Une messe pour Dracula (1970) Résumé : Trois bourgeois victoriens en mal de sensations fortes participent à une messe noire qui tourne mal et qui permet la résurrection du comte Dracula. Lequel entreprend de venger son serviteur victime des trois coquins. Critique : Avec ce film, la Hammer commence à entrevoir son déclin. Malgré une idée intéressante et originale, cette quatrième histoire du comte Dracula tourne un peu à vide et convainc nettement moins. La faute à quelques erreurs factuelles, à un casting moyen, à un final très médiocre et, aussi, à un Christopher Lee pas très motivé. L’idée de la vengeance n’aurait rien eu d’originale (c’était le thème du 3ème) si, pour une fois, le comte ne faisait pas preuve d’un peu d’altruisme. Il veut punir les trois imbéciles qui ont été complètement dépassés lors de la messe noire (une des meilleures scènes avec un Ralph Bates qui faisait ses débuts et montre déjà un charisme intéressant) et ont retourné leur peur en violence contre le serviteur du comte qui voulait ramener celui-ci à la vie. Ce qui est le cas au terme d’un procédé absolument pas canonique et, pour tout dire, disons, surprenant, pour rester courtois. Dracula va alors utiliser les enfants des trois bourgeois pour les retourner contre eux et les assassiner. Nouveau Monte-Cristo, Dracula collectionne les succès comme jamais ! Le portrait des trois Stooges est intéressant. Sous la respectabilité bourgeoise, ce sont trois jouisseurs. On lorgne vers une ambiance à la Dorian Gray ou à la Jekyll. William Fargood est un ivrogne à qui Geoffrey Keen donne à la fois une force brutale, un vernis social et le montre aussi répugnant que possible. Peter Sallis incarne Samuel Paxton, le suiveur de la bande que sa lâcheté conduira à sa perte au terme de scènes alternant émotion (on songe à Arthur Holmwood du Cauchemar) et horreur. Le dernier, Jonathan Secker, est joué par John Carson, que l’on connaît bien et qui tient là son meilleur rôle pour la Hammer ! C’est l’originalité de cet opus : les « héros » n’en sont pas. La victoire finale ressemble à celle du précédent film en encore moins bien. La faute des pères retombera sur les enfants. C’est très biblique comme problématique pour un film sur Dracula ! Mais c’est très intéressant car le film développe une thématique sur les luttes générationnelles et il est dommage que le film manque d’énergie. Pour les enfants, mis à part un jeune homme inintéressant, il y a deux jeunes femmes et l’on retrouve évidemment le schéma classique avec cette petite nuance que l’une d’entre elle, Alice, jouée par Linda Hayden, est soumise mais toujours vivante. Ce qui est d’ailleurs invraisemblable. La jeune actrice avait été choisie pour donner une image d’innocence et c’est pleinement réussi sur ce plan. Elle participe pleinement à l’action et est un atout pour le film. L’actrice n’a cependant pas le charme ni le talent de Veronica Carlson ou de Barbara Shelley. Quant à son fiancé, il est là pour se plaindre du père, tourner en rond puis devenir un héros dans les dix dernières minutes. On a connu des évolutions plus convaincantes ! Par contre, le rôle du policier, qui devrait être parfaitement anecdotique, puisqu’il ne sert à rien, est transcendé par Michael Rippert, un habitué de la Hammer qui parvient à s’imposer. La Hammer a fait des efforts pour ce film, notamment financiers. Les décors sont nombreux, soignés et parfaitement adaptés à chaque ambiance. On a ainsi le bordel très coloré (avec quelques nus fugaces, signe de l’évolution du studio vers plus d’érotisme et de violence), les appartements cossus de nos bons bourgeois et, bien sûr, la chapelle où se passe l’essentiel de l’action. Son habillage pour la messe noire est très réussi. Les décorateurs ont réussi à marier les ruines traditionnelles à un nouveau décor. Peter Sasdy hérite d’un rôle compliqué avec celui de réalisateur de cet opus. Il s’y applique et c’est plutôt pas mal. La manière dont il filme la prostituée qui danse avec un serpent (emprunt aux Deux visages du docteur Jekyll) est rapide, fluide, restituant l’atmosphère licencieuse et fin de siècle. Citons également la fuite d’Alice devant son père ivre qui est tendue et ne s’apaise qu’avec l’apparition de Dracula ! Le monstre devient le sauveur ! La mise à mort de Paxton est un moment vraiment horrible par la violence de la scène…même si le sang, d’un très beau rouge que Terence Fisher aurait adoré (on a aussi le miroir que le réalisateur affectionne) jaillit d’une manière pas tout à fait convaincante. Enfin, la défaite de Dracula est filmée avec une énergie maîtrisée, rapide car le monstre est brutalement désorienté mais brève pour en accentuer la force. Dommage alors que Christopher Lee en fasse trop et que ce final s’avère, au final, décevant. Un peu à l’image du film. Anecdotes :
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