-Man, et plusieurs petits rôles dans celle d’Evil Dead

  • With great power comes great responsibility déclare Dean au petit garçon. Il s’agit d’une reprise d’une célèbre réplique de la trilogie Spider-man, dans laquelle joue Ted Raimi et qui est réalisée par son frère.

  • Sam étant ressuscité, il s’agit du premier épisode de la série où, en définitive, personne ne meurt.

  • Sam prétend écrire un livre intitulé Supernatural, un clin d’œil à la série elle-même. L'épisode The Monster at the end of this book (4-18) nous apprendra qu'il existe déjà en réalité une série de romans Supernatural.

  • Kneel before Todd !, s’exclame le jeune Todd. Il s’agit d’un clin d’œil à Kneel before Zod !, la phrase rituelle de Général Zod, cet ennemi de Superman venu lui aussi de Krypton.

  • Or it's a Bigfoot. You know, and he's some kind of alcoholic-porno addict. Kind of like a deep-woods Duchovny déclare Dean, un clin d’œil aux démêles alors connus par David Duchovny. En août 2008, l’acteur avait annoncé subir une cure de désintoxication pour addiction sexuelle.

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9. SOUVENIRS DE L’AU-DELÀ
(I KNOW WHAT YOU DID LAST SUMMER)

Scénario : Sera Gamble

Réalisation : Charles Beeson

Who do I have to kill to get some French fries around here?

Résumé :

Anna Milton, une jeune journaliste, est internée dans un hôpital psychiatrique car elle est capable depuis peu d’entendre les Anges parler, en particulier de l’apocalypse se préparant. Parvenant à échapper à un démon, Anna s’enfuit et se cache, m    ais finit par rencontrer Sam et Dean, sur les lieux grâce à Ruby. Alors que le trio doit protéger Anna des démons qui tireraient d’elle des informations capitales sur la stratégie des Anges, Sam révèle à Dean pourquoi il a pleine confiance en Ruby…

Où Sam enlève le haut… bon, ben, 4 étoiles donc.

La critique de Clément Diaz : 

L’épisode paraît avant tout fonctionnel, car recourant au procédé éculé du flash-back pour nous délivrer d’importantes révélations, ici sur la relation si particulière unissant Sam et son coach, tandis que l’affaire du jour, resserrée, ne connaît qu’un développement minimal. Sera Gamble, la meilleure auteure de l’ère Kripke (avec ce dernier, Ben Edlund, et Julie Siege), se tire de cette double faiblesse en poussant au maximum son don naturel pour le suspense intense, qui irrigue deux intrigues très distinctes de forme, mais au ton pareillement enténébré, et émaillées chacune de scènes-chocs telles que Supernatural sait s’y bien en faire. Ruby bondit au premier plan, confirmant sa solide valeur ajoutée au show tandis que la saison bénéficie du savant dosage du crescendo élaboré par Kripke : les démons opposés à nos deux frères deviennent de plus en plus puissants, et les Anges de moins en moins… angéliques.

Le récit fortement sombre de Sam a l’intelligence de ne pas que dérouler une péripétie passée, ou expliquer ses attitudes instables depuis le début de la saison : il s’agit véritablement d’une exploration quasi entomologique du personnage, à deux doigts de sombrer dans la folie alors qu’il évolue au sein de ténèbres dans lesquels il est plongé depuis la mort de Dean et échoue encore actuellement à s’extirper. Son nihilisme absolu transparaît lors de l’éprouvante discussion à couteaux tirés (sens propre comme figuré) avec le démon des carrefours ou sa résignation lorsqu’il croit voir sa dernière heure arriver, comme s’il souhaitait en finir avec une vie qu’il ne supporte plus. Jared Padalecki impressionne dans la rage doloriste tantôt exacerbée tantôt retenue de son personnage, se montrant effrayant mais aussi tragique dans son incapacité à accepter la mort de son frère.

La mise en place de la relation de confiance avec Ruby s’effectue avec force rebondissements pour qu’on y croit, Ruby devant montrer plusieurs fois patte blanche pour prouver sa bonne foi (l’éthique est sauve quant à l’utilisation du nouveau vaisseau de chair), et y parvenant. Comme Dean, nous sommes acculés à l’évidence, Ruby semble bien du côté de nos héros. Mais si Sam retrouve le goût du combat grâce à elle, il reste très enténébré même depuis la résurrection de Dean, alors que Ruby excite son côté sombre pour le rendre plus fort, soit une intention louable sur le fond, mais contestable sur la forme. Rien ne paraît sain dans le lien Sam-Ruby, un couple Bonnie & Clyde du côté du « Bien » mais ne vivant que dans une détermination colérique, quasi hystérique. Leur scène sexuelle, inhabituellement torride, marque la force de leur lien, mais aussi interroge sur les intentions de la démone : passion ou manipulation ? Genevieve Cortese exprime toute la violence, la sensualité, et l’ambiguïté latente de Ruby avec une puissance indéniable.

Gamble compense l’intrigue minimale du jour en faisant entrer en scène deux très forts personnages : le terrible Alastair, qui dispose des deux frérots avec une aisance horrifiante, et cette auditrice involontaire des paroles des soldats du Très-Haut. Piégée dans une situation inextricable, faiblement protégée par des Winchester plus en difficulté que jamais, mais acceptant pleinement l’horrible vérité, Anna est une excellente idée de scénariste non seulement en montant encore les enjeux de la saison, car puissante arme potentielle pour les démons, mais aussi pour elle-même, pour l’émotion de son personnage entre les griffes d’un destin inhumain, et dont le cliffhanger semble tuer tout espoir pour elle de s’en sortir. Belle interprétation de Julie McNiven. Cette saison 4, plus feuilletonnante que les trois premières, roule à tombeau ouvert, rendant le spectateur délicieusement tachycharde.

La critique d'Estuaire44 : 

I Know What You Did Last Summer achève de confirmer que le Démon de la Vanne s'est emparé des auteurs des titres de Supernatural. Il introduit également le formidable personnage d’Anna, l’un des grands coups d’éclat de cette saison. La rousse Anna est déjà parfaitement incarnée par la délicieusement évanescente Julie McNiven (difficile de ne pas tomber amoureux, tant elle apparaît elle-même angélique). On parlera toutefois d’elle lors du prochain opus ; ici ,le présent se consacrant de fait essentiellement à la découverte des six mois mystères entre Sam et Ruby, enfin, mystères, on avait bien compris que ça fricotait, hein. Le récit prend certes la forme d’un flash-back parfaitement minuté, agrémenté par les savoureuses interruptions de Dean. Le puzzle se met impeccablement en place mais on retient surtout l’excellente prestation de la brune Geneviève Cortese, qui apporte une sensibilité et une fragilité bienvenue à Ruby. La dimension religieuse de Lucifer en Dieu des démons est également indiquée, cela pose encore plus le personnage, si besoin en était.

J’ai bien aimé que Ruby perde le duel au couteau face au gorille de Lilith, on ne saurait mieux expliciter qu’elle emploie désormais d’autres armes. Les auteurs ont la bonne d’idée d’insérer l’idée du vaisseau inanimé, qui vaut ce qu’elle vaut mais évite de rendre la situation insupportable moralement. Une histoire sombre et captivante où Ruby avance à l’évidence masquée, mais sans que l’on devine où le bat blesse. Quelques à-côtés viennent encore agrémenter le spectacle, l’excellent guesting de Mark Rolston en Alastair, le bras droit de Lilith appelé à être incarné par d’excellents acteurs, la perte du Couteau, le parallèle assez jouissif établi dans l’introduction entre Anna et Sarah Connor (Terminator 2) et bien entendu le cliffhanger pas piqué des vers, avec les deux Pistoleros en grande forme, A suivre, après ce nouvel épisode remarquablement dense.

Anecdotes :

  • Julie McNiven (Anna Milton) est notamment connue pour le rôle de Ginn dan Stargate Universe et de Hildy dans Mad Men. Elle mène également une carrière de chanteuse.

  • Le nom de Milton fait référence à John Milton, auteur du poème épique Le Paradis perdu (1667). Le texte narre la chute de Lucifer, puis ses manigances menant à l’exil d’Adam et Eve hors du Jardin d’Éden.

  • Le titre original reprend celui d’un Slasher movie à succès (1997) avec notamment Sarah Michelle Gellar et Jennifer Love Hewitt à l’affiche.

  • Dean surnomme Anna « Girl Interrupted », il s’agit du titre d’un film de 1999 (Une vie volée) mettant en scène une jeune femme hospitalisée dans une institution psychiatrique, après une tentative de suicide. Misha Collins y tient l’un de ses tous premiers rôles.

  • La radio angélique, comme la surnomme Dean, apparaît ici pour la première fois. Ce concert d’échanges d’informations entre les Anges va être référencé plusieurs fois au cours de la série. Elle jouera notamment un grand rôle lors de la confrontation entre Métatron et Castiel, en saison 9.

  • Robert Singer rappelle que la scène de sexe entre Sam et Ruby fut tournée avant que Jared Padalecki et Genevieve Cortese ne se fréquentassent officiellement. Toutefois, l’équipe ne cacha pas son étonnement devant la « ferveur » des comédiens à tourner la scène, ce qui amena certains à penser que la scène eût pu servir de catharsis pour leur relation !

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10. DISGRÂCE
(HEAVEN AND HELL)

 

Scénario : Eric Kripke, d’après une histoire de Trevor Sands

Réalisation : J. Miller Tobin

- Why would you want to be one of us? A bunch of miserable bastards; I mean, eating, crapping, confused, afraid.

- I don't know, there’s loyalty, forgiveness, love.

- Pain.

- Chocolate cake.

- Guilt.

- Sex.

- Yeah, you got me there.

Résumé :

Grâce à ses pouvoirs, Anna parvient à faire fuir Castiel et Uriel. Une séance d’hypnose chez Pamela Barnes (cf. La main de Dieu) révèle une stupéfiante vérité : elle est un ancien ange qui, en désaccord avec Dieu, a décidé de devenir humain. Coincée entre Castiel et Uriel qui ont reçu les ordres de la tuer, et Alastair qui cherche à l’amener en Enfer pour la forcer à lui transmettre toutes les conversations des Anges, aucune issue semble s’ouvrir pour Anna. Les Winchester et Ruby pourront-ils à la fois affronter les guerriers célestes et infernaux ?…

Ne dites jamais à Dean que les anges n’ont pas de sexe, ça le ferait marrer…

La critique de Clément Diaz : 

 

Un de mes épisodes favoris de toute la série.

Après avoir amassé une formidable tension, la saison 4 la libère dans cet épisode de mid-season. Dans un hallucinant tournoiement de confrontations spectaculaires, de dialogues ambitieux, de rebondissements à réveiller les morts, et de révélations tonitruantes, l’épisode vole très haut sur les cimes du thriller, tout en carburant au moteur de l’émotion, mettant en scène une première bataille directe entre le Ciel et l’Enfer, à laquelle succède une des plus déchirantes codas de la série.

L’histoire parfaitement architecturée de Trevor Sands (unique contribution à la série) happe le spectateur dès l’introduction, qui frappe en fanfare avec la première déroute des anges, résolvant brillamment le cliffhanger précédent. Si nous apprécions le bref retour de Pamela (toujours aussi entreprenante, Sam le confirme), le rebondissement spectaculaire d’Anna va entraîner une accélération vertigineuse de l’intrigue, menée entre autres par une Ruby plus terriblement ambiguë que jamais, domaine dans lequel Genevieve Cortese est pleinement à l’aise, tout en apportant un assouplissement plus chaleureux de son personnage ténébreux. Le sublime dialogue entre Anna et Dean fait ouvertement référence aux Ailes du désir de Wim Wenders, avec cet ange rejoignant les humains pour vivre comme eux, emportée non par amour sentimental comme l’ange Damiel, mais bien l’amour divin. Eric Kripke n’a jamais été si personnel que lors de cet échange où s’entremêlent la défense passionnée du libre-arbitre et l’exaltation de nos imperfections comme sources de bonheurs terrestres, tellement plus valorisants qu’une épuisante perfection, insatisfaisante à l’homme, et subie par des anges las.

On peut y lire une critique du perfectionnisme sociétal et personnel. La description des anges comme des soldats obéissants et frustrés, sans le libre-arbitre accordé aux hommes, surprend, mais cette idée permet de donner un intérêt dramatique aux anges et de fêler l’armure de Castiel, en proie à des doutes abyssaux qui éclateront tôt ou tard (quel éclat sombre et triste dans les yeux de Misha Collins !). Anna flamboie d’émotion, que ce soit lors de sa scène d’amour avec Dean (oui, dans Supernatural, on peut tout faire, copuler avec des anges aussi) et dans son bouleversant pardon. Julie McNiven rayonne de compassion, rendant crédible et émouvant un personnage improbable. La veillée d’armes fourmille d’un suspense omniprésent où, à chaque seconde, on sent que tout, mais tout peut basculer, mais on ne sait jamais à quel moment.

La double attaque simultanée d’Uriel et Alastair est un des plus grands sommets d’intensité atteints par Supernatural (Dean a bien du mérite). On reste pantois devant le plan tout simplement suicidaire de Sam, grandiose idée où il va parvenir à mettre les deux parties en présence pour s’entretuer. L’odieux chantage subi par Dean et la terrible torture de Ruby mènent à ce climatique final où le Ciel et l’Enfer bataillent pour la première fois, avec des fulgurances épiques filmées avec précision par le vétéran J. Miller Tobin, qui s’approche presque du niveau de Kim Manners (qui devait clairement le réaliser). Le triomphe céleste arraché de justesse, loin de soulager, ne résout rien. Dans cet épisode auquel on reprochera seulement l’absence de Bobby dans un moment si important et la facilité de la grâce d’Anna portée par Uriel, la coda finale élève définitivement l’épisode au panthéon des plus grands épisodes de télévision, avec le monologue à fleur de peau de Dean, révélation d’un tragique aussi tonitruant que sans espoir. Jensen Ackles se donne comme jamais dans cette scène magistrale, et l’on ressent pleinement l’émotion de l’acteur au moment de cette prise de parole. Frénétique, ambitieux, enchaînant les rebondissements assassins comme les émotions les plus violentes, Heaven and Hell clôt cette première moitié de saison 4 de la meilleure des façons, tout en offrant à la série un de ses plus grands chefs-d’œuvre.

La critique d'Estuaire44 : 

 

Heaven and Hell demeure certainement l'un des opus les plus ambitieux de Supernatural. Se structurant en double épisode avec I Know What You Did Last Summer, il introduit une magistrale symétrie entre les confessions des deux frères, et leur pareille recherche d'un répit passager à leurs souffrances, ou non, auprès de partenaire se refusant à juger. Plus concise, celle de Dean apparaît également davantage bouleversante que celle de Sam, par l'impact de ce qu'elle révèle mais aussi grâce à un étonnante composition de Jensen Ackles, décidément convaincant sur bien des registres différents. Un moment particulièrement fort et âpre. Heaven and Hell permet également de mesurer la féconde complexité désormais atteinte par l'univers de Supernatural, avec un de parties adverses et ramifiées s'opposant au cours d'un récit dense mais toujours clair et dynamique. Du bel ouvrage, la saison 1 et ses simples monstres de la semaine apparaissent bien loin. Uriel et Alastair confirment la solidité de leur caractérisation. Après avoir été précédemment centrale, Ruby demeure logiquement en retrait (quand elle ne subit pas la torture).

Outre Dean, l'épisode demeure cependant dominé par Ana et Castiel. La diaphane et éthérée Julie McNiven exprime merveilleusement le côté décalé d'Anna, à mi-chemin entre deux mondes et n'appartenant réellement à aucun. Le côté road movie initiatique du récit est passionnant. Cette évocation de la Grâce et de la Chute s'élève au-dessus du fracas des combats, couronnée par la vison majestueuse de l'Arbre. Sublime et étonnamment solennel. On apprécie aussi de découvrir le regard que porte Castiel sur les événements et l'écho que cela éveille dans ess propres sentiments (somptueux Misha Collins). Comme quoi tout est possible dans Supernatural, y compris le raffinement psychologique. Sans oublier bien entendu l'action, Castiel reste d'ailleurs une sacrée Killing Machine, tout en évitant le piège de l'invincibilité. Anna, crucial catalyseur pour Dean, demeurera une superbe rencontre.

Anecdotes :

  • Le titre de travail de l’épisode était Hell’s Angels, il dut être modifié suite à une réclamation de l’association Hell's Angels Motorcycle Corporation, dépositaire de la marque.

  • Heaven and Hell est le titre d'un célèbre album (1980) du groupe de Heavy Metal Black Sabbath. Il marque le passage de témoin d'Ozzy Osbourne à Ronnie James Dio, au chant.

  • So what, you're just gonna take some divine bong hit and suddenly you're Roma Downey ? demande Dean à Anna. Roma Downey est l'une des deux interprètes principales de la série Les Anges du bonheur (1994-2003) racontant comment deux Anges vont incognito porter assistance aux humains.

  • Le sortilège permettant de bannir un Ange temporairement fait ici son apparition. Il sera régulièrement employé tout au long de la série.

  • Quand Dean et Anna font l’amour, on entend Ready for Love, de Bad Company.

  • Jared Paladecki remémore le tournage de la confession de Dean comme l’un des plus émotionnellement forts de la série, toute l’équipe étant bouleversée.

  • Évoqués par Ana, les quatre anges ayant contemplé la face de Dieu sont en fait les Archanges : Mickaël, Raphaël, Gabriel et Lucifer. Tous quatre vont intervenir ultérieurement dans la série.

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11. ENTRE LES MURS
(FAMILY REMAINS)

Scénario : Jeremy Carver

Réalisation : Philip Sgriccia

- There was blood everywhere.

- And Mr. Gibson, where was he?

- Everywhere.

Résumé :

Bill Gibson, un vieil homme, est retrouvé sauvagement assassiné dans sa maison à la campagne. Les Winchester pensent qu’un fantôme vengeur occupe les lieux mais ne peuvent empêcher la famille Carter de s’installer dans la nouvelle maison qu’ils ont achetée juste après la mort de Gibson. Toutefois, le fantôme n’agit pas comme l’ordinaire des fantômes, notamment en dérobant toutes les armes de Sam et Dean, maintenant démunis pour protéger les Carter contre son ire…

Supernatural ne fait pas de discrimination envers les enfants : ce sont tous des monstres.

La critique de Clément Diaz : 

  

Malgré les deux twists de son histoire, il faut avouer que Family Remains ne se distingue pas vraiment des autres histoires d’esprit vengeur (un loner sur trois dans la série), de plus pas sans quelques trous scénaristiques assez gênants. Carver s’est appuyé un peu trop sur son idée de base, qui ne modifie en rien le schéma de l’histoire-type de vengeance d’outre-tombe et la prévisibilité de ses péripéties. Heureusement, il n’en est pas moins un efficace conteur, et le suspense de l’intrigue se montre relevé par son respect global de la triple unité de lieu, d’action, et de temps. L’atout de l’épisode est toutefois bien sa force visuelle, où les décorateurs de la série se montrent au sommet de leur art pour imaginer cette maison confortable en apparence, horrifiante dès qu’on perce les murs, et la fantastique réalisation de Philip Sgriccia, ruisselante d’idées anxiogènes.

L’épisode ressemble beaucoup à un assemblage d’histoires précédentes : la famille piégée dans la maison rappelle Home et Salvation, le huis clos rappelle Asylum et Ghostfacers, l’enfant « dégénérée » fait penser à The Benders, le mode opératoire du fantôme est calqué sur No exit… ceci dit, le suspense n’a aucun mal à monter avec le comportement sans cesse inattendu de l’opposant, effrayant tour à tour les Carter et les Weuh par des manifestations théâtrales : étranges jeux avec les enfants, messages sur les murs mais sans une goutte de sang, scène du cercle de sel, filmée avec un sens consommé de l’horreur et de la surprise, cambriolage de l’Impala (entraînant une logique crise de nerfs de Dean)… mais n’édulcorant en rien ses pulsions sanguinaires. Les auteurs ont le bon sens de ne pas étirer trop longtemps le mystère, et de fait, font tout entier confiance à l’équipe technique pour transcender l’ultra classicisme de leur histoire (mis à part le twist final). Supernatural étant autant une série de réalisateurs que de scénaristes, l’épisode maintient sans problème sa qualité au moment de l’exploration éprouvante du repaire de Lizzie, véritable cauchemar glaçant où l’angoisse monte à chaque instant. L’épisode doit beaucoup à son interprète, Mandy Playdon, qui dans un rôle muet, déchaîne la terreur comme jamais (mention à la scène du rat), une performance donnant pleine mesure de son talent de comédienne de théâtre, au-delà de son maquillage halluciné. Par contre, on regrette certaines incohérences : une analphabète parvenant à écrire des messages, une force exceptionnelle pour une enfant, les effets spéciaux de l’introduction, ses allers-retours très rapides parfois peu explicables si ce n’est par un pouvoir de téléportation dont elle est manifestement dépourvue…

À l’exception de l’oncle transparent, la famille Carter se voit joliment décrite, caution émotion convaincante de cet épisode. Le grand talent d’Helen Slater trouve à s’exprimer dans cette mère tantôt passive, tantôt déterminée à sauver la chair de sa chair. Elle aurait quand même pu se faciliter la tâche en absorbant les radiations du soleil comme tout bon kryptonien qui se respecte… La remarquable évolution du père, d’incrédule terrorisé à nettoyeur déterminé, se suit avec intérêt, grâce au très bon David Newsom. Si encore une fois Sam est en retrait, il est touchant de voir Dean, impuissant à pardonner ses activités démoniaques passées, ne prendre aucun repos pour ne pas y penser. Shakespearien au possible, Dean est un personnage d’une grandeur et d’une détermination ténébreuses, parfois à lui tout seul locomotive de toute la série. L’on apprécie que l’épisode se conclut sans les trompettes de la franche victoire, l’opposition ne faisait après tout que « protéger » son domaine comme un animal apeuré et violent à la fois, avant tout malade et névrosé : sa fin sonne certes celle des meurtres, mais au niveau éthique, les bros n’ont pas de quoi être fiers, même si l’on aurait difficilement pu trouver une autre solution. La conclusion fait toutefois doublon avec la coda de l’épisode précédent, même si plus resserrée, et bénéficiant toujours d’un grand Jensen Ackles.

La critique d'Estuaire44 : 

  

Après une cavalcade mythologique, Family Remains permet de rythmer la saison grâce à un pur loner idéalement placé, mais le spectateur ne va pas souffler pour autant. Certes non. Cet épisode dégage une véritable épouvante, ayant l'excellente idée d'entremêler le meilleurs de deux traditions, les histoires de revenants et celles de dégénérés genre Bender. La mise en scène s'entend à dégager un véritable effroi, par des plans hautement suggestifs et un emploi savamment anxiogène d'un décor claustrophobique comme jamais. Bienvenue dans la crypte.

L'histoire de ces deux gamins s'avère également choquante au possible, comme un pur cauchemar en contraste avec la famille du dessus. Celle-ci se montre vraiment attachante, les auteurs ayant le sadisme d'en développer la rencontre bien davantage qu'à l'ordinaire, histoire d'accroître l'impact émotionnel d'une perte éventuelle. L'épisode reste un vrai one shot, quasiment déconnecté du corpus de Supernatural, hormis quelques vannes sur l'Impala ou autres discussions secondaires entre frères. Excellent guesting en optique inversée d'Helen Slater, la Supergirl du cinéma (un très bon souvenir des 80’s, quoi que l’on en dise), toujours aussi lumineuse, mais avec du métier en plus.

Anecdotes :

  • Helen Slater (Susan Carter) est notamment connue pour avoir débuté au cinéma dans le rôle de Supergirl, lors du film de 1984. Elle interprète également Lara Lor-Van, mère biologique de Superman, dans Smallville et Eliza Danvers, mère adoptive de Kara Zor-El dans l’actuelle série Supergirl.

  • Située à Surrey, en Colombie britannique, la maison est la même que celle ayant servi de décor à l’épisode Home des X-Files. La famille Carter est également un clin d’œil à Chris Carter, créateur de cette série. Mrs. Curry est jouée par Karin Konoval, qui interprétait la mère incestueuse des Peacock.

  • Ripped from an Austrian headline déclare Dean, faisant référence à l’affaire Josef Fritzl. En 2008, on découvre que cet Autrichien à tenue enfermée sa fille dans la cave familiale, durant 24 ans.

  • Après The Benders (1.15), l’épisode met une nouvelle fois en scène de simples humains comme adversaires des Winchester, une situation demeurant rarissime par la suite.

  • Les Winchester prennent comme pseudonymes Stanwyk et Babar, une référence au film Fletch (1985).

  • Le film regardé à la télévision par Bill est La Charge sur la rivière rouge (1953), western connu pour avoir été réalisé en 3D. L’un de ses personnages donne son nom au Wilhelm scream, effet sonore popularisé par les films Star Wars et Indiana Jones, devenu un rituel geek.

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12. COMME PAR MAGIE
(CRISS ANGEL IS A DOUCHEBAG)

Scénario : Julie Siege

Réalisation : Robert Singer

Oh, come on Jay, his misdirect is shaking his ass like an Eighth Avenue hooker.

Résumé :

Trois vieux prestidigitateurs, Jay, Vernon, et Charlie, se souviennent avec nostalgie de leur gloire passée. Vance, un jeune magicien insupportable, se moque de Jay. Comme un baroud d’honneur, Jay décide de faire un numéro à très haut risque où il peut se faire transpercer de plusieurs épées. Il réussit son tour, mais c’est alors que Vance tombe mort : ses blessures correspondant aux épées ! Sam et Dean soupçonnent Jay de s’être ainsi vengé de son humiliation. Mais dans le monde de la magie, les apparences sont souvent trompeuses…

Les magiciens de Supernatural sont des vrais mecs : ils sortent pas des lapins de leur chapeau, ils sortent des cadavres.

La critique de Clément Diaz : 

Excellente idée de confronter dans le monde de Supernatural la magie « réelle » inhérente au show à la magie « artificielle » des prestidigitateurs. Cette sombre histoire de complot faustien privilégie cependant l’émotion à l’action, avec un touchant portrait du trio d’anciennes gloires, et plus particulièrement de Jay, ici au centre de l’épisode. Siege développe une cruelle histoire sur la tyrannie du temps, source d’oubli et d’abandon, sur le passage de témoin pas toujours apaisé entre les deux générations, sur le coût de l’amitié… la scénariste maîtrise à la perfection les différents leviers de l’émotion, quitte à se contenter d’une intrigue assez schématique. Fait rare, notre duo reste en arrière-plan et n’abattra pas le monstre final, un événement curieux mais qui se justifie pleinement ici.

L’épisode jette un regard acrimonieux sur ce milieu. Il met en scène tant de jeunes loups méprisants envers leurs aînés, que ces derniers se contentant d’encaisser les coups et de marmonner dans leur barbe « décadence ». L’auteure exagère sans doute le milieu en dépeignant les nouveaux magiciens comme des métalleux anars et les anciens comme des frustrés ronchons, mais a le mérite de souligner que dans chaque milieu artistique, le passage d’une génération à une autre ne se fait pas toujours de la plus harmonieuse des façons.

La surenchère du spectaculaire, rendant désuet le charme délicieux des tours d’antan, est finement dénoncée, tandis que l’oubli attendant presque chaque artiste au soir de sa vie, est souligné avec une tristesse naturaliste. Supernatural prend ici la vision inverse des X-Files dont l’épisode sur les prestidigitateurs (Maleeni le prodigieux) se montrait plus lumineux, confirmant que le show apparaît bien comme un miroir enténébré de sa prestigieuse aînée. Le trio de prestidigitateurs a également le mérite de faire la leçon à nos bros peut-être trop sûrs d’eux, dont Dean en particulier lors de sa rencontre mémorable avec le « Chef », mais aussi en se débarrassant d’eux grâce à leur vivacité d’esprit et leurs « trucs » : cela fait du bien de voir notre duo redescendre sur Terre parfois ! Les scènes de meurtres sont mis en scène avec la qualité horrifiante habituelle de la série (mention à la pendaison), tandis que l’épisode ne résiste pas à nous montrer quelques tours amusants.

C’est un épisode d’acteurs. Kripke fait appel à trois brillants comédiens ayant désormais la plus grande partie de leur carrière derrière eux, et l’on sent une émotion sincère dans l’appropriation de leurs personnages, qui tracent un parallèle avec eux. Si Vernon est d’un souriant détachement (amusant Richard Libertini) et Charlie (excellentissime John Rubinstein, dans un rôle in fine proche du Linwood Murrow d’Angel) partagé entre révolte et résignation, Jay s’enfonce dans une amertume corrosive le menant à un point de non-retour personnel. L’étincelant Barry Botswick joue merveilleusement ce personnage désormais sans avenir, cherchant vainement un retour de gloire, quitte à en mourir, et n’ayant que son amitié avec Vernon (dangereusement psycho vers la fin) et Charlie pour tenir.

On sait depuis Six feet Under que Michael Weston est un casting de rêve pour jouer un pur psychopathe, il le confirme ici : sa démence froide soutient un final au rasoir où les chimères de la jeunesse éternelle frappent avec leur plus cruelle férocité. La série n’hésite pas à nous mettre mal à l’aise car Jay va payer très cher le prix de son intégrité, et nos frères ne peuvent rien contre sa juste colère dans la coda où il a vraiment tout perdu. Alors que Sam s’apprête à descendre encore plus bas l’escalier de ténèbres, guidé par une Ruby à la fois alliée et danger potentiel, l’épisode a le mérite de maintenir l’atmosphère de plus en plus sombre de la Mythologie au sein de ses loners, et de montrer que loin d’être une simple série fantastico-gore, Supernatural ne le cède en rien sur l’émotion.

La critique d'Estuaire44 : 

Criss Angel Is A Douchebag a l’immense mérite de nous immerger dans un univers fascinant et toujours propice pour l’étrange, celui de la prestidigitation. Le ressenti que l’on conservera de l’épisode va partiellement dépendre de l’intérêt que l’on porte à cette fascinante et si exigeante discipline. Sans tout à fait parvenir à égaler la virtuosité virevoltante de The Amazing Maleeni (qui a de plus la fabuleuse idée de recruter de vrais magiciens) dans The X-Files, La mise en scène reconstitue admirablement cette atmosphère si particulière, Les amateurs de DC Comics songeront sans doute à Zatanna Zatara, pour ce mélange de magie cl de prestidigitation. Au long d’une habile intrigue bâtie judicieusement autour du thème de la mystification, on découvre également trois magiciens vieillis mas pas abattus, impeccablement interprétés par des guests grand train. On se régale de leurs dialogues et de leurs facéties. Mention particulière à John Rubinstein, incidemment un ancien d’Angel (Attorneys at Law).

Excellente idée d’avoir choisi son fils pour incarner le personnage rajeuni, la ressemblance s’avère stupéfiante. A travers l’opposition à l’illusion moderne (notamment les shows souvent tapageurs de Las Vegas) le scénario développe également une morale amère autour du vieillissement et du déclassement que celui-ci entraîne, renvoyant un habile effet miroir aux Winchester. Même les héros vieillissent sous le harnais et finissant par rester sur le bord de la route, (quand ils ont de la chance), c’est assez glaçant. Geneviève Cortese nous offre une nouvelle scène irrésistible, sa Ruby manipulant toujours aussi magistralement un Sammy tragiquement malléable. L’actrice excelle dans le Dark Side, on en redemande. On n’oubliera pas l’aventure absolument énorme de Dean dans la boite queer/cuir, même Cas n’a pas osé se montrer.

Anecdotes :

  • John Rubinstein et son fils Michael Weston (crédité sous son nom de naissance : Michael Rubinstein) jouent Charlie âgé et jeune.

  • Dean se fait passer pour l’Agent Ulrich : Lars Ulrich est le batteur du groupe Metallica.

  • I hope I die before I get old déclare Dean, il s’agit d’une citation du tube My Generation, des The Who (1965).

  • Les prénoms des prestidigitateurs vétérans rendent hommage à trois grandes figures de cette profession : Charlie Miller, Dai Vernon et Ricky Jay. Ce dernier avait interprété le protagoniste de l'épisode Maleeni le Prodigieux des X-Files (7.08).

  • Le titre original fait référence à Criss Angel, un illusionniste gothique connu pour ses performances sur scène à Las Vegas. Il inspire le personnage de Jeb Dexter.

  • Quand Jeb Dexter est tué, on entend I Am the Douchebag de Christopher Lennertz et Steve Frangadakis. Quand Dean et Sam rencontrent Jay, on entend She Makes Me Fall Down, de Buva.

  • L'épique et mémorable rencontre entre Dean et The Chief reprend une fameuse scène du film Police Academy (1984).

  • L'Impala n'apparaît pas en cours d'épisode.

  • L'affiche du jeune Charlie montrée par Dan s'inspire directement d'une réelle, concernant Howard Thurston, dit The Great Magician ou The King of Cards, le plus célèbre prestidigitateur américain du début du 20ème siècle (1869-1936).

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13. L’ESPRIT VENGEUR
(AFTER SCHOOL SPECIAL)

Scénario : Andrew Dabb & Daniel Loflin

Réalisation : Adam Kane

That ghost is dead : I'm gonna rip its lungs out! ...Well, you know what I mean.

Résumé :

À la Truman High School, une adolescente assassine en la noyant une camarade de classe qui l’avait traitée de laide et de moche. Sam et Dean reviennent donc dans cette école où ils ont été scolarisés deux mois il y a plus de dix ans ; ils soupçonnent en effet que l’assassin a été possédée par le fantôme vengeur d’un élève que Sam a bien connu… Pendant leur enquête, des souvenirs des semaines passées entre les murs de l’école leur reviennent.

Sam & Dean contre l’esprit vengeur (comment ça, encore ?).

La critique de Clément Diaz : 

After School Special est globalement un échec. Les auteurs ont voulu écrire une intrigue reliée à des flash-backs forcément révélateurs sur nos héros ; malheureusement, les flash-backs sur la jeunesse des Winchester ne nous apprennent rien de plus que ce que la série nous a déjà raconté, ce que le duo Dabb-Loflin tente de compenser par la caricature, surtout du côté de Dean. L’enquête rachitique ne vaut pas mieux. L’épisode convainc par sa description documentaire au vitriol du milieu scolaire, américain de surcroît, pré-jungle et microcosme cruel de la société.

L’investigation des frères est réduite à peu de choses, et quelques cache-misères ne font pas illusion, même si on apprécie Dean en professeur de sport à la rigueur militaire et en tenue… inhabituelle, ou encore l’agression sur Sam, bénéficiant d’un effet spécial assez spectaculaire. La poésie lyrique des agressions (ah, ces mixers…) est également un bel atout, bien qu’on tique avec cet énième histoire d’esprit vengeur (les X-Files montraient quand même plus de variété), à la personnalité grossière, uniquement présent pour présenter des flash-backs sur les Weuh vu qu’il n’existe pas par lui-même. L’enquête demeure longiligne et sa résolution conventionnelle se fait sans tambours ni trompettes.

C’est dans son approche des lycées américains que l’épisode se doit d’être vu. L’on pense beaucoup au percutant Mean Girls et sa description de la faune adolescente vue comme une communauté agressive et sans pitié, mais qui serait ici étendu aux mecs, sans perdre beaucoup du venin qu’avait su instiller Tina Fey. Ici, aucune rédemption ne se pointe à l’horizon entre haine de la différence, harcèlement des plus faibles (jusqu’au suicide), nouvelle génération déculturée, obsession de la violence, et inversion parfois rapide des rôles entre bourreau et victime, dont la possession par le fantôme ne fait finalement qu’accentuer les traits. On frémit en pensant que ce panorama s’étend avec peu de problèmes dans les autres pays. À l’arrière-plan, les adultes ont une marge de manœuvre quasi absente, il est donc touchant de voir le professeur de Sam se démener pour tenter de « sauver » une âme en l’incitant à suivre sa voie, ce que Sam fera, avant d’être privé au dernier moment de la vie « normale » qu’il rêvait. Un rêve brisé qui touche.

La scène finale, pudique, se montre très émouvante, le silence final de Sam en disant plus long que tous les discours. La culpabilité de Sam d’être assassin par procuration est aussi subtilement capturée, l’épisode exprimant amèrement les regrets du passé et une recherche de rédemption souvent incertaine. Quant aux jeunes acteurs, on retrouve avec plaisir le très doué Colin Ford en jeune Sam, déjà une tête pensante mais qui sait faire parler les poings dès lors qu’on lui bave sur les rouleaux. Brock Kelly et sa ressemblance étonnante avec Jensen Ackles joue excellemment un Dean malheureusement trop caricatural, mais dont on apprécie que sa virilité dont il tire gloire ne s’exprime que dans la violence ou la sexualité, ce qui lui vaut une percutante explication de texte finale. Dans son ego désespéré, il choisira de ne pas l’entendre. Pauvre Dean : vouloir à tout prix être un héros au sens romantique du terme alors que la vision de l’héroïsme que donne finalement Supernatural est bien plus proche de celle désenchantée et sacrificielle des séries de Joss Whedon, dont l’influence thématique paraît ici très prégnante.

La critique d'Estuaire44 : 

L’épisode flash back After school special détonne singulièrement. Centré quasi exclusivement sur le seul Sam, il se prive en grande partie de l’irremplaçable dynamique existant entre les deux frères Winchester. La remplace tout un fatras de clichés sirupeux et faciles propres aux productions à destination des ados, vu et revus au sein de tant de collèges et lycées du petit écran (y compris la figure du professeur mentor, chez Buffy il se fait bouffer d’entrée par la mante religieuse, et ce n’est pas plus mal).

On peine vraiment à y retrouver le ton Supernatural, et l’inanité de la chose fait que l’on s’ennuie rapidement, malgré une interprétation correcte. Les épisodes flashback n’ont d’intérêt réel que s’ils apportent un éclairage sur la situation encours ou interagissent avec elles, ce n’est ici que fort marginalement le cas. On s’intéresse au parcours antérieur de Sam, d’où une certaine déconnexion. L’épisode ne constitue même pas une curiosité, se bornant à du remplissage dépourvu d’imagination.

Anecdotes :

  • Le jeune Sam raconte dans sa rédaction comment sa famille a tué un loup-garou, il s’agit de la même histoire que Dean racontait à Gordon dans l’épisode Bloodlust (2.03).

  • Dean se fait passer pour le coach Roth, David Lee Roth est le chanteur du groupe Van Halen.

  • Les costumières de la série ont pris un malin plaisir à rendre le short rouge de Jensen Ackles le plus moulant possible et cette tenue est restée très populaire chez le public féminin de la série.

  • Yeah whatever. Go have your Robin Williams 'O Captain! My Captain! moment déclare Dean à Sam. Il fait référence au film Le cercle des poètes disparus (1989).
  • La brève fiancée du jeune Dean est interprétée par Candice King, l’interprète de Caroline Forbes dans Vampire Diaries depuis septembre 2009. Les deux séries sont très dissemblables, mais ont le même diffuseur, CW.

  • Quand l’Impala se gare devant le collège Truman High et que l’on bascule dans le passé, on entend Long, Long Way from Home, de Foreigner.

  • L’épisode rend hommage à deux membres de l’équipe technique récemment disparus : Christopher F. Lima (électricité) et Tim Loock (édition Internet).

  • Colin Ford joue ici Sam à quatorze ans, il l'interprétait à neuf ans dans l'épisode A Very Supernatural Christmas (3.08). Il va en tout interpréter le jeune Sam dans six épisodes de la série.

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14. LE VENIN DE LA SIRÈNE
(SEX AND VIOLENCE)

Scénario : Cathryn Humphris

Réalisation : Charles Beeson

- Just take him to the strip club, keep an eye out for the siren. Come on, Dean. Just, just focus on the naked girls. You'll forget he's even there.

- I'm not doing this for you, I'm doing it for the girls.

Résumé :

En deux mois, 3 hommes heureux en ménage ont tué leur femme dans la même ville. Leur point commun : ils fréquentaient tous des strip-teaseuses. Bobby prévient Sam et Dean qu’ils ont sans doute affaire à une sirène polymorphe capable de rendre les hommes fous par son charme. Cependant, leur enquête est perturbée par deux incidents imprévus : Sam trouve une suspecte à son goût, et un agent du FBI a été envoyé enquêter lui aussi sur cette affaire…

Imaginez Liaison Fatale avec plus de gros sang qui tâche… ben voilà.

La critique de Clément Diaz : 

Le succès de cette saison 4 tient beaucoup à ses audaces, ses histoires sur la forme ou sur le fond marquantes : parodie luxueuse de films d’horreur (Monster movie), débat sur le libre-arbitre humain (It’s the great pumpkin, Sam Winchester), rapport des hommes et des anges à Dieu (Heaven and Hell)… mais Sex and violence revient se caler sur des rails éprouvés, sans prise de risque, délivrant tranquillement une intrigue mécanique, tandis que le problème de fond de l’épisode : le déballage de printemps entre les Weuh n’apporte rien de plus que ce que les auteurs ont déjà explorés (notamment en saison 2). Mais même en mode automatique, Supernatural parvient à divertir quelque peu au cours d’une histoire aux twists scientifiquement dosés.

La chasse à la sirène ne se montre pas des plus exaltantes, rigoureusement privée d’action, et délayée en bavardages incessants et banals (les discussions avec la doctoresse et l’agent sont longuettes). Si la série a souvent été accusée de sexisme - il serait plus juste de dire qu’elle n’est simplement pas féministe, mais l’accusation de misogynie semble à mon humble avis excessive - ce n’est certes pas avec cet épisode qu’elle arrange son cas car le premier de ses deux sujets (si on exclut le quelque-chose-de-pourri-au-royaume-des-Winchester, une fois par épisode depuis le pilote), qui n’est autre que la corruption de l’âme des hommes par les charmes fémininsIt is the woman's part; be it lying, note it/The woman's; flattering, hers; deceiving, hers/For even to vice, they are not constant, but are changing still... comme dirait le Barde. Il aurait été enchanté que le changement se fasse aussi au sens propre, surtout que la sensualité torride de Moneca Delain imprime violemment la rétine, mais on a quand même l’impression que les jolies filles sont surtout là pour pallier à la déficience du scénario.

La charmante doctoresse est si transparente qu’elle ne dégage aucune émotion, malgré une Maite Schwartz nous faisant un mémorable numéro de séduction mais dont l’attirance pour Sam semble bien précipitée (aux dernières nouvelles, il n’est pas possédé par l’esprit de 007), rien à voir avec la louve-garou. On notera cependant que Cara reste vivante après une relation sexuelle avec Sam, faisant d’elle la deuxième femme à échapper au « Peen of Death ». Le copinage de l’agent du FBI avec Dean ne dégage rien de plus qu’une virile amitié, mais inoffensive et sans originalité (Gordon avait plus de gueule).

L’épisode trouve une certaine grâce par le savoir-faire aiguisé de Charles Beeson, décidément le digne héritier de Kim Manners : il rend l’ambiance étouffante et aguicheuse des strip-club sans trop insister sur la chair vulgairement dévoilée aux mâles en folie, maîtrise le tempo juste pour chaque scène, lui permettant d’en tirer tout le suspense possible (fixité dérangeante de la caméra lors de la séduction de Cara ou de la machination de Belle, frénésie mais toujours claire lors du combat des chefs…). Cathryn Humphris parvient également à trouver de réjouissantes idées comme l’hilarante intervention de Bobby matant le fâcheux de service avec entrain - le gag des téléphones est à mourir de rire, mais aussi révélateur de l’organisation stricte de la team Dean-Sam-Bobby. On apprécie le twist final ainsi que la bataille entre les deux héros qui se frappent à la gueule au sens propre comme au figuré, mais aussi à quel point Bobby est indispensable au show, comme il le montre au cours de son intervention décisive.

Le monstre du jour souffrant du même complexe que le Fantôme de l’opéra, permet de se rendre compte de sa fielleuse perversité, que sa frustration rongée par l’égoïsme a donné naissance, dommage qu’il n’acquiert cette aura qu’en fin de parcours. On a beau être habitués maintenant, mais on reste toujours fan de ces codas sans soleil, où Sam et Dean s’assurent qu’ils vont oublier ce qui s’est passé tout en ne prenant pas la peine de sauver les apparences. À l’exception des parenthèses burlesques des épisodes décalés, on sent bien qu’on suit une progression de plus en plus désespérée dans cette saison, quel suspense !

La critique d'Estuaire44 : 

Sex and Violence, titre pour le moins explicite pour une relecture du mythe de la sirène, se révélant un tantinet décevant par manque d’originalité. Concrètement on se limite en effet à retrouver pour l’essentiel la figure traditionnelle de l’incube. De plus si l’affaire paraît comme toujours rondement menée, on regrette que certaines convergences entre la suspecte et le monstre ne soient pas réellement explicitées. Le véritable sujet du récit demeure néanmoins le délitement continu et désormais terriblement manifeste du lien unissant les deux frères, soit le moteur ultime de la série. Malgré les différents efforts menés les mensonges (surtout du côté de Sam, il est vrai) continuent à saper cette relation, laissant déjà pressentir un désastre en fin de saison. On est sur le fil de rasoir, le malaise apparaissant d’autant plus aigu et superbement narré que le temps des colères, éventuellement salvatrices, est passé. On se situe désormais dans une espèce de marasme froid et empoissonné, sans porte de sortie en vue tant l’emprise de Ruby sur Sam résulte prégnante.

C’est dramatiquement très fort, d’autant que les résonnances avec l’intrigue du jour sont finement agencées. Les stripteaseuses typiquement US sont joyeusement pittoresques, on remarque qu’elles portent toutes des noms reliées à Disney, ce qui est raccord avec la sirène ! On apprécie que la sirène ne soit pas Cara, ce qui aurait été très cliché, mais aussi que Sam puisse se lier à une femme sans que celle-ci ne meure (il est aussi Veuve noire que la Sam de Stargate SG-1). L’épisode bénéfice également du retour de Bobby, bien trop rare depuis quelques temps. Son intervention est aussi royale qu’à l’accoutumée et on découvre avec plaisir ses diverses astucieuses combines pour aider les Chasseurs en backstage, une excellente idée qui sera développée dans l’épatant Week end at Bobby’s. Le travail de production résulte une nouvelle fois irréprochable, l’épisode constitue un sommet en matière d’étranges chambres de motel, véritable série dans la série.

Anecdotes :

  • Les Winchester se font passer pour les Agents Stiles et Murdock. Il s’agit des noms des héros de la série, également itinérante, Route 66 (1960-1964).

  • Les prénoms féminins utilisés par la Sirène proviennent tous des personnages de Disney : Jasmine d'Aladdin (1992), Aurore de La belle au bois dormant (1959), Ariel de La petite sirène (1989) et Belle de La Belle et la Bête (1991). Etrangement, personne ne s'en rend compte.

  • La première chanson entendue au club de Strip-tease est Thunder Kiss '65, de White Zombie, la deuxième est Steal the World, de Brian Tichy.

  • Quand Dean et Nick regardent le Dr. Roberts, on entend Come on Shake, de Classic.

  • Le club de Strip-tease se nomme The Honey Wagon, soit la désignation traditionnelle des toilettes utilisées durant les tournages.

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15. DE L’AUTRE CÔTÉ
(DEATH TAKES A HOLIDAY)

Scénario : Jeremy Carver

Réalisation : Steve Boyum

- Alastair ! I thought you got deep fried, extra-crispy.

- Nah. Just the pediatrician I was riding. His wife's still looking for him. It's hilarious. Anyway, no time to chat : you got a hot date with death.

Résumé :

À Greybull, un homme reçoit une balle en plein cœur, mais il se relève sans aucune trace de blessure : depuis dix jours, il est impossible aux habitants de la ville de mourir. Sam et Dean comprennent que les démons de Lilith ont kidnappé le faucheur local pour briser un autre sceau. Ils n’ont pas le choix que d’entreprendre une projection astrale pour le retrouver, mais ce faisant, ils deviennent très vulnérables face au démon…

Valar morghulis… zut, mauvaise série.

La critique de Clément Diaz : 

Death takes a holiday se cantonne à une nouvelle chasse au démon, tandis que le lien s’effritant entre les deux frères tourne à vide à force de répétition continuelle des mêmes thèmes (mensonges et pouvoirs de Sam, Ruby, humeur sombre de Dean). L’épisode est toutefois relevé par tout un discours sur l’appréhension de la mort par l’homme et l’originalité du voyage astral, en effet l’idée la plus kamikaze des frères depuis longtemps. Cela permet de donner une impression de nouveauté à cette aventure, d’autant que l’opposition, deux très appréciés come-back, et le twist final donnent une agréable saveur ajoutée.

Dans l’épisode One Night at Mercy de La Treizième Dimension, un docteur convainquait une Mort dépressive de ne plus prendre d’âmes au kilomètre et de laisser les humains vivre, ce qui résultait en un dawa d’enfer. Sur un sujet similaire, Carver éprouve toutefois de la difficulté à assurer un rythme soutenu à l’histoire tout en développant un discours sur l’approche de la mort éprouvée par les hommes qui ne fait que diluer un rythme déjà lent. Plus que l’enquête des Winchester, seulement correcte, c’est la sombre pertinence de ce discours qui fait le prix de cet épisode.

Le retour de la haute en couleur Pamela est accueilli avec liesse, d’autant qu’elle ne se prive pas de leur dire ses quatre vérités aux bros quant à leur idée tordue. À défaut d’une véritable personnalité, Alastair est un plaisant pain in the ass, démon qui surgit hors de la nuit, courant vers la baston au galop, et dont la mégalomanie assure un vrai show, merci à Christopher Heyerdahl de ne se réfréner en aucun cas dans ce registre, il fait vraiment peur. Sam se mue toujours plus en machine de guerre, la Ruby magic school produit apparemment des résultats… spectaculaires ! Mais chaque utilisation de ce pouvoir contribue à renforcer les ombres de Sam, accumulant sans cesse les mensonges à son frère qui commence à légèrement s’énerver de le perdre peu à peu. La photographie bleutée du voyage astral imaginée par Serge Ladouceur se montre étrange et fascinante, on a l’impression de pénétrer dans une nouvelle dimension, une dimension faite non seulement de paysages de sons, mais surtout d’esprits. L’élégante simplicité des effets spéciaux et la réalisation tantôt intime tantôt fastueuse de Steve Boyum (mémorable sanctuaire) créent avec peu de moyens un monde parallèle très convaincant.

On regrette cependant le tempo très retenu de l’épisode et l’évacuation précipitée d’Alastair, même si cela permet un joli twist final avec une nouvelle apparition d’un Castiel toujours le cœur en fête. Il faudra qu’on nous explique comment Misha Collins parvient autant à tirer le maximum d’effet à chacune de ses apparitions, un magnétisme rare. La fin de Pamela, partant le cœur chargé de rancune et de haine, est une bouleversante et terrible coda, sèche dans son ton très abrupt. Décidément, Castiel aura causé bien des dégâts…

Le retour de l’aussi magnifique que mystérieuse Tessa (fascinante Lindsey McKeon, à la beauté irréelle et funèbre) et l’interaction avec l’enfant entre deux mondes - superbe Alexander Gould dans un rôle particulièrement exigeant - sont les sources les plus riches de l’épisode. Prend forme tout un discours sur la peur de la mort et les dérivatifs utilisés par les hommes pour la tenir en distance (espérance d’une résurrection, d’un monde meilleur…). Comme dans In my time of dying, Tessa incarne une mort consolatrice et compatissante, mais ferme dans ses intentions - le gros mensonge de Sam est une phase particulièrement dure de l’épisode - Il est touchant de voir Dean, athée en crise de « foi », s’illusionner sur une éventuelle seconde chance religieuse avant que Tessa remette les pendules à l’heure, tout comme Sam s’illusionner sur ses intentions pures à utiliser un pouvoir de ténèbres, mais recevant cette fois l’explication de texte de Pamela. Sans en avoir l’air, l’épisode déchire encore plus les faibles espoirs des deux frères quant à leur rédemption et leur avenir.

Alors que Dean croit en l’égalité des êtres, Sam croit que leur nature de héros fait qu’ils sont « autorisés » à violer les lois naturelles, comme leurs résurrections, point confirmé par Castiel. Il est étonnant de voir que des deux frères, le plus propret et mignon devient le moins moral, le plus ambigu, rendant la frénésie débaucharde et suicidaire de Dean paradoxalement moins dangereuse que cette dérive spirituelle. L’émotion n’est pas absente avec une exploitation inversée de l’idée de Bedtime stories où cette fois, c’est le mort qui, en s’accrochant aux vivants, ne s’autorise pas à partir, tout en blessant aussi l’être aimé qui reste. La délivrance de la mère éplorée conjointe à la merveilleuse tirade de Tessa est un vibrant appel à ne pas laisser ses sentiments, si nobles peuvent-ils être, jouer avec les lois de la vie et de la mort (leçon que n’ont pas retenu les esprits vengeurs). Le départ de Cole, dans une grande douceur, adoucit la dureté de la mort de Pamela, puissante fin à un épisode plus intéressant sur le fond que sur la forme.

La critique d'Estuaire44 : 

Death Takes an Holiday séduit par le côté original de son sujet, avoisinant joyeusement le spiritisme des Victoriens. Les auteurs et la mise en scène utilisent habilement les différentes potentialités offertes par la transformation des Winchester en fantômes : ambiance spectrale, bizarrerie des situations, humour d'excellents dialogues ultra référencés (avec l'inévitable Ghost, mais aussi Star Wars et tutti quanti), clin d'oïl jouissif voyant les Winchester se faire à leur tour désintégrer au sel, soit un retournement joyeusement sadique d'une leurs armes principales... Si la gamine demeure bien trop lisse, on adore retrouver Tessa, un personnage toujours aussi attachant, humain et compatissant, interprété de nouveau avec beaucoup de sensibilité par Lindsey McKeon.

Décidément une belle rencontre pour Dean, Il y aurait d'ailleurs tout un chapitre à écrire sur les nombreuses femmes croisant sa vie, alors que derrière, les bravades, il y laisse toujours une part de lui-même. Sam se cantonne aux louves garous et aux roulures démoniaques, c'est un style. Grand coup de cœur pour la nouvelle incarnation d'Alastair, puisqu'il s'agit du formidable Christopher Heyerdhal, bien connu des amateurs de Sanctuary. Son Alastair revêt d'ailleurs d'excellentes intonations genre Druitt des mauvais jours. Fin de partie réussie pour Pam, l'un de ces personnages secondaires relevés mais météoriques constituant l'une des griffes de Supernatural. Le nombre de personnages féminins à y périr vire assez au record, et ce n'est pas hélas pas fini.

Anecdotes :

  • A la fin de l’épisode, une annonce dédie l’ensemble de la saison à Kim Manners. Ce producteur et réalisateur ayant beaucoup contribué au succès de la série est décédé le 25 janvier 2009, d’un cancer du poumon.

  • Quand Sam lui propose de l’aspirine, Dean lui répond No thanks, House une référence à la série Dr. House (2004-2012).

  • Last I checked, Huggy Bear ain't available déclare Dean, un clin d’oeil à Huggy les bons tuyaux, l’informateur des héros de la série Starsky et Hutch (1975-1979).

  • Au début de l’épisode quand les deux hommes quittent le bar, on entend Perfect Situation for a Fool, de George Highfill et Jai Josefs.

  • Le titre original reprend celui d’un film de 1934 voyant la Mort devenir un être humain avant de tomber amoureux.

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16. LE PREMIER SCEAU
(ON THE HEAD OF A PIN)

Scénario : Ben Edlund

Réalisation : Mike Rohl

You ask me to open that door and walk through it... You will not like what walks back out.

Résumé :

Sept anges ont été assassinés. Castiel et Uriel ayant échoué à faire avouer Alastair l’identité du meurtrier, ils forcent Dean, son « meilleur étudiant » en Enfer, à le torturer à leur place. Alors que Dean le torture avec raffinement, il apprend une nouvelle qui l’anéantit. Castiel, dévoré par le doute, est tenté de suivre la voie d’Anna et de désobéir à Dieu, et découvre une atroce vérité. Sam franchit un énorme pas en direction des ténèbres pour aider Dean sur le point de craquer…

Boucherie Winchester : ouverte 24 heures sur 24. Demandez Dean.

La critique de Clément Diaz : 

C’est un dantesque orage de noirceur sauvage qui s’abat sur cet épisode infernal. Au fil de révélations semant un désastre sans nom, la violence ne cesse d’enfler, de tortures en trahisons en passant par de l’hémoglobine servi à volonté et des dialogues comme autant de coups de couteau. Mythologie, scénario, réalisation, et interprétation s’harmonisent pour nous livrer un des épisodes les plus éprouvants de la série entière, jusqu’à briser net le trio Sam-Dean-Castiel, désormais totalement perdus. Dirigé par l’écriture assassine de Ben Edlund, l’épisode compte parmi les plus grands opus du show, versant noir, très noir.

Ben Edlund au scénario : ah, on va rigoler alors !… Ben non. Si l’auteur en avait marre d’être l’amuseur de service, il pouvait difficilement exprimer mieux sa réprobation qu’avec cet épisode qui ne fait rien moins que pousser Sam, Dean, et Castiel au fond d’abîmes différents, mais tous aussi profonds les uns que les autres. Alors qu’on sentait que Sam du côté obscur de la force, des deux pieds, il plongeait, voilà que Kripke se décide qu’il est temps d’accélérer les choses. Si l’on était ému que Dean sacrifiât son salut éternel pour sauver son frère, c’est un pur déchirement de voir Sam se métamorphoser de plus en plus en agent des ténèbres pour lui rendre la pareille. Notre héros peut bien arguer qu’il a de bonnes intentions, mais il se laisse corrompre par les illusions fatales d’une Ruby terriblement manipulatrice (ce sourire torve quand Sam suce son sang…) et aux intentions toujours aussi floues, même si le jeu vénéneux de Genevieve Cortese est une porte ouverte à un désastre imminent pour les Winchester.

Ange exterminateur glissant sur une pente ombrée, Sam ne se rend pas compte de sa métamorphose, et l’on craint à juste titre une catastrophe irréversible que même les Anges ne pourront arrêter. Rarement équarrissage de démon aura autant fait frémir… On ne peut qu’être secoué devant les ordres d’Uriel, attirant l’horreur de Dean quant à la perspective de redevenir, même pour un moment, l’un des meilleurs bourreaux de l’Enfer. Craintes confirmées, tant le raffinement de Dean à torturer Alastair est à donner la nausée : ne laissant aucune perfidie du démon le toucher, Dean verrouille tout sentiment pour devenir aussi horrible que lui. Si Jensen Ackles casse la baraque en bloc de haine monolithique (l’expression « regard de tueur » n’est pas un cliché pour lui), l’acteur a reconnu loyalement qu’il se faisait voler la vedette par son partenaire. Effectivement, on reste soufflé par les déflagrations sarcastiques et cruelles d’Alastair, incarné avec une puissance tellurique par un Christopher Heyerdahl lançant missile après missile, jusqu’à foudroyer Dean lors de la spectaculaire révélation du premier sceau, entraînant ipso facto sa destruction morale et un choc profond pour le spectateur.

L’onde de choc frappe également Castiel : tourmenté par une affection envers son protégé qui lui est interdite, il est impuissant à contrevenir à un ordre qui peut briser ce dernier et assiste impuissant à la confrontation. L’intervention de l’ange révolté, Anna (Julie McNiven toujours entre glace et feu), va brouiller davantage encore ce doute le rongeant comme jamais, Castiel étant sur le point de défier Dieu comme Lucifer le fit avant lui : comme Anna naguère, il met en question le jugement du Tout-Puissant. Qui pourrait le reprocher en voyant tout ce qu’il a dû commettre en cette saison ? Uriel demeure tel qu’en lui-même, sociopathe et condescendant (Robert Wisdom est sinistre à souhait). L’explosif twist final a l’inconvénient de déplacer le centre de gravité de l’épisode de Dean à Castiel, soit une perte d’unité, mais met au jour les effets désastreux de la jalousie, ainsi qu’un intéressant point de vue : Dieu aimerait davantage les humains que les anges, ces derniers voyant leur puissance sapée par leur servilité alors que les humains disposent du libre-arbitre. Elle tend aussi à montrer un Lucifer ayant agi sous une doctrine toute prométhéenne, cherchant lui aussi un libre arbitre qui lui fut refusé, mais qui se mua en un orgueil démesuré et mégalomane, d’où une rébellion entraînant pour toujours désolation et fêlure dans les royaumes terrestres et supra-terrestres.

Les actions des anges s’appliquent d’ailleurs avant tout aux humains, faisant de la garde rapprochée de Dieu une situation moins… angélique qu’on pouvait le croire. Cet épisode explique finalement une saison jusqu’alors marquée par un point de vue féroce sur le Divin. Castiel, moins cruel que son déchu confrère, est aussi tenté par cette voie, d’où un dilemme pesant que Misha Collins sait reporter à merveille. La crise de désespoir de Dean couronne cette bombe de noirceur, laissant les frères et leur ange gardien à la ramasse, l’un pour cause d’avilissement moral consenti, les deux autres broyés par l’ampleur de la tâche qui les attend. Six épisodes avant la fin, et on a le sentiment que nos héros en morceaux ne vont qu’être pulvérisés encore et encore, alors que le Prince des Ténèbres prépare son évasion. Un épisode tranchant comme un diamant noir.

La critique d'Estuaire44 : 


Plus noir que la nuit la plus noire, on trouve On the Head of a Pin, qui va inexorablement, implacablement, méticuleusement s’attacher à détruire Dean Winchester, par l’abîme moral dans lequel le précipite la longue et éprouvante scène de torture d’Alastair (Christopher Hayerdhal une nouvelle fois génial). Le choc de l’Œdipe avec John écrase la performance de sa résistance en Enfer, soit son ultime alibi, par le gouffre désormais béant ouvert entre lui et un Sam définitivement tombé du côté obscur. Que ce dernier triomphe in fine d’Alastair n’y change symboliquement rien. Sam buvant le sang de Ruby apparaît comme une image particulièrement forte, et inversée de celle de Buffy apportant le sien à Angel, la damnation se substituant à la chance de rédemption, la sujétion à l’amour.

On sent que la véritable apocalypse de l’univers de Supernatural réside dans cette scission, bien davantage que dans la survenue de Lucifer. Peu d’espoir également chez les Anges, avec la révélation de leur pourrissement via Uriel, l’épisode apporte un précieux éclairage sur cette faction de l’univers de la série (comme on dirait dans un Jeu de Rôles). Tout de même, demeure Anna, magnifique. Il est judicieux que ce soit elle qui sauve la situation son esprit libre lui autorisant davantage de latitude qu’à un castiel encore enrégimenté, pour qui la vérité est simplement inconcevable. Davantage qu’à l’accoutumée, on savoure es échanges entre Castiel et Dean, plus précieux que jamais. Que cet opus abyssal précède de peu un franc délire comme The Monster at the End of This Book témoigne des grands écarts que Supernatural peut accomplir avec succès.

Anecdotes :

  • Le titre original est une référence à l’expression d’origine médiévale « Combien d'Anges peuvent-ils danser sur une tête d'épingle ?", symbolisant les débats théologiques abscons, ou menés pour le simple plaisir de la rhétorique.

  • L’épisode voit survenir pour la première fois la mort d’un Ange. Par la suite, le glaive angélique va devenir une arme de choix contre Anges et démons.

  • Christopher Heyerdahl (Alastair) est le neveu du navigateur et archéologue Thor Heyerdahl. Il participe à de nombreuses séries télévisées, incarnant souvent des personnages inquiétants. Il tient des rôles réguliers dans Stargate Atlantis,Sanctuary ou encore  Hell on Heels.

  • Avant que Dean ne commence à le torturer, Alastair chante Cheek to Cheek, d'Irving Berlin. John Coffrey la chante également dans le film La Ligne verte (1999), avant d'être exécuté.

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17. NÉS POUR CHASSER
(IT'S A TERRIBLE LIFE)

Supernatural 4 17 1

Résumé :

Cela fait trois semaines que Sam Wesson est employé au service technique de l’entreprise Sandover Bridge & Iron Inc. Mais il a la désagréable sensation de ne pas être à sa place. La nuit, il rêve qu’il chasse des monstres en compagnie de son supérieur, Dean Smith, nommé directeur des ventes et Marketing en même temps qu’il est entré dans l’entreprise. Lorsque deux des employés se « suicident » dans des circonstances bizarres et que Mr. Smith est témoin d’une apparition spectrale, les deux hommes, qui ne se connaissent pas, décident cependant de s’allier pour comprendre ce qui se passe…

Comment motiver vos clients :

1. Rendez-les amnésiques.

2. Envoyez-leur un esprit sanguinaire.

3. Laissez-les se démerder.

4. N’intervenez pas même s’ils se font tuer.

5. S’ils gagnent, ne les réconfortez surtout pas, cassez-les bien.

Efficace hein ?

La critique de Clément Diaz : 

Comment succéder à un chef-d’œuvre comme On the head of a pin ? La meilleure solution consisterait à en prendre son parti et écrire un épisode solide à défaut d’être aussi transcendant. Les auteurs vont toutefois être ambitieux et y succéder un épisode quasi décalé avec le thème bien connu de la réalité parallèle, peut-être dans l’espoir de garder une intensité différente mais de même force. Malheureusement, Sera Gamble ne parvient pas à dépasser une fausse bonne idée de départ (Sam et Dean parfaits étrangers, associés contre le crime) et s’enlise dans une chasse au fantôme sans surprise rappelant les loners souvent schématiques de la première saison, tout en restant trop sage sur les difficultés de cohabitation entre les deux frères amnésiques, qui en définitive forment une alliance sans grandes aspérités. Quelques scènes faisant leur effet, un discret sous-texte sur la pression pesant sur les employés d’entreprise, et un final malin parviennent à soutenir un script assez terne.

Cette version pâle de What is and what should never be ne convainc pas par son écriture singulièrement lourde. Cela est particulièrement visible pour Sam, délivrant une version du quidam pressentant un glissement de réalité avec répliques clichés à la pelle et comportement à l’avenant. Quant à Dean, il n’est guère mieux loti car passé le choc du clip initial le voyant en jeune cadre dynamique, il n’est guère approfondi et reste à la remorque de Sam. De fait, il n’y a aucun changement de comportement entre les Sam et Dean connus et ceux présentés ici, et plus grave encore, leur relation, malgré leur amnésie, restant finalement similaire à l’ordinaire du show. Plus porteur aurait été une vadrouille chargée d’oppositions, mais l’on retombe vite dans la complicité fraternelle, cela sape du même coup tout l’effet de la réalité parallèle. Les indices progressifs laissés aux héros (et au spectateur) sur la fausse réalité n’ont aucune originalité (les réflexes de chasseur retrouvés à la Jason Bourne…), même si on apprécie le clin d’œil à Ellen, Jo, Bobby, et la Madison de Heart (saison 2). Quant au fantôme du jour, il se contente d’envoyer des mandales et de tendre un doigt menaçant à ses victimes, on pouvait espérer mieux.

Quelques friandises surchargent au milieu de cette soupe peu engageante, très bien filmée par James Conway, avec notamment cette photographie plus lumineuse caractéristique des mondes parallèles de la série. Il est joyeusement vachard de la part de Miss Gamble de donner un apprentissage accéléré de chasseur de fantômes à nos héros grâce… aux Ghostfacers !! Soit les experts les plus débiles en la matière des séries TV, l’occasion de quelques passages hilarants où le duo se montre dans toute sa splendeur tout en se payant la tête de nos Weuh ! Le duo A.J.Buckley-Travis Wester est inépuisable, et on discerne une pointe de maturité lorsqu’ils confessent (du bout du bout des lèvres) qu’ils ont tout appris des W2. La boucle est bouclée, et mine de rien, ils se montrent utiles pour la première vraie fois de leur vie. Les scènes de mort rivalisent d’explosions d’hémoglobine bien goûtues, dont une pompée (mais avec suspense et talent) sur une des plus mémorables intros de Six feet under (Untitled, saison 4), série remarquable entre autres par ses introductions létales et inventives !

Dean en col blanc se shootant aux détoxifiants vaut aussi le coup d’œil ! On apprécie aussi l’attaque contre la déshumanisation inhérente au capitalisme, le fantôme transformant les employés en chair à canon prêts à se tuer pour la plus bénigne erreur : le burn-out, certes, mais aussi cet enfer modernisé qu’est la course au succès social, épuisante, sans repos ni but, qui n’est pas sans évoquer le puissant A stop at Willoughby de la Twilight Zone, via notamment le marché final. Si le twist final n’a rien d’imprévisible, le mémorable dialogue qui s’ensuit se montre dense et percutant, notamment grâce à l’impeccable composition de Kurt Fuller, où Dean, acculé à l’évidence, comprend qu’il est incapable de faire autre chose que chasseur. Le poids d’une destinée imposée pèse sur Dean, mais qui maintenant peut repartir à l’attaque après cette thérapie de choc. Courage, les gars !

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La critique d'Estuaire44 : 


Episode très à contretemps que It’s a terrible life (clin d’œil amusant à Capra) On perçoit bien ce que les auteurs ont voulu accomplir. D’une part instaurer une situation étrange et décalée, mais de fait on comprend très vite de quoi il en retourne et le récit embraye finalement sur une chasse au fantôme assez classique. Par ailleurs le but réel reste de souligner que le lien entre les frères est profond, subsistant à travers la crise actuelle. Mais cela on l’avait compris, le souligner aussi pesamment paraît maladroit. Ce qui nous intéresse dans cet ultime tronçon de la saison c’est bien le déroulement inexorable de la crise actuelle et les conséquences qu’elle va connaître in fine, pas que l’on nous raconte que tout cela compte pour du beurre.

Si le fond semble contre-productif, la forme demeure hyper efficace, avec une chasse réussie et de nombreux petits indices disséminés de ci de là à propos du monde réel, qu’il est ludique de repérer (le coup du dessin se retrouve dans Dr Who, lors de l’épisode équivalent Human Nature). Le summum demeure l’excellent gag des Facers apprenant les bases du métier aux Winchester. Le sommet de leur carrière, gloire à eux. L’épisode a aussi le mérite d’installer le réjouissant personnage de cette bonne pourriture de Zacharie, interprétée avec une formidable présence par Kurt Fuller.

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Anecdotes :

  • Dean et Sam se nomment respectivement Smith et Wesson, soit le nom d’un important fabricant d’armes, tout comme Winchester.

  • Les noms des membres de leurs famille sont autant de références à des personnages de leur véritable univers : Bob, Ellen, Jo et Madison, fiancée de Sam (la louve-garou dont il était tombé amoureux).

  • Ian et Paul, les prénoms des deux victimes, sont des clins d’œil aux vedettes de Vampire Diaries, Ian Somerhalder et Paul Wesley. La série vient alors d’être lancée sur CW, le même diffuseur que Supernatural.

  • Le titre original est un jeu de mots sur celui de It's a Wonderful Life, le grand classique de 1943.

  • Durant la séquence montrant le réveil de Dean, on entend A Well-Respected Man, parThe Kinks. On y entend brièvement à la radio Hollow, de Brian Tichy.

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18. LE PROPHÈTE
(THE MONSTER AT THE END OF THIS BOOK)

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Scénario : Julie Siege, d’après une histoire de Julie Siege & Nancy Weiner

Réalisation : Mike Rohl

One day, these books – they'll be known as the Winchester gospel.

Supernatural. It was a series. Didn't sell a lot of copies, though. Kind of had more of an underground cult following.

It's always nice to hear from fans. But for your own good, I strongly suggest you get a life.

Oh, my god! That was one of my favorite ones, because Dean was so... strong... and sad and brave. And Sam... I mean, the best parts are when they'd cry. You know, like in – In "Heart," when Sam had to kill Madison, the first woman since Jessica he really loved. And in "Home," when Dean had to call John and ask him for help. Gosh... if only real men were so open and in touch with their feelings.

Everything is in here, I mean everything, from the racist truck to me having sex. I'm full frontal in here, dude.

Résumé :

Coup de tonnerre ! Sam et Dean apprennent que la majorité de leurs aventures ont été écrites sous forme d’une collection de romans, baptisée Supernatural !! Leur stupéfaction s’accroît quand ils réalisent que l’auteur Carver Edlund, de son vrai nom Chuck Shurley - un loser pathétique - prédit en fait leurs péripéties à l’avance ! Malgré tous leurs efforts pour aller à l’encontre des prédictions de Chuck, Sam et Dean ne peuvent empêcher ces dernières de se réaliser. Or, Chuck a prédit que Sam aurait un moment très intime avec Lilith…

Livre de Chuck, chapitre 1 verset 1 : Au commencement étaient deux gros bras qui en bavaient grave. Puis, Supernatural est arrivé. Depuis ce jour… ils en chient encore plus.

La critique de Clément Diaz : 

Méta-épisode décalé de la plus belle eau, The Monster at the end of this book confirme que Supernatural est tout simplement l’une des meilleures séries en matière d’idées sous fumette ! Fortement inspiré du déjanté A world of his own de La Quatrième Dimension, cet épisode narre une hilarante collusion entre créateur et créations, née d’une idée désopilante de Nancy Weiner (assistante des scénaristes) : et si les scénaristes de la série se mettaient en scène via un personnage qui se présenterait comme le créateur des aventures de Sam & Dean ? Au fil de révélations s’aventurant toujours plus loin dans le délire, mais brillamment maîtrisées, la très douée Julie Siege fait avancer la Mythologie par des dialogues sous acide et des situations rocambolesques naissant de cette très particulière collusion entre réel et imaginaire. Cela n’empêche aucunement le développement d’une véritable intrigue au suspense aigu, faisant de cet épisode un des plus denses de la série, et un nouveau sommet pour cette saison 4 roulant à tombeau ouvert.

Les deux premiers actes sont lancés à bride desserrée tandis que Supernatural se livre à sa propre autocritique : succès certain mais très confidentiel, descriptions grinçantes des héros, Sam en particulier (la scène du lavomatique est tout un poème), fans en folie fantasmant sur le « Wincest » au grand dégoût des héros, ou plus modérément exprimant leur amour de la série, particulièrement ses moments émotionnels (hilarant personnage de Sera Siege atomisant sans s’en rendre compte ses personnages chéris). L’arrivée en fanfare du prolifique mais déguenillé Chuck Shirley, avatar des scénaristes et du créateur Eric Kripke, précipite l’ensemble dans une joyeuse folie lorsque nos frères se font reconnaître de lui (une des rencontres les plus allumées de la série !).

Par-là, les auteurs s’auto-flagellent avec un pur entrain : sadisme de leurs histoires, héros très (trop ?) martyrisés, histoires parfois mal écrites… mais aussi leur propension assumée à l’ego, que ce soit dans le pseudonyme de l’auteur (Carver Edlund) ou de la fan (Sera Siege) mais surtout lors de la mise en abyme ultime où Shirley se rêve en créateur rencontrant ses créatures et en prophète tout-puissant, avec immédiate réalisation dans la réalité ! Les scénaristes de la série s’amusent comme des gosses, et leur joie est si communicative que le spectateur ne peut que la partager, se tapant le derrière par terre tout le long de cette fantaisie lysergique. L’énorme twist central sur l’identité de Shirley, permettant un numéro bidonnant de Castiel alignant les phrases les plus solennellement vaticinantes avec son monolithisme habituel, achève d’envoyer l’histoire dans la stratosphère, tout en sauvegardant le libre-arbitre de nos frères… ou presque.

Car l’humour du récit provient aussi de leurs efforts à échapper aux prophéties (c’est le cas de le dire !) de Chuck, mais voyant à chaque fois un facétieux destin se charger de les remettre sur le droit chemin dès lors qu’ils essayent de s’en écarter (mention au cheeseburger et aux pansements de petite fille). L’épisode se paye même le luxe de rendre hommage aux X-Files, son influence tutélaire, avec un caméo de Megan Leitch, interprète des différents avatars de Samantha Mulder adulte, que c’est mignon ! En écrivain inspiré mais à la ramasse, Rob Benedict surjoue sans frein ; sans doute une des plus remarquables prestations d’une guest star dans la série. Le versant thriller n’est pas oublié avec la venue de Lilith provoquant une autre crise - tiens, encore ? - entre les Winchester, Dean préférant la prudence, et Sam croyant encore en son libre-arbitre et cherchant le combat, avec une alliance de courage et de témérité.

La confrontation avec Lilith, cette fois sous les traits d’une aussi séduisante qu’empoisonnante Katherine Boecher, prend la forme d’un tango mortel avec Sam, conclu par la contre-attaque ingénieuse de Dean (avec un Castiel décidément plus soucieux de Dean qu’il veut le laisser croire). La coda avec Zachariah, avec un Kurt Fuller doucereusement matois mais bien cynique, met bien en avant le dilemme de l’écrivain, qui même au bout du rouleau, même dépassé par ses propres histoires, personnages, ou drames personnels, doit toujours écrire et écrire, car tel est son but. En sous-main, on peut voir dans cet épisode une application de la théorie de Mondrian voyant en l’Artiste moins un créateur qu’un canal, l’intermédiaire entre une inspiration divine, et sa réalisation dans le monde terrestre, ce qui n’est ni plus ni moins le cas de Chuck. Un méta-épisode fun, malin, et abouti, un sommet de la série.

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La critique d'Estuaire44 : 


The monster at the end of this book sacrifie avec réussite au genre particulièrement risqué du méta épisode, parvenant à trouver le parfait minutage d’auto parodie et den private jokes dédiées aux fans que nécessite cet exercice de style. Cette géniale idée du Prophète Chuck (épatant Rob Benedict), écrivant L’Evangile des Winchester sous forme de romans de garen nous vaut ainsi une réjouissante première partie, tandis que crépitent les vannes et que les Winchester se prennent l’effet miroir en pleine figure. Un joyeux prologue pour le formidable The Real Ghostbusters, qui ira encore plus loin dans ce domaine. Tout l’audacieux parallèle avec les prophètes bibliques apporte une dimension supplémentaire à l’humour, d’autant que Castiel en rajoute à plaisir.

Comme souvent dans Supernatural, une première partie humoristique bascule dans l’horreur, ici avec le retour gagnant de Lilith, qui s’apprête à ne faire qu’une bouchée d’un Sam toujours aussi présomptueux. Bien loin de constituer un simple canular, l’opus se révèle très finement écrit, intégrant un sujet totalement décalé à la trame de la saison, tout en jonglant avec naturel entre des scènes hilarantes et d’autres absolument dramatiques. Le gambit de Castiel se montre inventif en diable, illustrant le talent de l’Ange pour la ruse mais scellant également l’amitié avec Dean. Episode aux nombreuses facettes, The monster at the end of this book restera en définitive celui où Cas entre de plein pied dans le clan des Bros, même s’il partage encore cette affection avec son allégeance céleste. Joli guesting de Keegan Connor Tracy en éditrice groupie et de Katherine Boecher, parfaite en Lilith devenue adulte (voire très adulte). On ressent une légère frustration de ne pas voir l’Archange, mais on sera bientôt largement servi sur ce point !

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Anecdotes :

  • Venu du stand-up, Rob Benedict (Chuck) mène une double carrière d’acteur et de guitariste, comptant six albums à son actif. Il est également connu pour ses rôles récurrents dans les séries Threshold et Felicity. En octobre 2013, il fut victime d’un accident vasculaire cérébral lors d’une convention Supernatural à Toronto. Il dut sa survie à Richard Speight, Jr., ami de longue date et interprète du Trickster, qui l’emmena à toute vitesse à l’hôpital. Depuis, les deux hommes soutiennent les associations de victimes d’attaques cérébrales.

  • En 2015, les deux hommes produisent Kings of Con, une web série humoristique sur le monde des conventions de fans, où ils intègrent notamment leurs expériences sur Supernatural.

  • Les titres des romans écrits par Chuck correspondent à ceux d’épisodes.

  • Chuck s’excuse auprès des deux frères de la mauvaise écriture du roman consacré aux insectes et de celui avec le bateau fantôme. Bugs et le pourtant excellent  Red Sky At Morning ont été des épisodes décriés par les fans, mais aussi par Kripke lui-même.

  • Carver Edlund, le nom de plume de Chuck, est une combinaison de ceux de Jeremy Carver and Ben Edlund, producteurs et scénaristes de la série, et qui en deviendront ultérieurement les showrunners.

  • Le nom de l'éditrice Sera Siege est une combinaison de ceux des scénaristes Julie Siege et Sera Gamble, cette dernière deviendra également plus tard la showrunner de la série.

  • Sam et Dean mangent au Kripke's Hollow Diner, un clin d'oeil au créateur de la série.

  • Quand Sam et Dean discutent avec Lilith, on entend Leave All This Behind, de Sonny Ellis

  • Le titre original de l’épisode reprend celui d’u roman de Sesame Street, voyant Glover tenter à plusieurs reprises de convaincre le lecteur de cesser sa lecture, car il sait qu’un monstre attend à la fin du livre. Mais en définitive le monstre n’est autre que lui-même.

  • A la boutique de Comics, Dam et Dean se font passer pour les Agents DeYoung et Shaw. Dennis DeYoung et Tommy Shaw sont des membres du groupe rock Styx.

  • Chez Chuck, on reconnaît des couvertures du Comics Origins (paru chez DC), retraçant la jeunesse de Sam et Dean aux côtés de John.

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19. TROIS FRÈRES
(JUMP THE SHARK)

Supernatural 4 19 1

É

Scénario : Andrew Dabb & Daniel Loflin

Réalisation : Phil Sgriccia

- Dad didn't have a choice with us, okay? But with Adam, he did. Adam doesn't have to be cursed.

- He's a Winchester. He's already cursed.

Résumé :

Dean reçoit un appel sur le portable de son père, il émane d’un certain Adam Milligan, qui prétend être le fils de John Winchester !! Une rencontre et quelques enquêtes convainquent les incrédules frérots qu’ils ont bel et bien un demi-frère, issu d’une brève liaison que leur père eut avec une femme harcelée par des monstres. Or, la raison de l’appel d’Adam est que ces mêmes monstres ont réattaqué, kidnappant plusieurs personnes…

Et l’Oscar du pire père de la télévision revient pour la quatrième année consécutive à John Winchester !

La critique de Clément Diaz : 

Parmi les nouveaux auteurs, il faut avouer que le duo Andrew Dabb-Daniel Loflin éprouve du mal à intégrer les codes de la série, se contentant de prendre une idée originale et… ne pas en tirer grand-chose. Si Yellow Fever divertissait surtout grâce à la performance de Jensen Ackles, After School Spécial montrait déjà les limites de leur écriture, et ce n’est pas Jump the Shark qui va davantage nous convaincre. Si les saisons suivantes montreront un plus grand dynamisme de leurs histoires, une certaine dose d’indulgence est requise pour apprécier le rebondissement très soap opera du troisième frère. Une fois avalée cette grosse pilule, l’on arrive à s’intéresser aux états d’âme des trois Winchester, bien que l’on appréciera surtout un final très rouge sang.

Dean nous fait certes bien rire durant tout le premier acte où il tente vainement de prouver qu’Adam n’est pas celui qu’il prétend être (mémorables tests au restaurant, très à la Bobby), mais toute la prise de contact entre les trois frères se montre assez laborieuse. Par son « innocence », Adam offre un contrepoint étonnant à la famille Winchester, tous plus ou moins des têtes brûlées et ténébreuses, mais le contraste est si tranché qu’il flirte souvent avec la fadeur, l’interprétation effacée de Jake Abel abonde d’ailleurs en ce sens. Les monstres ne se montrent pas avant l’affrontement final, privant l’enquête d’une énergie pourtant nécessaire. De fait l’épisode ressemble à un très long prélude à l’explication finale, certes réussie, mais qui ne valait pas une attente amorphe aussi étendue. Le cœur de l’épisode, la famille Winchester elle-même, irrigue quelques couches émotionnelles pendant ce surplace, notamment avec la volonté de Dean d’épargner une vie de souffrances à son frangin « pur », se heurtant en cela à un Sam décidément bien changé depuis le pilote, et appliquant désormais plus doctement l’héritage paternel pourri dont Dean mit tant de temps à s’en débarrasser. Il est difficile de prendre parti, chacun des deux frères aînés ayant d’excellentes raisons, le spectateur choisira de trancher selon son idéalisme ou son réalisme, ou préférera s’abstenir dans une incisive ambivalence (là aussi on se situe dans les raisonnements de Joss Whedon). Pointe à l’avant-plan un regard décidément bien pessimiste sur la dynastie Winchester, incapable de dévier de ses sombres (et parfois mortels) destins, même quand il s’agit de l’agneau innocent : l’émotion des scénaristes quant au fatum de leurs héros n’est pas absente, derrière l’apparent sadisme dont-ils font preuve pour les démolir consciencieusement à longueur d’arcs apocalyptiques tous plus catastrophiques les uns les autres.

Le twist final, peut-être pas tout à fait imprévisible, ne se montre pas moins coupant. Dedee Pfeiffer (sœur de Michelle) assure un excellent numéro dans l’abominable vengeance de son personnage, tandis que l’exploration désespérée de Dean emmuré vivant se montre anxiogène et morbide à souhait. Mais à ce titre, c’est bien pour le calvaire de Sam, écorché vif avec force flots de sang que l’on a le cœur au bord des lèvres, où Phil Sgriccia fait exploser l’intensité qui couvait jusque-là. C’est vraiment in extremis que Dean le sauve, tandis que l’amateur d’X-Files ne pourra songer de penser au bien nommé Sanguinarium pour son gore amené en scène de la même façon. Un épisode simplement correct, à la base trop outré pour convaincre sans effort.

Supernatural 4 19 2

La critique d'Estuaire44 : 


Jump the Shark reste évidemment un titre à part pour les fans des Bandits Solitaires, mais l’épisode va plutôt ennuyer qu’autre chose. Faire apparaître ex nihilo ce troisième frère suscite du mélo gratuit et facile, tout en égratignant inutilement la statue de John. Il ne faudrait pas que Supernatural tourne à la saga familiale faisandée, voire à la Telenovela. Les scènes proposées apparaissent de facto assez dépourvues d’intensité, d’autant que l’interprétation de Jake Abel se situe clairement en deçà du niveau coutumier de la série. Cela lui vaudra d’ailleurs de gâcher partiellement la future confrontation apocalyptique. La révélation d’Adam ne se justifiera réellement qu’en saison 5, ici on se situe dans un travail de préparation dépourvu de dimension, purement fonctionnel. . Les Goules se montrent par contre amusantes, mais entrent trop tardivement en scène. Un épisode très dispensable, même s’il évoque (une nouvelle fois) habilement le fossé béant existant désormais entre Sam et Dean.

Supernatural 4 19 3

Anecdotes :

  • Le titre original reprend une expression devenue commune pour désigner le moment où l’intérêt d’une série télévisée se met à décroître. Cette expression fait elle-même référence à une cascade accomplie par Fonzie dans la série Les jours heureux. Y faisant allusion, une affiche du Fonzarelli Water-Skiing Championship est aperçue lorsque Dean et Sam entrent dans le restaurant.

  • Quand Sam et Dean rencontrent Adam au restaurant, on entend Reaching Higher, de Nathan Williams. Quand Dean est au bar, on entend A Little Bitty Tear, de Burl Ives.

  • Dean se fait passer pour l’Agent Nugent. Ted Nugent est un important guitariste de Rock, le pseudonyme avait déjà été utilisé lors du pilote de la série.

  • Dans la chambre de Sam et Dean, on aperçoit une brochure publicitaire comportant une photographie d’un jeune Kim Manners alors moustachu.

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20. LE PÉNITENT
(THE RAPTURE)

Supernatural 4 20 1

Scénario : Jeremy Carver

Réalisation : Charles Beeson

You used to be strong enough to kill Alistair. Now you can't even kill, uh, stunt-demon number 3?

Résumé :

Sam et Dean découvrent Castiel inanimé : il a été en effet rappelé au Ciel, laissant son vaisseau de chair, Jimmy Novak, désemparé ! Sonnés par la perte de leur allié, Sam et Dean veulent protéger Novak des démons qui souhaitent le capturer pour avoir accès à des informations cachées dans sa mémoire. Profitant de la faiblesse de Sam, en manque de sang de démon dont il est devenu dépendant, Novak s’échappe pour retrouver sa famille qu’il a abandonnée sans avoir eu le temps de lui dire au revoir il y a un an, mais les démons sont à ses trousses…

Quand les Anges merdent, ils vont au Ciel. Logique…

La critique de Clément Diaz : 

À travers ce magnifique épisode, Supernatural explore avec une émotion renouvelée le déchirement se produisant lorsqu’un être humain décide d’embrasser un destin héroïque, et sacrifiant « pour le plus grand bien » son bonheur personnel. A contrario de Sam et Dean, Jimmy est un homme ayant vécu longtemps une vie enviable, avant que ses convictions religieuses brisent son bonheur terrestre. Ce dilemme douloureux hante tout cet épisode qui n’oublie pas d’être captivant, aux multiples coups de théâtre, tandis que Sam s’approche de plus en plus du point zéro de son irrémédiable chute ténébreuse. Misha Collins réussit son dernier test en montrant qu’il peut tenir tout un épisode alors que Jared et Jensen sont en périphérie.

Supernatural n’a pas vraiment la main heureuse dans ses flashbacks, les plongées dans le passé des deux frères sont restées très anodines (mis à part le très spécial In the beginning), et l’on pouvait redouter a fortiori un résultat encore pire pour Novak qui n’a jamais été approfondi. Mais c’est oublier le talent de Jeremy Carver, qui se joue du problème en axant son intrigue sur le fascinant mystère de la foi religieuse, qui a tant réussi à la série (Faith, Houses of the Holy), faisant du même coup ressortir son miroir inversé, la dérive spirituelle, celle de Sam, avec plus d’éclat. Cette foi religieuse épanouit Novak, et tant qu’il peut la partager avec la chaleur familiale, il trouve un équilibre. C’est quand sa ferveur, celle qui n’appartient qu’aux hommes et aux femmes appelées à changer le monde en profondeur, déborde, qu’une fêlure se produit, avec un déchirement entre le désir de rester avec ceux qu’on aime, et le fait d’être immergé tout entier dans une tâche immense. La résonance avec le destin « sacrificiel » de Sam et Dean, comme Jump the Shark l’avait rappelé, est évidente, mais se ressent plus fortement encore par la présence de la famille, passant ici par pertes et profits, et par une mission finalement plus éprouvante encore, car il s’agit de renoncer à vivre sa propre vie pour permettre à un ange d’aider plus efficacement à la lutte contre le mal.

Les scènes déchirantes mais sans pathos aucun entre Novak et sa famille saisissent vraiment, tandis que se manifeste un autre problème bien connu des grands héros : la tentation d’abandonner. Car Novak n’en peut plus de voir son corps martyrisé, de délaisser sa famille, il est comme encombré de sa foi qui le dépasse, et c’est cela qui explique son attitude fuyante aux deux frères qui s’ils gardent la tête froide, ne peuvent tout à fait le comprendre, car ils ont depuis longtemps abandonné tout espoir d’une vie normale, pas Novak. Ses décisions seront jugées selon les croyances religieuses ou « prométhéennes » du spectateur, mais quoiqu’il en soit, il est difficile de ne pas être ému lors du choix final de Novak, qui mêle in extremis son amour familial bien qu’ici sacrifié, et sa foi, pour une ultime séparation à en avoir le cœur serré. Castiel quant à lui paye son affection pour son protégé avec un sévère avertissement, d’où une coda en rage rentrée.

La lenteur presque contemplative de l’intrigue réserve ainsi des effets saisissants lors des attaques des démons perturbant soudainement ce calme malaisé, mais aussi lors des accès de folie de Sam, en amorce de descente alors qu’il se drogue depuis si longtemps au sang de Ruby. Il est sinistre de voir Dean ne plus arriver à réagir devant l’autodestruction de son frère, tant il est blasé, alors même qu’une vision saisissante nous montre Sam s’assimilant à un vampire démoniaque. Le grinçant cliffhanger (Bobby le renard) ouvre la voie à un avant-dernier épisode où l’on pressent que cela va chauffer, et au fer rouge minimum.

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La critique d'Estuaire44 : 


The Rapture a l’excellente idée de s’intéresser au Vaisseau de l’ami Castiel, ce qui permet non seulement de mieux comprendre le parcours de l’Ange mais aussi de nous valoir un récit riche en émotions, mais exempt de tout mélo. Les rapports complexes unissant Cas à son hôte sont passionnant à suivre et parfaitement exposés grâce à l’astuce diabolique du scénario. Sans avoir l’air d’y toucher, le récit établit un parallèle assez époustouflant entre les arrivées d’Azazel les Yeux Jaunes et de Castiel au sein d’une paisible famille et des conséquences que cela induit. Cas y met certes davantage les formes, mais l’élément humain apparaît bien secondaire. Cet aspect sombre de l’Ange (que les dramatiques évènements rendent tout de même supportable) bondit de nouveau en avant quand Castiel retombe dans ses ornières, tant sont lourdes les chaînes qu’il doit porter de par sa nature même. C’est habile et finalement assez logique, il aurait été décevant que la convergence de Castiel vers les Winchester soit un chemin semé de roses.

 En plus cela instille un élément dramatique supplémentaire pour le final de saison la fragile et récente alliance étant remise en cause. On regrettera cependant qu’Anna en paie le prix, il s’avère contre-productif de sacrifier aussi vite un aussi formidable personnage. On apprécie également la parfaite maîtrise de la mise en scène, notamment la photographie et l’aspect onirique de la formidable scène du lac (où l’on ne serait pas surpris de voir Scully flottant sur sa barque). La jeune interprète de la petite fille se montre épatante, mais l’on retiendra avant tout l’incomparable stand up de Misha Collins que constitue en définitive The Rapture. L’acteur se montre époustouflant de conviction dans chacune de ses incarnations successives, un véritable exploit. Les J2 excellent tout au long de Supernatural, mais la prestation de Collins demeure l’une des plus impressionnantes que j’ai découvert sur le petit écran lors de la période fin 2000/début 2010, avec David Tennant dans Doctor Who et Terry O’Quinn/Michael Emerson dans Lost. Sam tombe en morceaux, décidément tout se présente idéalement pour le grand final.

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Anecdotes :

  • Le titre original fait référence au récit chrétien du Jugement dernier, quand les Justes seront conduits au Paradis par le Christ.

  • What the hell happened back there ? It looked like an angel Battle royale déclare Sam. :Battle Royale est un film japonais de 2000 montrant des lycéens devant se livrer une lutte à mort dans le cadre d’une tété réalité.

  • Amelia Novak est ici interprétée par Wynn Everett. Celle-ci est notamment connue pour le rôle de Tamara Hart dans The Newsroom et celui de la diabolique Whitney Frost, adversaire de l’Agent Carter en saison 2 de cette série Marvel.

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21. LE DIABLE AU CORPS
(WHEN THE LEVEE BREAKS)

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Scénario : Sera Gamble

Réalisation : Robert Singer

Now, correct me if I'm wrong, but you willingly signed up to be the angels' bitch?… I'm sorry ; you prefer "sucker"?

Résumé :

Emprisonné dans la cave de Bobby, Sam, en manque de sang de démon, subit de terribles hallucinations. Alors que les sceaux retenant Lucifer se brisent les uns après les autres, Dean, déterminé à laisser son frère hors de la bataille finale - faute de quoi, il serait probable qu’il doive le tuer - fait un pacte avec Castiel. Mais Sam finit par s’échapper et rejoint Ruby…

Chez les Winchester, qui aime bien châtie bien : on démolit la face de l’autre parce qu’on l’aime.

La critique de Clément Diaz : 

Grand prologue au final de saison, When the levee breaks s’axe tout entier sur la psychologie de Sam via différentes idées, et sa rupture semble-t-il définitive avec son frère, soit le cœur même de la série. L’épisode ne peut donc qu’être excellent, quoique Sera Gamble n’évite pas certains clichés en première moitié d’histoire, et se montre très chiche en matière d’action. Poussés dans leurs derniers retranchements émotionnels, le trio Sam-Dean-Bobby, à fleur de peau, sait toutefois impliquer le spectateur dans ce scénario courant droit à sa noire coda, une des plus désespérés de la série alors même que l’Apocalypse se profile à l’horizon.

Gamble utilise une ficelle usée mais qui a fait ses preuves pour exprimer l’effet du manque sur Sam : les hallucinations « psy ». Pas de grinçant délire à la Trainspotting, plutôt une exploration de 4 des facettes de Sam : le chasseur terrorisé, l’adulte frustré, le fils sevré d’amour maternel, et le frère à la relation si compliquée avec Dean. Si Christopher Heyerdahl fanfaronne toujours sadiquement en Alastair, la séquence est surtout là pour des effets faciles. La révolte de Sam enfant face à ce qu’est devenu Sam adulte déroule des dialogues et des idées mille fois vues, malgré une bonne interprétation.

Le casting surprise de Samantha Smith est en revanche une excellente idée, dont les attitudes prennent à contrepied le spectateur mais finalement de manière logique : la chasseuse ne peut qu’être fière que son fils ait pris la relève avec autant d’éclat, même si elle est triste que ce soit au prix d’une vie normale. Voir Sam se consoler sur son épaule est émouvant, et c’est sans doute la seule facette de lui-même, la fierté du travail accompli, qui est apaisée, et qui lui donne un moment de répit. Tant mieux car la confrontation avec sa projection de Dean se montre à l’opposé d’une dureté aiguë, où il n’arrive à imaginer qu’une vision négative voire haineuse que son frère a de lui. Le contraste avec les vraies pensées de Dean, exposées en alternance, est cruel pour Sam, mais ironiquement, ses actions finiront par user la patience de Dean dans la coda où réalité et fantasme vont se rejoindre pour le pire. Jared Padalecki est mémorable en junkie lessivé et patraque.

L’impuissance rageuse de Dean et Bobby n’est pas moins corrosive, et il faut vraiment que Dean soit au bout du rouleau pour accepter de se soumettre aux ordres d’un Dieu invisible - auquel il n’a jamais vraiment cru et dont il doute le bien-fondé de ses actions - via un Castiel peut-être encore plus paumé que lui. L’ange en a ras l’imperméable de cacher tant de choses capitales à son padawan, doutant en permanence des ordres qu’il reçoit : au fond de lui, il souhaiterait sans doute suivre Anna la rebelle et non la remettre aux « autorités » divines. L’action reste immobilisée durant le huis clos, ce qui fait que l’épisode n’est pas sans longueurs.

Après nous avoir fait suivre tout le parcours tragique de Sam en cette saison, Supernatural atteint enfin le fond du gouffre lorsque Sam choisit de faire confiance à Ruby plutôt qu’à Dean. Il est étonnant de constater que c’est encore une fois l’amour fraternel qui les pousse l’un contre l’autre : Dean préfère tuer son frère plutôt que le laisser devenir un monstre, et ainsi se montre impitoyable contre lui, tandis que Sam veut protéger son frère et n’a pas confiance en sa force pour empêcher l’apocalypse, alors qu’il s’agit pourtant du « plan de Dieu » (ou du moins, présenté comme tel), mais il est vrai que Dieu ne s’est guère clairement manifesté sur le sujet, et ce n’est pas les Anges, tous chauffés à blanc, qui vont nous rassurer en prenant l’intérim !

La tragédie est consommée lors de la si poignante scène où Bobby tente de retenir Sam, mais est impuissant à lui tirer dessus (I love that boy like a son. All I'm saying is maybe he's here right now instead of on the battlefield because we love him too much). Ruby, félonne grand train, manipule avec toujours autant de sensualité perverse notre pauvre Sammy, et l’on continue à se demander quel bénéfice elle en tire. Quoiqu’il en soit, le jeu de Genevieve Cortese commence tout doucement à surchauffer, un choix idoine quant à l’excitation de son personnage, sur le point de frapper un grand coup, on en doute pas ! L’explication finale entre Sam et Dean, désormais en pleine incommunicabilité, se montre aussi violente que sans espoir (réalisation électrique de Robert Singer), avec cette image terrible de Sam choisissant Ruby au lieu de Dean, car désormais trop dépendant : à sa volonté de sauver son frère, au pouvoir, peut-être aussi à la démone elle-même, et pas seulement son sang. Toujours unis au moment des finales de saison, le lien Sam et Dean, moteur du show, meilleure arme contre les forces du mal, est brisé, ce qui laisse augurer un final de saison bien intense !

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La critique d'Estuaire44 : 


When the Levee Breaks présente l’intérêt de nous révéler vraiment ce qui anime Sam dans sa course à l’avilissement. En effet il est souvent malaisé de deviner ce que ressent cet introverti surdoué, bien davantage que chez Dean, plus direct et à qui Castiel sert couvent de confident. Malheureusement, malgré un Padalecki au sommet de son art, cet espèce de Christmas Carol inversé ne convainc que partiellement, avec ses visites ultra prévisibles et son arrière fond lourdement psychanalytique. Celui-ci voit Sam s’adresser à lui-même avec les figures marquantes de son passé symbolisant les diverses facettes de sa personnalité. Tout ceci demeure démonstratif et formaté au possible, mais la mise en scène maintient sa qualité et l’épisode sait se relancer quand Sam sort enfin du bunker.

 On a un premier choc quand on entrevoit la possibilité que Sam nous tue Bobby, là tout de suite, mais le grand moment survient lors de la grande confrontation qui éclaté enfin entre les deux frères. La scène, d’une âpreté sans concessions, se révèle d’une puissance émotionnelle terrible, d’autant qu’elle semble réellement sans retour. La vénéneuse Ruby triomphe, toujours campée avec brio par la brune Geneviève. Vraiment un adversaire grand train, n’ayant plus rien à voir avec la guerrière d’opérette de la saison précédente. Le scénario déplie tout un impressionnant mouvement, car Castiel connaît son nadir simultanément à celui des Winchester, lors de sa trahison d’Anna. Il a beau faire la moue, l’acte est bel et bien perpétré, et jamais l’Ange ne sera plus antipathique qu’à cet instant. C’est en guenilles, sinon en lambeaux, que la Team Winchester parvient au final de saison, ce glissement suscitant une impressionnante force narrative.

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Anecdotes :

  • Le titre original repend celui d’une chanson de Led Zeppelin (1971), adaptant un Blues de 1929.

  • If you walk out that door, don't you ever come back déclare Dean à Sam, reprenant la phrase de John quand Sam était parti à la faculté de droit.

  • They come on like shady politicians from Planet Vulcan déclare Dean faisant un parallèle entre Castiel et le manque d’émotion de Spock.

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22. LE RÉVEIL DE LUCIFER
(LUCIFER RISING)

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Scénario : Eric Kripke

Réalisation : Eric Kripke

Dean... HE's coming!

Résumé :

Sam kidnappe une alliée de Lilith et la force à lui avouer où elle brisera le dernier sceau qui libérera Lucifer : le couvent Sainte Marie dans le Maryland, où Azazel massacra 8 nonnes en 1972. Dean est téléporté dans une chambre divine par les Anges pour le préparer à l’Apocalypse. Les deux frères vont finir par comprendre qu’ils ont tous les deux été joués, mais n’est-il pas déjà trop tard ?…

The road so far…

Devinez qui vient dîner ce soir !

La critique de Clément Diaz : 

Lucifer Rising (et pan, encore un titre qui tue !) ne souhaite pas nous surprendre : le sens sans équivoque de son titre et les indices parsemés dans toute la saison (double jeu de Ruby, Sam déclenchant la catastrophe en croyant l’éviter…) font que l’intérêt du final n’est pas de nous choquer, mais de regarder, comme une tragédie grecque, nos héros se battant tant contre les Anges que contre les Démons, et faisant face à une inévitable Apocalypse (le créateur n’allait évidemment pas nous décevoir après nous avoir chauffé toute la saison). L’émotion est le moteur de tout ce finale riche en scènes spectaculaires, où Sam plonge sans retour dans les trompeuses promesses de Ruby, et où Dean tente de trouver une échappatoire au piège des Anges. La tension grimpe tout le long du récit, jusqu’à prendre feu dans une grandiose coda et un des plus hallucinants cliffhangers qu’une série ait pu nous proposer.

La magistrale première séquence emboîte la dernière pièce du puzzle qu’est la Conspiration des démons pour libérer Lucifer, instaurant Azazel comme son authentique meneur, même par-delà sa mort. Le délire satanique du prêtre face à son assemblée frappe les esprits par son cynisme et sa mégalomanie. Eric Kripke fait face au challenge de devoir raconter deux segments presque déconnectés, mais ce faisant, il exprime bien la déroute des Winchester dès lors qu’ils ne travaillent plus ensemble. Surtout, les deux parties de l’histoire se montrent d’une intensité permanente.

Côté Sam : Ruby ne cache plus son excitation et lève plusieurs fois le coin du masque (notamment avec la connaissance de Lilith) alors qu’elle accomplit les ultimes étapes du plan d’Azazel, dont elle est la cheville ouvrière depuis sa mort en fin de saison 2. Sam, dans sa ténébreuse addiction à son ego et au pouvoir, ne voit rien venir, plus ange exterminateur que jamais. Le voir accomplir docilement toutes les injonctions de Ruby fait froid dans le dos, alors même que l’on sait qu’il est en train de commettre une terrible erreur. Le voir à l’ultime moment repousser la main salvatrice de Dean pour commettre l’acte final, sous les yeux pervers d’une Ruby jubilante, est le couronnement du travail de sape de cette dernière ; de la belle ouvrage.

Côté Dean : c’est un dialogue, enfin, une dispute, qui s’instaure avec Zachariah, subtilement perfide derrière ses airs narquois (un rôle taillé sur mesure pour l’éblouissant Kurt Fuller). Son inactivité forcée finit par éveiller un dangereux soupçon, jusqu’à ce que l’ange dévoile son plan dans un twist retentissant que les plus malins auront peut-être deviné. Mais voir les frères devoir après Heaven and Hell combattre une fois de plus le Ciel et l’Enfer simultanément a cette beauté tragique que l’on retrouve dans les meilleurs récits épiques.

L’épisode consomme jusqu’au bout l’amertume des Anges devant des humains tellement plus faibles et pêcheurs, mais bénéficiaires du bien le plus précieux : le libre-arbitre. L’on peut se demander pourquoi Dieu « a quitté la boutique », mais nul doute que Supernatural nous donnera quelques explications à l’avenir ! Kripke porte une emphase particulière sur la condition des Anges, avant tout des guerriers bataillant contre le mal, et piaffant à l’idée d’en découdre une bonne fois pour toutes avec leur confrère travaillant dans les sous-sols. À leur tempérament belliqueux s’ajoute l’impatience, celle d’exterminer la race démoniaque, quitte à passer une humanité ingrate par les pertes et profits. Finalement, cet épisode n’est pas autre chose qu’une relecture certes spéciale de l’éternel sujet du frère aîné et du frère cadet rivaux se disputant l’amour (et l’héritage) du patriarche, dont l’affection se porte souvent sur le plus jeune. Seul grain de sable dans la machine, Castiel, qui par Dean, a appris à aimer les humains, et entre en sécession hélas dramatiquement tardive.

Mais comment lui en vouloir, lui qui a tant à perdre et rien à gagner dans cette affaire ? Il est prêt à tout sacrifier pour apaiser sa conscience, et c’est par cela qu’il nous émeut, cela et le jeu si intériorisé et si déchirant à la fois de Misha Collins, décidément le casting idéal pour ce personnage si complexe. On apprécie également le coucou de ce bon vieux Chuck (inénarrable Rob Benedict), toujours paumé entre deux prophéties, et demandant juste qu’on lui foute la paix. Ouais, coco, mais comme t’es un prophète du Très-Haut, c’est pas gagné. La terrifiante coda, lorsque la terre s’embrase sous les pieds de Sam, comprenant trop tard sa monumentale erreur, ne lâche à aucun moment le spectateur, tandis que Ruby fait une tourbillonnante danse de joie méchante. Haïe par les fans du show, Genevieve Cortese n’aura pourtant jamais démérité face à Katie Cassidy, certes plus en présence physique, mais au jeu moins large que sa successeure, tellement plus félonne. Elle nous le prouve lors de son récital final. Qu’importe que les foudres de Dean s’abattent sur elle, le cliffhanger final, s’arrêtant quelques secondes avant la libération du Roi des Enfers devant nos frères prisonniers, est à hurler de rage - ce que tout cliffhanger qui se respecte doit faire - tout en portant les enjeux très très haut pour une saison 5 s’annonçant comme spectaculaire !

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La critique d'Estuaire44 : 


Lucifer Rising (ça c’est du titre, les amis) débute après le toujours délicieux coup d‘œil dans le rétroviseur qu’est le The Road so Far, un rituel que l'on aime encore et toujours retrouver. Dès son commencement le Season finale se profile ainsi comme épique. Le scénario pourrait sembler souffrir d’un manque de rebondissements, tant ses articulations majeures sont prévisibles, assez inévitablement étant donné la force du récit précédent. Oui, Lucifer s’élève des tréfonds de la Cage (bon, c’est dans le titre), oui le complot de Ruby fonctionne jusqu’à son terme, oui les Anges veulent la Grande Bataille donnant un sens à leur existence, oui les Bros se retrouvent au moment ultime (mais trop tard), oui Castiel tourne casaque et redevient l’allié des frères au moment fatal (trop tard pour Anna), oui, tout cela était totalement scripté. Et pourtant l’épisode s’avère enthousiasmant de bout en bout, s’échappant par le haut grâce à la renversante qualité de ses dialogues (énorme tirade de Bobby sur John !), de sa mise en scène hyper nerveuse et de son interprétation, particulièrement incandescente ici. Geneviève Cortese se montre une nouvelle fois parfaite malgré les réserves parfois exprimées de-ci, de-là.

Par ailleurs, initialement un peu lente mais gagnant sans cesse en énergie, l’intrigue nous réserve malgré tout quelques jolies surprises en cours de route, comme Azazel bouclant superbement la boucle, Lilith en sceau terminal, le retour hilarant du Chuck ou la découverte de cette étrange salle très à la séquence finale de 2001 Odyssée de l’Espace, où Zacharie nous régale encore une fois de son numéro de fripouille intégrale et satisfaite d’elle-même. Le final demeure également spectaculaire, on apprécie l’ironie voyant Ruby tuée par son propre couteau. Qui a vécu par l’épée etc, tellement biblique. J’aime aussi la jouissance de Dean à la trucider, c’est toujours ça de pris pour la Route. Certes nous refait le même coup qu’avec l’Archange du Prophète Chuck, car on ne voit du Déchu qu’une lumière vrombissante, mais cela suscite un cliffhanger assez ultime ! La saison 4 s’achève, d’un très haut niveau, elle confirme à quel point les auteurs de Supernatural ne craignent pas de pousser leurs intrigues et concepts jusqu’à leur terme ultime, aussi éprouvant soit-il. La cinquième, la préférée de nombreux fans, sera encore meilleure.

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Anecdotes :

  • Deuxième et dernière réalisation pour sa série du créateur Eric Kripke, cette fois sur un de ses scénarios. Il avait déjà réalisé What if and what should ever be en saison 2 d'après un scénario de Raelle Tucker.

  • Le nom du Père Dominic Lehne, possédé par Azazel, est un clin d’œil à Fredric Lehne, qui interprétait les Yeux Jaunes en saison 2.

  • Le titre Lucifer Rising renvoie à celui du pilote de saison, Lazarus Rising. C'est aussi le titre d'un tube du groupe de Doom Metal suédois Candlemass, en 2008. C'est aussi le titre d'un court métrage culte de 1972, narrant comment des dieux égyptiens invoquent l'Archange Lucifer afin de créer un nouvel âge mystique.

  • L'arrivée de Lucifer est annoncée par une pure lumière, assez logiquement car son nom signifie "Porteur de Lumière".

  • Dernière apparition de Ruby et de Lilith au cours de la série.

  • On entend le traditionnel Carry On Wayward Son de Kansas durant la séquence récapitulative The Road So Far. L'infirmière Cindy interprète Patty Cake, de Juliana Wimbles.

  • L'une des pentures représente l'Archange Mickaël, qui va jouer un grand rôle en saison 5.

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 saison 1Saison 2

Supernatural

Saison 1

1. La Dame blanche (Pilot)

2. Wendigo (Wendigo)

3. L'Esprit du lac (Dead in the Water)

4. Le Fantôme voyageur (Phantom Traveler)

5. La Légende de Bloody Mary (Bloody Mary)

6. Faux Frère (Skin)

7. L'Homme au crochet (Hook Man)

8. La Vallée maudite (Bugs)

9. La Maison des cauchemars (Home)

10. Terreur à l'asile (Asylum)

11. L'Épouvantail (Scarecrow)

12. Magie noire (Faith)

13. Route 666 (Route 666)

14. Télékinésie (Nightmare)

15. Les Chasseurs (The Benders)

16. Daeva (Shadow)

17. À force de volonté (Hell House)

18. La Strige (Something Wicked)

19. Le Tableau hanté (Provenance)

20. Le Retour des vampires (Dead Man's Blood)

21-22. Délivrance (Salvation /Devil's Trap)


1. LA DAME BLANCHE
(PILOT)

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Épisode Mythologique

Scénario : Eric Kripke
Réalisation :
David Nutter

- When I told Dad I was scared of the thing in my closet, he gave me a .45 !
- Well, what was he supposed to do ?
- I was *nine* years old ! He was supposed to say "don't be afraid of the dark!"
- Don't be afraid of the dark ? What are you, kidding me ? Of course you should be afraid of the dark. You know what's out there !

Résumé :  

Il y a 22 ans, dans la maison de la famille Winchester, Sam et Dean sont encore des enfants lorsque leur mère se fait tuer par une force démoniaque qui enflamme la maison. Grâce à leur père, ils réussissent à s’en sortir. 22 ans plus tard, Sam (le cadet) vit avec sa petite amie Jessica et envisage déjà une vie toute tracée. Mais, un soir, Dean s’introduit chez lui pour lui faire part de ses inquiétudes : leur père à disparu depuis des jours alors qu’il était allé chasser des démons. Malgré quelques réticences, Sam accepte d’accompagner son frère à la recherche de leur père. La piste les mène à une petite ville où les hommes disparaissent...

Bienvenue dans Supernatural...

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Même s’il ne fait partie des meilleurs épisodes de la série, le pilote est indispensable. C’est avec cet épisode que débute la grande mythologie de la série. Le pilote de Supernatural joue comme tous les pilotes sur trois points : l'atmosphère, les personnages, l'histoire, et il faut avouer que les deux derniers points sont encore faiblement ébauchés, alors que l'immersion dans l'univers d'horreur de la série s'effectue avec une efficacité renversante, et cela dès la tonitruante et pyrotechnique introduction, une merveille d'horreur fracassante.

Par suite, l'épisode doit subir un ton passablement verbeux pour expliquer tout ce qu'il y a savoir :  Cela passe par des tunnels dialogués assez longs. Le premier frère que l’on découvre est Sam Winchester, accompagné de sa petite amie Jessica Moore (Adrianne Palicki). La présentation, laborieuse, s'améliore avec la venue de Dean. Côté personnages, Dean et Sam livrent une version de ghostbusters contemporains innovante et prenante, mais demeurent encore grossièrement dessinés, et les acteurs sont encore peu assurés. On fait aussi connaissance des bonnes vannes de Dean ainsi que de la première dispute entre frères qui pourra aller de la légère engueulade (comme ici) à de très violentes bagarres (comme plus tard).

À partir de ce moment, on va retrouver les codes de la série : le meurtre sanguinolent (d’habitude en intro), les recherches, les multiples usurpations d’identité (souvent des fédéraux) et surtout... la traversée sur les routes de l’Amérique dans la mythique Chevrolet Impala sur un fond de musique rock. Ce genre de scènes nous suivra tout de long de la série. Néanmoins, certains éléments ne sont pas encore en place : Sam parle des esprits au premier venu et l'histoire du jour bute sur une version de la Llorona mexicaine minimaliste. Il eut été aussi plus synergique que le duo enquêtât ensemble au lieu d'être séparés en milieu de parcours. Pour un premier épisode, c'est une maladresse. C’est bien dommage, car Sarah Shahi est dantesque en esprit fou et sauvage, dont l'évanescence et la grande beauté impriment une force peu commune - amusant de voir Duane Barry en passant, comme pour marquer la succession avec les X-Files. La cruelle épanadiplose finale est un coup magistral.

Les défauts de la narration se voient joliment compensés par l'une des réalisations les plus flamboyantes du pilot whisperer David Nutter et du chef opérateur Aaron Schneider : on est immédiatement pris au cœur de l'ambiance d'horreur et de suspense à fouetter le sang (musique ad hoc de Christopher Lennertz), et aussi de l'Amérique profonde et ses légendes country qui soudain prennent vie. Les magnifiques paysages cachent avec brio le petit budget de la série tandis que les scènes d'effroi se voient magnifiquement mis en scène. Les apparitions de la Dame Blanche mettent d'emblée sur les nerfs, l'assassinat de la victime ou l'agression de Sam sont des cauchemars éveillés. Secousses garanties lorsque Sam "percute" la Dame. On sent l'atmosphère de folie sanglante à chaque plan de cette histoire effrayante.

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La critique d'Estuaire44 : 

La Dame blanche constitue un pilote de haut vol, campant parfaitement le décor de Supernatural  et narrant avec une grande efficacité la tragédie familiale des Winchester, ainsi que le lien unissant les deux frères. Évidemment la série va progressivement développer ces éléments mais, l’essentiel est déjà là, à commencer par une Impala d’emblée mise en valeur.

Malgré l’économie des moyens, les scènes horrifiques frappent d’emblée très fort, complétant le panorama d’une série puisant aussi bien se sources dans les folklores de l’Amérique profonde que dans les légendes urbaines. Le scénario sait ne pas sacrifier l’intrigue du jour. La sublime et talentueuse Sarah Shahi inaugure en grande pompe la tradition des invités de marque dans Supernatural. Le fait qu’elle venait juste de devenir la rayonnante Carmen de The L Word rend par contraste encore plus saisissante sa composition.

De leur côté, Jensen Ackles et Jared Paladecki possèdent d’emblée leur rôle, ce qui va permettre de développer de manière convaincante la relation fraternelle lors des prochaines étapes de ce vaste road movie. De fait ce pilote constitue un authentique manifeste pour cette série se positionnant aussi bien en héritière des X-Files que de Buffy contre les Vampires, tout en forgeant son identité propre. On devine déjà que, sans tout à fait égaler ses prestigieuses devancières, elle va représenter une précieuse relève pour les amateurs. 

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Anecdotes :

  • Cet épisode est égalemment connu sous le titre français L’horreur.

  • Jensen Ackles s’est fait connaître dans Des jours et des vies à la fin des années 90. Depuis, il est apparu en second rôle dans plusieurs séries (Dark Angel, Smallville, Dawson…). Son timbre grave lui vaut également d’être un acteur de voix régulier, notamment pour des dessins animés et des jeux vidéos.

  • Jared Padalecki connaît le succès grâce à Gilmore Girls, au début dans années 2000. On le voit ensuite au cinéma, notamment dans La maison de Cire (2005), le remake du classique de 1953 ou celui de Vendredi 13, en 2009. Lui et Jensen Ackles étaient déjà amis de longue date avant le lancement de Supernatural. En 2010 Jared Padalecki épousa Genevieve Cortese, l’interprète de Ruby II, en saison 4.

  • Exceptionnellement, la séquence pré-générique ne montre pas le Monstre de la Semaine dans ses exploits, alors que, tout comme dans les X-Files, ce procédé deviendra l’un des rituels de la série. À la place, le pilote montre logiquement l’origine du drame familial des Winchester, le passage équivalent se voyant néanmoins implanté en cours d’épisode. Et ce n’est pas dommage, car le premier Monstre de la Semaine, la Dame Blanche, se voit incarnée par la brune et généreuse Sarah Shahi (1980), d’origine irano-espagnole (et parlant couramment le persan), que l’a pu admirer par ailleurs dans The L Word et actuellement dans Fairly Legal. Elle est égalemment ceinture marron de karaté. Elle est aussi connue pour son rôle de Dani Reese dans Life. Elle est apparue entre autres dans Alias, Dawson et Urgences. Elle devient ainsi la première guest de la série et inaugure une tendance régulière de la série : de nombreux épisodes organiseront l’aventure des Winchester autour d’une rencontre féminine, pour le bien comme pour le mal.

  • Adrianne Palicki (1983), Jessica, réapparaîtra dans les saisons 2 et 5 de la série. Elle est connue pour son rôle de Tyra Colette dans Friday Night Lights et incarna Wonder Woman en 2011, dans le pilote inabouti du reboot de cette série.. On apercevra la petite amie de Sam, dans trois autres épisodes.

  • Joseph Welch est interprété par Steve Railsback, grand spécialiste des rôles tourmentés. Dans les X-Files il incarna Duane Barry, l’une des grandes figures de la mythologie développée par Chris Carter. Plusieurs autres acteurs des X-Files apparaîtront par la suite dans Supernatural, série accueillant déjà une partie non négligeable de l’équipe technique des X-Files, à commencer par Kim Manners.

  • Dean fait référence à "The X-Files" lors de sa réplique : "Agent Mulder, Agent Scully". Durant la fête d’Halloween, Sam explique que sa famille n’a rien de comparable avec les Brady, tandis que le copain noir de Jessica commente que la sienne est également très différente des Huxtable. Il s’agit de deux familles symbolisant à la perfection les valeurs traditionnelles américaines ; chacune étant l’héroïne d’un soap à succès : The Brady Bunch (1969-1974) et The Cosby Show (1984-1992). L’avant dernier épisode des X-Files, Sunshine Days, met également en scène les Brady, ainsi que le décor emblématique de la série The Brady House. Dean surnomme Sam « Unsolved Misteries » quand celui-ci explique la nature du Pentacle à deux jeunes femmes gothiques. Unsolved Mysteries est, depuis 1987, une série documentaire à succès, décrivant des cas avérés (ou prétendus tels) de manifestations paranormales : ce que l’on appellerait, dans un autre univers, des affaires non classées. Jusqu’en 2002 elle fut présentée par Robert Stack. Une adaptation francophone du concept est diffusée depuis 2004, sous le titre de « Les enquêtes impossibles ». Elle est commentée par Pierre Bellemare, grand spécialiste du genre.

  • Surnommé « The Pilot Whisperer », le réalisateur David Nutter est un spécialiste des pilotes de série. Il a ainsi mis en scène 21 pilotes (dont 19 donnèrent lieux à des séries) dont ceux de MillenniuM, Roswell, Dark Angel, Smallville, Terminator Sarah Connor Chronicles, etc. Il n'est toutefois pas le réalisateur ayant dirigé le plus grand nombre de pilotes, le record étant détenu par le prolixe James Burrows, réalisateur de plus de 1000 épisodes de série dont 64 pilotes ! Nutter a retenu Sarah Shahi car il est un grand fan de The L Word, en particulier de la divine Carmen de la Pica Morales. Nutter réalisera également l’épisode suivant, Wendigo.

  • Le pilote introduit l’un des fondements de l’univers de la série, avec la Chevrolet Impala noire 1967 de Dean. Cette voiture deviendra la résidence principale des Winchesters au cours de leurs pérégrinations (Dean souffre d’une peur phobique de l’avion). Elle est devenue l’un des emblèmes principaux de la série, ainsi qu’un personnage à part entière, jusqu'à lui voir un épisode filmé de "son" point de vue et qui lui est entièrement consacré (Baby, 11-04). L’Impala fut développée en 1958 par General Motors, comme une voiture sportive de standing accessible aux classes moyennes, et connut un grand succès durant les années 60 et 70. Son imposant coffre contient l’arsenal des deux frères.

  • La Dame Blanche est une figure présente dans les mythes et légendes de nombreuses contrées européennes, souvent annonciatrice de mort prochaine, qu’elle soit une fée ou un spectre. Elle puiserait son origine chez la Banshee des Celtes, se mêlant à la tradition arthurienne. Ce folklore, comme de nombreux autres présents dans la série, a suivi les populations s’installant en Amérique du Nord. Le pilote en exploite une version plus récente, devenue une authentique légende urbaine, celle des autostoppeuses fantômes. Les premier cas relatés remontent aux années 30, aux Etats-Unis, mais des observations ont aussi été relevées en France. Des jeunes femmes vêtues de blanc, récemment décédées dans un accident de voiture, avertiraient les conducteurs solitaires du péril, parfois en criant, puis disparaitraient soudainement.

  • Le pilote révèle également ce qui va devenir une identité forte de la série, une bande son somptueuse, composée de standards Rock ou Metal. Les chansons partiellement entendues sont : “Gasoline” de The Living Daylights quand on découvre Jessica et Sam à l’univesité, “What Cha Gonna Do” de Classic, à la fête d’Halloween, “Speaking In Tongues” de Eagles Of Death Metal qu’écoute la future victime de la Dame, “Ramblin’ Man” de Allman Brothers Band, à la station service, “Back In Black” d’AC/DC quand l’Impala approche de Jericho “Highway To Hell” d’AC/DC sur le chemin du retour. On remarque que quand Dean met une casette de Metallica, c’est pourtant une chanson de AC/DC que l’on peut entendre. On note qu'en vrai puriste Dean n’écoute que des cassettes audio, jamais de DVD.

  • Dean se présente au shérif comme étant Ted Nugent, en fait un grand guitariste de Rock. Les identités d’emprunt de Sam et Dean comporteront souvent des clins d’œil à d’autres figures du Rock.

  • Quand la Dame Blanche massacre l’automobiliste, du sang asperge la voiture à profusion. Or il n’en reste aucune trace à l’arrivée des policiers.

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2. WENDIGO
(WENDIGO )

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Épisode semi-mythologique

Scénario : Eric Kripke, d'après une histoire de Ron Milbauer & Terri Hughes Burton
Réalisation :
David Nutter

Guns are useless, so are knives. Basically we gotta torch the sucker.

Résumé :

Après l’assassinat de Jessica, Sam a accompagné Dean dans sa traversée de l’Amérique pour retrouver leur père et el démon responsable de la mort de leur mère de Jessica. Ils suivent une piste qui les mène jusqu’à une jeune fille qui ne retrouve pas son frère parti camper en forêt.

Promenons-nous dans les bois...

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Au niveau scène d’introduction digne-des-meilleurs-films d’horreurs, on a vu mieux. Quoique la scène suivante nous montrant Sam au cimetière sur la tombe de Jess, contient une surprise de taille. Si l'on est pas contre de s'appuyer sur une situation cliché comme ici la forêt maléfique et ses campeurs malchanceux, il faut que le traitement adopté soit sinon original, du moins efficace. De fait, c'est ici ni l'un ni l'autre : sur le fond, la suite de l’épisode est assez classique, reprenant les règles habituelles de Supernatural. Sur la forme, l'on constate un cruel manque de suspense ou de pics d'intensité, malgré un David Nutter ne ménageant pas ses efforts pour faire monter la sauce (très belles vues de la forêt de Vancouver).

Néanmoins, malgré quelques bons moments tels que les habituelles vannes de Dean, la très bonne interprétation de Gina Holden, ce cher Callum Keith Rennie en guide prétentieux, et des autres acteurs secondaires ainsi que la bonne volonté des scénaristes à créer du suspense, on s’ennuie un peu. Car du suspense on en a pas du tout : encore une fois, on devine tout ce qui va se passer. Les scènes dans la forêt se répètent et se ressemblent, mais on trouve quelques idées éparses : la référence aux Anasazi, les insultes de Dean au Wendigo (il gagne +10 en côte d'amour rien qu'avec ça) et surtout une comique substitution des miettes de pain par... les M&M's ! (c'est quand même du gâchis, pasque c'est bon les M&M's) L'épisode manque cependant d'humour, celui qui était si gouleyant dans l'épisode correspondant d'X-Files : Détour. L'épisode est toutefois plus réussi que l'idiotie commise par la version de Charmed. Très belle photographie, obscure juste ce qu'il faut pour limiter un budget un poil indigent, mais une première saison de série a presque toujours ce problème.

La seule scène qui brise un peu la routine est le dialogue entre Sam et Dean à propos de leur père et de Jess.  L'épisode trouve en effet un second souffle dans la relation entre les deux frérots, à la fois polaire - en surface - et chaleureuse - en-dessous - Sam enthousiasme comme dans le pilote par sa défiance, sa répugnance à servir la voie que le destin lui propose, tandis que Dean fêle un peu l'armure par ses motivations qui le poussent à continuer cette quête sans gratification ni gloire. Même si Jared Padalecki et Jensen Ackles sont très convaincants, cela reste bien peu. De plus, Sam et Dean mettent un temps fou à se rendre compte qu’ils traquent un Wendigo, beaucoup d’invraisemblances (donc, le Wendigo à tuer tout le monde sauf Tommy. Mouais...). En bref, on regarde l’heure toute les cinq minutes. Et ici, on n’a pas trop de bons effets spéciaux à se mettre sous la dent : le Wendigo fait très fabrication à l’ordinateur et sa mort est tout sauf spectaculaire. Mine de rien, l'on sent vraiment que la série a du potentiel, il n'y a qu'à attendre un scénario plus nerveux.

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La critique d'Estuaire44 :

L'ambiance et les seconds rôles reconstituent de manière amusante la tonalité des films d’horreur en forêt, Supernatural s’avère déjà plaisamment référencée et bénéficie décidément d’excellents guests dès la première saison, un vrai indice de potentiel pour une nouvelle série. Le scénario se montre habile, ménageant le suspense avant de révéler le Wendigo et assurant un bon équilibre entre les actions des deux frères tout en approfondissant leurs différences vis-à-vis de la figure paternelle.

Les auteurs sauront tisser une belle toile autour de cette opposition entre fils obéissant ou rebelle, jusqu’à lui conférer une dimension biblique. La mie en scène de  David Nutter rsute toutefois moins intense que lors du pilote et Wendigo soufre de la comparaison avec Détour, épisode des X-Files mais au traitement davantage abouti.

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Anecdotes :

  • Gina Holden (1975) à une carrière d’actrice secondaire bien remplie : Dead Zone, Killer Instinct, Blood Ties, etc.

  • Cory Monteith (1982-2013) est ici un des campeurs malchanceux. Il est aujourd’hui connu pour son rôle de Finn Hudson dans la série musicale Glee, il décéda durant la production de cette série d'une overdose d'alcool et de drogues.

  • Il est dit que cet épisode se déroule dans la zone autours de "Grand Junction", alors qu’il n’y a que du désert dans cette zone : aucune forêt et même aucun arbre... so Supernatural... Dean raconte au garde forestier que lui et Sam sont étudiants de "UC Boulder" : il aurait dû dire ‘’CU Boulder’’ (une université du Colorado). Il y a une différence entre le message qu’enregistre Tommy, et celui qu’Haley fait écouter à Sam et Dean. Quand Sam et Dean se présentent à Haley, Dean dit s’appeler Dean, mais sur sa carte, il y a écrit ‘’Samuel Cole’’.

  • La scène du rêve de Sam au cimetière fait référence à "Carrie au bal du diable" (Brian de Palma - 1976).

  • Après un pilote tourné à Los Angeles, Supernatural prend ses quartiers à Vancouver. La plupart de ses épisodes seront en effet tournés dans cette ville et ses alentours, dont les vastes forêts immédiatement reconnaissables ici. David Nutter réalise également cet épisode, il considère d’ailleurs que le déménagement de la production à Vancouver fait de Wendigo un quasi second pilote de la série. Il estime également que l’idée de révéler le plus tard possible le Wendigo lui vient de son passé de fan (et de réalisateur/producteur) des X-Files, où ce l’on imaginait était toujours plus effrayant que ce l’on voyait. Eric Kripke, créateur et showrunner de la série, estime d’ailleurs que la visualisation du Wendigo reste quelque peu décevante. D’une manière classique Supernatural dispose de moins de moyens à ses débuts que par la suite.

  • L’un des campeurs lit Le héros aux mille visages, l’ouvrage majeur de Joseph Campbell. Cet anthropologue américain (1904-1987) s’est spécialisé dans l’étude psychologique comparée des mythologies et de archétypes s’en dégageant au-delà des différences culturelles. L’influence de Campbell s’étend à de nombreuses productions Hollywoodiennes, en particulier chez Disney ou chez George Lucas, qui le cite par miles grandes inspirations de Star Wars. Les auteurs de LOST indiquent également s’être référé au Héros aux mille visages dans l’écriture de leur mythologie.

  • Roy est incarné par Callum Keith Rennie, bien connu des amateurs des X-Files pour ses participations à la série ainsi qu’film de 2008. Il apparaît également dans de très nombreuses séries : Tru Calling, Californication, The L Word, Flashforward, Battle star Galactica, 24h Chrono etc.

  • Sur la pierre tombale, on voit que le nom complet de Jessica est Jessica Lee Moore et qu’elle a été assassinée à l’âge de 21 ans (1984-2005).

  • Au cours de l’épisode on entend "Hot Blooded" de Foreigner, dans l’Impala, en début d’épisode "Down South Jukin’’ de Lynyrd Skynyrd, au bar, "Fly By Night’’ de Rush, quand Sam prend le volant, en fin d’épisode.

  • Le Wendigo (ou Wendigowak, witiko, wihtikow etc. selon les tribus) est une créature maléfique, issue du folklore amérindien (référence est d’ailleurs faite aux Anasazi). Il désigne souvent un humain devenu monstrueux, ayant pratiqué le cannibalisme pour s’emparer de la force vitale de ses victimes ou pour survivre à l’hiver. Les Wendigos résident au cœur des forêts les plus profondes et occupent une place similaire aux Lycanthropes dans les contes européens. Ils ont comme apparence un corps terriblement émacié et difforme, sans orteils ni oreilles et peuvent être tués par l’argent ou le feu, qui détruit son cœur de glace. L’importance du Wendigo dans la culture populaire nord américaine le fait souvent apparaître dans les récits d’épouvantes, au même titre que les loups garous ou les vampires. Entre autres exemples, Lovecraft et King l’ont intégré à leurs écrits, tandis que Charmed lui consacre également un épisode (1-12 : Métamorphoses). Le terme « Wendigo » signifie « le mal qui dévore ».

  • Quand Dean évoque le cannibalisme du Wendigo, Ben déclare que cela est semblable au « Donner Party ». Il s’agit de l’expédition Donner : durant l’hiver 1846/147 un groupe de colons en route vers la Californie resta bloqué dans la Sierra Nevada à cause de la neige. Près de la moitié d’entre eux périrent de faim et de froid. Des survivants eurent recours au cannibalisme pour survivre jusqu’à l’arrivée des secours.

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3. L'ESPRIT DU LAC
(DEAD IN THE WATER)

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Scénario : Sera Gamble & Raelle Tucker
Réalisation :
Kim Manners

Oh god, we’re not going to have to hug or anything, are we ?

Résumé :

Une jeune fille s’est noyée, soi-disant accidentellement, dans un lac. Les frères Winchester, perplexe, se rendent sur place pour enquêter. Après une nouvelle victime qui appartenait à la même famille et qui s’est noyée dans un lavabo (!), Sam et Dean se plongent dans le passé de la famille..

Glou, glou...

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Le mystère de l'énigme de ce faux monstre du Loch Ness se coule dans un épisode très classique mais particulièrement abouti. On se laisse prendre par cette histoire qui pour une fois ne joue ni sur le gore ni sur l’horreur. L’histoire pallie à sa prévisibilité par un crescendo horrifique magistralement amené, à la clef, un grand nombre de scènes haletantes : la scène finale est un vrai petit chef d’œuvre tandis que la tentative de noyade sur Andrea (sauvé in extremis par Sam... alors qu’elle est nue) bénéficient d’une réalisation hors-pair, comme très souvent dans la série. Les scènes de meurtres ne sont pas sanglantes comme d’habitude, mais elle restent tout de même assez spectaculaires, en particulier celle du lavabo. En revanche, le bateau qui se renverse, pas terrible... Le scénario a un mystère bien entretenu : nature du monstre, cible véritable, suspense véritable de l'enquête par ces fausses pistes incessantes. Les fans des X-Files et de Buffy/Angel, les influences premières de la série, seront comblés de voir dans le même épisode Kim Manners et la surdouée, la merveilleuse, la sublime, l'unique, la magnifique, etc. Amy Acker qui ne se résout pas à être mauvaise ou même simplement correcte. Non, Amy, c'est la perfection, c'est un présent pour un réalisateur, et la damoiselle insuffle une vraie émotion à son personnage.

Si on pouvait éprouver une préférence à Détour par rapport à Wendigo, autant Dead in the water semble bien surclasser Quagmire, prouvant que Supernatural, à ses débuts, est un palimpseste de valeur des X-Files par son ton plus sombre. Chaque révélation et chaque attaque produit un effet additif. Kim Manners déploie son talent monstre de réalisateur, non seulement dans les scènes d'horreur, mais aussi dans les émouvantes scènes entre Dean et le mutique Lucas (très bien incarné lui aussi). Dean cesse de jouer les durs, et se montre d'une grande sensibilité, tandis que Jensen Ackles finit de conquérir l'audience. On peut arguer que Sam est en retrait, mais la réussite de cette ouverture psychologique de Dean est tout à fait justifiée. Les quelques moments plus prévisibles ne pèsent pas lourd devant le suspense de la forme, la réalisation et le casting exceptionnel.

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La critique d'Estuaire44 : 

L’Esprit du lac reste l’un des grands souvenirs de cette première saison. Contrairement à l’opus précédent, Supernatural rivalise ici pleinement avec les X-Files et leur Quagmire. Le scénario propose un joli tour d’horizon de la thématique de l’eau dans les productions d’épouvante : entrée à la Jaws, lac psychopompe à la Jason Voorhees ou infiltrations terrifiantes à la Dark Water. L’histoire traite également avec éloquence de la force indissoluble des liens familiaux, l’un des grands sujets d’une série qui reste autant une bromance qu’une odyssée dans le Fantastique. Amy Acker s’impose bien évidemment comme l’un des meilleurs guestings de la saison, aussi impressionnante qu’à l‘accoutumée dans l’expression du sentiment, que cela soit l’effroi ou le bonheur retrouvé. La palette de la talentueuse actrice se montre décidément particulièrement large et son professionnalisme aussi total pour une simple participation que pour un rôle récurrent. Elle sera loin d’être l’unique personnalité marquante du Buffyverse à participer à la série.

L’épisode demeure l’un préférés de Jensen Ackles, pour le portrait de Dean mais aussi pour la première collaboration avec Kim Manners. Ce dernier se régale visiblement tout du long, avec ses scènes horrifiques toujours tirées au cordeau, ses perspectives de folie sur le lac et sa photographie hyper soignée instituant celui-ci comme lieu à part, entre ce monde et l’au-delà. L’épisode illustre à quel point Manners va devenir l’un des artisans majeurs du succès de la première époque de SPN, un moment toujours délicat pour une série. Comme commenté précédemment, SPN sera toujours bien loin d’être une superproduction, mais un grand metteur en scène n’a pas besoin d’effets spéciaux onéreux ou de plateaux somptueux pour instaurer une ambiance. Manners est en terrain connu, le lac est le même que celui qu’il avait déjà filmé pour Quagmire : Buntzen Lake, non loin de Vancouver (c’est aussi le lac de Freddy contre Jason).

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Anecdotes :

  • Amy Acker (1976) est surtout connue pour son rôle de Fred Burkle dans le spin-off de Buffy, Angel. Elle a égalemment tenu le rôle important de Kelly Peyton dans l’ultime saison d’Alias et est apparue entre autres dans Ghost Whisperer, Happy town, How I Met Your Mother, The Good Wife, Dollhouse, etc... Elle garde aussi un grand souvenir de l’expérience, tout comme les deux acteurs principaux (amis de longue date dès avant le tournage de la série), elle est une Texane pur sucre et ils ont aimé évoquer le pays en plein Canada. L’eau répugnante envahissant fut réalisée avec du chocolat au lait et Amy déclara avec humour à l’issue du tournage : Everybody seemed to like me better. I guess they thought it was really sweet, en référence aux rôles très durs qu’elle venait de jouer dans la dernière période d’Angel et dans Alias.

  • Cet épisode est égalemment connu sous le titre français Eaux mortelles.

  • Après les deux premiers épisodes réalisés par David Nutter, L’esprit du lac voit l’entrée en scène de Kim Manners. Celui-ci va mettre en scène 16 épisodes de la série et intervenir comme producteur exécutif sur 78 d’entre eux, jusqu’à sa mort. Manners se situe d’emblée en terrain connu puisque le tournage se déroule au lac Buntzen, dans le Grand Vancouver. C’est là qu’il avait pareillement réalisé Les dents du lac, l’épisode des X-Files voyant Mulder cherchant à débusquer Big Blue, un cousin du Monstre du Loch Ness. Les similitudes sautent aux yeux, d’autant que la première partie de l’enquête des Winchester envisage une hypothèse assez semblable. Le lac Buntzen, du fait à sa beauté et à son atmosphère particulière, apparaît dans de nombreuses productions fantastiques, comme les 4400, Smallville, Dark Angel, Eureka… Au cinéma c’est là que se déroulent Lake Placid (1999) et Freddy affronte Jason (Freddy vs Jason, 2003).

  • L'épisode voit également l'entrée en scène des scénaristes Sera Gamble et Raelle Tucker - qui écriront souvent en tandem - qui travaillèrent également à la supervision des scénarios dans les deux premières saisons. Tucker va toutefois quitter la série à l'issue de la 2e saison, tandis que Gamble "montera en grade" jusqu'à devenir la showrunner de la série après le départ de son créateur.

  • Andrea avertit Sam que les tentatives à la Jerry Maguire de Dean ne vont pas fonctionner. Il s’agit d’une référence au film éponyme de 1997 où Tom Cruise jouait un agent sportif aussi séducteur que baratineur. Comme souvent, les noms d’emprunt de Sam et Dean contiennent un clin d’œil, les agents « Ford et Hamill » reprenant ceux des comédiens de Star Wars, Harrison Ford et Mark Hamill. Lucas est également une référence à George Lucas. Dean affirme également à Lucas que « Zeppelin rules », une référence à Led Zeppelin, un groupe britannique phare du Heavy Metal (1968-1980).

  • Lucas joue sans cesse aux Army Men. Ces soldats en plastique verdâtre, hauts de cinq centimètres, très bon marché, sont particulièrement populaires aux Etats unis. Il furent lancés à la fin des années 30, mais se développèrent principalement comme contre coup de la Seconde Guerre Mondiale. Ils connurent une apogée dans les années 50, avec des ventes par sacs entiers. Le conflit du Viet Nam, et la moindre popularité de l’armée en résultant, firent baisser les ventes mais les Army Men subsistent encore aujourd’hui, y compris sous forme de jeux vidéos.

  • Au cours de l’épisode l’on entend : “What A Way To Go” de Black Toast Music, quand Dean et Sam épluchent les journaux, “Round And Round” de Ratt, lors de l’arrivée de l’Impala au lac, “Too Daze Gone” de Billy Squier, quand Lucas offre le dessin de l’église, “Movin’ On” de Bad Company, lors du départ pour de nouvelles aventures.

  • Les recherches sur l’Internet, via son ordinateur portable, vont devenir la spécialité de Sam.

  • L’épisode reste l’un des préférés de Jensen Ackles, car il constitue l’un des premiers à explorer le caractère de Dean ce qui lui permit de mieux intégrer son personnage. De plus il apprécia grandement la collaboration avec Kim Manners.

  • Du chocolat au lait fut utilisé dans la confection de la mixture symbolisant l’eau maudite dans le bain d’Andrea. Au passage on peut s’apercevoir que le niveau de l’eau a quelque peu baissé à l’arrivée de la mixture.

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4. LE FANTÔME VOYAGEUR
(PHANTOM TRAVELER)

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Scénario : Richard Hatem
Réalisation :
Robert Singer

- Man. I look like one of the Blues Brothers.
- No, you don't. You look more like a seventh grader at his first dance.

Résumé :

Un ami des Winchester demande à Sam et Dean d’enquêter sur un étrange crash aérien : un homme aux yeux noirs aurait ouvert la porte en plein vol...

Mesdames et messieurs, cher passagers, ici votre commandant de bord. Suite à une défaillance de l’appareil, nous allons mourir dans approximativement 2 minutes. Merci de bien vouloir attacher vos ceintures pour limiter la décomposition lors de l’impact. Si vous le désirez, nos hôtesses vont vous proposer des cafés à moitié prix...

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Épisode mineur que Phantom traveler. Supernatural a encore du mal à trouver un ton à elle, mixant une intrigue à la Destination Finale avec un fantôme très Huile Noire, et l'épisode ne vaut pas son modèle qu'est le Tempus fugit des X-Files.  Il y a une erreur de stratégie de révéler au spectateur la nature du monstre dès le début et attendre 18 minutes pour que les J2 percutent, d'où une enquête laborieuse. De plus, les Winchester qui ne chassent qu’un seul démon de « seconde classe » pendant tout un épisode, c’est inimaginable dans les saisons suivantes. Cette histoire fait très « saison 1 ». Le manque d'humour se fait vraiment sentir ici : la seule scène qui peut paraître amusante c’est Dean qui à peur dans l’avion. C’est bien peu.

Cela dit, ce scénario bancal est un peu compensé par le savoir-faire de Robert Singer. Il semble qu'en ses premières heures, la série mise énormément sur ses réalisateurs, davantage que leurs scénaristes, ce qui est relativement rare au royaume de la télévision où les réalisations demeurent souvent impersonnelles : malgré l'indigence de l'effet spécial de la fumée noire, la mise en scène demeure très intense, dynamisant considérablement les scènes d'avion et de possession (bon, là, Angel a fait plus fort, mais c'est quand même réussi). Surtout, si l'on y est sensible, on peut trouver un certain agréable parfum de série B : budget fauché que la prod' tente de boucher méritoirement, nos deux héros pas vraiment sûrs d'eux – la scène où ils se font surprendre par les agents de la Homeland fait très pastiche de film d'espionnage.

Les méthodes utilisées (eau bénite, exorcisme) font très préhistoriques si l’on compare au Colt où encore au couteau de Ruby (dès la saison 3), une vraie faiblesse de la saison ; mais le jusqu'auboutisme de ce point avec ici eau bénite, exorcisme latin, détecteur électromagnétique fabriqué avec deux bouts de ficelle... peut au final donner un vrai petit charme, celui des films d'horreurs fauchés que les amateurs du genre vénèrent particulièrement. La flèche du Parthe du démon sur Jessica sème un doute, ce qui permet une coda plus sombre que les deux épisodes précédents. Les débuts de Supernatural la voient encore trop inféodée à ses modèles (référence claire aux XF avec leur devise mythique), dont elle n'est encore qu'un ersatz ; mais un bon ersatz tout de même.

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La critique d'Estuaire44 : 

Épisode moins grandiose que le précédent, mains néanmoins habile. L’auteur joue habilement sur une peur des voyages en avions dont il sait qu’à coup sûr l’irrationalité sera partagée par une grande partie du public. Cela rejoint aussi cette vieille idée que le ciel demeure un territoire où les humains restent des intrus, un monde mystérieux et périlleux, aux drames échappant parfois à notre compréhension (un thème déjà fort présent dans La Quatrième Dimension, comme lors de Cauchemar à 20 000 pieds).

Avec la phobie de Dean, le récit trouve aussi une explication à la fois élégante et amusante du choix de l’automobile pour les pérégrinations des Bros, là où les Américains ont très naturellement et fréquemment recours à l’aviation (l’Impala vous dit grand merci). Là aussi on mêle habilement le réel au surnaturel, car de tels passagers sont bien plus courants que ce que l’on pourrait croire. J’ai aussi apprécié comment le scénariste se débrouille pour rendre à peu près crédible le fait que l’hôtesse croit l’histoire des Winchester, ce n’était pas gagné d’avance.

 L’opus reste malgré tout en premier lieu un épisode de mise en scène. Effectivement c'est une dominante en ce début de série, de manière assez logique. La majeure partie de l'équipe technique sont des anciens des X-Files, tandis que Kim Manners impose un ton à la réalisation, même quand il n'est pas aux fourneaux. On a donc d’emblée un bloc performant et expérimenté, tandis que les auteurs en sont encore à roder personnages et univers, la série a déjà un atout en main, l’autre viendra progressivement. Les scènes de krach ont un bel impact et Bob Singer exploite efficacement le huis clos de l’avion. La carcasse de l’avion est fort bien reconstituée On découvre un joli éventail d’effets spéciaux, des traditionnels (la chemise s’enflammant, gros boulot du département costumes) jusqu’aux images informatiques, minimalistes, mais vieillissant bien.

Évidemment le démon fait irrésistiblement songer à l’Huile Noire (à l’avenir ils revêtiront un look davantage gazeux), mais je ne pense pas qu’ici Supernatural s’inscrive ici totalement dans le sillon des X-Files. Chez Chris Carter, quand un avion s’écrase c’est lié à sa mythologie purement de Science-fiction, tandis qu’ici on se situe, comme toujours, dans le Fantastique. La nouvelle venue s’inscrit dans une famille des récits de l’imaginaire radicalement différente de celle du fil rouge des X-Files, c’est aussi une manière d’affirmer son identité.

Très bonne interprétation d’ensemble, Jensen confirme qu’il est un acteur plus varié et subtil qu’il ne semble de prime abord. Il se situe déjà en progrès vis-à-vis de Dark Angel, sans même parler de ses débuts comme bellâtre. Léger regret, Brian Markinson est sous exploité, alors qu’il est formidable dans The L Word, Continuum, Sanctuary, etc. Un parallèle involontaire assez étonnant avec la tragique actualité aérienne de 2015 (le Vol 9525 de la Germanwings), en son temps le pilote d’Au cœur du complot évoquait déjà les futurs événements du 11 Septembre.

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Anecdotes :

  • Cet épisode est également connu sous le titre français et mensonger Fantôme en plein ciel.

  • On aperçoit pour la première fois ce qui va devenir une image régulière des la série : les Démons (ennemis récurrents des Winchester) ayant la forme d’une fumée noire. Ils possèdent les humains en s’introduisant dans leur corps par la bouche, la victime ayant ensuite les yeux noirs par intermittence. En fait cela fonctionne de manière très similaire à l’Huile Noire des X-Files, la forme gazeuse se substituant à la liquide.

  • Quand Dean explique à l’hôtesse qu’il y a urgence, il lui déclare qu’il n’a pas le temps pour le « The Truth is Out There speech », une référence à la célèbre formule des X-Files. Pour justifier qu’il ne dort pas, Sam affirme qu’il regardait la publicité télévisée de George Foreman. Il s’agit d’un célèbre boxeur reconverti dans la commercialisation d’un grill destiné à la cuisine diététique, connaissant un grand succès. Des références sont aussi faites à deux grands classiques : Poltergeist et l’Exorciste.

  • L’épisode permet d’exposer la phobie des avions de Dean, qui explique partiellement le recours à la voiture pour sillonner les États-Unis.

  • Jerry Panowski est interprété par l’excellent Brian Markinson, qui fut par ailleurs le terrible Aaron de The L Word. Dans les X-Files, il incarna notamment Gary Lambert, le héros malheureux de Folie à Deux. Dans MillenniuM, il tint le rôle semi récurrent du Détective Teeple.

  • Max Jaffe déclare que le possédé était assis juste devant lui. Dans la scène d’introduction on voit que cela n’est pas du tout le cas.

  • Durant l’épisode on entend : “Paranoid”, de Black Sabbath ; quand les Winchester se font passer pour des Fédéraux, “Working Man”, de Rush, quand ils arrivent à Nazareth, “Load Rage” de Nichion Sounds Library, lors du traditionnel départ, accompagné des rugissements du moteur de l’Impala. À bord de l’avion, pour tenter de se calmer, Dean chantonne un tire de Metallica, il s’agit de « Some Kind of Monster ». Précédemment il a tenté de se faire passer au téléphone pour le docteur James Hetfield, qui est en fait le nom du chanteur et leader de Metallica.

  • L’épisode est le premier des 33 épisodes dirigés par Robert Singer. Il intervient également comme producteur exécutif tout au long de la série. Il donnera son nom à Bobby Singer.

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5. LA LÉGENDE DE BLOODY MARY
(BLOODY MARY)

Supernatural 1 5 1

Scénario : Ron Milbauer & Terri Hughes Burton, d'après une histoire d'Eric Kripke
Réalisation :
Peter Ellis

Do I look like Paris Hilton ?

Résumé :

Lors d'une soirée entre copines, une jeune fille obtient le gage de prononcer trois fois le nom de "Bloody Mary" devant un miroir. Dans la même nuit, son père meurt, les yeux arrachés. Quand Sam et Dean entendent parler de cette histoire, ils décident d'enquêter.

Légende urbaine...

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Cet épisode est un des plus effrayants de la série. Bloody mary bénéficie d'une prise d'assurance des scénaristes. La nature des deux frères continue à s'approfondir, avec une centralisation sur Sam après trois épisodes destinés à adoucir la rugosité de Dean. La réalisation de Peter Ellis assure les moments forts. Les scénaristes utilisent ici avec succès l’une des plus célèbres légendes urbaines : Bloody Mary. Bon choix car on retrouve des éléments d'horreur excellents : le gage qui tourne mal, la silhouette dans le miroir (il y a toujours un miroir, quelle que soit la variante de la légende)... et la découverte du corps toujours bien mutilé. On commence déjà à pressentir que les cauchemars de Sam sont plus que de simples cauchemars. 

Malgré une enquête lente et verbeuse, on suit avec intérêt Winchesters Investigation dans leurs œuvres, avec une ingénieuse remontée des fils de l'affaire ponctuée d'apparitions à geler le thermomètre. La scène finale est une des plus impressionnantes de la série, concentrant remarquablement le folklore autour des miroirs, refuges d'esprits maléfiques – et quel rebondissement final ! Jovanna Huguet est vraiment impressionnante. On sera moins enthousiaste pour Marnette Paterson et Chelan Simmons, pas mauvaises, mais flirtant trop avec le niais : deux personnes assez idiotes pour prononcer les mots maudits, c'est au moins une de trop (la petite fille de l'intro avait l'excuse de l'enfance). C’est également une étrange coïncidence que dans le même groupe d’amies, chacune ait une mort différente sur la conscience.

Jared Padalecki suit très bien une première évolution de son personnage, arpentant un chemin de réconciliation intérieure. Le soutien que lui manifeste Dean sous leurs petites piques fait chaud au cœur. Le leitmotiv de la mort de Jessica n'est pas utilisé à l'excès et reste efficace. Malgré les histoires et la Mythologie (en veilleuse) de la série, le chemin introspectif des deux frères et leur relation s'impose comme le fil rouge principal. C'est très habile qu'une série jouant autant sur le visuel ait comme fondation la plus solide quelque chose de purement psychologique ; c'est une alternative crédible au complot labyrinthique des X-Files.

Supernatural 1 5 2

La critique d'Estuaire44 : 

On se souvient surtout des apparitions terrifiantes de Bloody Mary mais le reste du récit présente une saveur de pop-corn movie assez plaisante, on pense pas mal à Souviens toi... L'été dernier. En s'entêtant à répéter les fatidiques paroles les victimes agissent comme 95% des victimes de films d'épouvante, c'est à dire en se jetant direct dans la gueule du loup. Le cliché est poussé à l'extrême, c'est très drôle. Les Bros épluchant la presse à la recherche de l'inexplicable, comme les les Bandits Solitaires le font à la recherche du complot.

Mary manque toutefois d’originalité, car composant une copie conforme de la Ring Girl, par son look et par sa sortie du miroir évoquant celle de la télé. Eric Kripke a d'ailleurs lui-même loyalement reconnu l'erreur commise. Belle performance malgré tout de l'actrice et de l'équipe maquillage/vêtements. J'ai beaucoup aimé le florilège d'effets spéciaux (sœurs jumelles et double décor symétrique, couloir apparemment droit mais subtilement incurvé pour que la caméra ne se voie pas dans le miroir, verre en sucre candi...). Le combat final reste un joli morceau de bravoure.

Supernatural 1 5 3

Anecdotes :

  • Épisode égalemment connu sous le titre français Bloody Mary.

  • Marnette Patterson (1980) pratique égalemment le chant, le kickboxing et la randonnée. Sa carrière d’actrice se limite à quelques apparitions dans des films comme Sliver, Sexcrimes et à des séries comme Charmed (saison 8 –Christie Jenkins), Nip/Tuck, Dr. House ou encore The Mentalist.

  • Jill à sur la conscience la mort d’un petit garçon nommé Gary Bryman. Dans la réalité, Gary Bryman a produit 4 films qui ont été écrit et/ou réalisés par le créateur de Supernatural, Eric Kripke.

  • L’épisode est censé se dérouler à Toledo, dans l’Ohio. Il s’agit de la ville natale d’Eric Kripke et de Adrianne Palicki.

  • L’apparition finale de Bloody Mary constitue toue une vraie copie conforme de The Ring ! Eric Kripke reconnaîtra une trop grande similitude de traitement.

  • Alors qu’il est filmé par Sam, Dean demande s’il ressemble à Paris Hilton. Il s’agit d’un clin d’œil car celle-ci vient alors tout juste de tourner avec Jared Padalecki, dans La maison de cire (2005). Paris Hilton fera ultérieurement une mémorable apparition dans la série (Idoles assassines, 5-05).

  • Durant l’épisode l’on entend : “Sugar, We’re Going Down”, de Fall Out Boy, quand Jill est devant son miroir, “Rock Of Ages” de Def Leppard, dans l’Impala, quand Sean vient de téléphoner, “Laugh, I Nearly Died”, des Rolling Stones, lors de l’apparition de Jessica.

  • Première mention des pouvoirs psychiques de Sam, qui vont devenir un arc majeur de la série.

  • La plupart des miroirs brisés durant l’épisode sont en fait en sucre spécialement traité, afin d’éviter tout risque de coupure avec les morceaux. Ceux sur lesquels rampe Bloody Mary sont en caoutchouc. Filmer Bloody Mary dans les miroirs sans qu’apparaisse la caméra fut un défi pour le metteur en scène, Peter Ellis, ainsi que pour les concepteurs des décors. Il fut même tenté d’utiliser deux jumeaux se faisant face, mais l’idée se révéla insatisfaisante après essai.

  • L’excellent film Mirrors (2008) reprend plusieurs thèmes de l’épisode, comme les miroirs hantés, le reflet prenant vie, ou la surimpression d’une main.

  • Comme précisé dans l’épisode, la légende urbaine de Bloody Mary connaît différentes versions, quoique trouvant leurs origines dans un folklore lié aux persécutions religieuses occasionnées par Mary la Sanglante, la reine Mary Tudor. L’esprit (également appelé Mary Worth, Mary Worthington, ou Hell Mary) est bien censé apparaître dans un miroir quand son nom a été prononcé trois fois (parfois treize fois). Mais il peut s’agir d’une suicidée, d’une femme morte en couches ou dans un accident etc. Ce mythe est très vivace aux Etats Unis, on l’on se prend souvent au jeu durant la nuit d’Halloween. Le mythe de Bloody Mary est référencé dans de nombreux films et séries, dont Beetlejuice ou Candy Man.

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6. FAUX FRÈRE
(SKIN)

Supernatural 1 6 1

 

Scénario : John Shiban
Réalisation : Robert Duncan McNeill

- I think we're getting closer to its lair.
- How can you tell ?
- Because there's another puke-inducing pile next to your face.

Résumé :

Une ancienne amie de Sam lui demande de l'aide. Son frère est accusé d'un meurtre horrible qu'il n'a pas commis. Il se trouvait à un autre endroit quand ce crime a eu lieu ! Les deux frères découvrent que le responsable est un polymorphe (Shapeshifter ou Skinwalker en VO), une créature capable de prendre l'apparence d'autres personnes pour commettre des crimes. Les choses se compliquent quand le monstre prend l'apparence de Dean pour continuer sa série de meurtres...

Dean... & Dean

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Cet épisode commençait pourtant par une des meilleures scènes d’introduction de la série : pas d’ambiance film d’horreur, pas d’assassinat sanglant ou d’effet gore (juste un peu de sang), non ! Juste de l’inattendu, car cette scène d’introduction est un flashforward (procédé souvent utilisé dans les séries télévisées et qui informe le spectateur d’éléments futurs). Tout le début est construit sur un moule semblable aux épisodes précédents, si ce n’est quelques petites différences, dont l’utilisation d’une ancienne amie (ou petite amie) d’un des deux frères : ici c’est Sam, mais Dean y aura aussi droit dans Route 666 cette même saison. Malheureusement, tout se gâte ensuite...

Il est difficile de garder de l'intérêt passée la dixième minute tant le moule de l'épisode est d'un académisme intégral : chasse infructueuse, possession du héros 1, héros 2 KO, évasion du héros 2, liaison avec le flashforward initial, dernière attaque du monstre, explication de gravures finale... tout cela était visible dès le début du récit. L'option humoristique prise par Vince Gilligan dans Small potatoes était bien plus porteuse et iconoclaste (mais Supernatural n'en est qu'à ses débuts et ne peut stratégiquement proposer déjà un épisode parodique, il faudra attendre un peu), d'autant que le monster of the day n'est à aucun moment vu comme un miroir inversé de Dean, qui aurait révélé sa face plus sombre, et n'est là qu'en tant qu'opposition. Le happy end est un peu trop éclatant pour un épisode aussi ténébreux qui nous a donné un aperçu des ténèbres de Dean, ce que Kripke va comprendre assez rapidement, car il va à l'avenir plus oser des fins malaisées, voire carrément noires. L'indigence du budget pénalise aussi les efforts de Robert Duncan, jusqu'à nuire au féroce combat "fratricide" final.

Quelques bons points toutefois : Jared Padalecki et Jensen Ackles réalisent ici un numéro assez impressionnant. Quand à Amy Grabow (Rebecca Warren), son jeu est très correct. Mais attention, ces remarques élogieuses de ma part ne sont valables qu’en VO. En effet, si le doublage français est souvent de qualité, ce n’est pas le cas ici. Donc, si on veut apprécier la qualité de Faux frère, il est capital de le regarder en version originale. A noter aussi de très bons effets spéciaux, comme la transformation très gore de ce dernier (Leonard Betts est renvoyé loin derrière !). On sent que la série est très à l'aise dans l'horreur goûtue, et on attend de voir comment elle va s'en servir à l'avenir.

Supernatural 1 6 2

La critique d'Estuaire44 : 

Le scénario s’en tient à la figure bien balisée du Métamorphe, Shiban n'a pas visiblement  voulu se lancer dans un combat qu'il ne pouvait pas gagner. Oui, les Métamorphes, Lycantropes ou Changeurs de formes ont accumulé tous les clichés possibles tout au long de leurs innombrables participations dans les séries fantastiques ou de Science-fiction. Il était impossible de faire du neuf, d’autant que le sujet n’a pas la richesse narrative du Vampire par exemple. Je pense que l’auteur n’a dès lors pas cherché à jouer sur le séquençage des événements, en effet tout à fait classique, mais s’est concentré plutôt sur l’atmosphère. En accentuant sur la noirceur, les endroits sinistres et claustrophobiques ou encore en dotant le Monstre de la semaine d’une vraie personnalité de serial killer, autant un client pour Frank Black ou Dexter que pour les Bros. Cela s’appelle une stratégie d'évitement mais je la trouve plutôt bien menée (même si Shiban aurait pu faire plus fort sur l’aspect parano, surtout en provenance des X-Files), et relayée efficacement par la mise en scène, notamment dans la scène pré générique bien horrifique  ou lors de la transformation. La bande son s’avère derechef très réussie

Encore une fois Supernatural fait de faiblesse vertu, en optant pour les trucages traditionnels  plutôt que les images générées par ordinateur. C’est superbement fait et supporte la comparaison avec l’équivalent mémorable du film Le Loup-garou de Londres. Après on peut se demander si un épisode Shapeshifter s’imposait réellement, mais  c’est une figure très présente dans le folklore nord-américain, déjà présente chez les Amérindiens, avec les guerriers esprits changeurs de peau. Cela fait donc partie du cahier des charges de la série, et ce n’est d’ailleurs pas le dernier opus du genre... Par contre,  l’actrice jouant l’amie de Sam apparaît assez empruntée et manquant de naturel, mais il est difficile d’être à niveau avec les diverses excellentes guests de la saison. Belle performance des interprètes principaux dans le combat les opposant, Cela n’y va pas avec le dos de la cuillère, on devine un important travail de préparation.

Supernatural 1 6 3

Anecdotes :

  • Cet épisode est égalemment connu sous le titre français Ubiquité.

  • Amy Grabow (1979) n’a pas une grande filmographie à son actif. Elle a joué dans le téléfilm Though none go with me (2006) avec Cheryl Ladd, où encore dans Charmed.

  • L’épisode est écrit par John Shiban, grand spécialiste des séries fantastiques (Enterprise, Smallville, Vampire Diaries, Torchwood…). Il est bien connu des amateurs des X-Files pour en avoir été l'une des quatre principales têtes pensantes ; il a écrit 24 scénarios pour cette série, mais aussi 6 de son spin-off Au Cœur du Complot. Il écrira aussi 4 scénarios pour Breaking Bad, série créée par son collègue d'écriture des X-Files : Vince Gilligan. Il va écrire 9 scénarios pour Supernatural dans les deux premières saisons. Il intervint également comme producteur jusqu'à la fin de la saison 3.
  • Dans le combat final entre le polymorphe et Sam, ce dernier à les pieds liés, puis les pieds libres selon les plans.

  • Plusieurs références seront faîtes à cet épisode, notamment ceux impliquant les forces de l’ordre : La main de la justice (2-07) et Le Polymorphe (2-12), tandis que les deux frères affronteront l’alpha-polymorphe dans l’épisode Two and a half men (6-02).

  • Quand Sam évoque les pouvoirs télépathiques du Métamorphe, Dean compare ceux-ci à ceux du «Vulcan Mind Meld». Il s’agit de la fusion des esprits, pratiquée par les Vulcains dans l’univers de Star Trek. Les deux individus la pratiquant partagent leurs connaissances à travers un contact physique, mais peuvent aussi fusionner pour ne plus former qu’une seule conscience. En début d’épisode on voit un panneau indiquant « Drive Safe, America !». Il s’agit d’une publicité pour Drive Safe, une importante chaine d’auto écoles. Rebecca s’exclame « What do you think this is ? Hooters? ». Hooters est un chaine de restaurants, notamment réputée pour ses séduisantes serveuses, les Hooters Girls.

  • L’adresse mail de Sam est Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser..

  • Durant l’épisode on entend : “In-A-Gadda-Da-Vida” d’Iron Butterfly, durant la scène d’ouverture, “Poison Whiskey” de Lynyrd Skynyrd, à la station service, “Hey Man, Nice Shot” de Filter, durant la transformation du Métamorphe, “All Right Now” de Free, dans l’Impala, durant la conclusion.

  • Les Métamorphes, êtres surnaturels capables de se métamorphoser, sont présents dans de très nombreux mythes, sous des appellations différentes : loups garous, changelins, vampires katsunes… Le terme de Skin-Walker, employé par les Winchester, fait référence au folklore amérindien, où ces créatures pouvaient prendre la forme d’un animal en revêtant la fourrure de celui-ci. On trouve également des animaux maléfiques pouvant prendre l’apparence d’êtres humains (renards, dragons…). Les Métamorphes sont fréquents en littérature de Science fiction (Danseurs Visages de Dune) mais aussi dans les séries télé : Cosmos 1999 (Maya), Manimal, Charmed, Fringe… L’un des Métamorphes les plus sympathiques demeure Eddie Van Blundht, des X-Files (La queue du diable, 4-20).

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7. L'HOMME AU CROCHET
(HOOK MAN)

Supernatural 1 7 1

Scénario : John Shiban
Réalisation :
David Jackson

- Told him you were a dumb-ass pledge and that we were hazing you.
- And he believed you ?
- Well, you *look* like a dumb-ass pledge.

Résumé :

Lorsqu’un adolescent est retrouvé éventré et pendu par les pieds, les frères Winchester partent enquêter. Ils pensent à la célèbre légende urbaine de « l’homme au crochet ». Après un second meurtre, Sam et Dean découvrent un point commun entre les victimes : une jeune fille nommée Lori.

...Ou le jumeau démoniaque du capitaine Crochet...

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Voici un épisode très divertissant, nouvelle preuve que les scénaristes de Supernatural savent y faire avec les légendes urbaines... un scénario à suspense, un bon whodunit, un affrontement climatique, un monstre saignant à point, un bon débit de vannes entre les bros, une mise en scène très affûtée...

Après l'introduction évoquant le Phases de Buffy (le crocheteur remplaçant le loup-garou), on se laisse prendre à une enquête adroite grâce au distinguo de Shiban : on sait vite qui est le monstre, mais justement, on ne sait pas qui il est réellement ni comment il agit. Une double interrogation qui tient l'épisode dans une atmosphère menaçante ponctuée par ces toujours savoureux dépeçages, un atout que la série balbutiante a assuré d'entrée. L'enquête sait dérouler ses twists a tempo pour relancer l'histoire avec des perspectives horrifiantes de plus en plus fortes, jusqu'à l'affrontement final. On salue l'ingénieux rebondissement ironique de la croix, talisman contre les forces du mal devenant ici le pouvoir même du démon ; un détournement sacrilège très audacieux.

L'épisode développe parallèlement une attaque fulminante contre l'influence funeste du puritanisme religieux sur les jeunes esprits, d'une manière plus aboutie que le Where the wild things are de Buffy. En effet, c'est le déchirement entre les désirs de Lori et son éducation rigoriste qui sont la boîte de Pandore de l'épisode. Cet affrontement entre les instincts naturels et une religion dévoyée, en plus d'être une excellente analyse des désirs humains contrariés, surtout chez les adolescents se coule bien dans cette série trash métal. Pour en revenir au scénario, il est pratiquement parfait en fait : le suspense sur celui qui contrôle l’homme au crochet, la scène finale, prenante, et la réalisation impeccable.

Les interventions de Captain Bloody Crochet, bien qu'analogues à l'arracheuse de mirettes, sont bien frissonnantes. Ceux qui sont en manque de meurtres sanglants vont être ravis. Dan Butler est lui aussi impressionnant. La mise en scène de David Jackson et cette photographie bien dark siéent si bien aux joyeusetés en tous genres de la série. L'auteur fait évoluer Sam en développant son côté compassionnel. Quant à Dean, il fait bien rigoler avec ses vannes continuelles ou lorsqu'il ronchonne à la party ou au cimetière. Un seul regret : ce n'est pas gentil d'évoquer une naked pillow fight sans la montrer à l'écran...

Supernatural 1 7 2

La critique d'Estuaire44 : 

On apprécie le recours à une légende urbaine très populaire aux USA, cela renouvelait les thématiques de la série et variait les plaisirs. Le vrai twist  a résidé dans le développement de l’idée originelle, on s’attend  à un Popcorn movie rigolard, pas du tout. L’un des soubassements de Supernatural est l’exaltation de la Liberté, que cela soit par l’affirmation du libre arbitre, même face à la volonté divine, par un appel de la Route assez semblable à celui des Beatniks ou par les rapports entre John et ses deux fils. Supernatural reste bien entendu l’une des séries où souffle le plus l’Esprit du Rock’n’Roll. Ici on traite avec finalement beaucoup de sensibilité mais aussi de courroux, des conséquences perverses du puritanisme, inséparable de l’histoire de l’Amérique, y compris concernant la liberté sexuelle. On s’aperçoit que le choix du Hook Man est tout sauf gratuit car, en fait, dans la légende urbaine originelle, son action n’a pas tant de tuer, que d’empêcher les jeunes gens de commettre le péché de chair.

La résonance avec le parcours des personnages  du jour est astucieusement trouvée. Le symbole de la véritable nature de la croix parle de lui-même. Un engagement assez audacieux pour une série n’en étant encore qu’à ses débuts et dont l’un ds autres thèmes est la puissance, parfois coercitive, du lien familial. Évidemment le plaidoyer n’empêche pas l’opus de représenter un spectacle horrifique aux petits oignis, avec un antagoniste bien flippant de sa race et un joli suspense. Très bonne interprétation. L’opinion de Kripke m’étonne, peut-être est-ce du à un tournage compliqué, marqué par un remplacement du metteur en scène car le premier ne parvenait pas à faire assez peur. De mémoire le résultat final est tout à fait à la hauteur. Je crois que c’est l’une des premières fois que des fusils sont chargés au sel, l’une des substances anti esprits les plus populaires du show. Oui, Jensen sera particulièrement à l’aise dans les épisodes humoristiques et décalés, ils ne vont pas manquer et deviendront plus fréquents au fil de la série.

Supernatural 1 7 3

Anecdotes :

  • Dan Butler (1954) est surtout connu pour son rôle de Bob "Bulldog’’ Briscoe dans la série Frasier. Il est apparu entre autres dans The X-Files (le chef des démonistes dans La main de l’enfer, 2-14), Columbo, Code Quantum, Dr. House, etc...

  • Le sujet de l’épisode se rapproche beaucoup de celui d’Urban Legend (1998), film d’épouvante se déroulant pareillement sur un campus et tournant autours des légendes urbaines. Les deux premiers meurtres ressemblent nettement à ceux du film.

  • Le Hook Man passe à l’attaque dans une église, domaine normalement interdit aux esprits maléfiques comme le montrera l’épisode Route 666 (1-13). Quand Lori s’endort dans sa chambre au campus, il n’y a aucune lampe sur sa table de chevet. Au réveil, une lampe grise est apparue. Quand Sean peint l’étudiant, le pinceau change brusquement de main.

  • Hook Man était censé composer le deuxième épisode diffusé de la saison, mais le tournage pris du retard. Le metteur en scène, David Jackson, éprouvait des difficultés à rendre suffisamment effrayantes les scènes du Hook Man. Wendigo fut donc diffusé à sa place, tandis que Kim Manners fut appelé à la rescousse afin de boucler l’épisode. Kripke considère de fait cet épisode comme l’un des moins performants de la saison.

  • Dean se compare à Matlock, héros de la série télé du même nom, un avocat remportant toujours la partie (1986-1995).

  • En voyant des jeunes filles de la sororité, Dean demande à Sam s’ils pourront assister à un combat d’oreiller déshabillé (« naked pillow fight »). Il s'agit d’un clin d’œil au film de John Landis « Animal House » (1978) où le héros regarde par la fenêtre des étudiantes s’amuser ainsi. Énorme succès en son temps, Animal House reste l’un des films les plus rentables de l’histoire du cinéma. Il est devenu une référence de la culture populaire, notamment pour sa musique et sa Toge Party, devenu un modèle encore régulièrement pratiqué pour les soirées étudiantes. Dean fait aussi référence à S.O.S fantômes (Ghost Busters, 1984) lorsqu’il appelle Sam "Dr. Venkman’’, un des héros interprété par Bill Murray.

  • Durant l’épisode on entend : “Merry Go Round” de Split Habit, dans la chambre des filles, en début d’épisode, “Bang Your Head” de Quiet Riot, dans l’Impala, lors de l’arrivée des Winchester, “Noise” de Low Five, durant la séance de peinture, “At Rest” d’APM, à l’église, durant les funérailles, “U Do 2 Me” de Paul Richards, durant la fête étudiante, “Peace Of Mind” de Boston, lors du traditionnel rugissant départ en Impala.

  • Le Hook Man s’en prenant à la voiture isolée où se trouvent deux amoureux demeure une légende urbaine particulièrement populaire, remontant aux années 50. Selon les versions le couple peut parvenir à s’échapper et trouve alors le crochet planté dans la porte de la voiture. La connotation moraliste de du mythe apparaît très claire. On y trouve référence dans Urban Legend, mais aussi dans Souviens-toi... l'été dernier (1997). Un épisode de MillenniuM, Les aliénés du diable (2-14) cite également plusieurs légendes urbaines, la première d’entre elles étant celle du Hook Man.

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8. LA VALLÉE MAUDITE
(BUGS)

Supernatural 1 8 1

Scénario : Rachel Nave & Bill Coakley
Réalisation :
Kim Manners

- We accept home owners of all race, religion, or… sexual orientation.
- Right. Um, I'm going to go talk to Larry. Okay, Honey ?

Résumé :

Après être tombé dans un trou, un ouvrier est retrouvé le cerveau dévoré de l’intérieur. Entendent parler de cette mort plutôt hors du commun, les frères Winchester partent enquêter...

Bzzzzz....Bzzzzz....

La critique de Clément Diaz et Cetp65 :  

Épisode mineur mais efficace. Comparée aux gros méchants des légendes, une invasion d'insectes non commandée par un génie du mal semble sans saveur. Alors que Supernatural trouve sa voie dans ses gros démons bien saignants, le sujet se rapproche plus d'X-Files qui avait déjà traité ces invasions avec plus de réussite, notamment avec war of the coprophages. Les auteurs font montre de compassion envers la tragique histoire des native americans.

On note des effets gores avec l’introduction ou encore la deuxième mort, avec les araignées qui sortent par centaines de la douche ....Brrr !!! Pas mal d’autres scènes intéressantes avec le vieil indien par exemple (Jimmy Herman, habitué à ce genre de rôles) ou amusantes lorsque tout le monde prend Sam et Dean... pour un couple – première vanne sur le « Wincest » début d'un séculaire running gag de la série. Les acteurs secondaires sont tous très bons. Mais malgré cette intrigue originale, on ne peut que regretter l’absence de réel adversaire ; les insectes, bien que redoutables, n’en constituant pas un. Et l’explication à tout ça (une malédiction indienne) ne compense pas l'absence de Diabolical Mastermind, c’est un peu facile... L'enquête des Winchester est assez palote, se promenant d'un endroit à l'autre jusqu'à tomber sur la solution plus ou moins par miracle. 

L'intérêt vient du conflit plus ouvert entre les deux frères : entre Sam l'enfant prodigue et Dean le fils modèle, ainsi que leur rapport au père, subsiste une fêlure que le temps ne comblera totalement, une belle gravité qui humanise des personnages qui doivent encore dépasser l'état d'esquisse. Heureusement, en dépit de ce script assez mou, il y a l'immense Kim Manners. Dans les bonus d'X-Files, Manners avait dit qu'on faisait désormais appel à lui dans les épisodes à insectes depuis qu'il avait réussi à se faire obéir d'une colonie de cafards dans cette série. Effectivement, il était le choix tout désigné ! Il déploie tout un climat de terreur. Son savoir-faire explose lors de la cataclysmique attaque de minuit, une longue et cauchemardesque scène de six minutes qui compte parmi les plus terrifiantes que l'on peut voir à la télévision. Bien que Manners fut le meilleur réalisateur d'X-Files (avec Bowman et Carter, sur un mode différent), Supernatural reste bien la série dans lequel il peut faire montre de tout son talent. Par contre, il est censé être minuit lorsque de l'attaque finale et six minutes plus tard, il fait jour ?!! Euh, les auteurs auraient pu avertir que le Docteur avait donné un petit coup de pouce à nos héros ! Ils ne savaient sans doute pas comment boucler l'histoire en fait.

Supernatural 1 8 2

La critique d'Estuaire44 : 

Le scénario joue sur les différentes légendes urbaines liées aux insectes, très populaires aux USA (les Creepy Crawlers). Pour le reste il ne m'a pas marqué plus que cela, quoique le cimetière indien c'est tellement cliché que cela en devient rigolo. La scène finale m'a aussi impressionné, mais elle n'a pas plu à Kripke, tandis que Manners lui-même regrettait de ne pas avoir eu le temps matériel de vraiment la fignoler. Il regretta notamment d'avoir recouru aux images informatiques pour assister les centaines d'abeilles effectivement présentes.

De fait ce genre d'ennemi parait moins fort que les humanoïdes doués de raison, avec lesquels davantage d’interactions peuvent se créer. C'est aussi pour cela que la série privilégia par la suite cette option, vis-à-vis du type d'épouvante mis en scène par l'épisode. Ce changement se fera pour le plus grand plaisir d’Ackles et Padalecki, pour qui le tournage  de La vallée maudite s‘avéra particulièrement éprouvant.

Supernatural 1 8 3

Anecdotes :

  • Cet épisode est égalemment connu sous le titre français Les insectes, soit la traduction exacte du titre original.

  • Unique scénario de la carrière de Rachel Nave et Bill Coakley.

  • La scène où les insectes descendent par la cheminée est une référence au film Les oiseaux de Hitchcock.

  • Sam et Dean comparent la situation au film Willard (1971). Ce classique de l’épouvante décrit comment un jeune psychopathe impose sa volonté à une abominable horde de rats et s’en sert pour tuer les gens l’ayant humilié. Un remake a été réalisé en 2003. À la grande surprise de Dean, Sam révèle qu’il lui arrive de regarder The Oprah Winfrey Show (1986-2011), alors que cette émission particulièrement populaire et influente aux États-Unis s’adresse avant tout aux femmes.

  • Larry Pike est joué par Andrew Airlie, comédien aperçu dans de très nombreuses séries, notamment fantastiques : X-Files, MillenniuM, Poltergeist, Au-delà du réel, Les chemins de l’étrange, Tru Calling, Les 4400, Stargate SG-1, Eureka, Reaper etc.

  • Dans le rôle de Travis, l’employé du gaz barbu, on reconnaît Ryan Robbins, le futur Henry de Sanctuary.

  • En guest lors de sa brève apparition en tant que professeur, on retrouve également Jim Byrnes, acteur et chanteur pareillement présent dans Sanctuary (le père de Magnus) mais aussi Highlander et de nombreuses autres séries fantastiques.

  • Près de 60 000 abeilles furent utilisées lors de la scène du grenier. Tous les comédiens portaient des vêtements spéciaux mais furent néanmoins piqués.

  • Quand Dean découvre les araignées dans la maison de Linda, il est évident qu’elles sont en caoutchouc.

  • Durant l’épisode, l’on entend, accompagnant les divers passages dans l’Impala : “Rock of Ages” de Def Leppard, “No One Like You” de The Scorpions, “I Got More Bills Than I Got Pay” de Black Toast Music, “Poke In Tha Butt” de Extreme Music, “Medusa” de MasterSource.

  • Du fait du manque de temps et de moyens, les scènes d’insectes ne correspondirent pas à la vision qu’en avait Eric Kripke, pour qui La vallée maudite demeure l’un des épisodes les moins percutants de la série. Kim Manners, le réalisateur, était lui sceptique dès le départ, expliquant que les insectes sont davantage sinistres que réellement effrayants. À la suite de cet épisode, les adversaires à forme humaine furent privilégiés tout au long de la série.

  • Le thème de l’épisode fut retenu en raison de la popularité des d’insectes parmi les légendes urbaines, notamment ceux dévorant les corps de l’intérieur. Le film Creepy Crawlers (2000) se consacre également au sujet, de même que l’épisode des X-Files Nicotine (7-18), déjà réalisé par Kim Manners.

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9. LA MAISON DES CAUCHEMARS
(HOME)

Supernatural 1 9 1

Épisode Mythologique

Scénario : Eric Kripke
Réalisation :
Ken Girotti

- All right then. Don't you worry about a thing. Your wife is crazy about you. [client thanks her, she closes the door after him] Whew. Poor bastard. His woman is cold-bangin' the gardener.
- Why didn't you tell him ?
- People don't come here for the truth. They come for good news.

Résumé :

Après avoir fait un rêve étrange, Sam persuade Dean de retourner dans la maison de leur enfance, là où leur mère est morte 22 ans plus tôt. Ils découvrent que la demeure pourrait être hantée et que les nouveaux habitants (une mère et sa fille) sont peut-être en danger. Les deux frères font alors appel à Missouri Moseley, une voyante.

Home Sweet Home...

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Devant développer son univers et son identité visuelle, Supernatural se concentre en début de partie sur des loners, entraînant une certaine impatience quant à sa Mythologie mise sous cloche. Les X-Files avaient rapidement pris le mors aux dents en alternant d'entrée ces deux types d'épisode. Heureusement, Home délivre une avancée de cette Mythologie via un épisode de fort bonne tenue, indispensable à la bonne compréhension de l’intrigue ; en particulier pour la révélation finale.

Commençons d’abord par les points positifs de l’épisode : le premier qui vient en tête est bien entendu l’impressionnant casting. Kristin Richardson rend attachant son personnage de mère courage. Loretta Devine lui vole toutefois la vedette en excentrique voyante en mode Whoopi Goldberg. Sa fameuse réplique Boy, you put your foot on my coffee table, I'm gonna whack you with a spoon ! est devenue culte chez les fans. A noter que la VF traduit par Oh ne posez surtout les pieds sur ma table à café où je vous change en crapaud ! Mouais...

Eric Kripke lance deux roulements de tambour : le "pouvoir" de Sam et le retour dans la maison infernale. L'auteur use avec habileté des objets du quotidien devenant soudain des objets de mort ; on se croirait devant un remake démoniaque de Allez-vous en Fintchley ! de la Twilight Zone. Le tout se déroule avec une belle variété d'effets, du gore de chez gore à la terreur psychologique en passant par le suspense diabolique. Le tout est orné de belles trouvailles comme ce singe à cymbales, peut-être l'image la plus flippante de l'épisode. Parmi les scènes les plus effrayantes et horribles (donc les meilleures) : l’introduction, le petit dans le réfrigérateur, le plombier qui se fait découper la main dans le broyeur à ordures (OUCH ! cliché certes, mais toujours efficace).

De bonnes scènes d’action également quand le poltergeist attaque Sam et Dean. Mais l’épisode doit surtout être vu pour sa révélation finale. On peut à ce moment penser que Kripke a déjà bien en tête le fil rouge général, ce qui est toujours indispensable dans ce genre de séries. Dans Bloody Mary, on avait appris d’étranges choses au sujet de Sam, mais le tout restait assez flou. Le sujet est ici plus approfondi.

Passons maintenant aux quelques points négatifs, concentrés surtout dans le dernier acte, qui relâche trop la tension. L'attaque finale se colle assez mal à l'intrigue, tandis que l'apparition finale du spectre de feu est trop courte pour apporter quoi que ce soit. Cette apparition deus ex machina minore pas mal le travail des bros. De plus, l’explication finale est un brin tirée par les cheveux. Mais un bilan plutôt positif au final.

Supernatural 1 9 2

La critique d'Estuaire44 : 

Il était grand temps que survienne un épisode mythologique. Le fil rouge sera plus présent en seconde partie de saison, le Big Bad se manifestera d’ailleurs directement dans l’arc final de celle-ci.

L’épisode ne se contente pas d’introduire des éléments qui serviront par la suite (dont le pouvoir parapsychique de Sam) mais apparaît en lui-même comme réussi, avec une relecture divertissante du film Poltergeist. Rien ne manque, maison inquiétante, esprit hostile, enfants, medium pittoresque mais sagace. L’apparition de John apporte un joli, twist final. L’épouvante sait varier les plaisirs : gore avec le broyeur (scène horrifique préférée de Kripke cette saison), à suspense avec le frigo, dans le suggéré avec les « rats », à effets spéciaux avec l’étonnant spectre igné.

Un spectacle de qualité, même si légèrement frustrant du fait qu’en définitive les Bros ne règlent pas l’affaire eux-mêmes. Les trois actrices invitées sont chacune très attachantes à leur manière, le récit revêt grâce à elles une vraie émotion et ne se contente pas d’aligner les faits d’armes. Quelques allusions oujous appréciées à Stephen King, avec la référence au Shining ou le diabolique singe à cymbales, directement issu de sa nouvelle Le Singe.

Supernatural 1 9 3

Anecdotes : 

  • Loretta Devine (1949) est surtout connu pour des rôles de Adele Weber dans Grey’s Anatomy et de Marla Hendrick dans Boston Public. Elle est égalemment apparue dans Ally McBeal, Méthode Zoé ou encore Glee.

  • Cet épisode est égalemment connu sous le titre français Le retour. Il s’appelait à l’origine The Journey Home.

  • Le numéro de téléphone de John Winchester est différent de celui donné dans Le fantôme voyageur (1-04). Quand l’enfant entre dans le frigo, les sécurités de ce dernier se ferment. Mais à la fin de la scène, juste avant le fondu au noir, on voit qu’elles sont ouvertes. Quand Sam et Dean se précipitent pour sauver Jenny et ses enfants, la porte d’entrée s’ouvre sans difficulté. Jenny ne l’aurait donc pas verrouillée. Possible, mais peu probable.

  • Le singe mécanique à cymbale est une référence à la nouvelle de Stephen King Le Singe, parue dans le recueil Brumes (1985) et ayant connu un grand succès. Le claquement des cymbales de cet objet maléfique provoquaient toujours la mort de quelqu’un. Ce jouet bien réel, d’origine japonaise, a connu une forte popularité aux USA, dans les années 50 et 60. Suite au texte du Roi de l’Epouvante, le singe est référencé dans de nombreuses productions fantastiques ou horrifiques, mais aussi dans des clips musicaux, des jeux vidéo etc. récemment il apparaît dans un épisode de Doctor Who , Drôle de mort (2005).

  • « I mean first you tell me that you've got the Shining. » déclare Dean, il s’agit d’une nouvelle référence à King (roman de 1977), ainsi qu’au célèbre film de Kubrick (1980). « Missouri did her whole Zelda Rubinstein thing » déclare Dean. Il s’agit d’un clin d’œil au film Poltergeist (1982), où cette actrice interprétait la voyante Tangina Barrons.

  • Première apparition de John Winchester, en dehors du flash back initial. Jeffrey Dean Morgan, son interprète, réalise une fort belle carrière, notamment grâce à son étonnant charisme naturel (Weeds, Grey’s Anatomy, Tru Calling, Star Trek : Enterprise, Urgences, Angel, The walking dead, etc.). Il attient la grande popularité grâce à sa remarquable prestation dans Watchmen (2009), où il interprète avec une remarquable présence le Comédien. Bien qu’il interprète le père des frères Winchester, il n’a que douze ans de plus que Jensen Ackles - avec qui il partage une ressemblance saisissante au même âge.

  • Fait rarissime tout au long de la série, l’épisode ne contient aucune chanson répertoriée.

  • Quand Sam dit à Sarry de sortir son petit frère de la maison, il utilise la même phrase que son père dans le pilote, quand celui-ci s’adressait à Dean : « Take your brother outside, as fast as you can. Don’t look back ».

  • C’est l’une des très rares fois où, pour s’introduire quelque par, les frères Winchester se présent comme étant... eux-mêmes !

  • La scène de la plomberie est la préférée de Kripke sur l’ensemble de la saison.

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10. TERREUR À L'ASILE
(ASYLUM)

Supernatural 1 10 1

Scénario : Richard Hatem
Réalisation :
Guy Bee

The only thing that makes me more nervous than a pissed off spirit is the pissed off spirit of a psycho killer.

Résumé :

Après avoir fait une ronde dans un asile psychiatrique abandonné, un policier abat sa femme sans aucune raison particulière, puis se donne la mort. Les frères Winchester, guidés par un texto de leur père, partent enquêtent dans l’ancien hôpital...

Huis-clos terrifiant..

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Très aimé des fans par son sujet horrifique et bien claustrophobe, on peut trouver pourtant bien des raisons de ne pas être emballé par Asylum. Pourtant, le scénario part d'une bonne idée car s'il y a bien des endroits où la folie sanglante règne, c'est bien les asiles abandonnés, siège des esprits les plus tordus. Comme un grand nombre d’épisodes de cette saison, l’ambiance est très sombre.

Les W2 n'enquêtent véritablement qu'à l'issue d'un interminable premier acte. Si le twist de la nature des premiers esprits est bien trouvé, cela réduit malheureusement l'opposition à une seule véritable figure, qui se contente d'errer dans les dernières minutes. Les grands méfaits du monster-of-the-week sont seulement évoqués et son esprit apparaît plus pathétique qu'effrayant ; il se rattrape avec son maquillage assez dantesque et son affrontement final. Il faut avouer de plus qu'on ne goûte pas beaucoup de surprises dans cette histoire linéaire, des fausses alertes jusqu'au duo d'amoureux suffisamment crétin pour se promener la nuit. Heureusement, la jolie fille - magnifique Brooke Nevin - se montre plus courageuse que le mâle et permet de briser quelque peu la figure de la damsel in distress. Leurs personnages, typique des films d’horreurs, sont assez sympathiques, mais par leur présence, perturbe la vadrouille des frérots et réduisent la saveur du huis-clos. La musique, incontournable dans ce genre d'épisodes, est malheureusement aux abonnées absentes.

La majeure partie de l’épisode se déroule dans les décors inquiétants et très réalistes de l’asile psychiatrique abandonné. Ce qui nous offre une atmosphère angoissante, voir terrifiante. La mise en scène de Guy Bee exploite très bien le décor. On peut égalemment noter l’aspect effrayant des esprits qui hantent l'asile, décomposés à en faire peur. Il n’y à rien à dire côté effets spéciaux, non plus : c’est parfait ! Sur un autre plan, le relationnel répond à l'appel pour maintenir l'intérêt d'une histoire inégale. Le fossé entre les deux frères semble s'élargir lors de la première dispute dans la chambre. Le tempérament protecteur de Dean, expression de son amour fraternel, ne serait-il pas aussi égoïste ? Il est vrai qu'il a toujours dirigé les opérations, ce qui a pu accumuler de la rancune jalouse chez Sammy. À ce titre, leur confrontation est un des moments les plus forts de l'épisode, avec l'image de Sam pressant la détente. Il n'est pas anodin que le départ traditionnel en voiture soit beaucoup plus malaisé. Enfin, l'épisode injecte de multiples citations de films par Dean qui commence à montrer sa geekside. Les dialogues se montrent aussi plus vifs qu'à l'accoutumée.

Supernatural 1 10 2

La critique d'Estuaire44 : 

On se souvient surtout de cet épisode pour son superbe décor, claustrophobique, horrifique et labyrinthique à souhait. Un travail extrêmement soigné, à l’image des coiffures, maquillages, accessoires et autres effets spéciaux. Je pense que le pari a été fait de réaliser un épisode essentiellement visuel, unifiant ces divers savoir-faire. Le pari a peut-être été jusqu’au-boutiste en sacrifiant la musique pour ne jouer que sur ce décorum, comme une démonstration de force.

Évidemment c‘était très casse-gueule, surtout avec la bande-son en or massif que déroule la saison depuis son commencement, mais on aime bien la prise de risque artistique, les couleurs remplacent la musique, c’est presque expérimental. L’histoire reste très prévisible en soi, mais le parti pris de l’épisode limite cette nuisance.

Supernatural 1 10 3

Anecdotes :

  • Dean fait référence aux séries Medium et Ghost Whisperer : "Hey Sam, who do you think is the hotter psychic ? Patricia Arquette, Jennifer Love Hewitt, or you ?’’ « All work and no play makes Dr. Ellicott a very dull boy » déclare Dean, il s’agit d’un clin d’œil à la phrase obsédant le protagoniste de Shining « All work and no play makes Jack a very dull boy ». « Maybe it's more like Amityville or the Smurl Haunting » indique Sam, avec une double référence. La première concerne le massacre de la famille Lutz (1974), popularisée au cinéma par le film de 1979 et d’autre part à la famille Smurl, qui affirma qu’un démon résida dans leur maison de 1974 à 1989. Leurs allégations connurent un succès médiatique, conduisant à un téléfilm en 1991. En évoquant ces deux affaires occultes très connues, Sam indique la probable présence d’esprits maléfiques. L’épisode contient aussi des références à Star Wars (Yoda) et au Sixième Sens (« Let me know if you see any dead people, Haley Joel » déclare Dean).

  • Cette épisode se déroule dans une "petite ville’’ appelée Rockford... qui est en réalité la troisième plus grande ville de l’Illinois ! Dans l’hôpital, on aperçoit à plusieurs reprises le symbole représentant un danger biologique. Or celui-ci fut crée en 1966, alors que l’établissement a été fermé en 1964. Ce signe fut d’abord établi par la firme Dow Chemical, puis généralisé 1967 car il était celui frappant le plus le public. Il se substitue alors à une quarantaine de logos coexistant simultanément. On aperçoit de la lumière diurne à travers les fenêtres, or l’action est censée se dérouler en pleine nuit.

  • Pour la première fois, l’acier est cité comme une arme anti-démon.

  • Jared maintient désormais sa voix naturellement grave, au lieu du ton moins marqué qu’il avait adopté depuis Gilmore Girls.

  • On entend le titre "Hey You’’ de Bachman Turner Overdrive, au bar.

  • Dean utilise le pseudonyme de Nigel Tufnel, soit le leader des Spinal Tap, groupe imaginaire de Hard Rock héros du mythique film du même nom (1984), avec Patrick Macnee.

  • Le tournage de l’épisode se déroula à proximité de celui de Smallville. L’acteur principal de cette série, Tom Welling, rendit visite à Ackles et Padalecki, qui s’amusèrent à le dissimuler à l’arrière de l’Impala.

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11. L'ÉPOUVANTAIL
(SCARECROW)

Supernatural 1 11 1

Épisode Mythologique

Scénario : John Shiban, d'après une histoire de Patrick Sean Smith
Réalisation :
Kim Manners

- How'd you get here ?
- I stole a car.
- That's my boy !

Résumé :

John Winchester envoie à ses fils les coordonnées d’une petite bourgade. Sur le trajet, Sam et Dean se disputent violemment et se séparent : Dean suit les coordonnées laissés par son père tandis que Sam part en Californie pour tenter de retrouver ce-dernier. Sur le chemin, il rencontre une étrange jeune femme nommée Meg. Mais lorsque Dean se retrouve pris au piège pour servir de sacrifice, Sam part pour lui venir en aide.

Première apparition de Meg Masters...

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Dès la formidable introduction cauchemardesque, on pressent qu'on va assister à un épisode de haut niveau. Effectivement, Scarecrow répond aux attentes générales en exploitant une figure assez mineure dans l'horreur : ces fameux épouvantails ici décrits comme avatars corporels de Dieux païens qui n'y vont pas de main morte (ou de crochet mort) quand il s'agit parler d'hémoglobine. La thématique du justicier devant protéger un innocent contre son gré et cherchant un moyen de s'introduire légitimement dans sa vie est source d'un excellent suspense : Tru Calling en a fait un excellent moteur d'histoires. Ajoutez-y des joyeux lurons prêts à vous tabasser si vous vous montrez tout insistant, et un héros privé de son coéquipier, et la tension se maintient tout le long.

La parabole sur l'aveuglement fanatique qui dévoie la notion de sacrifice pour "le plus grand bien" n'est certes pas de la première originalité, mais l'effroi devant cette déshumanisation demeure intacte à chaque version un tant soit peu appliquée. Supernatural capitalise beaucoup sur ces riants villages de campagne, dont le charme rustique et l'ambiance country se couplent fort bien à ces légendes macabres. Le village et le verger, malgré un budget tirant la langue, se voient fort bien exploités.

L'épisode doit énormément à Kim Manners, trouvant toujours les angles et les plans les plus anxiogènes à chaque situation. Violente frustration toutefois par une résolution bâclée. Quelques scènes retiennent l'attention comme la dispute entre Sam et Dean (Ackles et Padalecki sont au meilleur de leur forme), le sanglant massacre final ou encore le cliffhanger qui ne sera pas résolu avant Daeva (1-16). Tom Butler et tous les autres acteurs secondaires sont vraiment exceptionnels.

L'épisode prend un risque de creuser les dissensions entre les deux frères jusqu'à une première rupture, mais la performance très émouvante de Jensen Ackles dans un registre pourtant plus proche de son partenaire rend fort bien le déchirement de la séparation sous la bravade de façade, et la joie des retrouvailles. L'attraction du jour est bien sûr Meg Masters, campée par une excellente Nicki Aycox, qui va devenir un personnage très jouissif de cette première saison. On bat des mains lors du twist final : une énorme Conspiration soit à l’œuvre, et observe notre duo. Oui, Ils sont parmi nous, They're watching, il n'y a qu'une règle Resist or serve, etc. D'ailleurs, le Fumeur est en guest star, ils ne peuvent plus camoufler la vérité !! Supernatural lance à son tour sa Conspiration, en remplaçant les Aliens par les Démons, ce qui promet un traitement plus... saignant. On en redemande déjà.

Supernatural 1 11 2

La critique d'Estuaire44 : 

Certes le morne bûcher final reste une triste manière de conclure les débats (rien à voir avec ceux de Mélisandre !). On aurait assurément préféré un mano à mano final entre l’épouvantable épouvantail et les Bros retrouvés. Mais le budget ayant déjà financé pas mal d’extérieurs, y compris de nuit, la série atteint ici ses limites. L’Epouvantail reste particulièrement remémoré par les fans (il sera repris dans l’épisode 200) car il est le premier de ces Dieux païens que l’on va retrouver tout au long de la série.

Malgré tout le talent de Manners et des techniciens et artistes de la série, l’Epouvantail n’est à mon sens pas le meilleur, du fait de son mutisme et de son manque d’interaction avec les Winchester. Les suivants seront également tous friands de sacrifices humains mais aussi volubiles et mégalos, de bons psychopathes pour des épisodes souvent réjouissants. L’idée des dieux arrivés en Amérique par les croyances et les traditions des migrants se retrouve dans le chef d’œuvre qu’est le roman American Gods, de Neil Gaiman, probablement le grand inspirateur de SPN pour toutes ces histoires. On y trouve une histoire d’ailleurs très proche de celle de l’épisode.

Le récit joue joliment des petites villes étranges chères à La Quatrième Dimension, le deux séries se rejoignent d’ailleurs par leur attachement à l’Amérique profonde. J’aime bien aussi la saveur X-Files de l’opus, avec Kim Manners dirigeant de nouveau William B. Davis, évidemment dans un rôle de félon couvrant une machination. Noblesse oblige. Dean n’est pas assez parano, ça s’apprend. Les inquiétants vergers de noisetiers sont aussi ceux de Shizogony, situés à Hazelmore farms, près Vancouver (pour Hazelnut, noisetier en angalis). Le scénario évoque aussi celui de La Main de l'Enfer, où un groupe vénère aussi une entité démoniaque for the Greater Good.

Le scénario installe habilement un parallèle entre la brouille des deux frères, toujours aussi excellemment interprétés, mais formant toujours une famille, à la dissolution abjecte de celle basée sur le mensonge. Plusieurs moments forts, comme l’ouverture qui déchire tout, l’appel du Père bouleversant les deux frères, Sam qui s’affirme par la révolte ou Dean tentant désespérément de faire passer le message aux oies blanches destinées au sacrifice. Les victimes de ce genre de productions désirent vaiment mourir, c’est sûr.

Une dimension mythologique vient parachever l’ensemble. On devine tout de cuite que cette sympathique jeune femme reviendra un de ces jours rendre une petite visite. Effectivement Meg Masters est là pour un bon bout de temps. Kim Manners s’est déclaré particulièrement ravi de son arrivée, car il militait pour l’installation d’une mythologie dont selon lui la série avait désespérément besoin. Compensant le final manquant de punch, le téléphone infernal est une bonne idée. Pour le coup on pourra vraiment dire qu’il y a de la friture sur la ligne.

Supernatural 1 11 3

Anecdotes :

  • À deux reprises, les caméras et/ou les projecteurs sont visibles. Quand Meg tranche la jugulaire du chauffeur, la flot de sang apparaît bien inférieur à ce qu’il devrait être. Normalement on a une grosse tache sur une bonne moitié du pare-brise.

  • Cet épisode contient des références à : "Massacre à la tronçonneuse’’, "Le chant du diable’’ et "Le village’’ (of course !). Mais aussi dans l'ensemble au Magicien d’Oz : Emily, l’épouvantail, la cave, le pommier…

  • L’arbre présenté comme un pommier est en fait un noisetier. Durant l’Antiquité et le Moyen Age, de grands pouvoirs magiques ont souvent été attribués à cette espèce, notamment la fertilité et la détection de l’eau par les sourciers.

  • Supernatural accueille un grand guest en provenance des X-Files, en la personne de William B. Davis (l’Homme à la Cigarette en personne). Champagne !

  • Les X-Files ont également utilisé l’étonnant décor naturel des noisetiers, dans Schizogonie (5-09).

  • Nous découvrons l’impitoyable et perverse Meg Masters, l’ennemie au plus long cours des Winchester puisque toujours présente en saison 6. Apparue dans 12 épisodes, elle sera incarnée par Nicki Aycox (5 épisodes), puis par Rachel Miner (7 épisodes), très différentes mais pareillement douée. Nicki Aycox (1975) a une longue carrière en tant que guest dans des séries : Esprits criminels, Les Experts (Las Vegas et Miami), Cold Case, La treizième dimension, etc.

  • Les contacts apparaissant dans le téléphone de Sam sont soit des membres de l’équipe technique soit des personnages rencontrés par le passé, comme Estella Warren de Faux frères.

  • Il s’agit du premier épisode dont le titre apparaît à l’écran.

  • Le thème de la déité nordique protégeant un petite ville mais prenant un sacrifice annuel en échange est l’un de ce ceux décrits dans le formidable roman de Neil Gaiman qu’est American Gods (2001). Ce livre majeur inspirera plusieurs épisodes de la série, dont Le Panthéon.

  • Durant l’épisode on entend : "Puppet’’, de Colepitz, quand Sam utilise son téléphone, "Bad Company’’, de Bad Company quand Meg passe à l’action, "Lodi’’, de Creedence Clearwater Revival, à la fin.

  • Dean affirme s’appeler John Bonham. Il s’agit en fait d’un des plus grands batteurs et compositeurs de l’histoire du Rock, décédé en 1980 (avoir avoir ingurgité 40 verres de vodka). Surnommé Bonzo, il demeure une figure emblématique de son groupe, Led Zeppelin, et a exercé une grande influence sur bien d’autres musiciens par son sens du rythme et la puissance de ses prestations. Led Zeppelin décide de se dissoudre après son décès.

  • Les Vanirs (ou Vanes) constituent un groupe de dieux nordiques s’opposant aux Ases (Thor, Odin…). Divinités de la fertilité et de la magie (Freyr, Freyja…) ils sont plus proches des humains que leurs rivaux et les aident plus volontiers dans la vie courante. Leur nom signifie « Seigneurs amicaux ».

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12. MAGIE NOIRE
(FAITH)

Supernatural 1 12 1

Scénario : Sera Gamble & Raelle Tucker
Réalisation :
Allan Kroeker

I'm not gonna die in a hospital where the nurses aren't even hot.

Résumé :

Lors d’une chasse, Dean est mortellement blessé, et n’a plus que quelques heures à vivre. Pour le sauver, Sam l’emmène voir un certain Roy Lagrange, qui guérit miraculeusement les gens...

Émouvant...

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Sans doute le premier grand chef d’œuvre de la série, qui après 11 épisodes, ose enfin s'aventurer sur le terrain le plus difficile, mais sur lequel on juge la valeur d'une série : l'émotion. La sensibilité religieuse de cet épisode singulier est d'une force émotionnelle saisissante. De fait, au beau milieu d’une première saison très sombre, Faith apparaît comme un « éclaircissement ». Sera Gamble et Raelle Tucker bombardent leur script de questions éthiques et religieuses puissantes, et s'éloignent judicieusement de la version X-Filesienne (L'église des miracles), et ici avec plus de réussite que leur modèle déjà bon.

Les scénaristes nous servent une histoire passionnante, mélange de fantastique et de religion, ce qui sera beaucoup utilisé dans la série à partir de la saison 4 avec l’apparition des anges. Le dégradé progressif de l'horrible situation se fait avec un suspense et un sens du tempo très maîtrisés, avec ces apparitions terrifiantes du Reaper local, aussi mutique qu'implacable ; le final où Dean est dans le collimateur est d'un suspense effroyable. Cette idée "d'une vie pour une vie", bien que pas nouvelle, est ici remarquablement traitée ; la terrible éthique de la situation fait mal. Le complexe de culpabilité de Dean qui doit faire face au "meurtre" commis pour lui sauver la vie, et le déchirement de ce dernier lorsqu'il empêche la guérison de Layla sont aussi très forts. Si nos bros ont pris une décision certainement juste, le prix à payer reste lourd. La réalisation d’Allan Kroeker est inspirée, mais le plus grand atout de cette historie demeure sa guest principale : Julie Benz. L'on est enchanté que Supernatural, après X-Files, convoque un mémorable guest du Buffyverse. Et d'ailleurs, l'actrice retrouve certaines intonations de Darla lorsqu'elle trouve sa rédemption (le final du The Trial d'Angel a manifestement inspiré la coda, elle n'en est pas moins déchirante). Elle interprète Layla magistralement, et nous fait passer beaucoup d’émotion. A son unisson, Jensen Ackles nous livre ici une de ses meilleures prestations de la série.

On aime l'ironie à la Bernanos où le Révérend prétend guérir au nom de Dieu quand en fait, ce sont des forces noires qui sont à l’œuvre. Mais par-dessus tout, l'épisode se montre audacieux dans sa mise en pièces de la vision anachronique du Dieu rétributeur qui juge les hommes. Une vision incarnée par la foi dévoyée du fanatique Big Bad qui pourtant ne fait qu'agir par amour, un amour sincère qui le pousse jusqu'au satanisme assassin, ce qui ne fait que complexifier son portrait. Dean fait face à sa haine de lui-même lorsqu'il se juge indigne d'être guéri. Les événements répondent à sa question : pourquoi lui et pas Leyla qui "méritait" plus que lui de guérir ? Parce que le soleil brille pour tout le monde, même pour les non-croyants ; Dieu ne juge pas et ne fait pas de favoritisme.

La sublime scène finale voyant Leyla consoler Dean (comme Darla consolait Angel) en n'éprouvant nulle haine, et reconnaissante envers la vie, sans peur ni révolte de la mort prochaine... est à en pleurer d'émotion. Le bouleversement de Dean, promettant de prier, est une manière magnifique de terminer cet épisode qui a misé à fond sur l'émotion sans abdiquer son identité d'horreur. Supernatural montre avec cet épisode qu'elle peut aller au-delà du divertissement.

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La critique d'Estuaire44 : 

Un épisode fort et singulier, abordant le thème de la Mort avec sensibilité alors qu’elle n’était apparue jusqu’ici que comme point d’orgue de scènes horrifiques l’approche très humaine s’effectue selon un scénario particulièrement riche, envisageant également une différentiation plus complexe que d’habitude entre le Bien et le Mal. Les Winchester doivent trouver une voie étroite et difficile entre des impératifs moraux conciliables non sans prix à payer. Ce récit irrigué par la foi chrétienne se situe idéalement en début de série, avant que Kripke n’ait développé sa propre vision de la Divine Comédie (y compris pour les Faucheurs et leur patron en personne), le récit et ses interrogations en résultent universels.

L’épisode doit évidemment beaucoup à Julie Benz, à la présence toujours aussi forte à l’écran. L’au-revoir à Dean demeure l’un des scènes les plus émotionnellement fortes de la série et une évocation lumineuse du mystère de la Foi, loin de ses aspects dévoyés par le fanatisme. Oui, les auteurs ont certainement songé à Darla, qui a effectué le choix diamétralement opposé à celui de Leyla, reniant Dieu et acceptant de devenir un monstre aux mains du Maître, pour échapper à ce qui lui semble être l’anéantissement. Le parallèle entre les deux figures s’avère très éloquent sur la portée de nos actes.

L’épisode est l’un des référés de Kripke et de Singer, instituant la relation entre l’homme à Dieu et le libre-arbitre comme l’une des thématiques centrales de la série. Le fait de n’avoir subi aucune censure sur un sujet toujours délicat incita Sera Gamble à s’investir davantage dans une série où elle allait prendre une importance croissante.

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Anecdotes :

  • Julie Benz (1972) est surtout connue pour son rôle de Darla dans les séries Buffy contre les vampires et Angel ainsi que de la soeur de Dexter dans les quatre premières saisons. Elle est égalemment apparue dans la saison 6 de Desperate Housewives et plus récemment dans la série No Ordinary Family, interrompue au bout d’une saison, faute d’audience.

  • Cet épisode est égalemment connu sous le titre français La foi, soit la traduction du titre original.

  • Le tournage de l’épisode fut contrarié par des pluies diluviennes s’étendant sur cinq journées. Le sol boueux rendit également difficile le déplacement des véhicules.

  • Durant l’épisode, on entend "Don't Fear The Reaper’’, de Blue Öyster Cult, quand Roy effectue une guérison et que le Faucheur prend en échange la vie d’un coureur.

  • La fenêtre par laquelle Sam est censé s’échapper du sous sol est à l’évidence trop étroite pour cela.

  • L’épisode est le préféré de Kripke pour l’ensemble de la saison. Il indique également que c’est à cette occasion qu’il s’est pour la première fois interrogé sur la place de Dieu et du libre-arbitre dans l’univers de la série. Il fut dès lors convaincu alors que Supernatural était capable d’aborder frontalement ces questions.

  • Les Reapers (faucheurs) vont réapparaitre ultérieurement dans la série, notamment avec Tessa (Sacrifices, 2-01), mais également en saison 5, avec la venue de la Mort en personne, et pour finir dans la sixième saison.

  • L’auteure Raelle Tucker raconte avoir d’abord écrit le Reaper avec la faux et le voile noir traditionnels, avant de se rendre compte que cet aspect théâtral ne correspondait pas à l’esprit de l’épisode. Elle préféra également développer une figure originale, estimant que les poncifs n’effraient plus personne.

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13. ROUTE 666
(ROUTE 666)

Supernatural 1 13 1

Scénario : Brad Buckner & Eugenie Ross-Leming
Réalisation :
Paul Shapiro

- So burning the body had no effect on that thing?
- Oh sure it did, now it's *really* pissed!

Résumé :

Cassie, une ancienne petite amie de Dean, demande de l’aide à ce dernier : des gens de couleurs ont été assassinés par ce qui semble être...un camion. Les deux frères Winchester se rendent sur place pour enquêter.

Le camion fantôme...

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Après le voyage mortello-spirituel de l'épisode précédent, le retour sur Terre se fait sentir avec cet opus certes louable pour son attaque du racisme, fléau indissociable de l'histoire des Etats-Unis, mais au scénario... ronronnant. De fait, les auteurs semblent plus s'intéresser aux retrouvailles de Dean avec son ex. Une option valable, mais ce mélo se voit plombé par un manque d'alchimie entre Jensen Ackles (pas en très grande forme ici) et Megalyn Echikunwoke, cette dernière ayant d'ailleurs un jeu très limité ici. Comme il ne se passe rien si ce n'est des ressassements faciles du passé ou des réconciliations sur l'oreiller - gâchés par une photographie trop obscure - ce pan de l'histoire prend de la place et immobilise l'impetus de l'épisode. Toutefois, c'est assez amusant de voir notre dur-de-dur de Dean avouer qu'il a bien un p'tit cœur qui bat (et de bons goûts), car il en fait tellement un max quand il se la pète que le contraste marche très bien.

L'intrigue du jour ne vaut guère mieux, cette histoire de malédiction venue de l'au-delà en plus de ne pas être convaincante et prévisible, forme un doublon avec Dead in the water, et l'effet du cadavre noyé entraînant ses victimes est quand même plus massif que le gros truck qui démolit tout.   Une fois l'effet de surprise passé, le procédé s'use assez vite, même si plutôt original (on se croirait devant une version plus bourrine du Duel réalisé par Spielberg). L'explication est un poil tirée par les cheveux et quelques scènes pas du tout nécessaires frisent le ridicule, sans oublier une interminable confession de témoin. Quant à la résolution finale, elle frustre par sa fin pas très crédible et brutale, sans vrai mano a mano. L'évocation si américaine des longues routes campagnardes et de ses villages reculés demeure en filigrane. Heureusement, l'épisode trouve une planche de salut par la réalisation expérimentée de Paul Shapiro, qui parvient à passer quelques frissons lors des attaques de nuit, et distille merveilleusement une pincée d'angoisse dans chaque scène de suspense.

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La critique d'Estuaire44 : 

On conserve un bon souvenir du spectre automobile, également de découvrir cette fois l’Impala plongée au cœur de l’action. Toutes les scènes automobiles ont un vrai impact. La première version du script en contenait nettement plus, mais Kripke a du en rabattre finances obligent. On sent que le scénario a été colmaté à la hâte pour remplir les trous en résultant. Pour le reste la saison continue à visiter les plaies de l’histoire américaine, aussi bien que sa géographie. Après le puritanisme ou les communautés fermées, on trouve ici le racisme, traité sans trop de pathos.

Les auteurs essaient de renouveler la justification de l’arrivée des Bros, au-delà des sempiternels articles de presse. Le coup des ex ou des copines de fac (pour Sam) , ce n’est clairement pas la meilleure solution, cela fait terriblement artificiel. J’étais content de retrouver Megalyn Echikunwoke , je l’avais bien aimé dans les 4400, ici elle se maintient dans un registre très convenu, à l’aune du personnage. Je me souviens aussi que c’est dans cet épisode que j’ai remarqué pour la première fois les pittoresques ou étranges motels dans lesquels descendent les Winchester. L’équipe technique et artistique va se faire plaisir tout au long de la série sur le sujet, avec des résultats parfois impressionnants. En plus cela correspond réellement à une tradition américaine.

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Anecdotes :

  • Megalyn Echikunwoke (1983) est surtout connue pour ses rôles d’Isabelle Tyler dans Les 4400 et d’Angie Barnett dans That 70’s Show. Elle a fait quelques apparitions dans Urgences, Buffy contre les vampires, 24 heures chrono et plein d’autres séries.

  • Il s’agit d’une des rares fois où les frères Winchester ne chassent pas un ennemi à apparence humaine.

  • Sam et Dean demeurent parfaitement secs après avoir attaché une chaine au camion immergé. Dans le flashback, on voit que le camion est poussé dans l’eau vers l’avant, mais ce sens apparaît inversé quand il en est retiré. Sam déclare à Dean qu’il doit rouler sur 0,7 miles. Dean regarde alors le compteur, qui indique alors 70098.2 miles. A la fin du mouvement, il en indique 70100.6, soit nettement plus !

  • Le tournage de l’épisode fut perturbé par d’importantes chutes de neige, élément bien entendu impossible à montrer dans une action censée se dérouler dans les bayous de Louisiane.

  • L’épisode fait partie de ceux que Kripke déclare le moins apprécier cette saison. En effet son projet initial était de tourner un épisode entièrement basé sur des poursuites de voitures (l’Impala contre le monstre mécanique), mais il n’a pas pu disposer des moyens financiers suffisants pour mener à bien ce projet. Il fallut alors improviser un scénario de rechange et, avec le recul, il estime ridicule cette histoire de camion raciste (on peut penser qu’il avait en tête le Duel de Spielberg.)

  • "Yeah, kinda like that theatre in Illinois’’, déclare Sam, faisant référence à une légende urbaine américaine. Durant une représentation, un accident provoqua la mort d’un machiniste du Lincoln Square Theater, dans la ville de Decatur, Illinois. L’âme du défunt est ainsi supposée hanter l’endroit depuis les années 60.

  • Durant l’épisode, on entend "Walk Away’’, de The James Gang, au début de l’épisode, quand l’Impala démarre, ‘’She brings me Love’’, de Bad Company, quand Dean et Cassie ont un moment intime, "Can't Find My Way Home’’, de Blind Faith, lors du départ.

  • Le titre Route 666 est une référence au chiffre biblique de l’Antéchrist, mais aussi un clin d’œil à la mythique Route 66, reliant Chicago à Santa Monica, en Californie. Cet axe majeur des USA, surnommé « Mother Road » par Steinbeck, fut édifié durant le New Deal, à l’époque où l’Etat fédéral cherchait à relancer l’économie par de vastes travaux publics. Célèbre par ses paysages s’étendait sur près de 4 000 kilomètres, la route 66 a inspiré de nombreux artistes, écrivains et musiciens. Le développement des vastes autoroutes « interstates », lancées au début des années 60, l’a cependant déclassé en temps que vecteur économique, ruinant les villes s’étant édifiées sur son parcours (ce que raconte le dessin animé Cars). La Route 66 demeure cependant un important symbole de l’âme de l’Amérique profonde et d’une mystique du voyage également très américaine. Une Route 666 (désormais 491) existe bien, mais avec une distance bien plus modeste. La Devil Highway traverse la région dite des Four Corners, car seul endroit des Etats Unis où quatre Etats font jonction : Arizona, Colorado, Nouveau-Mexique et Utah.

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14. TÉLÉKINÉSIE
(NIGHTMARE)

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Épisode Mythologique

Scénario : Sera Gamble & Raelle Tucker
Réalisation :
Phil Sgriccia

- We’re not gonna kill Max.
- Then what? I hand him over to the cops and say, “Lock him up, officer; he kills with the power of his mind.”

Résumé :

Après avoir fait un rêve où il voyait un homme assassiné par un esprit, Sam convainc Dean de l’accompagner pour empêcher le drame, mais ils arrivent trop tard. Les deux frères enquêtent, mais voila que le frère de la victime se fait assassiner à son tour...

Immanquable...

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Il semble patent que les auteurs connaissent leur Angel. Un quidam qui n'a rien demandé assailli soudainement de visions psychiques qui lui donne l'occasion de sauver un innocent des griffes du mal, et devant vider trois tubes d'aspirine après ? On t'a reconnue Cordy ! Comme dans pratiquement tous les épisodes de la saison, le suspense est présent de A à Z, en particulier dans la scène finale, haletante comme jamais. Les deux excellents seconds rôles principaux, Brendan Fletcher (Max) et Beth Broderick (Alice) crédibilisent cette scène. Le twist du whodunit produit un très bon effet théâtral ! A noter les très bons effets gores dans le deuxième meurtre, la décapitation à la fenêtre (pourquoi croyez-vous qu’on les appelle ‘’fenêtres à guillotine’’ ?). Sinon, d’où est-ce que Dean sort son gadget très futuriste ? Ce grand épisode est immanquable car il contient aussi des informations très importantes pour la bonne compréhension de la série. Ainsi, on en apprend plus sur les étranges pouvoirs de médium de Sam. Jusque ici, le sujet avait déjà été abordé (La maison des cauchemars), mais jamais en profondeur. Ici, en plus d’importantes découvertes, on suit une enquête passionnante de bout en bout.

Le sujet de l'épisode est assez proche de la Poupée vivante de la Twilight Zone, mais qui aurait fait fusionner l'enfant victime et la poupée en un. Brendan Fletcher se montre saisissant de fureur homicide et de désespoir tragique dans sa composition d'enfant victime devenant bourreau vengeur. Ses scènes avec Sam, superbement dialoguées, sont des pépites, on ne sait jamais s'il va se calmer ou persévérer dans sa folie. Le thème des enfants maltraités, de l'assassin victime toujours plus intense qu'un simple méchant, et le fait que ce soit un être humain qui soit en cause permet un joli problème éthique, du moins pour Sam ; Dean ayant autre chose à faire que de se prendre la tête avec le tabou de l'humain, (encore très Buffy/Angel comme thème).

Cela est d'autant plus fort que Max renvoie à Sam un miroir inversé, et que ce dernier se voit forcé de relativiser sa rancune envers son père, finalement bon bougre comparé au père violent de Max... et relativiser son attitude face à son malheur, Sam ayant suivi un chemin moins destructeur que l'adversaire du jour, et cela il le doit à lui-même, et à son cher frère (émotion lorsque Dean assure qu'il n'arrivera rien à son cadet tant qu'il sera là, c'est à la fois viril, naturel, et beau). Sinon, Sam et Dean en prêtres font hurler de rire, crédibilité à aller chercher du côté des infinis négatifs, tout comme Dean comptant utiliser les dons de Sam pour gagner à Vegas... Un grand épisode qui lève le voile sur certaines questions et en commence de nouvelles. Dans tous les cas, on est désormais persuadé d’un futur sombre pour Sam...

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La critique d'Estuaire44 : 

Le thème de l’alter ego négatif est souvent porté à l’écran et c’est bien le cas ici, entre Sam et son quasi Doppelgänger, mais aussi entre les deux frères. L’étude psychologique et l’horreur font bon ménage. Effectivement cela laisse présager tout un développement autour de Sam, relié à la mythologie de la vendetta familiale (mais qui surviendra surtout en saison 2, de mémoire).

Effectivement les Bros en prêtre cela reste un sacré souvenir ! La costumière de la série avait malicieusement veillé à ce que les tenues soient un brin trop courte pour l’imposante musculature de ces messieurs.

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Anecdotes :

  • Brendan Fletcher (1981) est canadien. Il a joué entre autres dans Smallville, MilleniuM, Tru Calling, etc...

  • Cet épisode est égalemment connu sous le titre français Cauchemar, soit la traduction du titre original. Un choix préférable, l'autre titre en français nous révélant dès le début que le tueur à un pouvoir.

  • Sam et Dean se présentent sous les identités respectives de "Père Frehley’’ et de "Père Simmons’’, soit les noms du guitariste et du bassiste du groupe de rock KISS.

  • Durant l’épisode on entend deux chansons de Bob Seger : Two plus Two et Lucifer. Il s’agit d’un chanteur du Michigan, où est censée se dérouler l’action. Les différents décors contiennent également plusieurs références à cet État (photos, mugs…). Le réalisateur Philip Sgriccia est lui même originaire du Michigan et a voulu faire un clin d’œil à cet État.

  • La dessinatrice des costumes de la série, Diana Widas, déclare que la taille du costume de prêtre de Sam est un peu juste. Elle commente que c’est souvent le cas pour les vêtements de Sam, voulant ainsi indiquer son côté plus coincé que Dean.

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15. LES CHASSEURS
(THE BENDERS)

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Scénario : John Shiban
Réalisation :
Peter Ellis

- You killed my brother.
- Your brother. [laughs] Now I see.
- Just tell me why.
- Because it's fun. [laughs again]

Résumé :

Alors que les frères Winchester partent enquêter sur d’étranges enlèvements, c’est bientôt au tour de Sam de disparaître. Dean va alors faire équipe avec le sheriff Kathleen Hudack pour retrouver son frère, qui à été enlevé par une famille pour le moins...étrange.

Une famille formidable...

La critique de Clément Diaz et Cetp65 :

Avec The Benders, Supernatural livre sa version des chasses du comte Zaroff. Cependant, cette intrigue de search and rescue souffre d'en rester à une veillée d'armes qui ne crépite que rarement. Après la saisissante introduction et une fois Sam kidnappé par les joyeux dégénérés, on assiste à une vadrouille routinière en compagnie de Dean et de la shérif où il ne se passe pas grand-chose, si ce n'est une scène de chasse en effet efficace. Sinon, Sammy est au chaud dans sa cage, la flic st désincarnée (malgré le coup des menottes), et il y a pas mal de raccourcis (comment Dean retrouve-t-il Sam ? Comment Sam sort-il de la cage ? Sacrée coïncidence de tomber sur une policière étant dans la même situation que Dean). Le final est très décevant, avec cette partie de cache-cache mille fois vue et revue. On est loin des modèles du genre. Même la version burlesque de Buffy (Homecoming) dépotait mieux. Un des points forts est la découverte tardive qu’il n’y a rien de surnaturel dans cette histoire (dans la saison 4, le non moins bon Entre les murs en fera autant), une bonne surprise, à rebours de ce que le spectateur pensait initialement.

L'épisode peut heureusement compter sur le trio de sauvages bien cramés (les Benders sont devenus des ennemis cultes pour les fans). On aime bien que les Benders n'ont aucune motivation autre que le plaisir de tuer, de la chasse, ça les rend encore plus insoutenables que n'importe quel démon ; on est pas loin d'Esprits criminels, connue pour monter des sadiques plus horribles les uns que les autres. Mais c’est ici encore plus dérangeant de voir qu’il s’agit d’une famille entière... d’humains. En effet, on est généralement plus impressionné par les séries policières que par les séries fantastiques, car l’on sait que dans ce dernier cas, la menace n’est pas réelle. Or, dans ce genre d’épisodes où ces règles sont abandonnées (ce fut le cas pour Le fétichiste dans X-Files), l’horreur ne peut qu’en être augmentée. Surtout qu’ils n’ont pas choisi que des adultes dans cette famille du bonheur : il y a aussi une petite fille, pire que tête à claques et interprétée par la talentueuse Alexia Fast, mais doublée en français par la très mauvaise je-ne-sais-pas-qui-mais-change-de-métier.

En parlant de guest, on est servi dans cet épisode : les 3 autres acteurs membres de cette joyeuse famille sont tellement bien choisis qu’on dirait qu’ils sont les personnages. Jessica Steen est également remarquable dans le rôle de Kathleen. Superbe Dean qui nous fait vraiment émouvoir en gars prêt à tout pour retrouver son frère, mais qui malgré tout n'est pas sans reproche : n'y-a-t-il pas un peu d'ego dans sa volonté d'être le protecteur de Sam ? Bonnes vannes entre les deux bros, ou bien la discussion absurde sur Godzilla. Supernatural assure côté personnages malgré des intrigues très disparates d'intérêt.

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La critique d'Estuaire44 : 

L’épisode joue pleinement la carte des retrouvailles avec une famille de films d’épouvante très populaires aux USA, celle du Survival horrifique, voyant des péquenauds dégénérés s’en prendre aux passants infortunés. Cela va des Massacre à tronçonneuse au Détour mortel d’Eliza Dushku, en passant par Délivrance ou la Colline a des yeux. On aime bien le côté référencé du récit qui reprend tous les principaux à-côtés du genre, dont le côté bien crado ou le gore souvent brut de décoffrage. Tout comme dans La Meute des X-Files, le shérif local en prend aussi plein la figure, là aussi une figure imposée de ce style de film, le faux espoir tombe à l’eau et la tuerie peut continuer, merci. L’épisode est moins singulier que La Meute, cela peut très bien être considéré comme une faiblesse, mais le côté B Movie est parfaitement assumé. J’ai trouvé la mise en scène plutôt efficace et sinistre à souhait. Les différents antagonistes sont parfaitement dessinés, mention spéciale à la petite fille, l’une des adversaires des Bros les plus dérangeantes cette saison.

Évidemment cet épisode de Supernatural présente l’originalité d’être totalement dépourvu de surnaturel, ce qui peut décevoir les aficionados du Fantastique, mais c’était amusant de voir les Bros se retrouver dans la position des habituels ados massacrés copieux et être aussi à la peine, sinon plus que contre les créatures issues de la Bouche de l’Enfer, euh, du Paranormal. J’ai bien aimé les scènes entre Dean et la Shérif découvrant le monde étrange et périlleux de la Chasse. Son appel (souvent un drame familial) peut toucher quiconque, y compris une policière comme la Kate d’Angel.  J’ai trouvé ses réactions assez justes avec un casting réussi de Jessica Steen, la première interprète de Liz Weir dans Stargate SG-1. Beau travail des maquilleurs et des costumiers, on a l’impression que les Benders ne sortent jamais de leurs fringues, c’est plaisamment immonde.  Pour l’anecdote, l’acteur devant jouer Pa Bender en fut empêché par une tempête de neige, et la production dut trouver en urgence absolue un autre qui les porterait parfaitement.

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Anecdotes :

  • Jessica Steen (1965) est d’origine canadienne. Elle est apparue dans un grand nombre de séries télévisées, comme Stargate SG-1, NCIS, Charmed et même le remake de Kojak en 2005.

  • Premier épisode à abandonner le fantastique. Ce sera à nouveau le cas dans Entre les murs (4-11). Il s’agit égalemment du premier épisode (en VO seulement) sans le petit récapitulatif des épisodes précédents : "22 years ago’’, qui deviendra par la suite "THEN’’.

  • En VO, lorsque Dean entre dans la cave pour la première fois, on peut voir ses lèvres bouger mais aucun son ne sort. L’ordinateur de Kathleen indique que les Winchester ont la même taille (six pieds, quatre pouces), ce qui est manifestement faux. Quand Sam demande à Jenkins où ils se trouvent, on aperçoit le micro à droite de la tête de ce dernier.

  • Dean fait plusieurs fois référence à Godzilla au cours de l’épisode. They're just a bunch of psycho hillbilly rednecks... lookin' for love in all the wrong places, déclare Jenkins, en faisant référence à aux paroles de la chanson Looking for Love du chanteur Country Johnny Lee.

  • Dans Stargate SG-1, Jessica Steen, fut la première interprète du Dr. Elizabeh Weir, qui devait devenir l’une des figures majeures de Stargate Atlantis (mais sous les traits de Torri Higginson).

  • Le nom de « Bender » fait référence à une famille du Kansas qui assassinait les clients de passage dans leur hôtel, en 1872 et 1873. Vingt et une personnes ont ainsi été tuées, avant que !es « Bloody Benders » ne prennent la fuite.

  • Il est également indiqué que Dean est mort, ce qui fait référence aux évènements de Faux frères.

  • On entend Rocky Mountain Way de Joe Walsh au bar au début.

  • C’est la première fois qu’un épisode ne se conclue pas sur le départ de l’Impala, les frères étant à pied.

  • Ackles et Kripke estiment que Missy Bender compte parmi les adversaires les plus effrayants des Winchesters cette saison.

  • L’épisode est tourné dans le décor d’une petite ville abandonnée depuis des années.

  • Dean demande en plaisantant aux Benders de promettre de ne pas le transformer en cendrier. Il s’agit d’un clin d’œil au célèbre serial killer Ed Gein, qui transformait les dépouilles de ses victimes en décorations d’intérieur. Les cranes servaient ainsi de cendrier.

  • L’épisode s’inspire très largement du cultissime Massacre à la tronçonneuse (1974) où une famille isolée de dégénérés s’en prend pareillement à des voyageurs ; Le « héros » du film, Leatherface, fut également écrit à partir de l’histoire d’Ed Gein. Le retentissement du film à créé un nouveau genre de film d’horreur, où cette situation se reproduit à quelques variantes près (La Colline a des yeux, Détour Mortel…). Il en va de même pour les séries télé, l’épisode La Meute des X-Files (4-02) ne comporte ainsi également pas d’éléments fantastiques. Massacre à la Tronçonneuse à également contribué à la galerie des Scream Queens, Marilyn Burns frappant très fort avec une demi heure pleine d’hurlements ininterrompus.

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16. DAEVA
(SHADOWS)

Supernatural 1 16 1

Épisode Mythologique

Scénario : Eric Kripke
Réalisation :
Kim Manners

- You guys said you're with the alarm company?
- That's right.
- Well, no offense, but your alarm's about as useful as boobs on a man.

Résumé :

Une jeune femme est retrouvée en plusieurs morceaux à son domicile fermé de l’intérieur. Les frères Winchester découvrent que le coupable est une Daeva, une ombre maléfique. Parallèlement, Sam retrouve Meg et découvre que la jeune femme n'est pas étrangère à ce meurtre...

Les griffes de la nuit...

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Eric Kripke prend la plume, mais n'accorde pas la moindre importance à l'histoire. Pourtant, on aurait pu en tirer quelque chose de ces Daevas bien flippants, mais à part deux-trois scènes on repassera. Le talent de Manners trouve à s'exprimer comme à son habitude, mais la déception reste. Dialogues trop abondants, absence d'action, tempo traînard, monstres plus silhouettes que consistants (sans jeu de mots). Et puis, bon, j'aime les W2 parce qu'ils savent rester sobres quand les émotions les atteignent, alors voir Sam et Dean subitement extérioriser ce qu'ils ressentent paraît un peu maladroit, d'autant qu'Ackles et Padalecki n'ont pas encore acquis une aisance de jeu dans ce registre – ça ne tardera heureusement pas. Kripke se laisse coincer par des clichés qu'il ne dépasse pas (le plan diabolique peu original, la filature de milieu d'épisode, la jolie fille de l'intro marchant seule dans la nuit et se faisant ventiler ; de la part d'un fan de Buffy, ça fait mal).

Heureusement, le retour de la pure et chaste Meg nous permet d'excellentes scènes, toujours le sourire light devant sa félonie démoniaque. Chaque scène avec Sam pétille ; en particulier sa scène de séduction perverse (on croirait Drusilla et Giles dans Acathla de Buffy). Dans cet épisode, le personnage prend énormément d’épaisseur, ce qui permet d’apprécier davantage le très bon jeu de Nicki Aycox, taillée sur mesure pour ce rôle de baddie mutine et séductrice. Sa confrontation finale avec les Winchester lui permet de montrer l’étendue de son talent. À noter également la scène où Sam l’observe en sous-vêtements, très Fenêtre sur cour, mais en plus malsain (Kripke assume que ses valeureux héros ne soient pas irréprochables et peuvent se comporter de manière peu galante). Le grand événement reste la première réunion de famille avec John apparaissant enfin au milieu de notre duo qui n'en croit pas ses mirettes. Scène émouvante, sans pathos, un brin cliché, mais portée par un Jeffrey Dean Morgan meilleur que jamais, et par Ackles et Padalecki, très justes ; la scène de séparation sonne bien, et on se languit de retrouver la vénéneuse blonde.

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La critique d'Estuaire44 : 

Manners réalise quelques beaux effets horrifiques avec les jeux d’ombres et les deux acteurs invités excellent chacun dans leur domaine. Les retrouvailles de John et de ses fils restent un grand moment, en particulier la réconciliation avec Sam, qui m’avait beaucoup touché à l’époque.  L’intérêt demeure éveillé, malgré un récit ultra prévisible que Meg ait repéré les Bros (It’s a trap ! comme on dit chez Star Wars). Surdouée jusque-là, elle tombe dans le piège des Winchesters un peu trop facilement, une garce vipérine grand train toutefois. La séparation finale ressemble trop à une fuite des bros pour ne pas susciter la gêne.

C’est sans doute basique, mais j’aime quand les frères gagnent sans fioritures (bon, on se doute bien qu’on reverra la péronnelle diabolique, rendez-vous pour le retour de la revanche de la vengeance). Et puis l’ADN de la série n’est pas grand-urbain, je trouve les Bros plus dans leur élément dans la cambrousse, ici on est hors sol. Si une série dérivée finit par se faire, elle se déroulera sans doute dans une grande ville, mais je préfère quand l’Impala parcourt les chemins de traverse de l’Amérique redneck, c’est son originalité. Au total on sent trop qu’il s’agit d’un simple préliminaire avant le combat contre le toujours mystérieux commanditaire de cette rafraîchissante rosière de Meg.

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Anecdotes :

  • Cet épisode est égalemment connu sous le titre français Retrouvailles.

  • Meg dit qu’elle à rencontré "Quelque chose Michael Murray’’ dans un bar de L.A. Il s’agit d’une référence à l’acteur Chad Michael Murray qui à joué avec Jared Padalecki dans la série Gilmore Girls et le film La maison de cire.

  • L’épisode voit les retrouvailles temporaires des frères Winchester avec leur père.

  • Durant l’épisode l’on entend : "Pictures of Me’’, de Vue, au bar, "You Got Your Hooks in Me’’ de Little Charlie and the Nightcats quand Meredith marche dans la rue, "The New World’’ de X quand on découvre le symbole.

  • Les Winchester apprécient les voitures vintage : John conduit une GMC Sierra Grande. Ce pick-up haut de gamme a connu un grand succès à l’USA, dans la première moitié des années 80, grâce à ses capacités mais aussi à son design. Il a également été popularisé par la série L’homme qui tombe à pic (1981-1986), où il donne lieu à de nombreuses cascades.

  • Le symbole apparaît tracé avec le sang de Meredith, il n’a donc pas pu servir à invoquer le démon l’ayant tuée.

  • Le Daeva est une divinité védique aux grands pouvoirs, effectivement totalement intangible, mais pas négative. Le mot signifie « se mouvoir en toute liberté ».

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17. A FORCE DE VOLONTÉ...
(HELL HOUSE)

Supernatural 1 17 1

Scénario : Trey Callaway
Réalisation :
Chris Long

- This stuff right here — this is our ticket to the big time. Fame, money, sex. With girls, okay? Be brave. Okay, WWBD. What would Buffy do? Huh?
- What would Buffy do? I don't know, but, Ed, she’s stronger than me.

Résumé :

Alors qu’ils visitaient une maison supposée hantée, une bande de jeunes se sont retrouvés nez à nez avec le corps d’une fille pendue à la cave. Les frères Winchester partent enquêter, mais ne trouvent rien de surnaturel dans la maison. Ils rencontrent également deux pseudo-chasseurs, trouillards et pathétiques.

Que voulez-vous réellement... ?

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

L'unique épisode écrit par Trey Callaway mélange une histoire horrifique d'une prodigieuse originalité et un humour massif à se serrer les côtes. On a attendu un certain temps, mais ça y est, Supernatural ose enfin l'humour, et ça marche. Le mélange horreur-comique est parfait, et rappelle les grandes heures de Buffy et de X-Files.

Par un brillant changement de cadre, la série choisit de montrer non une version de légende locale américaine, mais la naissance de toutes pièces d'une telle légende. C'est ainsi que le monstre du jour se crée sous nos yeux grâce à un public avide de paranormal qui projette ses fantasmes ; un décadrage audacieux. Par un amusant enchevêtrement entre réel et imaginaire, Supernatural nous rappelle que les légendes, bien que souvent appuyées sur des faits réels, sont nées de l'imagination des hommes ; or la série, par essence une fiction, a pour postulat ces légendes prenant vie, et ses spectateurs comme ses scénaristes sont fans de surnaturel, soit un effet de méta-récit très savoureux.

Surtout, cette idée sert aussi l'histoire en elle-même, la nature du monstre faisant en sorte qu'il agit de manière différente à chaque apparition. Il devient donc un adversaire quasi invincible, une opposition de choix pour nos bros qui d'ailleurs ne sortent pas tout à fait vainqueur du combat, un doute final planant sur le devenir du monstre. Le suspense est également omniprésent tout au long de l’histoire. Les scènes dans la maison sont assez effrayantes, dignes de vrais films d’horreur. Il y a peu d’effets spéciaux mais ils sont plutôt réussis. Le meurtre de la fille à la fin du premier acte, en montage rapide, est particulièrement sauvage. Le décor de la maison est glauque à mort, la photographie très noire, et la mise en scène de Chris Long est d'une tension de chaque instant, en plans fluides et continus, soudainement hachés lors des attaques.

Les scénaristes continuent de revisiter leurs modèles, et nous voici avec la version Supernatural des Lone Gunmen des X-Files (l'efficacité en moins) et du Trio de Buffy (l'intelligence en moins) : un duo de geeks abrutis d'un crétinisme effréné à hurler de rire. Entre références à la pop culture (What would Buffy do ? = sursaut d'allégresse), amateurisme intégral, arrogance ridicule, et trouillardise puissance infini, le festival ne s'arrête jamais. Chapeau aux acteurs d'être aussi convaincus dans ces rôles d'idiots amuseurs, ils m'ont tué à chaque apparition. Mais autant que le rire, il est difficile de ne pas voir Kripke se moquer affectueusement de ses fans amateurs de surnaturel, qui rêvent de traquer le Fantastique, d'être des Ghostbusters, comme Whedon parodiait les geeks, et Carter les obsédés d'OVNI.

Par là, il s'agit du premier épisode de la série à vraiment jouer avec son public, et l'on sait que le succès de Supernatural doit beaucoup à son lien fusionnel avec ses fans. Cela est renforcé par la spectaculaire apparition de Jared en serviette de bain, ajoutée à la demande des spectatrices qui ont dû ressentir le même émoi que les femmes des années 60 en voyant Sean Connery sortir de sa douche. Jared et Jensen s'amusent vraiment beaucoup, et c'est avec grand-plaisir qu'au milieu de cette affaire sinistre, ils se lancent dans un concours de vacheries à tomber par terre. Un concentré d'horreur, d'humour, et d'amour envers le public, un sommet absolu de la saison.

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La critique d'Estuaire44 : 

Les blagues entre frères participent également à l’ambiance humoristique, de même que les vannes sur le Texas profond. J’aime bien qu’à côté de cela l’épisode ne cède rien sur l’aspect horrifique, on a un mélange réellement harmonieux et dynamique de deux éléments très disparates, un alliage bien connu des amateurs de Buffy. Sous l’influence des Bandits Solitaires, pas mal de séries (pas seulement fantastiques) ont incorporé des personnages geeks parmi leurs seconds rôles, avec des résultats très inégaux. Mais ici les Ghostfacers (pas encore nommés) s’avèrent totalement irrésistibles de fatuité et de nullité crasse, effectivement on en redemande. Appréciés par les fans de Supernatural qui ont toujours eu beaucoup d’humour, ils vont effectivement revenir, à la grande joie des Bros toujours ravis d’avoir à gérer les champions en plus du monstre de la semaine. Les Facers auront même droit à leur web série.

D’ailleurs l’usage de l’Internet montre bien que nous sommes une décennie après le lancement des X-Files ou de Buffy, il est ici entré dans la vie quotidienne et n’est plus un objet exotique frétillant de nouveauté ou un fantasme parano. Kripke va réellement mettre en place le site des Facers, qui développera durant un temps, de manière humoristique, les thématiques de divers épisodes. Belle prestation d’Agam Darshi en victime du Tulpa, elle va devenir une belle recrue de Sanctuary. Supernatural va développer au fil du temps pas mal d’épisodes décalés humoristiques  et jouer aussi des niveaux de réalité et du relationnel avec les fans. Gros boulot des décorateurs de la série et excellente bande son rock/métal, comme toujours.

Supernatural 1 17 3

Anecdotes :

  • Cet épisode est égalemment connu sous le titre français La maison de l’enfer, soit la traduction du titre original.

  • Première apparition d’Harry et Ed qui formeront plus tard le groupe des Ghostfacers. Ils utilisent l'expression What Would Buffy Do?, souvent abrégée en WWBD, devenue une question rituelle du geekland. Elle est prononcée pour l'amusement du défi, mais aussi parfois très sérieusement. Le livre "What Would Buffy Do?: The Vampire Slayer as Spiritual Guide", écrit par une auteure chrétienne, définit une démarche spirituelle basée sur la série de Joss Whedon. Les futurs Ghostfacers reviendront par la suite pourrir la vie des deux frères, dans les épisodes Ghostfacers (3-13) et Nés pour chasser (4-18). Ils ont leur propre site Web et sont devenus les héros d’une Web-série, dérivée de Supernatural (2010), portant leur nom. Ils y enquêtent sur la mort mystérieuse de l’actrice Janet Meyers, qui depuis hante un théâtre.

  • Le site internet que Sam découvre existe réellement : www.hellhoundslair.com à été crée par les producteurs de la série. Il relate plusieurs légendes urbaines dont certaines reliées à des épisodes de la série.

  • La jeune femme tuée en prologue est interprétée par Agam Darshi qui va devenir en 2009 l’une des interprètes principales de la série Sanctuary (Kate Freelander).

  • Avant d’être tuée, elle casse plusieurs jarres, dont une qui réapparaitra plus tard dans l’épisode, manipulée par Dean. Par ailleurs, les policiers ont dû vraiment s’éloigner pour ne pas entendre les coups de feu ! L’épisode se déroule à Richardson, au Texas, qui est la ville natale de Jensen Ackles. Elle est très différente de la petite localité rurale montrée ici car intégrée dans l’urbanisation de Dallas - Fort Worth.

  • Durant l’épisode on entend "Fire of Unknown Origin" de Blue Öyster Cult, au début "Burning For You" du même groupe, à la fin. Les paroles de la première chanson évoque le passé des Winchester : « A fire of unknown origin/Took my baby away… ». Le symbole peint au mur que commente Dean est en fait le logo de ce groupe apparaissant toujours sur leurs albums. Nommé le « Cronos », il s’inspire du symbole de Saturne. Importante formation de Heavy Metal, parfois psychédélique/ésotérique, les Blue Öyster Cult existent depuis 1967.

  • Les noms Zeddemore et Spengler font référence aux héros du film SOS Fantômes (1984).

  • L’album impressionnant Dean à la boutique est le mythique Point of Know Return, du groupe Kansas (1977), contenant notamment leur standard Dust in the Wind.

  • Les dialogues des deux Geeks comportent un nombre élevé de références : le Seigneur des Anneaux, l’Exorciste, Donjons et Dragons, etc.

  • Après avoir eu recours à plusieurs légendes urbaines cette saison, Kripke indique avoir voulu ici montrer comment celle-ci se créaient puis se développaient. Il déclare également que le sujet le passionne et qu’au cours de cette première saison, il a voulu montrer comment les légendes urbaines participent au folklore d’un pays et donc pleinement à sa culture.

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18. LA STRYGE
(SOMETHING WICKED)

Supernatural 1 18 1

Scénario : Daniel Knauf
Réalisation :
Whitney Ransick

- Dude, dude, I am not using this ID!
- Why not?
- Because it says "Bikini Inspector" on it!

Résumé :

John Winchester laisse à ses deux fils les coordonnées d’une petite ville. Lorsqu’ils se rendent sur place, Sam et Dean remarquent qu’il y à très peu enfant dans les rues, une épidémie de pneumonie en ayant envoyé la majorité à l’hôpital dans un état critique...

Quelque chose de méchant...

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Something wicked se penche sur un thème très Whedonien qui avant lui a beaucoup intéressé les psychologues : la perte de l'innocence originelle ; ces moments où les délicieuses rêveries de l'enfance nous quittent devant la brutalité de ce monde. D'ailleurs, cet épisode fait penser au Killed by Death de Buffy avec ce croquemitaine s'attaquant aux enfants. Mais Daniel Knauf choisit de mettre l'histoire au second plan pour examiner le traumatisme originel qui sans doute rongera toujours Dean.

Si le monstre est bien craignos, que la vision de ces enfants sans vie est assez éprouvante, que la mise en scène de Whitney Ransick est bien flippante avec ces plans statiques et ces ombres menaçantes (la scène de la vieille dame !), c'est surtout pour un Dean touché au plus profond que l'épisode trouve sa force. On ne peut s'empêcher de penser que John se montre assez cruel quand on voit la fenêtre ouverte sur l'enfance de Dean : grise, triste, corrompue par la mission du père qui le prive des délices de l'enfance. Les deux acteurs qui jouent Sam et Dean enfants sont très corrects (par contre, leur doublage français...), et l'on a le plaisir de revoir Jeffrey Dean Morgan, dont le jeu est de plus en plus impressionnant d’épisode en épisode. La seule scène où le jeune Dean prend stoïquement le fusil pour tirer sur la Stryge en dit long ! Alors que son frère demeure dans sa bulle, Dean est déjà dans la position du père de substitution alors qu'il n'est qu'un enfant, se sacrifiant déjà pour lui - la scène du bol de céréales est moins drôle que dramatique. L'ironique répétition de la situation le voyant devoir agir comme son père se montre grinçante.

Michael émeut aussi en subissant comme Dean la disparition des doux rêves de l'enfant devant l'agression du monstre. Malgré le courage dont il fait preuve, il ne sera plus jamais le même. La coda, d'une gravité amère, se montre éloquente là-dessus. Sammy est volontairement en position quasi passive, comme si Dean devait à nouveau porter son fardeau d'aîné qui le force à prendre soin de son frère. La famille Winchester semble décidément bien torturée, salis par la présence du mal qui ne les laisse jamais en repos. Alors, peu importe que le rythme soit assez lent, que la seule scène d’action soit bien en-dessous d’autres de cette saison, que le visage de la Stryge fait très... masque en latex, ou que le duel final soit un peu précipité, cet épisode creuse plus profondément la douleur des personnages, la meilleure chose à faire pour faire durer une série.

Supernatural 1 18 2

La critique d'Estuaire44 : 

De toutes les familles d’épisodes de Supernatural, celle explorant la jeunesse des frères Winchester est sans doute celle qui m’intéresse le moins. Je pense qu’il aurait été bien plus subtil de nous faire percevoir leurs traumas passés via leurs répercussions sur leur relation et attitudes présentes.

Aussi réussi soit l’opus, opérer par flash back c’est tout faire pour que le pathos apparaisse bien à l’écran, de la manière la plus misérabiliste possible. Ceci-dit je reconnais que les deux adolescents qui représentent Sam et Dean jeunes sont très bien choisis.

Supernatural 1 18 3

Anecdotes : 

  • Cet épisode est égalemment connu sous le titre français L’épidémie, un poil moins révélateur que La Stryge.

  • À la fin, les caméras sont visibles sur l’Impala. À l’entrée de Fitchburg, le nom de la ville est écrit sur le panneau de bienvenue, mais celui précisant le total de la population indique l’orthographe Fitchberg. Quand les deux frères rencontrent le médecin et discutent avec l’infirmière, on aperçoit le micro dans un miroir, au dessus de la tête du docteur. La dame âgée appelle sa croix un crucifix, or une croix ne devient un crucifix que si Jésus y est représenté.

  • Lors d’un des souvenirs d’enfance, Sam regarde le dessin animé Cosmocats (Thundercats, 1985-1986), qui raconte la lutte de valeureux hommes-chats contre d’affreux mutants. Un reboot fut réalisé en 2011. Dean joue lui au jeu vidéo Andro Dunos, un shoot them up vertical sorti en 1992 sur Neo-Geo AES.

  • Durant l’épisode l’on entend : "Rock Bottom’’, d’UFO, quand les deux frères discutent dans l’Impala en début d’épisode, et "Road to Nowhere’’ d’Ozzy Osborne, lors du départ.

  • Le titre original de l’épisode est une référence à un très célèbre roman de Ray Bradbury, Something Wicked This Way Comes (1962). Intitulé en Français La Foire des Ténèbres, il raconte comment des enfants sont confrontés à une fête foraine maléfique et à une créature des ténèbres. Constance M. Burge donnera le titre exact de ce roman (en remplaçant "wicked" par "wicca") au pilote de sa série Charmed.

  • Dans le folklore, une Stryge est un démon ailé femelle, aux hurlements très sonores. Elles se nourrissent surtout des nouveaux nés, qu’elles agressent au berceau, quand personne ne les surveille. Elles sucent sur place le sang des nourrissons ou les enlèvent. Leur nom a une racine grecque signifiant oiseau de nuit.

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19. LE TABLEAU HANTÉ
(PROVENANCE)

Supernatural 1 19 1

Scénario : David Ehrman
Réalisation :
Phil Sgriccia

- Why are you trying so hard to get me laid?
- Why are you trying so hard to *not* get laid?

Résumé :

Un couple est sauvagement assassiné au rasoir, alors que tout chez eux était bouclé. Les deux frères Winchester partent enquêter. Ils sont persuadés que le tableau acheté par les victimes le jour de leur mort n’est pas étranger au drame. Parallèlement, Sam fait la connaissance de Sarah Blake, une spécialiste en art...

Le must, ou comment un meurtre sanglant peut-il devenir artistique...

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Le must de la saison chez les loners (avec Faith), et un des meilleurs épisodes de la série. Il exploite le thème certes commun de l'objet maléfique, mais quelle maestria dans le traitement de David Ehrman ! La pâleur hiératique des personnages du tableau introduit dès les premières secondes un sentiment de frayeur qui ne lâche plus jusqu'à la dernière scène. Sarah Blake est un des meilleurs personnages secondaires féminins de la série, et pourtant il y en a des tonnes, de même que Taylor Cole est une des meilleurs guests. Ce personnage donne une force supplémentaire à l’épisode qui est déjà merveilleux. Déjà, l’intro, bien sanglante comme d’habitude, donne le ton...

Cet esprit fou qui semble indestructible donne pas mal de sueurs froides à nos bros qui ont bien du mal à tenir la cadence, un de leurs adversaires les plus terrifiants, interprété de manière époustouflante. On retrouve tous les ingrédients nécessaires à la réussite d’un épisode : action (la scène finale), humour (le dîner entre Sam et Sarah, les habituelles répliques de Dean), horreur (les meurtres, le cadavre d’Evelyn, à nouveau la scène finale) et surtout suspense : la coda, le briquet qui refuse de s’allumer, les mouvements du tableau, les meurtres où la production semble décidée à ne pas faire dans la demi-mesure question faux sang, les échecs répétés des W2... la tension est permanente, et explose lors de la tornade finale, véritable tour de force horrifique, et en cette saison, un des rares mano a mano terminal à ne pas paraître hâtif ou décevant. Le scénario est rempli de fausses pistes, bien malin qui aura deviné le twist final. La réalisation est à la hauteur : angles de caméra inspirés, effets spéciaux corrects. Que du bon, donc !

Reparlons un peu de la volcanique Sarah Blake, LE personnage secondaire de l’épisode. Son petit jeu de séduction avec Sam est très agréable à suivre, émouvante sans sombrer dans la guimauve. On ne peut que regretter que le personnage n’apparaisse que dans cet épisode, on aurait pu avoir de grandioses retrouvailles. Prendre une actrice aussi magnifique que Taylor Cole (spectaculaire apparition en robe noire) a son revers : le spectateur mâle peut ne plus prêter attention à ce qui se passe pour la dévorer des yeux. Quelle merveilleuse idée qu'elle tienne un rôle actif dans la situation, et accepte de se jeter en plein cœur du danger avec son nouveau chéri, c'est magnifique, c'est beau, ce n’est pas méga réaliste, mais sa fougue emporte tout. Véritablement un des premiers grands personnages féminins de Supernatural, reconnus pour envoyer pas mal de bois de chauffe. Cole a un vrai talent de comédienne, et l'alchimie avec Jared Padalecki est une évidence. Tout au long de l'épisode, on s'amuse de leur pas de deux désynchronisé, où Sam ne cesse de ralentir quand la damoiselle tente d’accélérer les choses (les interventions de Dean pour décoincer son frérot sont désopilantes). Un triangle gagnant, et on a vraiment envie de traiter Sam de crétin pour autant atermoyer, mais cela fait partie de la dure vie de héros ténébreux...

Supernatural 1 19 2

La critique d'Estuaire44 : 

Épisode très relevé, avec des scènes sinistres ou horrifiques particulièrement goûtues. Le langage visuel s’exprime pleinement entre le sympathique tableau (un chef d’œuvre dans son genre) ou le mausolée familial et ses jolies poupées mortuaires, quelle charmante idée. Jodelle Ferland apporte son impact coutumier au très dérangeant spectre enfantin, elle est une parfaite invite pour la série.

Nombre de rebondissements ponctuent efficacement ce récit mettant en avant la tradition des tableaux ouvrant sur d’autres mondes, tout comme ce fut le cas avec les miroirs de Bloody Mary. Le final se montre haletant au possible. Rien ne manque au succès de l’opus, y compris une superbe rencontre, avec la sublime et très attachante Sarah.

On apprécie que le récit ne joue pas la carte du mélo qui verrait un Sam tiraillé entre Sarah et la Chasse avec son frère, ce ne serait pas crédible. Sarah permet aussi d’introduire la technique de narration toujours efficace qu’est la découverte du monde des héros par une tierce personne néophyte. Cela fonctionne ici à la perfection, ce qui démontre à quel point cette première saison aura su bâtir un univers solidement établi.

Supernatural 1 19 3

Anecdotes : 

  • Épisode égalemment connu sous le titre français Le tableau maudit.

  • Lorsque Sam et Dean sont assis dans la voiture près de la galerie d’art, on peut voir un microphone sur le tableau de bord. Sam indique que les Telesca sont morts il y a quatre jours, la nuit suivant l’achat de la peinture. Mais il est déclaré suite que le portrait est resté en magasin jusqu’à il y a un mois, quand les Telesca l’a acheté. Les deux versions ne correspondent pas. Quand Evelyn retire ses lunettes, leur positionnement change après un aller retour de caméra. Il est visible que le tableau n'est pas une peinture mais une photographie retouchée.

  • La plaque d’une des voitures en stationnement, filmées en début d’épisode, indique « The Krip », un clin d’œil au showrunner de la série, Eric Kripke.

  • Taylor Cole (1984) a été mannequin avant d’obtenir un rôle dans la série Summerland. Elle est également apparue dans : NUMB3RS, Les Experts ou encore Heroes. Elle maitrise parfaitement le français.

  • Née en 1994, la jeune Jodelle Ferland est déjà une icône des productions fantastiques, étant apparue avec succès dans nombre de séries (Smallville, Kingdom hospital, Dark Angel, Stargate Atlantis) et de films du genre (Twilight, Silent Hill, Bloodrayne, Le Peuple des Ténèbres…).

  • Au cours de l’épisode, on entend : "Night Time’’ de Steve Carlson, sur scène, au bar, et "Bad Time’’ de Grand Funk Railroad, avant que Sam ne demande à Dean de couper la radio.

  • « Daddy dearest isn't here. » déclare Dean, il s’agit d’une référence au film Mommie Dearest (Maman très chère, 1981), racontant les relations difficiles entre l’actrice Joan Crawford, interprétée par Faye Dunaway, et sa fille adoptive. Le film a été massacré par la critique mais est devenu culte auprès d’une fraction du public, notamment pour les scènes mémorables où Crawford détruit son jardin à la hache ou devient folle de colère quand sa fille utilise un cintre en fil de fer. Dean fait aussi référence à Da Vinci Code (évidemment !).

  • Le metteur en scène Philip Sgriccia déclare considérer que les excellentes performances des deux invitées du jour, Taylor Cole et Jodelle Ferland, expliquent plus que tout autre élément le succès de l’épisode. Il raconte que Taylor Cole s’est particulièrement bien entendue sur le tournage avec Jared Padalecki et Jansen Ackles, avec lesquels elles partageaient le même sens de l’humour et des origines pareillement texanes. Un prolongement de la romance entre Sam et Sarah fut envisagé, mais il fut finalement estimé que la mort de Jessica était encore trop récente pour cela.

  • Le responsable des décors de la série, George Neuman, indique apporter un soin tout particulier aux différents motels dans lesquels font halte les Winchester. Il veille toujours à ce que ces chambres s’organisent autour d’un thème et d’une atmosphère à chaque fois différents. Il considère que le motel disco de Le tableau hanté demeure l’une de ses plus belles réussites.

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20. LE RETOUR DES VAMPIRES
(DEAD MAN'S BLOOD)

Supernatural 1 20 1

Épisode Mythologique

Scénario : Cathryn Humphris & John Shiban
Réalisation :
Tony Wharmby

- You know, we could have some fun. I always like to make new friends. [Kisses Dean]
- Sorry. Don't really stay with a chick that long. Definitely not eternity.

Résumé :

Daniel Elkins, un ami de John Winchster se fait assassiner par une bande de vampires. Ces derniers lui dérobent une arme qui pourrait tuer n’importe quelle créature : le Colt. Avec l’aide de ses deux fils, il va tenter de récupérer l’arme pour s’en servir d’arme contre le démon qui à tué Mary...

Offre du jour : une transfusion sanguine gratos.

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Dead man's blood se laisse voir avec plaisir. Kripke fait tout pour se démarquer de l'écrasante influence de Buffy et des grands romans du genre, de Stoker à Stéphanie Meyer. C'est ainsi qu'il envoie balader tout le côté rituel (croix, pieu, soleil), et utilise un moyen attesté dans la littérature, mais peu connu du grand public, de se débarrasser des Fils de la Nuit (sang de cadavre). Intéressant, mais ce parti pris tournant le dos à la mythologie habituelle est un peu excessif. À un moment, on a peur qu’on nous sorte quelque chose du style « Pour les tuer, il faut leur arracher le nez ».

Efforts méritoires, mais sans être connaisseur du genre, on coince devant une vision assez misérabiliste des vampires, ici en voie d'extinction, et d'une intelligence que l'on va qualifier de peu étendue, ce qui les désacralisent trop. Les auteurs auront toujours du mal avec les vampires, le pire sera dans la sixième saison où l’on découvre... qu’on peut se « dévampiriser » grâce à une espèce de médicament. Non, mais ça va pas ?! Toutefois, le côté série B marche très bien avec hémoglobine et sexualité torride à tous les étages, jusqu'à un excès franchement joyeux. Peut-être regrette-t-on simplement des bad guys demeurant à l'état de silhouettes, malgré le cabotinage assez jouissif de leurs interprètes. Pour le coup, on est loin de Sunnydale. On aurait bien aimé voir ce que les W3 auraient fait si Angelus avait pris des vacances dans le coin tant dans le côté sadico-saignant que dans ses perverses (et terriblement justes) analyses psychologiques.

Malgré une opposition faiblarde, le récit captive grâce à la Triple Alliance des deux frères et du papounet. Jeffrey Dean Morgan confirme la justesse de son casting, en montrant la rudesse et l'affection intériorisée de John. Entre les trois acteurs, cela crépite de partout, notamment dans la grosse scène de dispute où gentil Sam fait sa crise devant papa. Les fêlures familiales sont le vrai sujet de l'épisode, et leur entente forcée déploie pas mal de tensions. L'histoire en elle-même (casser les vampires) a beau être simplette, il y a un bon suspense lors de chaque affrontement. Cet épisode contient de plus des informations essentielles pour la suite de la série :  l'arme-qui-va-exploser-ce-qui-sert-de-gueule-au-méchant-démon, plus communément appelé « Colt » sera maintes et maintes fois utilisé ; son effet est spectaculaire ! Bien, voilà la p'tite famille réunie, prêt à plonger dans un finale de saison que l'on pressent saignant et bien catastrophique. Chouette.

Supernatural 1 20 2

La critique d'Estuaire44 : 

Les Vampires de Supernatural ont triste mine : les crocs sont ridicules tandis que point de vue intellect et aura maléfique, on se situe loin de l’Angelus de Joss Whedon, c’est certain. La rencontre avec la haute figure du Vampire aurait dû constituer le thème central d’un épisode, or ici il compose vraiment la cinquième roue du carrosse. Le Clan n’est là que pour permettre la découverte du Colt, qui va devenir l’un des artefacts les plus importants et populaires de la série, mais aussi d‘arrière fond aux dissensions familiales des Winchester père et fils.

De ce point de vue, l’épisode se révèle captivant et parfaitement interprété. Formidable prestation de Jeffrey Dean Morgan, totalement immergé dans son rôle, mais les Ackles et Padalecki sont à la hauteur. La famille Winchester, entre fêlures et amour viscéral, demeure un sujet inépuisable ; on aime que Supernatural ne soit pas un simple Formula Show, ne se contentant pas d’aligner les Monstres de la semaine.  L’épisode annonce efficacement le final, on sent bien que c’est lancé pour la grande explication de gravures.

Supernatural 1 20 3

Anecdotes :

  • Cet épisode est égalemment connu sous le titre français Le sang de l’homme mort, soit la traduction exacte du titre original.

  • John indique que le Colt fut forgé en une nuit lors de la chute de Fort Alamo, durant le passage de la Comète de Hailey. Mais ces évènements sont respectivement survenus en 1836 et 1835. Le nom Daniel Elkins est mal orthographié dans le journal de John : Daniel Elkin. La machette tenue par Sam disparait mystérieusement entre le moment où il quitte la résidence des vampires et celui où il atteint la voiture.

  • Dans la repaire des vampires, on entend la chanson Strange Face of Love (Tito and Tarantula). Elle est tirée du film From Dusk Till Dawn, qui mettait également en scène des vampires (1996).

  • On découvre le Colt mystique, tueur de Démons (et de toutes autres formes d’existence), qui va devenir l’un des principaux artefacts de la série, tour à tour perdu puis récupéré par les Winchester. Ceux-ci tueront le Démon aux Yeux Jaunes grâce à lui, mais même son pouvoir se révèlera impuissant face à Lucifer.

  • On apprend que l’Impala fut offerte à Dean par son père, mais l’historique de celle-ci sera plus tard développée. C’est Dean, revenu dans le passé, qui incitera John à l’acheter.

  • "Sounds more like That's Incredible than Twilight Zone’’, déclare Dean. That’s Incredible est une émission de téléréalité montrant des faits étonnants mais bien réels (1980-1984). L’équivalent français en fut Incroyable mais vrai, présenté par Jacques Martin (1980-1983). Twilight Zone (La Quatrième Dimension, 1959-1964) est une anthologie cultissime de Science fiction qui, a contrario, est notamment connue pour ses altérations de la réalité.

  • Le tournage de l’épisode fut momentanément interrompu par la police, des gens du voisinage ayant cru à la présence de vrais tireurs.

  • Eric Kripke déclare qu’initialement il ne voulait pas de vampires dans Supernatural, car Buffy contre les Vampires avait déjà exploité au mieux le sujet et qu’il voulait affirmer l’identité de sa propre série. Puis le déroulement de la saison le rassura sur ce point, tandis que les fans lui demandaient fréquemment quand il y aurait un épisode consacré aux vampires. Finalement il se rangea à cet avis, pensant qu’il était amusant, pour le dernier monstre avant le final de saison, d’avoir recours à un grand classique.

  • Le modèle du Colt est le Texas Paterson de 1836, soit le tout premier révolver historiquement conçu par Samuel Colt. Pour en avoir le modèle exact, la production fit appel à un grand armurier de Vancouver possédant un exemplaire de chaque révolver existant. Une réplique fut fabriquée à Los Angeles, conçue pour tirer à blanc.

  • L’inscription latine sur le Colt est Non timebo mala : je ne craindrai pas le Mal.

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21-22. DÉLIVRANCE
(SALVATION/DEVIL'S TRAP)

Supernatural 1 21 1

Épisode Mythologique

Scénario : Sera Gamble & Raelle Tucker (1re partie) et Eric Kripke (2e partie)
Réalisation :
Robert Singer (1re partie) et Kim Manners (2e partie)

- Where's our father, Meg?
- You didn't ask very nice.
- Where's our father, bitch?

Résumé :

Sam, Dean, et John ont enfin le Colt, l’arme qui pourrait tuer n’importe quelle espèce démoniaque ! Mais Meg, de retour, cherche à s’en emparer, et commence à tuer tous les amis des Winchester, clamant qu’elle va continuer jusqu’à ce que John lui remette la fameuse arme. Sam et Dean tentent de protéger une famille qui, selon les visions de Sam, se fera tuer par le même démon aux yeux jaunes qui a assassiné leur mère 22 ans plus tôt, tandis que John se rend au rendez-vous avec un faux Colt... Bobby Singer, chasseur et vieil ami de la famille, va aider les Winchester dans leur lutte. Ils vont en avoir besoin, car le démon aux yeux jaunes a enfin décidé de les affronter...

Un final explosif.
The Road So Far...

Supernatural 1 21 2

La critique de Clément Diaz et Cetp65 : 

Cette saison a moins brillé par ses scénarios que par sa mise en scène et son casting, mais avec Salvation/Devil's trap, les scénaristes ont décidé de frapper un grand coup. Eh bien, ça ne rate pas : ce double final de saison enchaîne les scènes d'anthologie à un rythme fulgurant, semant twists, cliffhangers, affrontements de fer et de feu, scènes de pure terreur, suspense fouetté avec frénésie, relationnel bien dysfonctionnel. On ne s'attendait pas à une telle intensité de la part d'une série qui n'a pas encore trouvé toutes ses marques et qui a toujours dû composer avec un budget léger. Mais l'équipe parvient à nous faire un feu d'artifice permanent grâce à son ingéniosité.

Les auteurs prennent un risque en séparant John de ses fils, mais miracle, les deux fronts d'attaque se voient impeccablement développés sans jamais se gêner. Nos deux bros ont une manière différente de gérer : là où Sam est sur le point de se laisser aller à des effusions, gagné par la peur de l'échec, Dean ne tolère aucun moment de faiblesse mais lui-même en fait trop en jouant au gars sûr de lui, masquant mal l'égale terreur qui l'anime. L’histoire est passionnante de bout en bout : du suspense à en mourir, une réalisation parfaite, de bons effets spéciaux (l’assassinat bien sanglant du prêtre en début d’épisode)...Que demander de plus ? Ah oui, de bonnes scènes d’action ! Pas de problème : L'affrontement dans la maison est d'un suspense phénoménal, avec la première apparition de ces yeux jaunes démoniaques. L’action et surtout le suspense sont aux rendez-vous durant le sauvetage, scène crédibilisée par les très bons effets spéciaux pyrotechniques qui rappellent le pilote. Erin Karpluck et David Lovgren (le couple sauvé) sont très convaincants. Il est juste de montrer Sam perdre les pédales sous le coup de l'émotion, se montrant soudain plus déterminé (jusqu'à la témérité) à tuer le grodémon que Dean. John mystifie par son sang-froid devant ce qui est une opération suicide. Car pour le coup, Meg (et son taiseux acolyte létal) se montre plus rouée et flamboyante que jamais. Nicki Aycox est fantastique de présence maléfique, de sourires mortels et sadiques, quelle beauté, et quelle opposition ! John qui tente d’échapper à Meg est une séquence prenante, haletante. Du grand art ! La première partie s’achève sur une scène à suspense qui nous laisse bouche bée...

Supernatural 1 21 3

... mais la deuxième va encore plus loin. Eric Kripke, totalement déchaîné, parvient à encore faire monter la sauce, et Kim Manners, par sa mise en scène de génie, provoque l'explosion. On assiste, hébétés, à un tas d’évènements haletants, riches en tout ce qui fait le succès de la série. L'auteur ne laisse aucun répit en mettant en scène le déni de Dean, qui dans un état psychique terrible, concentre toutes ses forces pour ne pas éclater et s'accrocher à une misérable lueur d'espoir. Mais surtout, le suspense et l’action sont encore plus présents, les fausses pistes se multiplient et...BOBBY ENTRE EN SCÈNE !!! C’est surtout cette dernière information qu’il faut retenir, car il s’agit d’un personnage clé, essentiel, INDISPENSABLE. Interprété par un Jim Beaver exceptionnel. L'arrivée théâtrale de Meg dans la maison de Bobby avec le retournement génial du cercle magique permet un premier acte jouant totalement sur la dynamique antagoniste entre les W2 et leur ennemie jurée : dialogues qui font mal, jeux d'acteurs en surchauffe permanente, réalisation en gros plans... la haine des personnages est quasi tangible. En revanche, cet épisode est le dernier où Nicki Aycox interprète le rôle du démon Meg (elle réapparaîtra dans la saison 4, mais cette fois-ci en tant qu’esprit). Elle passera le flambeau à l’encore meilleure Rachel Miner au début de la saison 5.

Pas de temps mort, on enchaîne sans transition à l'haletant et musclé sauvetage de John : la variété des scènes physiques et psychologiques, écrites et réalisées avec un talent égal, est vraiment étonnante. On reste scotché tandis que la mission Saving private John se déroule avec le retour de l'acolyte de Meg qui en fait voir de belles au Winchester, comptant impuissants, les balles du colt qui se réduisent comme peau de chagrin. Kripke ne laisse aucun répit et nous jette immédiatement après dans le formidable affrontement entre le Démon et les Winchester, via un foudroyant twist final (Jeffrey Dean Morgan dévore l'écran !) avec des dialogues assassins et des effets spéciaux aussi simples qu'efficaces. Cet affrontement psycho-épique est saisissant, avec en point d'orgue, la déchirante hésitation de Sam, piégé dans un horrible dilemme. Si vous n’étiez pas entré dans un état de rage profond à la fin de la première partie (et oui, il y avait encore la deuxième), là ça ne serait tarder : la saison se termine sur un cliffhanger insoutenable et un épouvantable carnage... Bon, Kripke a tout simplement pompé le cliffhanger de la saison 4 d'Alias (diffusé l'année précédente), mais on lui pardonne tant cette conclusion-choc est mirobolante. Alors, allez-y : CASSEZ LA TÉLÉ ! ARGH !

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La critique d'Estuaire44 : 

On trouve ici le même déferlement de rebondissements, de confrontations choc et de scènes percutantes que lors du mémorable arc Anasazi des X-Files, la référence absolue et séminale du final de saison, le tout dynamisé par un Kim Manners en pleine possession de son talent.

Le double épisode conclut idéalement la première saison tout en lançant les bases de la deuxième, en introduisant deux nouveaux protagonistes, qui vont y prendre toute leur place : Azazel le Démon aux Yeux Jaunes, enfin révélé et qui abordera désormais directement les Bros (mais la série est loin d’en avoir fini avec Meg), encore aujourd’hui considéré comme le meilleur Big Bad de Supernatural par de nombreux fans, et Bobby, qui va tenir lieu de deuxième père (et quasi d’Observateur) aux Bros. La saison aura su mettre en place les protagonistes et l’univers de la série, l’affrontement direct contre les Yeux Jaunes peut désormais débuter.

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Anecdotes :

  • Le récapitulatif de la saison est accompagnée par la chanson Carry on my Wayward Son, de Kansas. La fameuse formule de fin de saison, "THE ROAD SO FAR’’ est ici utilisée pour la première fois (ici en remplacement de l’intro habituelle (22 years ago...) mais uniquement dans l’épisode 21). Dorénavant, chaque finale de saison débutera par un panorama complet de la saison, accompagné par la chanson de Kansas : "Carry On My Wayward Son’’.

  • On entend également "Turn to Stone" de Joe Walsh, et "Bad Moon Rising" de Creedence Clearwater Revival.

  • On aperçoit plusieurs livres dans la chambre de John, dont Secrets de Danielle Steel.

  • Sur les treize balles forgées pour le Colt, six ont été utilisées préalablement à la série. En restent 7 moins une utilisée contre le chef des vampires ; restent donc six. Or l’on voit qu’il n’en reste plus que quatre. Quand Sam et Dean défont les liens de Meg, la corde tombe quasiment toute seule.

  • « Still here, John-Boy? » demande Meg. Elle fait référence à la série The Waltons (1972-1981), dont le jeune héros, John Boy, rêve de devenir écrivain plus tard.

  • Kripke voulait originellement tuer John dès la fin de l’épisode. Il serait alors mort dans les bras de ses fils, sortis à peu près indemnes du choc. Il estima ensuite que cela aurait constitué une conclusion trop sinistre pour cette première saison.

  • La cabane dans les bois fut entièrement construite par la production, constituant un décor jugé particulièrement important.

  • Kim Manners relata accorder un soin particulier que la scène de l’exorcisme de Meg. Il explique avoir consacré de nombreux efforts d’efforts pour que Meg, quoique attachée, demeure très présente et menaçante, bien aidé par la qualité de l’interprétation de Nicki Aycox.

  • Selon le chef décorateur George Neuman, le décor de la résidence de Bobby a exigé entre 5 000 et 6 000 livres !

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Crédits photo: Warner Bros.

Images capturées par Clément Diaz.

   

 

Épisode Mythologique

Scénario : Eric Kripke

Réalisation : David Nutter

- When I told Dad I was scared of the thing in my closet, he gave me a .45 !

- Well, what was he supposed to do ?

- I was *nine* years old ! He was supposed to say "don't be afraid of the dark!"

- Don't be afraid of the dark ? What are you, kidding me ? Of course you should be afraid of the dark. You know what's out there !

Il y a 22 ans, dans la maison de la famille Winchester, Sam et Dean sont encore des enfants lorsque leur mère se fait tuer par une force démoniaque qui enflamme la maison. Grâce à leur père, ils réussissent à s’en sortir. 22 ans plus tard, Sam (le cadet) vit avec sa petite amie Jessica et envisage déjà une vie toute tracée. Mais, un soir, Dean s’introduit chez lui pour lui faire part de ses inquiétudes : leur père à disparu depuis des jours alors qu’il était allé chasser des démons. Malgré quelques réticences, Sam accepte d’accompagner son frère à la recherche de leur père. La piste les mène à une petite ville où les hommes disparaissent...