Don Camillo en Russie (1965) Résumé : Peppone annonce que Brescello va se jumeler avec une petite ville russe, Brochwyl, située elle aussi aux abords d'un grand fleuve, le Don. Furieux, Don Camillo parvient à s'inviter dans la délégation conduite par Peppone et se rendant en Russie pour parachever l'accord. Les deux compagnons vont tous les deux découvrir un pays très différent de ce qu'ils imaginaient, au cours de nombreuses péripéties. Le séjour est également marqué par la chute de Nikita Khrouchtchev, mais les Italiens parviennent à revenir sans encombre dans leur pays, même si Peppone doit être hospitalisé après une mémorable beuverie l’ayant opposé au maire de Brochwyl. Critique : Après la tentative vite avortée par Don Camillo Monseigneur de renouveler la saga en exportant brièvement l’action à Rome, Don Camillo en Russie se décide à passer au niveau supérieur, en se centrant sur la lointaine Union soviétique. L’opération s’effectue avec davantage d’intelligence. En effet, les amateurs de Brescello ont ainsi droit à toute une première partie rondement menée en Italie et qui, outre l’humour des situations et une ambiance désormais agréablement Sixties, insère déjà le thème central du film : l’URSS et sa perception asymétrique par Don Camillo et Peppone. Mais le corpus central du film correspond bien au séjour soviétique de nos héros et celui-ci séduit réellement par son abord finalement non manichéen du sujet. En effet nous ne nous trouvons pas ici dans le passablement fantasmé Tintin au pays des Soviets. Si la persécution religieuse, les mœurs politiques, ou l’immixtion dans la vie privée se voient justement pointés du doigt, cela s’opère toujours avec l’humour bon enfant caractéristique de la saga. Surtout, le récit sait différencier la population russe, présentée avant tout comme chaleureux et amical, de l’appareil d’état et de la propagande soviétiques. En définitive le message de film ne consiste pas tant en une dénonciation de l’URSS qu’en un rappel de la fraternité des peuples existant perdurant au-delà des rivalités politiques. Pour le reste, la trame scénaristique se contente de suivre les grandes étapes d’une célébration de jumelage, à peu près interchangeables quelque soient les pays concernées, et de les assaisonner de l’humour désormais parfaitement identifiable de la saga. L’ensemble pourrait résulter mécanique et prévisible, mais la complicité du duo vedette, même légèrement vieillissant, apporte toujours beaucoup d’allant aux scénettes divertissantes. Pour leur ultime aventure sous les traits de Gino Cervi et de Fernandel, on s’amusera davantage en compagnie de Peppone que d’un Don Camillo en permanence remonté et agressif, malgré la présence toujours apaisante de Jésus. Le registre d’arroseur arrosé et de paranoïa au sein du Paradis des travailleurs vaut au maire de Brescello de se positionner en véritable ressort comique du film (sans même parler de sa mémorable cuite !). Outre le fait qu’il permet de dater précisément les évènements, une circonstance toujours appréciable, la chute de Nikita Khrouchtchev permet de relancer une narration menaçant malgré tout de ronronner. Cette dramatisation soudainement impulsée aux évènements s’adjoint efficacement à celle induite par la découverte du pope. Celui-ci se voit joué de manière pittoresque par l’acteur suisse Paul Müller, qui accomplit effectivement l’essentiel de sa carrière en Italie. On regrettera toutefois le caractère artificiellement russe de décors italiens à peine retravaillés, ainsi que la réalisation très passe-partout de Luigi Comencini. Rituel incontournable des Don Camillo, l’amourette du jour semble également particulièrement improbable et artificielle, malgré le charme des jeunes comédiens (à commencer par la très belle Graziella Granata, figure du film de genre italien des années 60). La critique de l’Union soviétique apparaissait comme la plus immédiate et aisée, et l’on avouera une certaine frustration à ne finalement pas découvrir la revanche de Peppone aux Etats-Unis. L’approche irrévérencieuse du Bouclier du Monde Libre autoriserait en effet des scènes croquignolettes, tout comme le propose la même année Le Gendarme à New York dans ses meilleurs moments. Tel quel, Don Camillo en Russie constitue néanmoins une digne conclusion pour la saga classique des Don Camillo. Anecdotes :
Séquences cultes : Le tracteur soviétique Les réfugiés Le chantage L'arrivée en Russie Une annulation inattendue Peppone et Don Camillo nous quittent |
Don Camillo et les contestataires (1971) Résumé : Alors que les élections municipales approchent, rien ne va plus à Brescello : l’autorité de Peppone est contestée par les éléments gauchistes du Parti, tandis que Don Camillo doit faire face au jeune Don Francesco, tenant d’une Église résolument contemporaine, issue du concile Vatican II. Caterina (dite "Cat"), nièce de Don Camillo est également influencée par la vogue hippie touchant le village, tandi qu'une idylle se noue avec le propre fils de Peppone. L'impensable va survenir : Don Camillo et Peppone vont faire front commun, afin de contrer la génération montante ! Peppone est réélu maire, Don Francesco part pour une autre paroisse et l'histoire se conclue par le beau mariage de Cat et de son promis. Critique : Si on passe outre l'aspect moral douteux d'une entreprise visant à perpétuer par pur esprit de lucre une saga désormais dépourvue de son duo vedette après la maladie bientôt fatale de Fernandel, force est de constater que Don Camillo et les Contestataires ne constitue pas une catastrophe cinématographique. Le film doit ainsi beaucoup à l’adaptation de Gastone Moschin que l’on doit créditer d’avoir réellement accompli le maximum pour espérer réussir l’impossible : remplacer Fernandel. L’acteur italien s’immerge véritablement dans le rôle, a visiblement opéré toute une étude du jeu de son prédécesseur et anime l’ensemble du film en ne ménageant jamais sa belle énergie. Si, en définitive, il ne parvient jamais à réellement rivaliser avec son modèle, la production lui doit de demeurer à flot et de préserver une certaine décence, ce qui n’allait pas de soi au départ. Quasiment la seule non Italienne au sein de l’équipe, la magnifique Carole André apporte une appréciable touche de charme et de fraîcheur, tout en perpétuant la belle tradition des collaborations franco-italiennes de naguère. On reste malheureusement davantage dubitatif quant au jeu de nombre de seconds rôles, de même que l’américain Lionel Stander semble assez effacé dans sa reprise de Giuseppe Botazzi, dit Peppone. Sans être absolument fade, son interprétation fait que le duo vedette résulte plus inégal qu’il ne l’aura jamais été précédemment. Le scénario exploite une intéressante idée de base : faire s’engouffrer la modernité au sein de l’immuable Brescello. L’avènement du gauchisme maoïste et du concile Vatican II (mais aussi de la vague hippie) face au Communisme ouvrier et au Catholicisme social traditionnel, incarnés par les deux protagonistes est bien observée, de même que l’alliance de ces derniers pour y faire face. De même on se plait à découvrir l’irruption de la vie contemporaine d’alors au sein de la petite ville (voitures, vêtements, chevelures, électroménager, musiques…). L’avènement de la couleur accompagne idéalement ce mouvement, même si le choix d’une autre localisation de tournage que Brescello limite l’intérêt de la comparaison. Par contre, en s’insérant dans la continuité d’une déjà longue saga, Don Camillo et les Contestataires en subit inévitablement l’usure et de trop fréquentes péripéties ont un goût de déjà-vu, avec la circonstance aggravante de versions antérieures bien plus savoureuses (on a bien entendu droit à une énième romance débouchant sur un mariage). La perte du moteur que constituait le binôme Fernandel / Gino Cervi ne s’en fait que davantage ressentir. La mise en scène souffre également d’une forte présence des tics reconnaissables des films italiens de l’époque, comme ces brusques gros plans finissant par lasser. Au total Don Camillo et les Contestataires souffre bien de l’inévitable comparaison avec les opus précédents. Mais, pour peu qu’on lui laisse sa chance, il représente une sympathique curiosité se découvrant sans ennui, sachant évoquer en périphérie les tiraillements de l’Italie du début des 70’s, tandis que commence à s’abattre la chape des Années de plomb. Anecdotes :
Séquences cultes : |
Classement Don Camillo du pire film au meilleur film
6) Don Camillo Monseigneur : Le film tente initialement d’apporter une nouveauté en positionnant Don Camillo et Peppone à Rome, mais renonce vite à cette ambition pour retrouver un Brescello désormais bien balisé. La mise en scène de Carmine Gallone semble moins enlevée que lors du film précédent et les différentes scénettes s’insèrent sur une trame narrative peu constituée, hormis le vaudeville des deux protagonistes tâchant de retarder leur retour à Rome. Fernandel et Gino Cervi apportent toujours de la saveur et de la vitalité, mais le film reste le moins substantiel de la saga. 5) Don Camillo et les Contestataires : Si l’on met de côté les intentions douteuses de producteurs voulant perpétuer la saga après le départ dramatique de Fernandel, le film constitue plutôt une bonne surprise. L’irruption de la modernité au sein de Brescello, dans la vie courante aussi bien qu’en politique ou en religion, apporte une tonalité nouvelle. La convergence de Don Camillo et de Peppone en gardiens du monde ancien est également bien vue, tandis que Gastone Moschin accomplit une honorable prestation dans la soutane de Don Camillo. De manière légère, le film aborde les tiraillements italiens, au début d’une décennie particulièrement troublée. 4) Don Camillo en Russie : Le film a la bonne idée de renouveler la franchise en déplaçant une grande partie de l’action en dehors de l’emblématique village de Brescello. La mise en scène s’ouvre également sur l’époque en accueillant quelques éléments des Sixties (musiques…). Même si la trame scénaristique paraît ténue, la saga demeure toutefois fidèle à son humanisme, critiquant certes le régime soviétique, mais soulignant aussi les convergences entre les peuples. Gino Cervi et Fernandel entrent un tantinet dans l’âge, mais conservent une belle énergie. Les décors se voulant russes résultent souvent sommaires. 3) La Grande Bagarre de Don Camillo : Le départ de Duvivier et de son sens artistique aiguisé se fait d’emblée ressentir, même si la vivacité et la truculence de la mise en scène de Carmine Gallone contribue à apporter beaucoup d’humour et d’allant au film. Celui-ci demeure une comédie parfaitement divertissante, même si les scènes exceptionnelles se raréfient quelque peu vis –à-vis des deux films précédents. Fernandel et Gino Cervi se montrent toujours irrésistibles, un élément d’autant plus important que l’action se centrent encore davantage sur eux, au détriment des personnages secondaires. 2) Le Petit Monde de Don Camillo : Immense succès populaire, le film adapte à merveille les formidables nouvelles de Guareschi, renouant pleinement avec leur humour malicieux et pétri d’humanité. Magnifiquement réalisé par Julien Duvivier et dialogué avec finesse par René Barjavel, Ii constitue également un précieux témoignage historique sur un monde aujourd’hui quasi totalement disparu. Fernandel et Gino Cervi expriment d’emblée une chaleureuse complicité dans ce film exaltant la fraternité des hommes au-dessus des rivalités politiques. L’élection aurait pu se voir exploitée au-delà du simple affrontement entre les deux hommes. 1) Le Retour de Don Camillo : Le film maintient intact les qualités introduites par le premier volet de la série, avec de nombreuses scénettes de grande qualité, amusantes ou émouvantes. Le réalisateur Julien Duvivier tire également un excellent parti des possibilités offertes par un tournage s’effectuant en grande partie à Cinecittà. La chronique de la crue historique du Pô apporte une dramatisation supplémentaire au récit, tandis que le recours accru au réalisme merveilleux renforce sa saveur de fable. Le sermon dans l’église envahie par les eaux compose sans doute le sommet de la saga. |