Saison 2
1. Le Début et la Fin - 2e partie (The Beginning and the End - Part 2) 2. Attention, chien méchant (Beware of the Dog) 3. Génome en péril (Sense and Antisense) 5. Un simple brin d’herbe (A Single Blade of Grass) 6. La Malédiction de Frank Black (The Curse of Frank Black) 7. Apocalypse 19, verset 19 (19:19) 8. La Main de Saint-Sébastien (The Hand of Saint Sebastian) 9. Le Jugement dernier (Jose Chung’s Doomsday Defense) 13. La Chambre du mystère (The Mikado) 14. Les Aliénés du diable (The Pest House) 15-16. Les Chouettes - 1re partie (Owls - Part 1) / Les Coqs - 2e partie (Roosters - Part 2) 18. Un enfant en Arcadie (In Arcadia Ego) 20. L’Apprentissage de l'ordinaire (A Room with No View) Cette saison marque un important virage vis à vis de la précédente. Chris Carter, accaparé par les X-Files (tournage de Fight the Future, migration de Vancouver à Los Angeles), doit s'éloigner d'une série dont il confie l'écriture et la production au surdoué duo Morgan & Wong. Comme ils l'ont toujours pratiqué sur les X-Files, ceux-ci vont fonctionner en autonomie. De plus ils arrivent avec leur propre conception de MillenniuM, incorporant davantage de complotisme, d'effroi millénariste et d'ésotérisme biblique, voire introduisant une dose d'humour. Ils peuvent d'autant plus facilement imposer cette vision qu'elle rejoint celle du diffuseur, la Fox souhaitant améliorer l'audience de la série. Jugées rebutantes, les histoires de serial killer deviennent nettement moins présentes, au profit de la découverte des arcanes mystiques d'un Groupe Millennium davantage hostile, à la mythologie soudainement développée. D'association policière et d'expertise, il devient une entité dont l'histoire occulte se confond avec celle de l'Humanité, confrontée à une Fin du Monde annoncée de longue date. Le parcours de Frank Black, mais aussi de Peter Watts, devient bien davantage initiatique, une évolution soulignée par l'entrée en scène de nouveaux personnages (le Patriarche du Groupe, Lara Means, l'Elder). La divergence antagoniste entre les deux amis, concernant la nature et les buts ultimes du Groupe Millenium, va connaître de stimulants développements. On peut estimer à bon droit que la série perd de sa spécificité et de sa quintessence, mais le talent toujours aussi vif du duo suscite plusieurs épisodes aux scénarios d'une indéniable qualité (quelques ratages aussi). Pari risqué, les épisodes décalés et comiques atteignent leur but, Glen Morgan parvenant à convaincre son frère, le brillantissime et très déjanté Darin (Humbug, Clyde Bruckman's Final Repose, Jose Chung's From Outer Space etc.) d'écrire pour MillenniuM, où son humour noir et subtil fait merveille. La mise en scène maintient son haut standard de qualité, de même que les partitions toujours inspirées de Mark Snow. On observe un recours plus fréquent aux superbes panoramas naturels canadiens, contribuant à une ambiance moins sinistre. Du fait d'une tonalité moins morbide et de la qualité d'ensemble, un succès critique est au rendez-vous, de même qu'un regain de l'audience, certes seulement relatif. Le public n'adhère en effet que modérément à une mythologie immédiatement complexe et protéiforme (pour ne pas dire floue), imposant une forme quasi feuilletonnante et difficile à suivre. Néanmoins Chris Carter demeurera vivement contrarié par le détournement opéré du projet initial de la série et de on atmosphère si particulière et extrême, au point de se refuser à écrire le moindre scénario pour cette saison. Effectivement de moraliste et civilisationnelle (et réaliste), l'Apocalypse devient bien davantage effective et relevant du Fantastique pur, teinté de religion. La famille de Frank passe par ailleurs au second plan. Lance Henriksen se montrera également opposé à l'évolution de Frank, moins central dans le récit du fait de l'émergence de Peter et Lara Means. Quoique toujours porteur des valeurs humanistes, il paraît également bien plus en proie au doute qu'auparavant, tandis que l'aspect mystique de son Don s'accentue. Aussi le retour de Carter et Spotnitz entraînera de nouveaux changements lors de la troisième période, tandis que le duo Morgan & Wong, également déçu par une audience moindre qu'espérée, se retirera complètement de la série. 1. LE DÉBUT ET LA FIN Malgré la traque rapidement organisée par Frank, aidé par Peter et le Groupe, le Polaroïd Man parvient à s’enfuir avec Catherine. Peter révèle alors qu’un combat plus large oppose le Groupe au dément criminel et à ce qu’il représente. Il lu offre alors de devenir un membre à part entière de l’organisation, tout en renforçant son accès informatique aux bases de donnée secrètes du Groupe, dont celle concernant le Polaroïd Man. Celui-ci torture psychologiquement Catherine, notamment en utilisant une poupée pour lui faire croire qu’il assassiné Jordan. Simultanément, il utilise des clichés comme indices, afin de tracer un subtil chemin conduisant Frank jusqu’à lui. Découvrant sa femme effondrée, Frank est saisi d’une rage homicide et aveugle et exécute le Polaroïd Man. Il assure ainsi la victoire ultime que ce dernier avait préùédité, car ayant laissant libre cours à la part la plus sombre de sa personnalité. Horrifiée par ce spectacle, Catherine décide de se séparer temporairement de lui, le temps que Frank parvienne à récupérer le fragment d’humanité qu’il a perdu. Black quitte alors la Maison Jaune et sa famille. The Beginning and the End apparaît comme un grand épisode inabouti, subissant de plein fouet le virage initié avec brusquerie par MillenniuM. Ce qui aurait du constituer un aboutissement, un sommet devient un épisode de transition entre deux visions très différentes de la série. Comme dans chaque intrigue de ce type, la mise en place de l’univers vient dévorer l’espace consacré à l’histoire du jour. Ce la aurait pu demeurer acceptable lors d’un affrontement opposant Frank à un quelconque serial killer, mais l’on traite ici de son duel avec le Polaroïd Man, le fantomatique mais néanmoins omniprésent grand adversaire de la première saison, d’où un amoindrissement particulièrement dommageable, au profit d’éléments exogènes de plus souvent malheureux. L’intervention des deux Geeks rigolards, en rupture totale avec la jusqu’ici admirable noirceur sans concession aucune de la série, tombe au plus mauvais moment imaginable, au cœur d’un drame dont ils viennent inutilement rompre l’intensité dramatique. De plus Roedecker et ses puériles simagrées ne suscitent pas non plus une irrépressible hilarité, tout ceci demeure bien pataud, loin de la pétillante fantaisie d’un Ringo Langley, l’évident mais inégalable modèle. Toute la mystérieuse et si peu substantielle relation entre le Polaroïd Man et le Groupe est également jetée à va vite on assiste en fait à un détournement de ce personnage au profit de l’instauration à marche forcée d’un conspirationnisme encore peu convaincant. Même présentée comme temporaire, la séparation entre Catherine et Frank se ressent avec incrédulité, tant elle semble soudaine, abrupte et d’une justification dont le ton pompeux tente en vain de dissimuler la faible crédibilité Qui peut imaginer qu’à peine de retour, Catherine impose à Jordan le départ de son père ?. Encore une fois les nouveaux tenanciers, ici directement à l’écriture, y vont à la truelle pour imposer rapidement leurs vues et l’éloignement de la cellule familiale permettant placer le focus sur l’évolution personnelle et initiatique à venir de Frank. Cette hâte transparaissant à s’emparer des commandes de MillenniuM apparaît quelque peu déplacée. Et pourtant, malgré ces malencontreuses digressions, l’affrontement entre l’esprit diabolique et Frank, certes essentiellement indirect, va susciter de précieuses étincelles. Le long quasi plan séquence montrant l’évacuation de l’aéroport par le ravisseur et sa victime, mis en scène avec un parfait tempo grâce au talent de Wright, se montre remarquable par l’opposition entre la ruse implacable du Polaroïd Man et la mobilisation de l’intelligence et du Don de Black, ainsi que de la police et du Groupe Millennium lui même. Obtenu de haute lutte, l’échec de cette formidable coalition ne s’en ressent qu’avec davantage de force encore. Le choix de Doug Hutchison s’avère évidemment parfait, l’acteur exprimant avec la conviction qu’on lui connaît l’insondable mystère que représente son personnage et sa dimension mystique, supérieure aux usuels tueurs en série. On lui doit les scènes les plus remarquables de l’opus, quand il décrit avec une sombre passion le processus malaisé par lequel Black retrouvera sa trace où lors des abominables tourments psychologiques qu’il inflige à Catherine. Le tout prend place au sein d’un de ces décors empreints de la folie de leur propriétaire dont les artistes de MillenniuM ont le secret, cette ancienne maison de Frank aux murs désormais recouverts des clichés subtilement pervers du nouveau maître des lieux. L mise en scène comporte d’autres excellentes idées, comme l’impressionnante révélation de l’approche de la Comète du Millennium où l’ultime souffle du dément criminel pris en photo par son propre appareil (génial et terrifiant Hutchinson, une ultime fois). Aussi intense et brutale soit-elle ion aurait apprécié que la confrontation directe des deux adversaires bénéficie de davantage de dialogue et de dramaturgie, mais le temps manque, hélas, conférant un aspect trop mécanique à cette scène clé. N’en demeure pas moins l’idée forte et pénétrante d’un Black ayant perdu le combat sur le plan moral, car cédant à sa pulsion de meurtre. Déchu, il fait preuve d’un doute nouveau et d’une fêlure s’avérant cette fois prometteurs. Néanmoins, peut-être aurait-il mieux valu que l’épisode soit écrit par Carter et Spotniz, achevant la vision et le parcours impulsés par la première saison, avant de passer à autre chose on aurait ainsi évité évitant ainsi une contorsion globalement dommageable.
2. ATTENTION, CHIEN MÉCHANT Alors que Catherine et Frank envisagent de vendre la Maison Jaune, Peter demande à ce dernier d’intervenir dans une petite agglomération rurale, où un couple a apparemment été victime d’une attaque de chiens errants. D’abord sceptique sur l’utilité de son intervention, Black découvre une ville où règne un vraie terreur vis-à-vis de ces chiens surgissant la nuit tombée. Ils ont toujours été là mais semblent déchainés depuis peu. Frank fait également la connaissance de Michael Beebe, un homme aisé venu s’installer récemment, en quête de calme. Après avoir lui même échappé à une attaque de la meute, Frank remonte le fil jusqu’à un mystérieux ermite vivant dans la forêt et semblant maitriser les chiens. L’individu s’avère constituer le dirigeant secret du Groupe, vivant auprès de pierres remontant aux origines ancestrales de l’organisation. Il révèle à Frank la nature mystique du Groupe Millennium, puis le soumet à une épreuve en le confrontant aux chiens surnaturels. Ceux-ci sont en fait en guerre contre la maison de Beebe, construite sur un lieu sacrilège. Frank et le Vieil Homme lui sauve la vie en brulant sa demeure. Renrté chez lui, Frank décide de ne pas vendre la maison. Beware of the Dog souffre d’un trop grand éclatement en trois segments aux tonalités tout à fait différentes sinon antagonistes, ne fonctionnant que fort modérément de concert. Malgré leurs indéniables qualités intrinsèques, il en résulte une impression de patchwork manquant de cohérence et de profondeur. La partie la plus convaincante demeure sans la première, gravitant autour de la meute infernale, avec un ton évoquant d’ailleurs volontiers les X-Files. En effet, alors que le Fantastique demeurait rare et sous-jacent en première saison (hormis la séquence Butler), on y verse ici pleinement et sans retenue. Hélas l’auteur l’évacue trop prestement, pour propulser le voyage sinaïtique de Frank parmi les reliques du passé du Groupe et sa rencontre avec le Vieil Homme, dont tout ce qui précède ne constitue en définitive que le prétexte. L’évènement suscite des sentiments mêlés. En effet R. G. Amstrong apporte une vitalité et une malice assez irrésistibles à un Patriarche doté d’un indéniable charisme (au point de d’altérer l’aura même de Black). Ses considérations philosophico-mystiques ne manquent pas de souffle, de même que la soudaine ordalie imposée à Frank apporte un fort moment de suspense, mais tout ceci demeure imprécis et parcellaire. Souligner, via la Vieil homme, que cet aspect reste bien supérieur à la lutte précédente contre les serials killers semble maladroit et assez déplacé. Un troisième composant vient encore se rajouter à cet ensemble déjà disparate, avec la prestaion totalement hors sujet de Randy Stone. On lui accordera un plaisant cabotinage dans le rôle de Beebie, en soi divertissante caricature de bourgeois bohême vaguement efféminé. . Beebe, plus divertissant que les Geeks de l’épisode précédent, aurait sans doute fait merveille dans un soap humoristique à la Friends, mais ici il ne fait que dénaturer l’atmosphère par ses interventions intempestives. L’humour demeure difficilement soluble dans MillenniuM. Quand à l’histoire de sa maison bâtie sur un lieu sacrilège il s’agit tout de même d’un poncif usé jusque à la corde pour permettre de trouver une porte de sortie au problème posé par la meute. On ne va pas jusqu’à nous raconter que la demeure s’étend sur un cimetière indien, mais c’est tout comme !
3. GÉNOME EN PÉRIL
Un homme, le « patient zéro », apparemment atteint d’une grave maladie, est soigné en urgence à l’hôpital de Seattle. Grâce à la complicité d’un chauffeur de taxi avec lequel il a sympathisé, il parvient cependant à s’enfuir quand deux hommes se présentant comme policiers viennent se saisir de lui. Les autorités font appel à Frank, qui retrouve rapidement le patient zéro, avec l’aide de Geibelhouse. Or les prétendus experts sanitaires se volatilisent avec le mystérieux patient, qui semble exempt de tout virus. Interloqué, Frank fait appel au Groupe, qui décide de l’aide même si Peter est furieux d’avoir été initialement mis à l’écart. Avec l’aide du chauffeur du taxi (qui sera assassiné) les deux hommes mettent à jour une officine qui, sous couvert de la recherche du Génome Humain, exploite l’ADN pour mettre au point un conditionnement des individus. Des sans domiciles fixes sont utilisés lors d’expériences aux conséquences dramatiques. Il s’avère alors que le patient zéro n’était autre que chef du projet, sans doute victime d’un accident. Redevenu lui même, il nie tout en bloc. Dépourvu de preuves, Frank doit renoncer, tandis que le Groupe se déclare impuissant. Lors du premier temps de l’épisode, on apprécie vivement un certain retour aux fondamentaux de MillenniuM (avec un Henriksen buvant visiblement du petit lait). On retrouve notamment la figure sympathique de l’Inspecteur Geibelhouse, toujours joué avec pittoresque par Stephen J. Lang, et une enquête somme toute classique, basée sur les subtils talents de Profiler de Frank. L’ensemble fonctionne fort agréablement, d’autant que le décor urbain de Seattle (enfin, de Vancouver), admirablement filmé pour en faire rejaillir l’aspect sinistre et anxiogène, apporte une variété bienvenue avec la forêt précédente. Cependant sourdent déjà des différences, comme l’absence totale de recours au Don (envers lequel Morgan & Wong demeurent dubitatifs) ou l’absence de Catherine comme point d’appui de Frank, renforçant son désarroi. On achève de basculer dans un autre domaine que celui de la première saison, lors de la soudaine extension du récit, complotasse et paranoïaque. De fait on retrouve clairement une tonalité proche des X-Files, y compris dans certains effets, comme la capacité des adversaires à se fondre soudainement dans le néant (la disparition d’un service entier sera reprise dans En ami) ou l’inévitable assassinat de la source de Frank. Outre que l’on puisse regretter une perte de spécifié de MillenniuM, ce choix s’avère aventureux, car obligeant à une comparaison directe. Or ceci ne tourne pas à l’avantage de l’épisode car l’enquête de Frank et Peter souffre de nombreux défauts, dont des enchainements trop accélérés (l’étiquette absurdement révélatrice, le chauffeur de taxi miraculeux etc.) ou un ton moralisateur virant vite au déclamatoire empesé. Trop d’éléments démurent nébuleux pour ne vas dangereusement approximer les facilités scénaristiques. Cette virtualité globale entrave l’installation d’une véritable intensité dramatique, alors que la direction d’acteurs virent à l’occasion dans le caricatural. Ce gâchis attriste véritablement car le scénario ne manquait pas d’atouts. La pirouette scénaristique de la véritable identité du patient zéro se montre efficace et joliment amenée. Surtout la relation entre Peter et Frank (toujours aussi excellemment interprétés) reste captivante, tandis que s’exprime toujours davantage la volonté d’emprise d’un Groupe désormais intrusif. Plusieurs concepts anxiogènes s’entremêlent, comme les appels téléphoniques anonymes reçus par Frank ou le recours à la légende urbaine des camions ou ambulances mystérieux. L’emploi du Projet du Génome Humain comme vecteur apocalyptique était judicieux et prometteur dans l’optique des grandes frayeurs suscitées par l’an 2000, d’autant que les deux évènements convergent dans le temps. L’épisode prend ailleurs le temps, d’expliciter ce concept (on remarqua au passage que Peter semble étonnamment versé dans le domaine de l’ADN et que le Groupe abandonne bien facilement cette affaire). Hélas, brassant autant de thèmes divers (jusqu’au génocide du Rwanda !) , l’opus semble représenter un patchwork trop ambitieux, oubliant en cours de route de développer une enquête tenant la distance.
Watts envoie Frank dans une petite ville où plusieurs enfants ont fait l’objet de maltraitance. La responsable de la garderie est superette, alors que la tension monte dans la population. Soudain un enfant est retrouvé mort dans cet établissement, ce qui provoque une vague d’hystérie, exploitée par un procureur en cours der réélection. Il fait pression sur Frank pour que celui confirme la culpabilité de la femme, mais celui-ci s’y refuse, suspectant une terrible vérité : la coupable n’est autre qu’une petite fille, Danielle, aux insoignables pulsions sadiques. Black reçoit soutient de la psychologue Lara Means. Les deux enquêteurs se lient d’amitié et découvrent avec stupeurs qu’ils ont tout deux été envoyés par le Groupe. De plus Lara possède elle aussi un Don, lui permettant de percevoir des Anges annonciateurs de désastres. Alors qu’une meurtrissure de Jordan à la mâchoire fait suspecter Frank de maltraitance, Danielle fait croire que celui-ci l’a agressée. Frank est alors arrêté, mais reçoit le soutien de Catherine, alertée par Peter. Lara parvient à convaincre la mère de Danielle de révéler qu’elle sait que Danielle s’est elle même blessée. Frank est libéré, tandis que Danielle est confiée aux experts du Groupe Millennium. L’épisode vaut en premier lieu pour la découverte du formidable personnage de Lara Means, grâce à laquelle cette deuxième saison va réellement débuter et trouver un axe narratif fort. Kristen Cloke, totalement immergée dans le rôle, lui apporte la sensibilité qu’on lui connaît et s’accorde instannément avec Lance Henriksen. Si ses visions angéliques s’avèrent remarquablement amenées, à la fois merveilleuses et horrifiques, Morgan & Wong (ici directement à l’écriture), ne commettent pas l’erreur de se limiter à cet effet. Bien au contraire, en quels scènes ils parviennent à dresser le l’attachant portrait tourmentée par une terreur secrète et à l’angoisse d’une catastrophe à venir, mais néanmoins solide et arquée sur des principes moraux inflexibles. Après la traditionnelle prise de contact électrique, on apprécie de la découvrir rivaliser avec Frank en matière de déduction, tandis que leurs scènes communes se montrent aussi virtuoses qu’intenses. C’est notamment le cas lorsque Lara, épouvantée mais digne, évoque la multiplication croissante des manifestations d’Anges témoins de drames ou quand les deux partenaires constatent à quel point le Groupe n’hésite pas à les manipuler. Lara a aussi pour elle de constituer une création originale de la présente saison et donc de ne pas pâtir des contradictions inhérentes au changement de cap de la série. De manière d’autant plus appréciable que MillenniuM s’aventure désormais pleinement dans le Fantastique, Morgan & Wong veillent à ne pas se cantonner dans une stérile redite des X-Files : le duo Frank/Lara s’avère d’emblée en tous points différents de Mulder et Scully. Ces derniers divergent en bien des points, jusqu’à se montrer antagonistes dans leur approche de leur travail, avec notamment la fameuse opposition entre croyant et scepticisme. Bien au contraire, Frank et Lara se révèlent absolument semblables : méthodes de travail, position similaire d’experts au service du Groupe, partage de la même défiance envers les véritables desseins de l’organisation, partage de la même appréhension face à la montée des périls ou encore possession d‘un Don psychique. Que Frank perçoive le démon et Lara les Anges ne change rien, tant ceux-ci se montrent terrifiants par ce qu’ils se contentent d’annoncer (pas d’ange gardien en trench-coat dans le secteur). Cette posture sera brillantent exploitée par la suite de la saison, voyant Lara néanmoins réagir différemment aux révélations survenant. Lara Means va devenir le miroir obscur nous révélant ce qu’aurait pu devenir Black, jusqu’à ce qu’elle finisse par sombrer dans la folie. L’enquête du jour, autrement plus solidement charpentée que lors de l’opus précédent, se révèle également captivante. Entre dénonciation de l’obscurcissement de l’esprit provoqué par la peur et l’hystérie de groupe et cette description glaçante d’un enfant démoniaque, l’amateur de La Quatrième Dimension pourra y discerner un plaisant alliage des Monstres de Maple Street et de C’est une belle vie. Portée par l’envoutante musique de Snow, la révélation de l’horreur s’effectue avec un savant dégradé, tandis que la jonction de l’affaire avec le quiproquo autour de Jordan apporte un retournement de situation efficace. Outre le plaisir de trouver nombre de visages connus des X-Files, l’interprétation se montre de grande qualité, avec notamment un remarquable Robert Wisden dans le rôle d’un procureur intelligent, mais davantage soucieux de politique que de justice. La petite Lauren Diewold (Danielle). On regrettera quelques petites maladresses, comme la vision un brin caricaturale de l’enfant se repaissant des images horribles de la conclusion de La Mouche, ou le poncif de la coupable se frappant elle même pour discréditer son accusateur. Morgan & Wong y avaient d’ailleurs déjà eu recours pour Eugène Tooms face à Mulder ! Cette séquence nous apporte cependant l’une des plus mémorables composant de Lance Henriksen, quand Frank confesse tout l’amour qu’il porte à Jordan.
5. UN SIMPLE BRIN D’HERBE A New York, un chantier immobilier jouxte des fouilles archéologiques d’un cimetière indien. L’archéologue Liz Michaels découvre un cadavre récemment enterré, marqué par des symboles mortuaires. Appelé en renfort par le NYPD, Frank fait rapidement équipe avec Liz. Grâce à son Don et aux connaissances de celle-ci, ils déterminent qu’un groupe d’ouvriers indiens du chantier, originaires de différentes tribus, s’est lancé dans une quête aussi spirituelle que mortelle. D’une manière quelque peu similaire au Groupe, Ils pensent que la fin du monde approche et envoie des émissaires dans le monde des esprits, pour que leurs ancêtres leur indiquent comment rebâtir un paradis terrestre. Pour cela ils font ingérer de force du venin de serpent à sonnettes aux victimes, puis attendent en vain leur résurrection. Fasciné par le pouvoir de divination de Frank ainsi que par diverses coïncidences, ils jugent qu’il est le véritable élu, puis l’enlèvent et lui font subit le rituel. Grâce aux déductions de Liz, ils sont arrêtés par la police avant que Frank ne soit tué, mais celui-ci a le temps de percevoir des fragments du monde spirituel, indiquant que ses ravisseurs ont fait totalement fausse route. MillenniuM sacrifie ici au marronnier de l’épisode amérindien, à l’instar de la plupart des séries fantastique ou de Science-fiction (Buffy contre les Vampires, X-Files, Stargate SG-1 etc.). Le politiquement correct agit sans doute, mais la principale raison en demeure certainement la formidable richesse et la poésie caractérisant les mythes issus de ce shamanisme, notamment le fascinant concept du monde spirituel, image du notre. Avec une évidente et communicative sincérité, l’épisode entreprend de considérer l’Apocalypse telle que perçue par une autre culture, tout en rendant hommage à ce merveilleux folklore. Cela nous permet de découvrir de nombreux superbes objets d’art, à l’étrange beauté exotique, tandis une véritable atmosphère se met en place, également grâce aux tonalités américaines prises par la toujours sublime musique de Mark Snow. Les artistes de la série créent un nouvel endroit abominablement sinistre, avec ce sous-sol sordide où se déroulent les exécutions, agrémenté de peintures rituelles. Par contraste la splendeur et mysticisme des visions du monde spirituel en sortent renforcés. Par ailleurs le parallèle établi entre les menées du groupe et celles des indiens, ainsi qu’entre le Don de Frank et le shamanisme apparaît bien pensé. Malheureusement le scénario commet la même erreur que celui de Sense and Antisense : brasser trop de thèmes divers (la mythologie se substituant à sa version contemporaine des légendes urbaines), jusqu’à en oublier de développer une véritable intrigue d’enquête. Un temps bien trop considérable est accordé aux commentaires et explications de Liz, certes intrinsèquement intéressants en soi, mais dont l’accumulation finit par virer au quasi documentaire, hors sujet ici. On finit malheureusement par saturer, d’autant que l’action principale se limite durant ce temps à un vaste surplace, paraissant pour le moins verbeux. Du coup, pour conclure le récit, les auteurs se voient contraints à des accélérations passablement artificielles, comme un recours pour le coup massif au Don de Black ou à de soudaines et miraculeuses déductions de Liz, dignes de Sherlock Holmes. Les inserts représentant New York sont également calqués de manière assez artificielle. Isoler également à ce point Frank de son environnement et surtout des liens forts tissés avec les personnages récurrents de MillenniuM constituait un pari aventureux. De fait l’on ressent effectivement comme un manque tout au long de l’historie, même si l’entent formée avec Liz demeure sympathique. D’autre part, si Amy Steel (Ginny Field dans le deuxième Vendredi 13) s’avère excellente dans ce rôle, il faut bien avouant que les jeunes indiens développent un jeu pour le moins minimaliste. On note également plusieurs maladresses comme le portrait extrêmement caricatural du promoteur immobilier ou la course des bions décrédibilisant les adversaires du jour et les transmuant en pitoyables idiots. Une ironie inutile, à l’instar du passage se voulant humoristique du médecin légiste décalé, qui suscite surtout une violente nostalgie de Dana Scully.
6. LA MALÉDICTION DE FRANK BLACK Frank accompagne Jordan durant la soirée d’Halloween. En chemin, il remarque divers éléments étranges, comme des manifestations silencieuses de démons, ou les nombres 26:8 apparaissant écrits sur de multiples supports. Après qu’il ait raccompagné sa fille, sa voiture tombe en panne.. Débute alors une errance tout au long de la nuit, durant laquelle les faits les plus curieux ne cessent de survenir. Sous leur influence, Frank se remémore divers moments de son passé : comment il a rencontré un homme étrange durant son enfance, égalent lors d’Halloween, mais aussi comment son Don est apparu, à l’adolescence. Passant par la Maison jaune, où un groupe de jeunes l’évoque tel un légende urbaine, il croit un instant que le fantôme de Bletcher va lui apparaître. Rentré chez lu , Frank comprend que les chiffres font référence à une citation d es Actes des Apôtres, affirmant la réalité de la résurrection. Le fantôme de l’homme jadis rencontré se manifeste alors. Il révèle à Black que son action au sein du Groupe MillenniuM irrite celui dont le triomphe prochain serait inévitable et lui conseille d’y mettre un terme. Malgré cette nuit effrayante, Frank poursuit nénamoins son combat. Nombreuses sont les séries télévisées, en particulier les fantastiques, a avoir abondé Halloween. Le résultat obtenu s’avère le plus souvent d’excellente facture, tant le sujet s’avère inépuisable et autorisant de multiples approches différentes. Mais rares sont les épisode a avoir abordé avec autant de talent et d’expressivité la double nature de cette fête, relevant à la fois du merveilleux et de l’horrifique. Le mérite en revient en premier lieu à la mise en scène et la photographie, sachant exprimer avec un art authentique le caractère unique de cette nuit, ou les deux plans, naturel et surnaturel, se juxtaposent. Effets lumineux, plans savamment distordus, emploi pertinent du noir et blanc, apparitions diverses, choix ambitieux de longs plans séquences silencieux, musique subtilement connotée de Snow, tout concoure à créer une atmosphère fascinante d’étrangeté et de mystère. Le décor d’une banlieue américaine tranquille devient un étrange et envoutant entre-deux mondes. Ce travail a compagne harmonieusement ce périple sinaïtique de Frank, avec une nouvelle dualité, cette fois entre passé et avenir. Lance Henriksen se révèle une nouvelle fois parfait, dans cet opus où il démure pratiquement seul en scène. De précieuses informations nous ont ainsi révélées sur son passé et la les premiers pâs du parcours devant le conduire à devenir le plus grand profiler du FBI. Cet épisode hors normes, chef d’œuvre visuel, se conclue en point d’orgue avec la visite du fantôme des Halloweens du passé. Le thème relevant davantage de Noël depuis Dickens, mais s’il existe une série capable habiller la Nativité aux couleurs de la Fête des Morts, c’est bien MillenniuM. Dean Winters (Ryan O’Reilly dans Oz) réalise également une formidable composition, hissant cette apparition au dessus des clichés traditionnels du genre, par l’humanité qu’il parvient à exprimer tout en délivrant le message du Démon (toujours ce thème si troublant de la dualité contradictoire). Jamais Black n’aura été aussi tourmenté et en proie en doute, alors qu’il est concomitamment élevé au rang de mythe urbain par les jeunes. A la vision du passé, mêlant nostalgie et effroi, succède une vision, cette fois univoque, de l’avenir, car toute en épouvante. Mais si la présente du Démon s’avère prégnante comme jamais, Black nous signifie avec une émouvante et silencieux éloquence que l’espoir perdure, lors de la formidable scène finale. Il ne renoncera pas à combattre le Futur. Avec The Curse of Frank Black, à al fois virtuose exercice de style et pénétrant portrait de Franck Black, cette saison 2 achève de basculer dans le Fantastique pur et d’installer la perspective d’une Apocalypse biblique, mais cette fois sans susciter aucune nostalgie pour la première époque de la série, tant la réussite de l’opus s’avère éclatante. Le goût prononcé de Morgan & Wong pour l’expérimentation ambitieuse et le développement de voies originales au sein d’un ensemble trouve ici l’une de ses concrétisations majeures.
7. APOCALYPSE 19, VERSET 19 Matthew Prine se gorge d'informations télévisuelles, jusqu'à y percevoir une mécanique conduisant inexorablement à l'apocalypse nucléaire d'une troisième guerre mondiale. Également obsédé par le Livre des Révélations, il est persuadé que le Sauveur de l'Humanité se trouve parmi les élèves d'une école voisine, mais que celui-ci court un grave péril. Il enlève alors les enfants et les enterre vivants dans un container, pour les mettre à l'abri, attendant un signe divin signifiant la fin de l'alarme. Cayse, le shérif local, est le père d'une kidnappée, la petite Jessica. Désespéré, il fait appel au Groupe Millennium. Frank, assisté par Peter, trace le portrait psychologique de Prine et le fait rapidement capturer. Néanmoins celui-ci refuse d'avouer où se trouvent les enfants. Tandis que l'oxygène commence ce à manquer, Jessica se révèle une leader née et entretient héroïquement le courage de ses camarades. Frank fait appel à Lara Means. Son étude du comportement de Prine, outre divers éléments matériels, permet de déterminer que les élèves sont ensevelis dans une ancienne carrière; Conduit sur place, Prine refusent encore d'indiquer où ils se trouvent. Annoncée de longue date par les météorologues, survient une gigantesque tornade, dans laquelle Prine reconnaît le signe qu'il espérait. Il s'anéantit en se jetant dans le cyclone, qui extrait le container du sol, en sauvant in extremis les enfants. Plus tard, Frank apprend que la tornade a détruit l'école et aurait qu'elle tué les enfants sans l'intervention de Prine. Le grand mérite de 19:19 consiste à opérer une parfaite fusion entre les thématiques des deux premières saisons de MillenniuM. Contrairement à des épisodes comme Sense and Antisense et A Single Blade of Grass (ou encore malheureusement le désastre de l'opus prochain), un équilibre pertinent est trouvé entre l'aspect enquête et celui du Fantastique au sens large. Avec un pétulant plaisir on retrouve Black en majesté, retrouvant ses postures de jadis et délivrant une pénétrant profil psychologique, on plus d'un serial killer mais d'un illuminé mystique. L'ensemble, solidement charpenté et au suspense croissant, se suit avec un vif intérêt, d'autant que les apports distincts de Frank , Peter et Laura s'intègre dans un tout cohérent et écrit avec un vrai sens du rythme. Certes l'on notera qu'en première saison Frank n'aurait en aucune manière nécessité l'intervention de Lara et que celle-ci se livre à une révélation assez peu subtile, le mouvement inconscient des mains de Prine quand on évoque les enfants paraissant assez téléphoné. Mais l'on assiste néanmoins avec plaisir au développement de, l'amitié et de la synergie s'instaurant entre Frank et Lara, sous l'oeil attentif de Peter Watts. Un joli coup de griffe empreint de paranoïa est d'ailleurs derechef décoché au Groupe, avec sa propension à suivre les achats de l'ensemble de la population. Big Brother is watching you. Les auteurs ne négligent pas l'aspect humain, avec le déchirant portrait du Shérif, père tourmenté par l'angoisse et sans cesse au bord de la rupture (remarquable Steve Rankin). L’ésotérisme inhérent à l'intrigue suscite également des passages très forts ou étrangement incongrus, tels le ravisseur se joignant à la prière de ses victimes ou l'apparition providentielle des enfants, comme jaillissant de la terre nourricière. Sans devenir envahissants, les effets spéciaux (le feu nucléaire, la tornade) s'avèrent remarquables pour l'époque. Le portrait de Prine se montre aussi complexe que fascinant, du Data Zombie cher aux Cyberpunks au mystique le plus exalté. Christian Hoff apporte une étonnante présence à son personnage, notamment lors des confrontations l'opposant à Black et Lara. Le personnage fait réellement froid dans le dos par son ambivalence abyssale, simultanément convaincu d'oeuvrer pour le Bien et totalement indifférent au sort des enfants en cas d'absence de signe divin, car alors plus rien n'aura d'importance. En contraste le lumineux portrait de la vaillante et charismatique Jessica ressort particulièrement émouvant. De plus son histoire, entre tempête à venir et enfant unique espoir de l'Humanité revêt des accents à la Terminator propres à séduire l'amateur. La très jeune Colleen Rennison (Ally/Cassandra dans Stargate SG-1) crève absolument l'écran. La thématique apocalyptique, empruntant une voie judéo-chrétienne bien connue, peut dès lors judicieusement se permettre de ne pas occasionner de trop longs commentaires, dévorant l'espace narratif imparti à l'enquête. Idéale conclusion à ce si astucieux scénario, le twist final, totalement déstabilisant et amené avec une brillante concision, s'avère d'un rare impact, comme issu de La Quatrième Dimension elle même !
8. LA MAIN DE SAINT-SÉBASTIEN Peter demande de l’aide à Frank, pour une affaire que le Groupe lui a pourtant conseillé d’abandonner. Le de Dr Schlossburg, un grand érudit versé dans les mystères médiévaux, a été assassiné à Brême. Les deux hommes partent en Allemagne pour enquêter et y reçoivent l’assitance un autre membre du Groupe ayant déjà collaboré avec Frank, le Dr Cheryl Andrews. Peter révèle que Schlossburg aurait retrouvé la trace de la dépouille d’un chevaler membre du groupe, remontant à l’époque précédant l’avènement du premier millenium. Celle-ci contiendrait la Main de Saint Sébastien, une relique ayant permis à l’organisation de vaincre les fléaux de cette époque reculée. Après une enquête mouvementée, où l’on tente à diverses reprises de les assassiner, les deux hommes établissent que c’est Andrews qui trame ce complot, désireuse que ces secrets ne soient pas révélés. Elle est arrêtée par la police allemande. Une fois découverte, la Main se révèle porteuse de divers tatouages mystérieux, dont Peter envisage la traduction. Frank pense lui que le chevalier a emporté ces connaissances dans la tombe. Bien plus similaire à un mauvais épisode la déjà médiocre Sydney Fox l’Aventurière qu’à un Indiana Jones, La Main de Saint Sébastien demeure à juste tire l’un des épisodes les plus contestés parmi les fans de MillenniuM. Le récit n’a plus rien à voir avec la série telle qu’on la connait et apprécie, optant pour une vague casse au trésor, ponctuée de scènes d’action guère tonitruantes et un fatras ésotérique réellement épuisant, ne semblant guère convaincre un Lance Henriksen singulièrement plus absent qu’à l’accoutumée (il est vrai qu’il souffre alors de problèmes de santé). Morgan & Wong oublient toute subtilité dans ce basculement narratif, avec plusieurs maladresses étonnantes vendant de la part d’auteurs aussi talentueux et chevronnés. Introduire sans réelle utilité Chereyl Andrews revient évidemment à la désigner d’entrée comme la coupable, d’autant qu’aucune fausse piste n’est élaborée pour enrichir le récit (CCH Pounders est par contre toujours formidable). Par ailleurs, quand on en vient à s’approximer à une série historique, la question du manque de moyens devient incontournables. De ce fait les scènes médiévales deviennent vraiment toc, aux limites du risible. Repeindre le groupe en secte ésotérique le rend beaucoup plus quelconque que la création originale et ambigüe de la première saison, puisque que l’on renoue un thème maintes fois exploité dans la littérature populaire ou fantastique. Le scénario se définit comme très mécanique, tout en trahisons et rebondissements faciles, mais dépourvu tout la profonde désespérance morale précédente, comme une bande dessinée dépourvu d’imagination. Le premier degré et l’emphase de tout ce fatras confirment une déperdition, non seulement sur fond de la série, mais aussi sur sa forme. Parallèlement Roedecker continue à nous irriter par la lourdeur pachydermique de son humour et l’inspecteur Betzdorf ne s’extirpe pas de clichés convenus, malgré la sympathie suscitée par l’acteur allemand Gottfried John (le général Ourumov dans Goldeneye). On ressent d’autant plus intensément l’étendue du gâchis qu’il s’agit pour une fois d’un épisode plutôt centré sur le complexe Peter Watts, une occurrence attendue depuis longtemps.
9. LE JUGEMENT DERNIER
Quelques temps après s’être intéressé à un service particulièrement inclassable du FBI, l’écrivain Jose Chung écrit un nouveau roman. Celui-ci s’intéresse aux différents cultes fleurissant à l’approche du Millennium. Il interroge ainsi un disciple de la Selfosophie, en rupture de ban certes relative. Chung a d’ailleurs connu dans a jeunesse le fondateur de ce mouvement, Goopta. Le disciple est retrouvé mort électrocuté par l’engin servant à la Selfosophie à « éduquer » ses ouailles, ce qui entraîne l’intervention de la police de Seattle et du Groupe. Malgré des caractères très opposés Frank et Jose finissant par sympathiser au fil de leurs confrontations, malgré la vive méfiance de Peter envers toute publicité non désirée pour le Groupe. Jose promet de ne pas évoquer celui-ci dans on ouvrage. Il va mener de pair avec Frank une enquête hors normes, où s’entrecroisent un Selfosophe particulièrement extrême et ulcéré pour le travail de l’écrivain, mais aussi un tueur fanatique de Nostradamus, ivre de vengeance après que sa petite ami l’ait quitté. Frank parvient à intercepter le Selfologue mais l’autre individu a le temps d’assassiner Chung avant d’être arrêté. Le livre de José, Doomsday Defense, terminé à temps, est néanmoins publié et il évoque bien entendu de manière caustique un certain Blank ! L’introduction pour le moins originale que constitue la biographie déjantée de Goopta narrée par Chung, confirme d’entrée que Darin Morgan, génie hors normes, n’a aucunement l’intention de se fondre dans le moule de MillenniuM. Tant mieux ! Son imagination survoltée, bien plus ambitieuse qu’il n’y paraît au premier abord, va valoir l’un de ses plus inoubliables opus à cette deuxième saison. Et, incidemment, prouver que l’humour peut fonctionner même au sein d’une série aussi sombre que MillenniuM, pour peu que l’on s’en donne vraiment les moyens, sans se contenter de greffes aussi sommaires que malhabiles. Ce succès va se bâtir sur l’assemblage dynamique de trois éléments distincts, au sein d’un ensemble sans doute davantage coordonné que lors de l’éminemment lysergique Jose Chung’s From Outer Space. Il s’agit tout d’abord de la drôlerie irrésistible de nombreuses scènes. Darin Morgan explose littéralement les conventions de la série, pour accumuler les scènes de pure comédie. Il multiplie ainsi les digressions examinant les résolutions possibles de l’énigme, au gré de l’inventivité en roue libre des commentateurs. Effet garanti, la palme revenant sans doute à la vision d’un Frank devenu un espèce de Mike Hammer vulgaire et satisfait, au pouvoir miraculeux. Du grand n’importe quoi, massivement jouissif. Evidemment il en ressort que l’enquête n’en est plus vraiment une, se résumant à une succession de situations aberrantes et à une résolution en forme de pure charade, mais l’épisode a bien entendu raison de jouer à fond la carte de l’épisode décalé. Il s’agit quasiment du seul présent dans MillenniuM (Darin refrappera cette saison), il serait dommage de ne pas en profiter ! Le récit abrite également quelques pépites de pur absurde, comme, cette scène voyant Jose écrire sur Black, qui écrit sur le Selphosophe fou, qui écrit sur Jose. On se régale. On assiste en outre à quelques clins d’œil à From Outer Space, comme la scène finale voyant Frank lire le bouquin de Chung le concernant, de manière absolument similaire à Scully. Mais il se contente de le poser un peu vivement sur sa table de chevet, au lieu de le projeter, ce qui est fort bien vu ! Le second atout de l’opus reste sa valeur d’impliable pamphlet contre la Scientologie, sous une apparence de comédie, dans la grande tradition du genre. l’ensemble des divers aspects de l’association des joyeux héritiers du débonnaire (et auteur de Science –fiction tellement sous doué) Lafayette Ron Hubbard : fatras de la doctrine, vénalité de la démarche, assise hollywoodienne et californienne; rôle de socle joué par l’œuvre du Maître, maîtrise des moyens modernes de communication et du juridisme américain, mais aussi capacité à bâtir sur le long terme. Certes les Scientologues se voient décrits comme de désopilants débiles légers, en particulier le fanatique ultime suscitant une succession de gags énormes par son recours gaguesque à la « Pensée Positive » (tout va très bien Madame la Marquise, à la puissance 10). Mais la vue d’ensemble de cette implacable mécanique de conquête fait froid dans le dos, d’autant que l’épisode assimile clairement la Scientologie à la mouvance sectaire. Les amateurs des X-Files se régaleront des apparitions de Dave Duchovny (hélas seulement via des affiches) en caricature de comédien porte parole de la Scientologie. Une manière d’ironiser sur les rumeurs perpétuelles courant sur son compte (il agira de même bien plus tard, dans l’irrésistible Californication). Au total une charge bien plus terrible que nombre de postures moralisatrices ou offusquées. Le ridicule tue à coup sûr. Mais, l’inouï Jose Chung’s Doomsday Defense atteint toute sa dimension et son audace en développant, davantage en sous main, une seconde mordante satire, cette fois contre MillenniuM elle même, jugée clairement prétentieuse comparée aux X-Files. Darin Morgan n’a au grand jamais adhéré au ton funèbre et crépusculaire de la série, parfois même morbide. Il va profiter que Wong et son frère Glen lui ait laissé carté blanche (également concernant la tonique mise en s cène) pour dresser ce qui s’assimile bien à procès, certes feutré, de la série. De manière tout à fait inédite, il faut bien constater que la grande majorité des piquantes et superbement dialoguées confrontations opposant Frank et Jose tournent à l’avantage de ce dernier, d’autant que l’abattage insensé de Charles Nelson Reilly répond toujours autant à l’appel. C’est bien Chung qui résout en premier l’affaire, grâce à son bon sens dégonflant une idole comme Nostradamus. On devine aisément que le joyeux et volontiers caustique Chung devient le porte parole de Darin, quand celui-ci fustige l’aspect sombre et prêcheur du Groupe et jusqu’à Frank lui même. Soyons clairs, à côté du flamboyant Jose Chung, Frank ressemble à un éteignoir, dont le côté sentencieux fait plus que jouxter l’ennui. Il se voit caricaturé dans ses attitudes et son penchant à tout perdre tragiquement au sérieux. Il en va de même de Giebelhouse, devenu parodie du policier télévisé de base ou Peter lui même, entre paranoïa et fascination pour Nostradamus. Même le tueur est grotesque. Un passage au vitriol certes quelque peu diffus, mais néanmoins présent de bout en bout. Même la mort sacrilège de Jose Chung semble souligner l’aspiration viscérale de MillenniuM au tragique. Jose Chung’s Doomsday Defense compte bien parmi les chefs d’œuvre iconoclastes de Darin Morgan.
10. GOODBYE, CHARLIE Le bon Dr Kiley prodigue généreusement une mort rapide et sans souffrances aux personnes en stade terminal d’une maladie, au moyen d’une injection massive de penthotal. Il pousse l’amabilité jusqu’à accompagner le passage d’une chanson apaisante. Evidemment ses amis sont bâillonnés et ligotés, peut-être pour parer à une malencontreuse pulsion les faisant s’accrocher à la vie. La jouissance physique qu’il éprouve quand il exerce le pouvoir du choix entre la vie et la mort n’entre évidemment pour rien dans son action. Mais tel n’est pas forcément l’avis du groupe Millennium, qui, perplexe, envoie sur ces traces Frank et Lara. Frank, aidé par les intuitions de Lara et l’aide du solide inspecteur Giebelhouse, trace progressivement le profil psychologique de ce tueur en série original, totalement indifférent au sexe des victimes et se persuadant d’agir pour leur bien. Arrêté, Kiley se révèle lui même mourant d’une leucémie. Il est libéré pour manque de preuves matérielles, mais Frank et Lara interviennent à temps pour empêcher le grand projet de Kiley, le suicide assisté de tout un groupe de volontaires. Contrairement à ses promesses, il ne s’était par contre pas joint à eux et s’est échappé ! Après plusieurs opus hors normes et une introduction très réussie par son incongruité horrifique, on en revient à une narration plus classique, avec cet épisode solidement charpenté, retrouvant plusieurs accents de la première saison. Le récit se suit tout du long avec un vif intérêt, grâce à une intrigue solide, où les éléments matériels, souvent astucieux, se mêlent habilement aux déductions psychologiques. Le scénario rend d’ailleurs un bel hommage à Giebelhouse, certes moins surdoué que ses deux acolytes (dans tous les sens du terme), mais dont le professionnalisme et l’efficacité policière compte pour beaucoup dans le succès. Il apparait bien comme un précieux personnage secondaire pour MillenniuM. L’élément le plus fascinant de la traque demeure néanmoins, comme au bon vieux temps, l’abyssal profil psychologique de ce tueur en série, dans lequel Frank nous entraine étape par étape. Même dans un créneau plus balisé que durant les récents opus, Henriksen demeure d’ailleurs absolument fascinant. Parallèlement à l’enquête. On apprécie également vivement les dialogues entre Frank et Lara, s’autant que celle-ci fait preuve d’un humour cynique et parfois vachard envers son chéquier et ami. L’absence de Peter renforce leur proximité. Divertissant, mais aussi émouvant quand on sait qu’l s’agit d’une carapace dont elle se sert pour dissimuler son désarroi intérieur. Le scénario délivre également quelques retournements de situation réussis, avec ces liens en définitive volontaires ou le refus final de Kiley de s’appliquer sa propre doctrine. Les décorateurs de la série se montrent toujours aussi inspirés dans leurs créations, comme ce sinistre hôpital désaffecté où Kiley s’approvisionne en penthotal contenu dans d’antiques bouteilles en verre et où il conserve en reliques les corps décomposés de ses premières victimes. Le tueur lui même se montre captivant par son ambivalence. Tucker Smallwood se montre parfait et d’une ébouriffante conviction. C’est notamment le cas lorsque la folie de son personnage devient patente et que, derrière le discours, émerge le délire mégalomaniaque de se ressentir comme la Mort en personne. On luit doit plusieurs scènes brillantes, estampillées MillenniuM, comme sa fureur aussi ardente que sincère devant le cadavre d’un malade n’ayant pas bénéficié de son intervention, ou le dialogue passablement original de son interrogatoire par Frank et Lara, se basant notamment ur le dossier médical de Bobby Darin, mort à 38 ans du fait de graves problèmes cardiaques. Goodbye, Charlie ressort comme un épisode convaincant à défaut de sortir tout à fait des sentiers battus de la série et toute saison nécessite de tels opus pour pouvoir tenir une distance atteignant plus de 20 jalons. On suit un peu moins quand les auteurs utilisent le cas de Kiley lors d’une interrogation sur l’euthanasie. Quand le médecin se livre à un vrai lavage de cerveau pour en convaincre son patient, les termes du débat deviennent faussés.
11. LA NUIT DU SIÈCLE La veille de Noël, tandis que Frank recherche désespérément un cadeau pour Jordan, il reçoit un message de son père, Henry Black. Il n’y donne pas suite pensant que sa mère, qui avait le même Don que lui, est morte du refus d’Henry de l’admettre dans leur vie. Par la suite, alors qu’il se remémore le passé, un Ange énigmatique se manifeste à lui, évoquant le mystère de Noël. Le Don se manifeste alors avec force chez Jordan, qui perçoit sa grand-mère défunte. Celle-ci l’aide à dessiner l’un de ces Anges dont elle raffolait jadis. Après en avoir discuté avec Lara, Frank se rend chez son père. Une longue conversation0, d’abord malaisée, permet aux deux hommes de se redécouvrir, Frank s’apercevant en fait qu’Henry a toujours aimé et soutenu son épouse mais que le Don a dévoré celle-ci, lui rendant insupportable le monde réel et l’incitant à rejoindre les Anges. Depuis Henry attend : il a conservé l’Ange en porcelaine qu’il avait offert à sa femme pour le Noël 1946, juste avant son départ. Elle lui a promis qu’à travers lui elle lui enverrait un Signe annonçant qu’il pourrait enfin la rejoindre. Mais il le donne à Frank comme cadeau pour Jordan, estimant que la réconciliation avec son fils représentait le véritable Signe. Plus tard, Frank et Jordan perçoivent l’âme d’henry entrer sereinement dans l’Au-delà. Episode fascinant et fort singulier que Midnight of the Century, Noël apportant un remarquable pendant à Halloween. The Curse of Frank Black, voyage similaire au sein de l’histoire personnelle de Black, se centrait sur ce dernier, alors qu’ici se voit abordé l’ensemble de l’univers de la série. Dans cet émouvant conte de Noël, mâtiné de mort et d’angoisse (on reste dans MillenniuM), il s’avère passionnant de voir l’ensemble des personnages de la série faire comme un pause aux abords de la Nuit du Siècle et révéler leur réalité profonde. Plusieurs scènes se révèlent particulièrement intenses, comme celle voyant Peter délaissant la mondanité de sa traditionnelle réception de Noël, où il invite à l’évidence d’éminents membres du Groupe, pour prendre à part ses deux prodiges et amis, Lara et Frank, lors une discussion nettement plus intime. Le toujours impressionnant Terry O’Quinn (à l’instar de l’ensemble de la magnifique distribution) apporte une vraie humanité à ce moment particulier où Peter tombe le masque pour évoquer son amour pour sa famille et son tourment personnel face à la tempête qui s’annonce. Il en va de même pour les confessions de Catherine ou de Lara, dont l’empathie avec Black fait encore une fois merveille. Chacun révèle ses failles secrètes mais aussi ses espérances, brossant un portrait d’ensemble d’une rare humanité. On apprécie vivement de voir les auteurs profiter de moment à part pour approfondir la personnalité des formidables figures marquantes de MillenniuM, sans jamais céder à la mièvrerie. Si l’on n’atteint pas tout à fait le raffinement et la stylisation de The Curse of Frank Black concernant Halloween, l’atmosphère de Noël se voit également parfaitement reconstituée par des décors superbes et très évocateurs, parfois prenant vie à travers les visions de Black. Tout l’épisode se montre splendide visuellement et bénéficie également d’une bande son parfaitement choisie, abordant avec goût les rivages de la musique dite classique. L’incontournable visite de l’Ange demeure aussi énigmatique et ambivalente que lors de Powers, Principalities, Thrones and Dominions la saison précédente. Moins effrayant que lors des flamboyantes visions de Lara, les Anges tels que perçus par Frank demeurent néanmoins distants et ne manifestant guère d’empathie (on peut évoquer une certaine suffisance). Il n’y a toujours aucun secours providentiel à attendre de ce coté ! MillenniuM tient là une vraie spécifié, guère encourageante. Mais le cœur de l’épisode se situe bien entendu dans l’odyssée personnelle de Frank, abordant la tragédie intime vécu par sa mère, que son Don a dépossédé de sa vie, jusqu’à se réfugier dans la mort pour échapper à ces visions. On remarque qu’avec une infinie pudeur le terme de suicide n’est jamais employé. Les conséquences dévastatrices du drame sur les rapports du père et du fils sont évoqués avec une rare éloquence et c n’est pas le moindre des miracles de Noël que de découvrir la lumière de la réconciliation jaillir au cœur de cette si sombre nuit. Tout le long dialogue entre Frank et Henry se montre d’une rare intensité, la rencontre de deux comédiens aussi exceptionnels et à la personnalité si marquée que sont Henriksen et McGavin se révèle à la hauteur des attentes. Un très beau moment, il ne faut jamais désespérer de l’Humanité, semble nous souffler MillenniuM, au moment où la montée des périls s affirme toujours plus prononcée. Le seul véritable espoir pour celle-ci réside bien dans sa faculté à surmonter ses propres démons. A travers le portrait toujours captivant de Frank Black, la série s’affirme comme un véritable manifeste humaniste, particulièrement affirmé le temps d’une Nuit de Noel.
Catherine présente les Glaser à Frank. Leur fils Alex, un brillant étudiant promis à un grand avenir, a disparu lors d'un voyage en Alaska, où les secours ont désormais renoncé. Il sont cependant certains qu'il est encore vie, perdu quelque part dans la forêt. Frank accepte de s'occuper de cette affaire, mais se heurte à alors au Groupe. En effet se situe au beau milieu d'un premier examen par les dirigeants de l'organisation. Ils doivent décider s'il a désormais surmonté la pulsion homicide survenue face au Polaroïd Man, afin d'accéder au cercle intérieur. Son départ tombe donc à un très mauvais moment, pour une cause jugée perdue. Frank passe outre, malgré les mises en garde de Peter, très irrité. Arrivé sur place, il constate que le jeune homme a abandonné toutes ses possessions, pour aller vivre en ermite au coeur de la forêt. Malgré le scepticisme du shérif local et les divers obstacles que le Groupe ne cesse de lui occasionner, Frank se met en route dans la nature sauvage. Il est guidé par des visions d'une aurore boréale, dont il apprendra plus tard qu'elle est due à une conjonction planétaire reliée au Millénium. Catherine perd tout contact avec lui et, paniquée, intervient auprès de Watts. Celui-ci lui révèle malicieusement que le Groupe a mis en place toute une expédition de secours, qu'il part diriger sur place. Frank découvre Alex, grièvement blessé. A bout de forces, il entreprend de le ramener vers la civilisation, jusqu'à rencontrer Peter, venu à la rescousse. Guéri, Alex reprend néanmoins son errance. Plus tard, le Groupe apprend à Frank qu'il a réussi sa véritable épreuve. A priori rien de plus simpliste que le récit du jour, pour l'essentiel une exotique mission de sauvetage pour Frank, très linéaire dans son déroulement. On se situe évidemment fort loin des enquêtes complexes et de la subtile reconstitution du puzzle éclaté de la psyché des serial killers. On note également que le versant ésotérique et astrologique de l'histoire manque de substance et de profondeur, demeurant bien moins substantielle que ses équivalents antérieurs. Et pourtant cette bouffée d'air pur va apporter une originalité bienvenue à MillenniuM. Tout d'abord on prend plaisir à découvrir Frank en homme d'action vaillant et déterminé, ce qui nous change pour le moins de l'homme miné par la désagrégation de sa famille et ses doutes envers son action au sein du groupe. Cette évolution rejoignant celle de Catherine nettement plus à son avantage que sur l'ensemble de la série et davantage en empathie avec son mari. Les différents seconds rôles se voient également forts bien écrits, avec un amusant emploi des divers stéréotypes circulant en Amérique du Nord sur les rudes Alaskains, déjà popularisés à l'époque de la série de Roger Moore. Le pays du Klondyke et de Sarah Palin. A cet égard le casting de Brion James, grand spécialiste des rôles antipathiques, en tant que Shérif borné et ultra redneck fait réellement merveille ! Se détache également l’époustouflante splendeur des paysages naturels du nord canadien. Forets, montagnes et lacs composent un décor à la fois envoutant et pur, comme une promesse d’un nouvel Eden pour une renaissance de l’Humanité. Le contraste avec l’environnement habituellement sinistre et urbain de MillenniuM s’avère une nouvelle fois bien vu. Si l’épisode ne bénéficie évidemment pas de la force de frappe cinématographique de l’inouï Into the Wild. il reconstitue néanmoins avec souffle toute la fascination induite par le voyage à la fois intérieur et au long cours de Chris McCandless, ainsi que la beauté terrible, sauvage et innocente de la Nature. Aussi limpide soit-elle l’intrigue n’en exprime pas moins une savoureuse ambigüité sur l’action menée par le Groupe. Elle demeure en effet ambigüe sur le fait de savoir si celle-ci a été ourdie dès le départ où s’est progressivement adaptée à l’obstination de Frank, et donc en définitive sur la moralité de l’organisation elle même. L’épisode apparait également comme prophétique, l’une des interrogations majeures suscitées par la saison trois résidant sur le choix qu’opérera en définitive Peter Watts entre son amitié pour Frank et son allégeance envers le Groupe Millennium.
13. LA CHAMBRE DU MYSTÈRE Un site internet, nommé La Chambre du Mystère, montre une jeune femme attachée à une chaise, devant un mur sur lequel est affiché un numéro. Quand le nombre de vues égale celui-ci, elle est égorgée par un individu masqué, puis le site disparaît totalement. Divers indices contenus dans les numéros et dans des lettres envoyées à la police par le tueur indiquent que celui-ci n’est autre que l’insaisissable et surdoué Avatar, que Frank a déjà affronté en vain quand il travaillait au Bureau. Il s’est réactivé après des années de sommeil, visiblement excité les nouvelles technologies des réseaux. Aidé par Roedecker et les considérables mayens informatiques du Groupe, Frank débute une enquête difficile. De plus son Don n’agit pas sur ce qui véhicule par la Toile. Un duel où chacun tend des pièges retors l’oppose à Avatar. Il le mène à un théâtre désaffecté de San-Francisco, reconnaissable par l’indice des affiches du Mikado, où se trouve la Chambre du Mystère. Le dément semble alors menacer Black d’une arme. Mais avant de riposter ce dernier comprend qu’ils ‘agit d’une captive du tueur, grimée à son image. Le dernier traquenard d’Avatar a échoué mais il parvient à s’enfuir. Frank prévoit un nouveau réveil dans les prochaines années. L’épisode souffre beaucoup aujourd’hui de ce qui constituait sans doute son atout maître en 1999 : son immersion particulièrement prononcée dans le nouvel univers des Autoroutes de l’Information, comme on disait jadis. Cet aspect technologique apparaît clairement comme sa justification première et le cœur du travail mené par les auteurs, or il s’agit d’un domaine où l’obsolescence se montre des plus rapides et redoutables. Le côté désuet des divers hardwares et softwares présentés ne constitue cependant pas le plus dommageable (cela suscite même un aspect documentaire parfois distrayant). On subit particulièrement le sérieux et le premier degré avec lequel sont énoncés tous les lieux communs de l’époque concernant l’Internet, prononcés sur un ton vaguement apocalyptique, alors même que tout cela, avec les bons comme les mauvais côtés, est désormais intégralement passé dans notre quotidien. Ce vaste catalogue, réalisé avec sérieux, paraît également bien appliqué, finissant parfois par appesantir le récit par la trop grande importance donnée à a la mise en scène des potentialités des réseaux. A son échelle, The Mikado pâtit de la même ironie que l’ensemble de la littérature Cyberpunk, captivante dans les années 80, quand elle prophétisait l’avènement du Cyberespace, puis dépossédée de son objet même, quand la véracité de ses prédictions s’est vue confirmée. Dans cet environnement Roedecker trouve enfin autre chose à exprimer que son humour puéril mal dégrossi, mais l’on se situe tout de même toujours à des encablures du Ringo des Bandits Solitaires. Ayant sans doute fait le tour du sujet, les auteurs ne le feront d’ailleurs plus apparaître ultérieurement. La deuxième saison continue à s’améliorer et à évacuer plusieurs des erreurs accomplies lors du virage initial trop brutal impulsé par Morgan & Wong. L’épisode trouve un second souffle dans son évocation éloquente et, hélas, convaincante, de l’aime moral constitué par le voyeurisme malsain du public. Quelque soit la modernité des technologies employées, en remontant jusqu’aux jeux du Cirque, celui-ci reste toujours d’une triste actualité, atteignant jusqu’à Peter et Frank, à leur corps défendant. L’aspect à la fois Grand-Guignol et très stylisé de la Chambre transforme effectivement la Mort en un spectacle abdominale, dans un effet particulièrement troublant. Au-delà de l’horreur absolue de ses mises en scènes, comptant sans doutes parmi les tueries les plus éprouvantes de la série, Avatar se montre également un fascinant adversaire. Son côté ludique dévoyé et mégalomane, quasi à la Diabolical Marstermind (version MillenniuM, c'est-à-dire qu’un Prendergast représente un aimable convive) apporte comme un arrière goût des bondissants duels des Sixties à sa confrontation au long cours avec Frank Black. Un aspect de culture populaire encore souligné par le terme ou l’esthétique de la Chambre du Mystère, que ne démentirait pas Gaston Leroux, où son affublement si semblable à celui des conjurés de Cigares du Pharaon. Evidemment, selon la loi d’airain du genre, il s’échappe à la fin, tandis que Frank envisage déjà un duel futur. Un aspect original, qui vaut à Avatar de demeurer particulièrement apprécié chez les amateurs de la série. On lui doit également quelques forts moments de suspense forts, à l’impeccable mise en scène, comme l’investissement de la caravane piégée par la police, Frank explorant le théâtre désert, accompagné par grand air du Mikado ou le remarquable twist final.
14. LES ALIÉNÉS DU DIABLE Plusieurs meurtres particulièrement abominables se déroulent aux alentours d'un hôpital psychiatrique abritant des maniaques homicides particulièrement dangereux. Les massacres successifs imitent le modus operandi de plusieurs d'entre eux, mais ces personnes sont toujours sons écrou au moment des faits. Aidé par Peter, Frank enquête au sein de l'hôpital. Il se heurte cependant à l'hostilité du Dr Stoller, adepte d'un approche positive de la folie et d'une seconde chance offerte aux malades . Elle accepte mal la la suspicion envers ses patients, comme envers ses travaux. Il s'avère que l'un de ses collaborateurs, Edward, a le pouvoir de s'emparer des rêves hallucinés des déments. Il a d'abord tenté de s'en servir comme d'une thérapie, mais ce sont ces pulsions qui se sot emparées de lui, l'amenant à reproduire les meurtres imaginés par les psychopathes. Ces derniers, amputés d'une partie de leur personnalité, deviennent encore plus instables qu'avant. Edward est désormais devenu dépendant de cette vampirisation psychique. Découvert, il tente d'abattre Frank et Stoller. Mais il est à son tour tué par l'un des malades qu'il a traité, heureux de pourvoir commettre un meurtre utile. The Pest House, ou quand MillenniuM rencontre Wes Craven. Les auteurs, admirablement secondés par la percutante mise en scène d'Allen Coulter, ont en effet l'excellente idée de constituer les meurtres scandant le récit en tableaux vivants (provisoirement) reconstituant différents thèmes classiques des Slasher Movies et autres légendes urbaines. L'effet Scream joue à plein, alors que les deux premiers opus de la saga viennent de connaître un grand succès en 1996 et 1997 (l'épisode est diffusé en février 1998). Si l'inspiration apparaît manifeste, l'épisode ne se contente pas d'y surfer et mène cette opération avec le plus grand soin et un vrai raffinement de détails, ce qui lui apporte un revigorant humour noir. L'inévitable entrée en lice de l'emblématique Hook Man survient lors d'une mémorable scène introductive, là encore bien dans l'esprit Scream, bien avant que Supernatural ne se penche à nouveau sur le sujet en 2005. Les autres scènes du même acabit se montrent également remarquables, d'autant que l'on goûte sans réserve la subtile inversion des Griffes de la Nuit que constitue l'astucieux scénario. Au lieu d'être immergées dans le plan onirique, les victimes voient fondre sur elles l'essence même des cauchemars, au sein du monde réel. Un bel exercice de style, où le talent d'écriture de Morgan & Wong fait merveille. Le récit ne limite d'ailleurs pas à ce chapelet d'horreurs particulièrement suggestif et se prolonge efficacement au sein de l'hôpital. Les différentes démences rencontrées nous vaut également plusieurs moments forts, filmés avec une crédibilité aussi étonnante qu'effrayante, sans fioritures inutiles. Le tout s'insère avec harmonie au sein d'un décor au sordide judicieux, loin du gothique exacerbé d'un Arkham Asylum. Coulter exploite avec une optimale efficacité les diverses potentialités de l'endroit et de ses longs couloirs, afin de susciter une ambiance des plus inquiétantes, notamment lors de l'affrontement final en huis clos, parfaitement anxiogène. On en peut que regretter l'absence perpétuelle de Kim Manners au sein de MillenniuM, mais Allen Coulter s'impose ici comme étant bien davantage qu'un remplaçant honorable. Deux bémols viennent cependant atténuer la réussite de cette balade réussie au sein du film d'épouvante moderne. Tout d'abord, afin de prolonger quelque peu artificiellement l'action et la ronde des tueries, Frank se montre sensiblement moins performant qu'à l'accoutumée. Il demeure embarrassant que le public ait depuis longtemps compris de quoi il en retournait, alors que le héros, pourtant à son affaire demeure aussi longtemps à la traîne. De plus, conformément u plan initial, le Dr. Stoller se résume elle même aux clichés propres à ce type de personnage. Cela présente le mérite de la cohérence mais limite de manière réellement frustrante la remarquable prestation de Melinda McGraw, cantonnée à un registre loin de la subtilité évanescente de Melissa Scully. De ce fait la rencontre avec Lance Henriksen ne tient pas tout à fait ses promesses, ce sentiment aurait sans doute été atténué avec une actrice moins attendue. Toutefois The Pest House bénéfice de l'apport de nombreux excellents comédiens pour ses seconds rôles. C'est notamment le cas pour Louis Ferreira, absolument parfait dans l'expression de la double, sinon multiple, personnalité d'Edward.
15-16. LES CHOUETTES/LES COQS Un fragment supposé de la Vraie Croix est retrouvé par le groupe, puis dérobé, ce qui exacerbe le conflit entre eux factions de l’organisation, les Chouettes (mystiques, dont relève Peter Watts) et les Coqs (scientifiques). Pour mettre fin aux suspicions, Peter demande à Frank et Lara d’enquêter sur le vol. L’enquête révèle des pratiques sinistres du groupe, amenant Frank à prendre du recul. La crise attient un paroxysme au sein du Groupe, dont Lara est exclue par Peter, qui la suspecte de travailler en secret pour les Coqs. Celle-ci réapparaît en compagnie du Vieil Homme, qui révèle à Frank l’existence d’une société secrète nazie, Odessa, ennemie de longue date du Groupe Millennium. C’est elle qui a dérobé l’artefact, puis qui assassine le Vieil Homme, obligeant le Groupe à faire font commun contre l’adversaire. Peter monte en puissance dans le Groupe et se réconcilie avec ses deux amis, tandis que l’Elder remplace le patriarche défunt. Odessa est exterminée par un commando punitif dirigé par Peter. Le fragment de la Vieille Croix est conservé par le nouveau dirigeant du Groupe. Ce double épisode mythologique se situe dans la droite line de la direction déjà dessinée par La Main de St-Sébastien. Autant dire que l’on regarde d’un œil aussi distant qu’incrédule cette histoire tortueuse, charriant bon nombre de poncifs et d’effets faciles autour du thème des sociétés secrètes mystiques. On se situe malheureusement plus près de l’extrêmement médiocre Da Vinci Code que du flamboyant chef d’œuvre du genre, Le Pendule de Foucault, d’Umberto Eco. Le plus attristant réside dans le constat d’à quel point l’ambitieux projet initial de Chris Carter se voit dénaturé par ces fadaises boursouflées. On doit tout de même se pincer quand l’on voit débouler les Nazis, confirmant cette version particulière de la Loi de Godwin, voulant que, plus une série fantastique dure longtemps, plus la probabilité d'y trouver une allusion aux Nazis s’approche de un. Ailleurs cela donne Triangle, ici on obtient ce fatras. X-Files 1, MillenniuM, 0. Et pourtant tout ne s’avère ps mauvais, notamment lors de la première partie. Le concept de factions s’opposant au sein du groupe aurait pu devenir porteur sans toute cette emphase. La mise en scène exprime la gravité ad-hoc et Henriksen se montre admirable lorsque Frank a l’opportunité d’exprimer son dépit envers les menées secrètes du Groupe. Les auteurs ont l’intelligence réserver un large espace aux sentiments et aux interactions du triangle Formé par Pater, Lara et Frank, tandis que l’on apprécie que celui-ci et Catherine continuent de se retrouver. Les différents interprètes se révèlent une nouvelle fois ébouriffants de talent. Malheureusement cette exposition somme toute correcte de la situation donne lieu en seconde partie à une exploitation confuse et souvent ridicule. Les excuses de Peter et sa réconciliation avec ses amis demeure un émouvant moment. On observe plusieurs naïvetés confondantes, comme l’agente prétendument secrète d’Odessa révélée par ses boutons de manchette représentant le sigle de l’organisation. Dommage, l’on remarque au passage que les Chouettes semblent toute de même plus intéressantes que les Coqs, l’orgueil hexagonal dut-il en souffrir.
Un navire transportant des immigrants chinois clandestins est découvert par les autorités. A son bord se trouve une mystérieuse jeune femme, crainte par les autres passagers. Elle aurait abordé le bateau en pleine mer, sans que quiconque puisse se rappeler comment (les souvenirs divergent) et serait responsable de la mort de quatre hommes. Frank s’intéresse à cette affaire, le Groupe lui indiquant que l’inconnue a été portée disparue en mer depuis des années. Après une confrontation énigmatique avec elle, Frank perd connaissance. Il se réveille dans un monde où il n’a jamais connu le Groupe et où il vit heureux en famille. Mais Jordan est alors tuée, sans doute par des agents du Mal. Revenu à lui, Frank se précipite à la rencontre de la femme, désireux d’en appendre davantage sur sa destinée. Il arrive à temps pour empêcher qu’elle soit tuée par les autres migrants, mais toute présence semble l’avoir abandonnée. De plus, l’enregistrement de la conversation avec Frank été transformé. L’idée d’une sirène asiatique séduisant les hommes non pas par ses chants mais en recourant à des visions d’un bonheur illusoire était originale et bien trouvée. Supernatural la reprendra d’ailleurs l à peu de choses près, cette fois autour des Djinns. Le jeune Vivian Wu restitue d’ailleurs à merveille l’aura mystérieuse et la nature ambivalente de cette entité venue des océans. On apprécie également le thème toujours inépuisable des univers parallèles et des réalités alternatives, auquel les X-Files sacrifieront d’ailleurs avec succès lors de 4D. cette séquence se montre d’ailleurs tout à fait réussie, à la fois empreinte d’étrangeté mais aussi éloquente à propos des traumatismes subis par Frank depuis le début de la série. Malheureusement, d’une manière réellement surprenante de la part d’auteurs aussi chevronnés et talentueux que Morgan & Wong, de manifestes errements narratifs s’en viennent saboter le récit. Tout d’abord la durée d’exposition, assez terne et verbeuse, s’étend beaucoup trop longuement, jusqu’à pratiquement limiter la séquence onirique dans le dernier tiers de l’épisode. Le cœur de ce dernier se voit don réellement réduit à la portion congrue, alors qu’il laisse le sentiment de n’avoir qu’abordé son sujet. Par ailleurs Siren débouche par un tête à queue particulièrement frustrant, que la scène d’action finale tente en vain de dissimuler. Beaucoup trop d’éléments demeurent dans un flou trop pratique pour qu’il ne s’assimile pas à de la facilité. Les auteurs bottent visiblement en touche, ne parvenant pas à conclure leur sujet. Un épisode pouvant apporter un précieux éclairage du parcours et de la personnalité de Black se cantonne dès lors à un Fantastique plaisant, mais manquant de substance.
18. UN ENFANT EN ARCADIE Un couple lesbien, la solide « Sonny » et la plus jeune et fragile Jeannette, s’évade de prison. Les deux femmes usent de violence, ce qui rend agressives les autorités chargées de la traque. Frank détermine cependant qu’elles se sont échappées car Jeannette est enceinte, suite à un viol perpétré par l’un des gardiens. Jeannette et Sonny croient cependant qu’il s’agit d’une grossesse miraculeuse, l’enfant à venir étant un élu de Dieu. Un examen médical de Jeannette indique que l’accouchement présente des risques importants et qu’un environnement médicalisé est indispensable. Une course contre la montre s’engage entre Black et la police. Frank retrouve Jeannette et l’aide à accoucher, mais la jeune femme succombe. Or il s’avère que son enfant est blanc, le violeur homme de couleur, ne peut donc être son père. Anéantie, Sonny fait en sorte d’être abattue par la police. L’enfant est confié à une famille d’accueil. On apprécie la générosité et l’humanisme des valeurs portés par le scénario et incarnées par Frank Black, de même que ce portrait touchant d’un amour tragique. Mais le scénario coule l’épisode, en multipliant les maladresses. D’entrée, il souffre d’une trop grande proximité avec Angel, opus de la saison précédente et histoire similaire d’une dérive féminine liée à un enfant. Par ailleurs le récit se montre vraiment trop manichéen, forçant notamment le trait concernant les gardes, uniformément crapuleux et haïssables. De plus l’écriture du couple apparaît lénifiante à force de se vouloir positif. Certaines facilités scénaristiques s’avèrent particulièrement visibles, comme l’aisance avec laquelle se déroule l’évasion, comme quoi le héros de Prison Break étaient vraiment nul, en plus de tatoué. L’ensemble du récit vire ensuite au mélodrame le plus exacerbé, avec une constance réellement épaississante. On se croirait revenu aux heures les plus lacrymales de la littérature populaire du XIXème siècle. A force de jouer sur le registre du sentimental, l’histoire en devient au contraire totalement mécanique. L’emploi du ralenti lors de lamort d’une Sonny criblée de balles s’avère également extrêmement pesant, de même que présenter la caractère miraculeux de l’enfant comme une formidable révélation, alors que le public l’avait anticipé depuis belle lurette. Ce fiasco attriste d’autant plus que les deux actrices manifestent un vrai talent. Elles assurent au mieux la défense de rôles aussi massifs. Le premier degré absolu de In Arcadia Ego présente néanmoins le mérite de souligner par contraste la réussite de productions telles The L Word. Instiller de l’humour parfois caustique envers ses personnages et leurs attribuer quelques défauts très humains rend plus subtil crédible si appréciable plaidoyer pour l’acceptation de l’altérité.
Catherine intervient en tant que psychologue auprès de cinq lycéennes affirmant avoir eu une vision de la Vierge Marie. Lara Means s’intéresse également à cette affaire, persuadée qu’une des jeunes filles, Clare McKenna a réellement connu une révélation, mais de la part de Marie-Madelaine.. De plus Ben Fisher, le professeur de théâtre de l’établissement, affirme être membre de la Famille, une faction dissidente du groupe MillenniuM s’intéressant aux personnes ayant de tels dons. Après que le miracle soit devenu visible de tous, Un jeune croyant exalté tente alors de tuer Clare, par jalousie et par colère de ne pas avoir été élu. Fisher s’interpose pour la protéger et reçoit le coup mortel. Plus tard, Lara révèle à Catherine la preuve que la jeune fille est la descendante de jésus et de Marie-Madeleine. La caractéristique première d’Anamnesis réside dans l’absence totale de Frank Black, notre héros n’étant qu’évoqué de temps à autres. Cela situe d’emblée l’épisode en marge de MillenniuM, tant Black marque de son empreinte l’ensemble de l’univers de la série. Les deux auteures ont l’intelligence de ne pas tenter de faire du Black sans Black et d’utiliser cette caractéristique comme une opportunité d’explorer d’autres voies), elles ont également l’excellente idée de mettre en avant un duo d’enquêtrices inédit, avec l’association parfois antagoniste Catherine et Lara. Le scénario évite habilement tourte trivialité et jalousie de Boulevard entre les deux femmes les plus proches de Frank. Au contraire l’épisode nous offre une passionnante controverse autour du mystère de la Foi, finement agencée et parfois étonnement érudite, tout en demeurant parfaitement explicitée. Les caractères des deux héroïnes sont parfaitement dessinés et idéalement mis en opposition, entre spiritualisme visionnaire pour Lara et incrédulité scientifique pour Catherine. Ces ambitieux dialogues se suivent avec intérêt, d’autant que les diverses péripéties les rythment avec efficacité. Dans cet opus éminemment féminin, où les différentes figures masculines apparaissent comme sources de menace ou de tension (y compris Peter), l’approche de la personnalité de Marie–Madeleine et de sa supposée relation charnelle avec le Christ s’effectue avec une légère mais indéniable touche militante, mais de manière autrement plus subtile que dans le déplorable Da Vinci Code. Les deux actrices incarnent superbement leurs personnages, rejointes par une distribution en tous points parfaite. Par ailleurs, même si Anamnesis constitue une parenthèse au sein du corpus principal de MillenniuM, il ne demeure pas pour autant enchâssé dans sa bulle. Il rejoint ainsi la narration par l’évocation de la personnalité de Frank (on comprend bien mieux les réactions de Catherine ou les fêlures de Lara), mais aussi par les perceptives millénaristes et les Signes guettés avidement par le Groupe. Malheureusement c’est dans de domaine que l’épisode échoue au port, avec un consternant retour au fatras mystique, soit la plaie vive de cette saison (Saint Graal, Mérovingiens et Suaire de Turin !), lors des ultimes révélations. Dommage, mais, tel quel, Anamnesis n’en reste pas au moins un splendide hommage à ces deux femmes admirables que sont Lara et Catherine, au moment où leur tragique départ de MillenniuM approche à grands pas.
20. L’APPRENTISSAGE DE L'ORDINAIRE Un lycéen est assassiné et l’un de ses camarades, le très brillant Landon Bryce, est enlevé. Grâce à son Don, Frank perçoit que la responsable en est la diabolique Lucy Butler. En alternant sa forme masculine, brutale et hostile, et féminine, compréhensive et séductrice, elle entreprend d’altérer la personnalité de Landon, lui faisant perdre ses capacités intellectuelles,. Elle cherche à lui faire perdre toute ambition concernant sa vie, comme toute croyance en la beauté de l’amour, en détruisant tout respect envers soi même. Peter et Frank découvrent que Térésa, la conseillère psychologique de l’établissement a subi par le passé le même lavage de cerveau, orchestré par une Lucy se créant ainsi tout un groupe de fidèles. Térésa, incité par Black, se révolte néanmoins et lui indique l’emplacement de la ferme où se déroulent les conditionnements. Frank intervient à temps pour sauver les jeunes gens, mais Lucy Butler disparaît une nouvelle fois. Le titre original ne sera pas évoquer quelques quasi réminiscences aux amateurs des Avengers, mais, pour cette fois, on éprouve surtout l’envie d’applaudir le magnifique titre français, une rare performance. En effet, cet épisode, à plutôt rapprocher du glaçant Lavage de Cerveau (période Cathy Gale), nous narre la transformation abominable de brillants esprits devenus ternes et amoindris. Ce scénario original touche par son sujet, car se situant au parfait opposé des histoires traditionnellement vues à l’écran, et pas seulement aux Etats Unis. Celles-ci nous racontent comment on peut devenir meilleur en se surpassant à for ce d’efforts. Cette narration, remarquable par sa crédibilité, d’une chute choque par sa transgression. Dans MillenniuM jusqu’ici on torturait et on amputait les corps, cette fois l’on procède de même avec l’esprit. La résultante s’en montre bien plus terrifiante encore. Cette oblitération de l’intellect et du sentiment n’emploie pas des formes scientifiques sophistiquées, tel n’est pas l’objet de la série. A l’opposé, on apprécie au plus haut point l’absence totale du charabia ésotérique trop fréquent cette saison. Le processus développe cependant un effroi palpable, provenant de plusieurs facteurs s’unissant en un pur cauchemar. Le décor de la ferme, claustrophobique comme jamais et au total huis-clos, à la décoration anxiogène au possible, présente l’un des chefs d’œuvre de MillenniuM, alors même que la série a si souvent réalisé des prouesses en la matière. La superposition physique à l’enferment mental ressenti par les proies de Lucy s’avère magistral. Lucy se montre de nouveau en grande forme, toujours idéalement interprétée une superbe Sarah-Jane Redmond, avec son charme vénéneux au dernier degré. Les auteurs ont l’excellente idée de développer le parcours de l’entité et de l’inscrire sur des décennies. les lecteurs du Roi de l’Epouvante pourront penser à un Randall Flagg au féminin, une combinaison redoutable. L’intrigue a la suprême habileté de rendre l’avatar féminin de Lucy, en apparence douce et maternelle, encore davantage destructrice que l’abrupt masculin, Elle est en réalité le véritable mactre d’ouvre du processus, conduisant les jeunes gens à abdiquer leur identité, renonçant d’eux mêmes à la majeure partie de leur humanité. Lucy parvient à apparaitre si sincère que cela en devient délectable. L’adversaire de Frank relevant le plus du Fantastique au cours de la première saison s’insère idéalement dans la deuxième. La musique répétitive accomplit son effet déstabilisateur, y compris sur le spectateur (cette fois-ci on retrouve Le Joker).A côté de cette éprouvante démonstration, l’enquête de Frank s’avère certes magistralement menée, mais demeure secondaire. Un fait souligné élégamment par des auteurs évitant audacieusement toute confrontation directe. Le cœur de l’épisode est ailleurs, avec une résistance acharnée du jeune homme devenant rapidement poignante. Mais aussi victorieuse, car en définitive c’est bien en lui même que Landon trouve la force de contrecarrer la diabolique entreprise. Une enthousiasmante marque de confiance en l’Humain, il fallait sans doute une série aussi sombre que MillenniuM pour évoquer avec autant de force l’Espérance. L’Apprentissage de l’Ordinaire reste sans doute la plus aboutie des rencontres avec cette originale et mystérieuse créature nommée Lucy Butler.
21. ANALYSE DIABOLIQUE Dans une cafétéria quatre vieux messieurs antipathiques discutent autour d’une tasse de café. Nous découvrons cependant rapidement leur véritable apparence : il s’agit de démons travestis en humains, racontant comment ils parviennent à damner ces derniers. L’un pousse un jeune homme fasciné par les tueurs en série à enfin oser en devenir un lui même, le deuxième pousse les individus au suicide en leur faisant comprendre la vacuité de leur existence, le troisième rend ou un censeur de série télé en exacerbant ses névroses et le quatrième tombe amoureux d’une humaine, mais l’accule néanmoins au suicide par désespoir, car telle est sa nature. Nos amis se rendent néanmoins compte que tous ont croisé un homme capable de percevoir leur véritable apparence : Frank Black. Pour cette ultime participation à la série du si imaginatif Darin Morgan, on regrettera une moindre ambition que lors de Jose Chung’s Doomsday Defense. Retenir la structure du film à sketchs revient à opter pour une relative facilité. Il sera toujours plus aisé d’écrire de brèves scénettes indépendantes (pas plus d’une dizaine de minutes) qu’une longue histoire autrement complexe. Darin donne aussi l’impression de choisir l’atypique pour l’atypique, prenant le risque rendre mécanique le refus du mécanisme d’une série. Mais ces quelques réserves demeurent tout à fait relatives. Contrairement à la plupart des productions du genre les quatre récits proposés s’avèrent égaux en intérêt et en drôlerie corrosive, alors que leur fil rouge s’avère astucieux. De plus Darin a l’habileté de multiplier les passerelles entre ses histoires (notamment des identités de lieux et de situations), provoquant un effet miroir et un humour de répartition des plus divertissants. Tout comme lors de son travail précédent, le facétieux auteur prend un main plaisir à quelque peu rosser MillenniuM et son héros, dont on apprend ainsi au passage que fumer de la marijuana lui ferait le plus grand bien. Les terribles démons présentés comme d’épouvantables fléaux deviennent ici des farceurs malicieux, certes cruels mais surtout… Lucides. En effet la grande idée de cet épisode pamphlétaire corniste en un magistral retournement de perspectives. On se situe cette fois non plus de notre point de vue, mais de celui de diables analysant les divers travers de l’Humanité. Le résultat s’avère aussi caustique que peu reluisant pour notre désespérante espèce, passée au vitriol rigolard de Darin Morgan. Celui-ci transforme les démons en porte-paroles et décoche tous azimuts ses missiles satiriques. Passent ainsi à la moulinette les fans fascinés par les sérial killerss, et donc, implicitement, de MillenniuM. Ils en ressortent autant massacrés à la tronçonneuse que les passionnés de Roswell et autres X-Files peuplant le Seigneur du Magma. La verve à la fois finement moraliste et d’une drôlerie homérique de Darin s’attache également à l’absurde quotidien de nos sociétés occidentales (ou quand l’humour noir devant fable à force de toucher juste) ou aux censeurs du monde délirant de la télévision, objets d’une féroce vindicte revancharde. Symboliquement, l’individu est d’ailleurs interprété par le même acteur que le chef des quasis Scientologues de Jose Chung’s Doomsday Defense. Il n’y a pas jusqu’aux X-Files eux-mêmes qui ne deviennent la cible d’une satire endiablée, avec une reprise passablement démente de la célèbre vidéo de l’autopsie du pseudo Alien, cette fois exécutée par les clones de Mulder et Scully. Il ne manque plus que l’illuminé du Seigneur du Magma surgisse pour que le tableau soit complet (Roswell ! Roswell !). On rit aux éclats, lorsque l’ultime histoire nous séduit a contrario par sa mélancolie désespérée. Les démons eux mêmes sont de pauvres diables. La mise en scène de Darin Morgan se montre également à la hauteur, multipliant les effets les plus imaginatifs, à l’instar de son écriture. Les comédiens vétérans et les artistes du maquillage font également merveille. A total ce démon souriant et iconoclaste qu’est Darin finit par remporter haut la main cet ultime pari. Son opus hors normes apparaît également comme une agréable parenthèse avant le tragique final de saison qui s’annonce.
22-23. LE QUATRIÈME CAVALIER/L’HEURE EST PROCHE Frank et Peter sont mis en quarantaine après avoir enquêté sur un homme tué par une forme de virus. Ils sont libérés après avoir reçu un vaccin. La maladie continue cependant à se répandre. Frank fait part à Peter de ses soupçons concernant l’implication du Groupe. Peter lui révèle une prophétie concernant un tremblement de terre, qui se révèle exact. Après cette démonstration Frank est appelé à intégrer pleinement le Groupe. Toutefois, toujours méfiant, il opte pou intégrer le Trust, organisation de consultants policiers. Peter découvre dans les bases de données du Groupe que le virus, issu de la recherche soviétique, a été disséminé dans la nature suite à la chute de l’URSS. Le Groupe Millenium a pu développer un vaccin, mais le réserve à ses seuls membres, désireux de contrôler l’Humanité après la catastrophe. Gilbert, contact de Frank au sein du Trust est assassiné. Lara Means, accède aux ultimes secrets du Groupe, ce qui la plonge dans la folie, puis la catatonie. Elle a le temps de donner sa propre dose de vaccin à Frank. Le virus se développe et Frank se réfugie avec sa famille dans une cabane qu’il possède, au fond des bois. Le vaccin est donné à Jordan. Dans la nuit Catherine s’aperçoit qu’elle est atteinte et part dans forêt pour que sa famille n’assiste pas à son agonie. La saison s’achève sur un Frank Black en état de choc, les cheveux devenus blancs. Avec une remarquable intensité, cet haletant final de saison porte à son paroxysme les diverses failles exprimées par les héros au fil de la saison. La suspicion de Frank envers el Groupe éclate au grand jour, tandis que Peter apparaît plus que jamais tiraillé entre sa croyance et son amitié envers ce denier. Terry O’Quinn se montre particulièrement grandiose dans l’expression de l’écartèlement de son personnage. Lara Means achève son chemin de croix lors d’un simili clip vidéo particulièrement réussi, exprimant avec une rare éloquence l’immersion dans la folie. Catherine hurle sa haine envers el groupe, qu’elle juge responsable da la faillite de son mariage. Morgan & Wong, ici au sommet le leur talent de scénaristes, parviennent ainsi à conjuguer une admirable profondeur psychologique à une impressionnante avalanche d’évènements. Le rythme du récit se montre trépidant à souhait, jusqu’à parfois évoquer le tonitruant arc Anasazi des X-Files. La tonalité n’en demeure pas moins plus sombre que jamais. Le renouvellement de la série apparaissait alors comme peu probable et les auteurs décident avec à propos de confer à l’histoire d’authentiques accents d’Apocalypse, pour l’ensemble du monde comme pour chacun des personnages. On apprécie également que le fatras mystico-ésotérique ayant si souvent empesé la saison se voit ici minimisé. D’ailleurs Morgan & Wong en avouent eux-mêmes l’inanité, en faisant débuter la fin du Monde près de 600 jours avant cet An 2000 tellement prophétisé. There is no Millennium ! s’exclame Frank, dans un moment paroxystique. Quelques excellentes idées viennent encore accroître le succès de ce final, comme la spectaculaire cérémonie où se voit révélée la véritable doctrine du Groupe, entrecoupée lors d’un parfais montage avec un abominable assassinat, ou la troublante découverte d’une Morley. La mise en scène impulse elle aussi beaucoup de force au récit, notamment lors des épouvantables morts dues à la protéine/virus. De pures scènes de cauchemar, rendent particulièrement effroyable cette vision de l’Apocalypse. L’ultime sacrifice de Catherine s’avère réellement bouleversant, tandis que la conclusion de l’épisode, un Frank Black apparemment définitivement brisé, s’avère aussi sombrement idéale que celle de Requiem pour les X-Files.
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