Prémonitions (2007) Résumé : Linda Hanson vit une vie tranquille de mère au foyer aux côtés de son mari Jim et de leurs deux filles jusqu’au jour où Jim meurt dans un terrible accident. Mais, le lendemain, Linda le retrouve dans leur cuisine, vivant ! C’est le début d’une semaine de cauchemars. Critique : Un film de bonne facture qui montre que Sandra Bullock est aussi douée pour le drame que pour la comédie. La structure narrative pourrait faire penser à une version d’un Jour sans fin mais c’est plus complexe puisque c’est à l’échelle de la semaine que les événements surviennent. Cela ne le rend pas forcément facile à suivre. En outre, après un démarrage aux accents horrifiques, le film accuse une nette baisse de rythme. Le fantastique devient cosmétique. Le départ pose les bases : un couple, deux enfants, une belle maison, et des scènes de la vie quotidienne. Mennan Yapo prend dix minutes pour présenter l’univers qu’il va ensuite dynamiter. Cela commence par un étrange message de Jim sur le répondeur puis le shérif qui vient annoncer à Linda que son mari est mort. Sandra Bullock affiche un regard sidéré et la douleur qu’elle expose est poignante et, dans une atmosphère qui devient ouatée, la voix du shérif s’éloigne de nous. Sauf que le lendemain, pas de mère venue appuyer sa fille – il faudrait faire une étude sur l’absence des pères dans les films de Sandra Bullock – et un mari bien vivant prenant son café ! Le réalisateur parvient à nous mettre en condition avec une descente lente de l’escalier par Linda, juste rythmée par le craquement des marches, puis la radio en sourdine, quelques détails de-ci-delà (un vêtement qui traîne) et puis Jim. Sandra est magnifique dans son interprétation d’une femme en état de choc. Julian MacMahon a un rôle un peu ingrat puisqu’il ne peut pas partager les états de sa femme – ce qui évidemment est un procédé usité dans le fantastique ; que le sujet doute de ses sens, voir Le Horla qui est un modèle du genre – mais, dans son rôle d’un homme « normal », il apporte une vraie crédibilité. S’il n’est pas d’un charisme fou, il pèse quand même plus lourd que beaucoup des « amants » de cinéma de Sandra Bullock ! Et surtout, il varie son jeu, passant de l’homme dans ses habitudes à l’étonné, l’agacé, l’amoureux ou l’inquiet avec aisance. Linda revit donc une journée avec la sensation de l’avoir déjà vécue, ce qui doit être une sensation atroce que l’actrice rend plutôt bien. Le malaise s’installe, même lorsque le shérif bienveillant lui dit qu’on « va essayer d’éviter les accidents ». En fait, ces paroles apaisantes agissent comme du sel sur une blessure. Les scènes de la vie courante sont comme décalées et, du coup, menacantes. On atteint le climax de l’horreur quand Linda trébuche et tombe sur le cadavre d’un oiseau mort et se retrouve la main couverte de sang. Et le sang, ça tache et ce sont des taches tenaces. Alors, quand le lendemain, ni Jim ni le sang ne sont là mais que la famille est vêtue de noir, Linda réagit en niant la mort de son mari. La scène du cercueil est un moment horrible où les cris de Linda manifestent une confusion qui met le spectateur à cran. Interprétation sans faille ; Sandra n’a jamais été aussi loin dans la représentation dramatique. C’est très fort. Confusion qui entraîne son internement. C’est un moment très dur où la photographie très crue transforme le psychiatre, Norman Roth – a-t-on idée de s’appeler « Norman » quand on est psy ? – présenté en contre-plongée comme un monstre sadique. Il faut dire aussi qu’il est joué par Peter Stormare qui est à l’ambiguïté ce que Dracula est au vampirisme, un porte-drapeau. Même sa bienveillance est menaçante ! Et Linda se réveille dans son lit. Et son mari est sous la douche. Là, le film connaît une baisse de régime. Les événements ne suffisent plus à cacher l’impression de répétition. Si le jeu génial de Sandra évite tout ennui, on a tout de même l’impression d’avoir fait le tour et qu’il faudrait relancer l’intrigue. Ce que le scénario ne fait pas et l’entrée en jeu d’une autre femme, une blonde comme par hasard, apparaît plus comme un artifice faiblard que comme un élément dramatique. Lorsqu’un geste ravive la mémoire de Linda, celle-ci a une idée : se créer un tableau où elle note les événements survenus. C’est mettre de l’ordre dans le chaos et reprendre les choses en main. Voilà qui remet de la tension ! Elle comprend quand son mari va mourir et elle essaye de le sauver. Dommage d’avoir perdu du temps et de nous montrer Linda réglant avec une distanciation qui surprend sa mère (mais pas nous) les formalités. Utile, pas vraiment : il eut fallu dramatiser plus encore le final – ce que Mennan Yapo se résout à faire dans les dix dernières minutes ; c’est bien fait (même un peu exagéré) mais cela arrive tardivement - pour que le spectateur espère ardemment que Jim survive. Certes, ce n’est pas une mauvaise idée que d’introduire le doute chez Linda qui dit froidement à sa mère : « Si je laisse mourir Jim, c’est pareil que de le tuer ? » et Sandra a un regard d’une dureté sidérante qu’on n’avait jamais vu chez elle ! La scène avec le prêtre est bien filmée (par-dessus puis cadré aux épaules) et Jude Ciccolella est très bon dans son rôle mais qu’est-ce que cela vient faire ? Cette introduction de foi est agaçante et elle trouve son pendant avec l’ultime image, qu’on peut trouver contestable même si elle peut se défendre. Anecdotes :
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