Josey Wales hors-la-loi (1976) Résumé : Après le massacre de sa famille, un fermier se joint à un groupe de soldats confédérés irréductibles mais, à la fin de la guerre, il refuse de suivre ses compagnons survivants qui déposent les armes, et tombent dans un traquenard tendu par les Nordistes. L’homme prend alors la direction du Texas et bâtit une nouvelle vie ; cependant, il est toujours recherché comme renégat et sa tête est mise à prix. Josey Wales, un fermier du Missouri, assiste impuissant aux meurtres de sa femme et de son jeune fils et à l’embrasement de sa maison par une milice de l’armée nordiste, les Pattes Rouges, commandée par le capitaine Terrill (Bill McKinney). Laissé pour mort, Wales survit à ses blessures et enterre les siens. Désœuvré, il quitte ses terres et part avec un groupe de Confédérés sous la direction du capitaine Fletcher (John Vernon, le maire dans L’inspecteur Harry) pour assouvir sa vengeance. Le paisible fermier devient un tireur impitoyable. Quelques années plus tard, les troupes gouvernementales somment les rebelles de se rendre après la capitulation du général Lee. Wales, resté en retrait, assiste des hauteurs au piège mortel qui se referme sur ses camarades d’armes dans le camp de reddition. Son intervention et sa maitrise de la mitrailleuse n’empêchent pas la tuerie et il s’enfuit avec Jamie (Sam Bottoms), un jeune soldat blessé. Les deux hommes, devenus des hors-la-loi, réussissent à échapper aux troupes lancées à leur poursuite, avec le sanguinaire Terrill et le traitre ambigu Fletcher à leur tête. Après avoir semé le groupe au passage du bac, ils se débarrassent de deux chasseurs de primes mais, la nuit suivante, Jamie succombe à ses blessures. Wales fait la connaissance de Lone Watie (Chief Dan George), un vieux chef Cherokee, qui l’initie à la façon de penser de ses semblables, puis l’aventurier rencontrera sur sa route vers le Texas des personnages hétéroclites qui vont se joindre à lui après qu’il leur ait sauvé la vie : une jeune squaw Navajo, Little Moonlight (Geraldine Keams), qui souffre de l’injustice du monde blanc civilisé, puis des colons du Kansas, Grandma Sarah (Paula Trueman), une femme âgée qui compte rejoindre la ferme de son fils, et sa fille Laura Lee (Sondra Locke) que Wales sauve d’un viol….sans oublier un chien qui se prend des jets de chique toutes les cinq minutes ! Josey Wales trouve la quiétude dans cette nouvelle famille, mais des ennemis se dressent sur son chemin : des chasseurs de primes, le redoutable chef indien Ten Bears (Will Sampson) qu’il saura amadouer, et le cruel capitaine Terrill qui lui permettra de solder les comptes et de passer à une autre vie… Critique : Ce film, dont l’action se situe pendant et après la guerre de Sécession, est un véritable chef-d’œuvre et la vengeance, qui constitue le thème principal, est une nouvelle fois traitée avec maestria. Pendez-les haut et court, L’homme des hautes plaines et, beaucoup plus tard, l’oscarisé Impitoyable, sont également des westerns construits sur la quête de représailles. Tous avec le même succès. Josey Wales est un paisible fermier (première scène) et il devient rapidement un homme endurci dont le dessein est de venger sa famille et d’éventuellement se reconstruire. Le long-métrage dépeint un être humain assoiffé de vengeance, soulignée par des flashbacks du massacre, mais Wales réapprend progressivement à vivre sur les valeurs de son passé. La première partie montre un déferlement de violence qui présente un portrait peu reluisant des USA à la période de la guerre de Sécession. La seconde moitié est différente, car Wales se reconstruit et la vindicte, qui n’est plus son unique désir d’existence, fait place à une sorte de rédemption. Si le thème de la vengeance fait de l’ombre, surtout dans la première partie, aux autres idées du film, il n’est pas pour autant l’unique de ce chef-d’œuvre. La trahison a également une place de choix ; celle de Fletcher, bien entendu, qui sacrifie ses hommes pour de l’argent et une reconnaissance des Nordistes, mais surtout celle du sénateur Lane, un politique pourri et manipulateur (pléonasme ?), qui promet une grosse récompense pour la capture de Wales. L’absurdité de la guerre est également perçue, que cela soit entre le Nord et le Sud ou avec les Indiens. La dernière partie, et l’installation du groupe dans la ferme délabrée, met en relief les thèmes de la solidarité, de l’amitié et même de l’amour avec la relation de Wales avec la jeune prude Laura Lee (voir les informations supplémentaires). Ces approches ralentissent le rythme du film mais elles sont nécessaires pour témoigner de la rédemption du héros avant le grand final. Wales tente d’inculquer à la petite communauté des rudiments de survie utiles s’il devait s’absenter. L’aventurier a en effet assemblé autour de lui des laissés-pour-compte de la société, des exclus, et ils forment une sorte de nation idéale, ce que devraient être les USA comme le conçoit Eastwood ; la population de l'ouest américain en construction. Le film prend un aspect allégorique, et Wales, le personnage protecteur, dépasse les limites du héros de western. On retrouve toujours cette notion de protection dans l’œuvre d’Eastwood surtout vis-à-vis des femmes, comme dans Impitoyable ou Gran Torino. Ce ‘road-movie’ du Far-West approche les idées de la vie défendues par l’acteur, tels le héros solitaire taciturne et généreux, le refus de l’injustice, le rôle de la famille et la trace laissée dans l'histoire. Comme les magnifiques images, l’interprétation constitue une des grandes qualités du film, car tous les personnages sonnent juste, même les petits rôles ; je pense à l’épicier collectionneur de photos de truands, au chef sadique des Comancheros et aux deux chasseurs de primes aux mines patibulaires trompés par le faux délire de Jamie, par exemple. Ils sont tous excellents. Eastwood est au top, jouant un personnage qui parle peu mais dont les répliques claquent comme des coups de révolver. L’acteur joue pour la seconde fois un soldat de la guerre de Sécession mais dans Les proies, il interprétait un Nordiste. Bien que The Outlaw Josey Wales soit un western violent, dur, voire cruel, il n’est pas dénué d’humour et surtout d’humanisme, contrairement à L’homme des hautes plaines. Le traitement de cette violence place Eastwood plus proche de Sam Peckinpah que de Sergio Leone sans pour cela rendre ses deux westerns totalement crépusculaires. Josey Wales interpelle astucieusement sur les atrocités de la guerre et le sort des victimes en mixant des faits historiques et des épopées romancées. Il est indispensable de s’attarder sur quelques répliques que tout bon fan de l’acteur doit connaître. Elles donnent un cachet supplémentaire au film, surtout qu’elles interviennent souvent entre deux jets de chique aussi précis que les révolvers de Wales. Ainsi, lorsque le chasseur de primes lui avoue que tout homme doit vivre de quelque chose, Wales rétorque : « Dyin' ain't much of a living » ou lorsqu’il crache sa chique sur le costume blanc immaculé du charlatan aux mixtures suspectes : « How is it with stains? » [Qu’est-ce que ça donne sur les taches ?]. Il y a aussi la repartie lorsque Jamie veut enterrer les deux chasseurs de primes qui ont pris des pruneaux et du jus de chique : « To hell with them fellas. Buzzards gotta eat, same as worms. » [Au diable, les busards doivent pouvoir se nourrir, comme les vers]. Une réplique qui rappelle Sierra Torride… Les phrases cultes se bousculent et chaque fan a sa préférée. La mienne se situe vers la fin du film quand Wales conte fleurette à Laura. La jeune fille prétend que le Kansas sent le rayon de soleil, ce à quoi Wales répond : “Yeah, well, I always heard there were three kinds of suns in Kansas, sunshine, sunflowers, and sons-of-bitches.” On perd à la traduction évidemment [J'ai toujours entendu dire qu'il y avait trois sortes de soleils au Kansas : le soleil, les tournesols, et les fils de putes]. Du romantisme made in Eastwood ! Second western réalisé par Eastwood, après L’homme des hautes plaines, Josey Wales hors-la-loi fait honneur au genre, car tous les ingrédients et personnages de l’Ouest sauvage sont représentés et le film est une sorte de synthèse du western avec plusieurs scénettes qui peuvent être visionnées séparément. On retrouvera quelques passages similaires dans d’autres westerns d’Eastwood, comme l’attaque du début dans Pale Rider et l’entrainement au maniement des armes d’Impitoyable. Les seuls personnages honnêtes de l’épopée se retrouvent autour de Josey Wales dans une ambiance qui alterne entre optimisme et inquiétude. Tous les autres sont des crapules, que cela soit le sénateur pourri, les trappeurs violeurs, les chasseurs de primes cupides ou les Yankees assassins. Très acclamé à sa sortie, il y eut peu de critiques négatives pour The Outlaw Josey Wales, sauf ceux qui pointèrent du doigt que le film est basé sur un roman écrit par un membre du Ku Klux Klan (voir informations complémentaires), mais il reçut néanmoins beaucoup d’éloges parmi les autochtones américains pour sa représentation non stéréotypée des Indiens d’Amérique. Les 2h15 passent très rapidement et le film s’apprécie avec le même intérêt à chaque rediffusion grâce à des personnages extraordinaires, des images sensationnelles, des dialogues percutants, des scènes d’action à couper le souffle et un message existentiel, qui fait de ce film plus qu’un simple western, un véritable témoignage de la culture américaine. Un des meilleurs Eastwood qui est aujourd'hui considéré comme l'une des œuvres les plus profondes et les plus personnelles du réalisateur, car le film est une sorte de pivot dans sa filmographie rassemblant les thèmes que Clint mettra en scène tout au long de sa carrière future. Une référence incontestable du genre. Du cinéma comme on l’aime. Anecdotes :
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