Pendez-les haut et court (1968) Résumé : Accusé à tort de vol de bétail et de meurtres, un éleveur survit à un lynchage et redevient marshal pour traquer ses neuf bourreaux et les faire comparaitre devant la justice. Critique : Eastwood se montre d’abord réticent et il accepte ce rôle sur l’insistance d’Irving Leonard avec qui l’acteur a créé la société Malpaso Productions. C’est le quatrième western pratiquement d’affilée pour Eastwood mais cela sera le premier apprécié par la critique américaine. Ce western est américain et il a peu de choses en commun avec la trilogie du dollar, si ce n’est son sérieux et sa violence. La scène de la pendaison au début du film, juste avant le générique, ne laisse pas de doute sur le caractère brutal du long métrage. Jed Cooper en réchappe de justesse et le juge Fenton (Pat Hingle), qui doit faire régner la justice sur un immense territoire, lui octroie une étoile de marshal afin que les assassins soient jugés dans le cadre de la loi et qu’ils ne subissent pas une vengeance personnelle. Déterminé, le marshal Cooper se lance à la recherche de ses neuf bourreaux. Il retrouve dans un saloon Reno qui lui avait volé sa selle. Lors du face à face, Cooper a une réplique qui claque comme une bascule d’échafaud en montrant sa cicatrice : « When you hang a man, you better look at him. » Il continue sa traque, mettant le forgeron sous les verrous, mais il reste le chef en liberté, le capitaine Wilson (Ed Begley). Ne pouvant soudoyer le marshal par intermédiaire, il décide de l’abattre. En marge de cette chasse à l’homme, Cooper doit ramener le redoutable tueur Miller à travers le désert pour qu’il soit jugé (un excellent Bruce Dern) et il fait la connaissance de Rachel (Inger Stevens), une jeune et charmante veuve, qui recherche éperdument les assassins de son mari. Une idylle va naitre entre les deux personnages, un thème complètement absent des westerns spaghetti de Leone, qui représentent un univers d’hommes. Les meilleures séquences du film sont l’introduction, le duel avec Reno au saloon, la traversée du désert, le final au ranch mais le clou demeure les longs préparatifs et l’exécution publique des six condamnés et, presque simultanément, la tentative d’assassinat sur Cooper. On assiste aux émotions variées des six hommes avant que le bourreau leur passe froidement la cagoule et la corde au cou. Chaque condamné a un comportement différent, comme les deux frères qui se disent adieu ou l’endurci qui demande à ce qu’on fasse taire le long discours du prédicateur, qui implore le pardon de la foule. Puis le bourreau s’assure que tout est en place pour l’exécution simultanée et il attend le hochement de tête du juge Fenton derrière sa fenêtre pour lâcher la trappe. Entre-temps, le révérend a demandé à la foule de chanter des chants religieux. Une longue séquence très bien filmée qui ne laisse pas indifférent. La superbe musique de Dominic Frontiere sied parfaitement aux différentes scènes clés du long métrage et particulièrement de ce passage. Pour son premier western américain, Clint Eastwood interprète à nouveau un personnage froid et inflexible, déterminé ici à assouvir une vengeance. Il est impeccable comme l’est toute la distribution jusqu’aux rôles secondaires. Citons par exemple Dennis Hopper, formidable dans l’interprétation du prédicateur illuminé juste avant qu’il ne soit abattu. Le film met en évidence deux formes de justice ; la justice expéditive, sans procès, qui engendre des exécutions sommaires, dont est victime Jed Cooper au début du film, et la justice institutionnelle personnifiée par le juge Fenton. Celle-ci trouve ses limites lorsque Cooper ne peut sauver de la pendaison les deux jeunes frères complices de Miller mais innocents de meurtre. Le marshal rejette cette condamnation et préfère s’isoler avec une prostituée alors que tout le monde accourt en famille pour assister au spectacle de l’exécution. Si Cooper est avide de vengeance, il reste néanmoins humain et rentre en opposition avec le juge qui applique la justice sans discernement, condamnant à la peine capitale tout individu coupable du moindre délit. Le juge Fenton reconnaît cependant qu’il est faillible car il fait régner la loi sur un territoire immense dont les moyens sont insuffisants pour que la justice soit impartiale et égale pour tous. Cooper exerce la justice du juge, poussé par une soif de vengeance, mais il finit par demander et obtenir le pardon de Jenkins, un de ses lyncheurs au rôle minime, gravement malade. Malgré les divergences, Cooper acceptera alors de poursuivre la mission demandée par Fenton et de retrouver les deux derniers hommes ayant participé au lynchage. Injustement sous-estimé, Pendez-les haut et court est un superbe western réaliste, dur et prenant, à voir autant pour son scénario puissant que pour une interprétation impeccable qui souligne les difficultés auxquelles les Etats-Unis ont dû faire face pour instaurer une justice qui ne soit ni un simulacre, ni un acte de vengeance. Le film bénéficie d’un scénario bien structuré s’appuyant sur le système de justice américain de l’époque. Dans ce rôle de marshal, Eastwood présente déjà les prémices de l’homme solitaire qu’on verra dans L’homme des hautes plaines, mais son personnage soulève également la question de la vengeance individuelle en opposition aux lois souvent discutables, un thème cher à Dirty Harry. Anecdotes :
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