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Les Malheurs d'Alfred (1972)Quelques messieurs trop tranquilles (1973)

Comédies françaises Années 70

Le Grand Blond avec une chaussure noire (1972)  par Phil DLM


LE GRAND BLOND AVEC UNE CHAUSSURE NOIRE (1972)

Résumé :

Le colonel Toulouse, chef du contre-espionnage français, est victime d'une machination montée par son rival le colonel Milan, qui ambitionne de le remplacer à la tête du service. Pour contrer Milan, Toulouse charge son adjoint Perrache de le piéger en lui faisant croire qu'un agent secret d'exception va enquêter sur ses agissements. Le super-agent est en réalité un civil choisi au hasard par Perrache à Orly, parmi la foule.

Critique :

Avant de passer lui-même à la mise en scène, Francis Veber a mené une brillante carrière de scénariste, dans son domaine de prédilection qu'est la comédie. Doué d'une imagination débordante, il a su trouver des idées originales, même si le cadre de ses histoires est toujours plus ou moins le même : un type « sérieux » est enquiquiné par un farfelu, souvent appelé François Perrin ou François Pignon.

Dans ce film réalisé par Yves Robert, la trame est légèrement différente : on retrouve bien le fantaisiste François Perrin (Pierre Richard), ainsi que le monsieur « sérieux » appelé Milan, interprété par Bernard Blier, mais les deux hommes ne se rencontrent jamais, Milan étant importuné à distance, par l'intermédiaire de son réseau d'espions, de ses micros et de ses caméras, alors que Perrin n'en est aucunement conscient. Le maître d’œuvre de cette machination, le colonel Toulouse, tire les ficelles dans l'ombre.

Le scénario est basé sur le fait, magistralement exploité par Toulouse, que les agissements communs d'un homme ordinaire vont paraître suspects dès lors que son observateur est persuadé que l'individu en question est en réalité un redoutable agent secret. Ainsi, Milan va construire peu à peu le piège mental dans lequel il va sombrer jusqu'à l'obsession.

Comme souvent avec Veber, on peut regretter que le rôle de la victime du farfelu ne soit guère valorisant, puisqu'il passe la majeure partie de son temps à regarder d'un air incrédule. Ainsi, le potentiel du géant du cinéma qu'est Bernard Blier n'est que partiellement employé dans ce rôle de Milan, tout comme l'année suivante celui de Lino Ventura dans « L'emmerdeur », où il jouera le rôle d'un tueur de la mafia appelé également Milan.

En revanche, Jean Rochefort peut s'en donner à cœur joie dans le personnage du colonel Louis Marie Alphonse Toulouse, chef des services secrets et homosexuel notoire, bien secondé par Paul Le Person, remarquable en adjoint magouilleur, à la limite de l'âme damnée, toujours fidèle à son patron même s'il désapprouve les velléités de Toulouse de faire tuer le Grand Blond.

Quant à l'acteur principal Pierre Richard, ce film a grandement contribué à lancer sa carrière de comique. Sa composition de violoniste distrait est mémorable, tout comme celle de Jean Carmet, qui interprète le naïf Maurice Lefebvre, ami de François Perrin et époux de Paulette (Colette Castel), la maîtresse hystérique de Perrin.

Les séquences avec Paulette et Maurice sont d'ailleurs parmi les plus drôles du film. Lors de ses ébats avec François, Paulette lui demande de faire le cheval. Perrin s'exécute et se met à hennir. Le problème est que les micros des espions ont tout enregistré et que Milan demande à écouter la bande magnétique dans une camionnette maquillée en véhicule de fleuriste, juste au moment où Maurice roule derrière en vélo ! La tête de Jean Carmet lorsqu'il dit à Pierre Richard : « Paulette couche avec un fleuriste » !

Et ce n'est pas fini pour le malheureux Lefebvre, qui arrive toujours à point nommé pour découvrir les nombreux cadavres d'agents secrets qui s'accumulent chez François, jusque dans le réfrigérateur, alors que Perrin ne se rend compte de rien !

Les autres scènes mémorables se déroulent entre Pierre Richard et Mireille Darc. Mireille Darc interprète Christine, une espionne à la solde de Milan, chargée de faire parler François Perrin lors d'une nuit d'amour sous haute surveillance. Qui ne se souvient de la robe ahurissante de Mireille Darc, qui lui laisse le dos dénudé jusqu'aux fesses ? Et de la séquence ou Perrin coince les cheveux de la belle Christine dans sa braguette ?

Christine se rend vite compte que François n'est pas un espion mais Milan, entré à fond dans le piège, refuse de l'écouter. Comme prévu par Toulouse, le malheureux Milan y laissera la vie. Quant à François Perrin, il sauvera sa tête grâce à Perrache, qui n'a pas obéi aux ordres de son patron tendant à laisser le Grand Blond se faire occire par les tueurs de Milan.

Le bienheureux François Perrin peut partir en vacances pour le Brésil, en compagnie de Christine, qui est tombée amoureuse de lui.

On peut penser que Francis Veber et Yves Robert ont non seulement voulu surfer sur la vague du film d'espionnage à la James Bond, en l'orientant sur un mode parodique (ce que fera très bien aussi Philippe de Broca dans Le Magnifique avec Belmondo), mais en ont profité, mine de rien, pour dénoncer l'ingérence des services secrets dans la vie privée des citoyens.

La distribution apparaît particulièrement brillante puisque, en dehors des acteurs principaux, tous excellents, on retrouve un groupe de comédiens particulièrement en verve dans les rôles secondaires, qui sont pour la plupart ceux d'agents secrets de grades subalternes. On citera Robert Castel, Jean Saudray, Roger Caccia, Jean Obé, Stéphane Bouy et Maurice Charrier.

Au final, le succès du film apparaît mérité, même si, en dehors des passages comiques irrésistibles déjà cités, le scénario n'a pas le même allant que sa brillante suite, qui atteindra en permanence les sommets du burlesque, alors qu'ici on ne les côtoie que de façon sporadique.

Anecdotes :

  • La robe sexy de Mireille Darc est une création de Guy Laroche. Pierre Richard n'avait pas été prévenu, afin que sa surprise se voit à l'écran.

  • Yves Robert avait pensé à Claude Rich pour le rôle de François Perrin. Idée curieuse puisque Claude Rich est plus coutumier des rôles de cyniques que des rôles de naïfs. Heureusement, Francis Veber lui a soufflé l'idée de Pierre Richard, dont le jeu était parfaitement adapté au personnage.

  • A noter l'originalité du générique, constitué de tours de cartes de Gérard Majax. On retrouve le célèbre prestidigitateur dans un petit rôle, lors de la fouille de l'appartement de Perrin, où ses talents sont très utiles au groupe d'espions.

  • La musique ludique de Vladimir Cosma, interprétée à la flûte de pan, reste un des marqueurs les plus puissants du film.

Séquences cultes :

Je suis pas bien François

C'est magnifique

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