LA CONJURATION DE CINQ-MARS
Volume 7 1. LA CONSPIRATION DU GÉNÉRAL MALET Date de diffusion : 23 février 1963 Résumé : Général républicain quoique d’origine aristocratique, Claude-François de Malet (1754-1812) rompt avec Bonaparte quand celui-ci établit le Consulat, puis l’Empire. Conspirateur largement chimérique, il est arrêté en 1808, mais s’évade en 1812, alors que l’Empereur est mis en difficulté en Russie. A l’aide d’une fausse annonce de mort de l’Empereur en Russie, il lance alors un coup d’Etat à Paris, le 22 octobre 1812. Les conjurés s’emparent du Ministère de la Police et de l’Hôtel de Ville, mais l’affaire échoue et Malet sera fusillé le 29 octobre. Le tumulte a néanmoins révélé la fragilité du régime impérial. Critique : De manière fort divertissante, c’est quasiment ce que l’on nommerait aujourd’hui un épisode décalé que nous propose ici La Caméra explore le Temps. En effet l’intrigue a la bonne de totalement embrasser le côté humoristique, voire surréaliste, de l’épopée à la fois surprenante et dérisoire du putsch entrepris par Malet. Sans que l’historicité du récit soit réellement sacrifiée, les auteurs mettent l’accent sur la petite ribambelle de personnages à la Federico Fellini formée par le général et ses improbables complices. Les comédiens en donnent à cœur joie, à commencer par un François Maistre particulièrement énorme. Décidément l’anthologie aura permis au grand comédien de briller par tous les aspects de son talent. Il ne manque rien à la fête, y compris l’humour involontaire, car dans le rôle du Général Dejean, Ministre de la Guerre et Président du tribunal condamnant à mort les conspirateurs, on reconnaît l’excellent Jacques Seiler. En 1967 celui-ci deviendra Desfossés, le fameux compère de Vidocq ayant une sainte horreur du « Rasoir national ». La production et la reconstitution de l’époque résulte une nouvelle fois de qualité. Le meilleur demeure sans doute la sidération s’emparant du spectateur devant une histoire aussi incroyable et pourtant vraie. A l’issue de cet authentique vaudeville, l’intervention de Castelot et Decaux, également très savoureuse, tombe à pic pour situer l’évènement au sein d’un Empire se découvrant soudain des pieds d’argile. Anecdotes :
2-3. LA VÉRITÉ SUR L'AFFAIRE DU COURRIER DE LYON Date de diffusion : 13 et 14 juillet 1963 Résumé : Le 28 avril 1796, sous le Directoire, la malle-poste Paris-Lyon transportant une forte somme destinée à l’armée d’Italie est attaquée. Les deux convoyeurs sont tués et l’argent dérobé. L’enquête menée par le juge Daubenton conduisit à l’arrestation d’un certain Lesurques en tant que chef des bandits. Il fut guillotiné avec ses supposés complices. Cinq ans plus tard le juge doit rouvrir le dossier du fait de révélations accusant un autre individu. Les règles juridiques d’alors empêchèrent une éventuelle réhabilitation de Lesurques, d’où une modification de la loi en 1867. Les débats sur l’identité du véritable ordonnateur de l’attaque donnèrent lieu à une importante littérature. Critique : Cet épisode déçoit car s’immergeant trop dans les méandres de l’affaire et du procès en résultant. On apprécie particulièrement l’étude des grands cas criminels quand ceux-ci évoquent leur époque, or cette dimension se voit ici réduite à la portion congrue. Les sujets ne manquaient pourtant pas, comme le fameux Assignats déjà bien dépréciés, l’incurie du Directoire, incapable d’organiser un convoi digne de ce nom, ou du profond dénuement de l’Armée d’Italie, que le jeune général Bonaparte est pourtant sur le point de transformer en fer de lance d’une République cernée par les monarchies coalisées. On aurait aussi pu tenter d’expliquer en quoi ce qui demeure un spectaculaire fait divers aura autant passionné nombre d’historiens. Mais les débats se centrent quasi exclusivement sur la question de la culpabilité ou de l’innocence de Lesurques, tandis que l’occurrence d’un double épisode se voit mise à profit pour examiner le processus judiciaire à la loupe, jusqu’à lasser. La narration se caractérise par la clarté pédagogique propre à La Caméra explore le Temps et les acteurs se montrent une nouvelle fois très convaincants (avec le décidément incontournable François Maistre en juge d’instruction). Mais l’épisode intéressera avant tout les passionnés d’histoire judiciaire. Anecdotes :
4. LE PROCÈS ET LA MORT DE CHARLES IER Date de diffusion : 2 novembre 1963 Résumé : L’autoritarisme et les vues religieuses de Charles Ier, roi d'Angleterre, d'Écosse et d'Irlande (1600-1649) lui valurent l’hostilité du Parlement et des Puritains anglicans. Il refusa que la monarchie devienne constitutionnelle, ce qui conduisit à la Révolution anglaise. A l’issue de plusieurs années de guerre civile, Charles Ier fut vaincu et arrêté par les troupes parlementaires, avant d’être décapité pour haute trahison, le 30 janvier 1649. Abolie, la monarchie fut remplacée jusqu’en 1660 par la République du Commonwealth d’Angleterre, qui devint rapidement une dictature puritaine dirigée par le Lord Protecteur Oliver Cromwell. Critique : L’épisode du jour présente bien entendu le mérite d’emmener le spectateur à la découverte d’évènements extérieurs à l’Hexagone, donc probablement moins connus de lui. De fait nous découvrons ici la destinée d’un roi dont le règne malheureux consacra l’affirmation du définitive du parlement anglais, un pivot de l’histoire politique de l’Occident. Comme toujours, La Caméra explore le Temps se révèle une merveilleuse leçon d’histoire, reconstituant personnalités et évènements avec une pédagogie n’étouffant pas le souffle d’une tragique épopée, réellement shakespearienne. Les seconds rôles se voient de même traités avec soin, n’étant pas sacrifiés à l’opposition centrale entre Oliver Cromwell et le roi. Ce duo se voit néanmoins porté par de magnifiques comédiens. François Chaumette apporte une froide et impitoyable résolution au futur Lord Protecteur, mais on retiendra surtout la formidable prestation de Michel Bouquet. Le comédien sait retranscrire toute la fragilité et l’irrésolution, mais aussi l’orgueil, de ce souverain tragiquement dépassé par le rôle que la destinée l’a appelé à tenir. Il s’avère particulièrement bouleversant de le découvrir enfin accéder à la grandeur à l’heure du supplice, l’Histoire s’accompagnant ici d’un beau portrait psychologique. L’intervention finale de Decaux et Castelot permet de compléter le tableau du règne de Charles Ier et de le mettre en perspective. Anecdotes :
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Volume 5 Date de diffusion : 24 juin 1961 Résumé : Après les Cents jours, en 1815, et jusqu’à sa mort le 5 mai 1821, Napoléon fut détenu sur l’île de St-Hélène, lointaine possession anglaise. Il resta jusqu’au bout entouré d’une poignée de fidèles, dont le Comte de Las cases, à qui il dicta ses mémoires. Les causes de son décès font l’objet d’une controverse, entre ulcère perforé à l’estomac et rigueurs de sa détention par son geôlier sir Hudson Lowe. Un empoisonnement à l’arsenic fut également évoqué par ses partisans. Critique : Figurant dans une anthologie historique française, l’épisode épouse naturellement avant tout le point de vue de Napoléon. S’il est écrit par Alain Decaux, André Castelot y apporta d’ailleurs certainement son écot, en grand spécialiste du crépuscule impérial. Non exempt de parti-pris à propos du bilan de Napoléon, l’opus demeure néanmoins d’une parfaite historicité quant aux péripéties et anecdotes ponctuant le séjour de Napoléon, tel que décrit par ses différents mémorialistes. La mise en scène pousse le soin du détail jusqu’à recréer avec précision le décor de Longwood House, résidence de l’exilé. La cour fantomatique de l’ancien conquérant se voit dépeinte sans fards, avec ses petitesses et ses trahisons. Ce grand intérêt historique se double d’un volet humain déchirant. En effet Raymond Pellegrin apporte une vraie humanité à l’Aigle déchu et dépeint avec sensibilité sa progressive décrépitude, aussi bien physique que morale. Alors que l’espérance d’un retour se mue en amertume et que son ulcère mal soigné le dévore, Napoléon doit également faire face à la froide hostilité et au mépris de son geôlier le gouverneur Hudson Lowe. Magistralement interprété par un Michel Bouquet rodant son futur Javert, Lowe suscite un duel structurant un récit auquel il apporte une formidable force dramatique en huis-clos. A travers les personnalités, ce sont deux mondes qui se confrontent, l’Anglo-saxon et le Latin, parachevant le succès de cet épisode particulièrement intense. Anecdotes :
2. L'AVENTURE DE LA DUCHESSE DE BERRY Date de diffusion : 3 octobre 1961 Résumé : En 1832, Marie-Caroline de Bourbon-Siciles (1798-1870), Duchesse du Berry, était la veuve du second fils de Charles X et la mère d’ « Henri V », le jeune prétendant légitimiste au Trône alors détenu par Louis-Philippe. Ayant fomenté une révolte contre ce dernier, en Provence et en Vendée, elle débarqua à Marseille le 28 avril 1832 pour en prendre la tête. Mais la Duchesse s’était illusionnée sur la popularité de son fils et l’opération tourna court. Après une cavale de plusieurs mois à travers la France, elle fut finalement arrêtée à Nantes et expulsée de France après un séjour en prison. Critique : Outre qu’elle s’avère agréablement datée (le tableau noir d’instituteur étant cette fois mobilisé pour la dynastie royale française), la savoureuse présentation de l’épisode par Alain Decaux et André Castelot se montre brillamment dialoguée. Il en va ainsi de l’opus lui-même, parfait exemple de l’art de Castelot pour brosser les grandes heures de l’Histoire de France, telles des pièces de théâtre fort réussies. Cette impression de théâtre filmé de qualité se retrouve dans la distribution, associant l’irrésistible Françoise Christophe à plusieurs comédiens rompus à l’exercice. Marcel Bozuffi nous régale ainsi d'un M. Thiers criant de vérité. Mais Castelot se laisse quelque peu emporter par la dimension évidemment très romanesque de l’épopée de de la Duchesse de Berry et nous en propose un portrait nous semblant légèrement entaché de parti-pris. Également favorisée par l’abatage de Françoise Christophe, la majeure partie de l’entreprise est montrée comme relevant quasiment de la comédie. Or ce que l’on a pu désigner comme la dernière guerre de Vendée aurait pu très mal tourner, et la Duchesse demeure une femme n’hésitant pas à troubler un pays déjà marqué par une Histoire tumultueuse, afin de satisfaire une ambition dynastique hors d’âge. Mais l’on comprend que le sujet ait pu séduire André Castelot, en effet, dès 1833 Alexandre Dumas relatait l’affaire dans La Vendée et Madame, tant l’aventure comportait de similitudes avec sa littérature. Anecdotes :
Date de diffusion : 9 décembre 1961 Résumé : Arrivé au pouvoir le 5 janvier 1762, le Tsar Pierre III mit fin à une guerre contre la Prusse, que la Russie était pourtant en passe de remporter définitivement, Berlin étant assiégée. Le Tsar fut inspiré par la grande admiration que lui inspirait le roi Frédéric II, mais son geste lui valut l’hostilité de l’ensemble de la cour moscovite. Sa volonté de modernisme le fâcha également avec le clergé. Six mois plus tard il fut renversé par sa propre épouse, Catherine II, au terme d’un coup d’état. Après avoir dû signer son acte d’abdication, il fut assassiné le 17 juillet 1762, dans des circonstances demeurées mystérieuses. Cela incita plusieurs agitateurs ultérieurs à se faire passer pour lui, dont Pougatchev. Critique : Le récit mis en scène par l’épisode se montre particulièrement catégorique, concernant aussi bien la réalité des prétentions de Pougatchev, que la responsabilité de Catherine dans la l’assassinat du Tsar Pierre. Ce ton très affirmatif paraît trancher avec les doutes encore maintenus par nombre d’historiens concernant la future grande Tsarine. On peut regretter ce relatif manque de distanciation, outre la complexité inutile consistant à agréger deux affaires complexes au sein d’un même épisode. On aurait préféré un plus grand développement de l’environnement international du règne de Pierre. Mais l’épisode séduit néanmoins par sa tonalité. En effet, s’il rejoint une certaine tradition d’une histoire russe particulièrement sanglante, l’épisode se caractérise par une sensualité marquée, du moins selon les normes télévisuelles de l’époque. Les mœurs dissolues et l’immoralité de la Cour impériale nous rappellent ainsi que Les Liaisons Dangereuses sont contemporaines à l’action, tandis que Nadine Alari (Catherine) et Marie-Claire Chantraine (Elizabeth Vorontsof, maîtresse du Tsar) jouent volontiers la carte de la séduction. En Tsar troublé, François Maistre confirme être l’un des meilleurs comédiens de l’anthologie, tandis que les amateurs de Chapeau Melon apprécieront la distinction de Pierre Berger en chambellan du palais. Anecdotes :
4. L'AFFAIRE DU COLLIER DE LA REINE Date de diffusion : 17 février 1962 Résumé : En 1785, le Cardinal de Rohan, épris de la reine Marie Antoinette, s'était laissé persuader par Jeanne de Valois, comtesse de La Motte, de se porter secrètement acquéreur, pour le compte de sa souveraine, d'un collier d'une inestimable valeur. Il acheta le bijou et le remit à un homme qu'il croyait être le valet de chambre de Marie-Antoinette. Il s'agissait en réalité d'une escroquerie montée par Jeanne de La Motte pour s'approprier le collier et vivre de la vente des pierres… Mais le considérable scandale éclaboussa aussi le Trône, le peuple ne croyant pas en l’innocence de Marie-Antoinette et Louis XVI ayant fait preuve d’un autoritarisme déplacé en faisant temporairement embastiller le malheureux Cardinal. Ce tumulte est désormais considéré comme préfigurant la Révolution. Critique : L’épisode constitue un exemple particulièrement éloquent de la qualité d’écriture de La Caméra explore le Temps. Certes les dialogues se révèlent aussi brillants que portés avec talent par une distribution toujours idéalement dans son emploi, dominée par la forte prestation de Giselle Pascale. On apprécie d’ailleurs que la série continue de laisser de côté la fausse bonne idée de doter ses personnages d’accents. Mais ce qui force avant tout l’admiration reste la limpidité de l’exposition d’une affaire très complexe, sans pour autant simplifier l’ordonnancement des évènements ou des enjeux. Grâce à la pédagogie coutumière de l’anthologie, l’Affaire du Collier demeure bien plus rigoureusement narrée ici qu’elle ne le sera jamais au cinéma. Par ailleurs la mise en scène de Stello Lorenzi sait pleinement saisir l’opportunité nouvelle signifiée par l’arrivée du Télécinéma. Les flashbacks et extérieurs ainsi introduits se montrent magnifiques, car tournés à Versailles et au Trianon, aussi bien dans les parcs que dans certains lieux emblématiques, comme la Galerie des Glaces. Ce soin du détail et de l’image se trouve dans les décors plus habituels, recréant notamment à l’identique les pièces du Palais de Rohan résidence du Cardinal (et actuel siège des Archives nationales). Son véritable lit se voit ainsi employé, ainsi qu’un ameublement reconstitué avec précision. Plus que jamais, La caméra explore le Temps entraine le spectateur à la découverte de l’Histoire. Anecdotes :
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