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Les Brigades du Tigre (1974-1983)

BONUS

1. 8ème salon des séries TV et du cinéma

2. Les Brigades du Tigre : les limiers des temps modernes

3. Les Brigades du Tigre dans Génération Séries


1. 8EME SALON DES SÉRIES TV ET DU CINÉMA

Les éditions Yris

Michelle Roussel - Didier Liardet

Je me suis rendu au 8ème salon des séries TV et du cinéma organisé par Sérialement Votre qui se tenait à Paris le 19 novembre 2011, et j'ai eu la chance de rencontrer des gens intéressants du monde des séries.

Dans une des salles se trouvait un stand des éditions Yris et je me suis entretenu avec Michelle Roussel, d'abord du livre consacré aux Brigades du Tigre, qu'elle a coécrit avec Didier Liardet en 2008, puis des séries en particulier. Je sais maintenant pourquoi le livre a quelques imperfections. Didier Liardet et Michelle Roussel connaissent notre site et cette dernière se souvenait de ma critique du livre. Les erreurs de syntaxe sont dues aux impératifs de production : le livre devait sortir du vivant de Claude Desailly qui était déjà très malade lorsque Michelle Roussel l'a interviewé. Il n'y a donc pas eu de relecture contrairement aux autres ouvrages, et vu que le livre s'est bien vendu mais sans plus, il n'y a pas eu de nouvelle édition. Michelle Roussel m'a également évoqué une manifestation de séries dans le Var en juin 2012 avec la participation de Roy Thinnes et d''un acteur anglais de série policière'.

J'ai ensuite pu converser une bonne demi-heure avec Didier Liardet sur, entre autres, les difficultés d'écrire un livre sur les séries en France. Par exemple, de nombreuses photos sur Les Brigades du Tigre dorment dans des archives, mais les ayant-droits refusent qu'on les utilise contrairement par exemple aux sources pour la série V d'où la sortie du livre (avec deux fans clubs qui se chamaillent pour avoir leur nom dans l'ouvrage). Didier Liardet m'a confié que Jean-Claude Bouillon était stupéfait qu'un livre aussi épais avait pu être élaboré à partir de l'interview. Un livre sur les séries françaises n'est donc plus d'actualité vu les difficultés et il n'y aura pas d'ouvrage sur Vidocq. Les prochains ouvrages à sortir sont basés sur des thématiques comme l'espionnage (déjà sorti) ou les séries policières (à venir). À noter aussi que la cinquième édition du livre sur Chapeau melon et bottes de cuir sortira l'année prochaine. J'en ai profité pour faire dédicacer par l'auteur mon exemplaire des Brigades du Tigre.   

En tout cas, souhaitons que les quelques ouvrages encore à sortir de ces deux auteurs sympathiques aient du succès. Le tout est de faire des livres abordables m'a dit Liardet avec du texte intéressant. Le livre du cinquantenaire des Avengers est beau mais les photos ne sont pas inédites et on n'y apprend rien. La difficulté aussi de sortir de bonnes collections DVD en France ; ainsi, TF1 sortit Les Envahisseurs sans bonus et il a fallu toute la détermination de Didier Liardet pour que la soucoupe volante des DVDs soit celle de la série et non pas une empruntée à un autre film ! Quand on voit comment Eléphant sort des séries à des prix exorbitants pour une piètre qualité… Idem pour les Brigades du Tigre dont l'image DVD est celle de la VHS tout simplement.

Rencontre avec les Brigades du Tigre

François Maistre - Claude Bolling

Cette journée était marquée par plusieurs rencontres et celle de 16h à 17h30 était consacrée aux Brigades du Tigre. Une vingtaine de personnes étaient présentes pour s'entretenir de la série avec les acteurs François Maistre (Faivre dans la série) et Jean-Claude Bouillon (le commissaire Valentin), le compositeur Claude Bolling et son fils, et les auteurs Michelle Roussel et Didier Liardet.

Les Brigades du Tigre est une série de 36 épisodes (6 saisons de 6 épisodes) qui fut diffusée sur Antenne 2 de 1974 (programmes de Noël) à 1983. Elle raconte l'évolution de la police de 1907 (premier épisode) aux années 30 à travers trois policiers qui évoluent avec leur temps et les nouvelles techniques.

Il y régnait une excellente ambiance avec des participants aussi enjoués que lors du tournage de la série. Les différents invités ont tous été formidables de naturel et de truculence. Une vraie complicité s'est d'ailleurs immédiatement formée entre eux et le public. François Maistre fut le premier arrivé puis vint Claude Bolling et enfin Jean-Claude Bouillon qui excusa Jean-Paul Tribout, retenu au théâtre. François Maistre a expliqué toujours tirer avantage auprès des agents de la circulation d'avoir été Faivre. Maistre ajouta qu'il avait reçu de très touchants courriers lors de la disparition de Pierre Maguelon, disant qu'il avait perdu l'un de ses hommes. La société Telecip avait demandé à Claude Bolling de faire une composition aussi bonne que celle de Borsalino et, en définitive, les responsables ont trouvé que 'c'était mieux que Borsalino'. Jean-Claude Bouillon n'était pas le premier acteur pressenti pour incarner Valentin. En fait, le choix de Victor Vicas était déjà fait pour un autre interprète, et c'est la femme du réalisateur, qui regardait à la télévision allemande Alexandre bis, qui a convaincu son mari de changer d'acteur.

Michelle Roussel commença par rappeler les origines de la série. Pierre Bellemare voulait faire une série de grande envergure (150 épisodes étaient prévus !) et la faire ressembler aux Incorruptibles, série américaine à succès des deux côtés de l’Atlantique. Le projet capota mais Claude Desailly garda l'idée dans ses cartons. Michelle Roussel évoqua ensuite les adaptations faites pour que les Brigades du Tigre ne soient pas, comme dans la réalité, confinées aux arrestations de voleurs de poules. Jean-Claude Bouillon se souvenait à l'occasion du premier épisode (Ce siècle avait 7 ans...) lorsqu'il circulait en vélo. Desailly sut utiliser les évènements et les personnages historiques de cette époque pour construire des scénarios plausibles. De plus, certaines histoires permettaient de coller aux actualités des années 70 (l'avortement) et 80 (la peine de mort). Jean-Claude Bouillon rappelait pour l'occasion que Claude Desailly avait toujours été engagé et qu'il vendait L'humanité un certain temps. La tâche était facilitée par le fait qu'il n'y avait pas de censure ou de directives imposées sur les personnages, pas de politiquement correct directif. Jean-Claude Bouillon a notamment comparé, avec beaucoup de pertinence, les conditions de tournages et de productions entre les séries françaises contemporaines et celles de l'ORTF. Particulièrement instructif… et révélateur ! La particularité des Brigades : un seul scénariste, un seul réalisateur, serait impossible de nos jours.

Jean-Claude Bouillon

Le succès ne fut décelé que lors de la deuxième saison et Jean-Paul Tribout avait d'ailleurs baptisé la série : Les Trigades du Bide. Les tournages de chaque saison duraient de trois à quatre mois et c'était une véritable récréation pour les acteurs malgré le perfectionnisme de Victor Vicas qui voulait toujours donner du mouvement dans les images. Ainsi, il demandait aux acteurs d'être sans cesse en mouvements. Il surveillait tout cela dans son objectif, et un jour, un des comparses y avait mis de la suie ce qui a donné l'illusion que Victor Vicas avait un coquard. Le succès de la série fut assuré par la réelle camaraderie qui s'est tout de suite installée dans l'équipe. D'ailleurs, les acteurs sont toujours restés en contact depuis le tournage. Chacun des personnages avait 'son' épisode et François Maistre se souvenait de celui dans lequel Faivre tombe amoureux d'une jolie femme à la grande risée de ses inspecteurs.

On a eu droit à de nombreuses anecdotes sur le tournage de cette série, pour beaucoup complètement inédites. Ainsi, Victor Vicas, d'origine hongroise, ne maitrisait pas le français parfaitement et il voulait un plan sur une mouette, et l'acteur Pierre Maguelon, décédé le 10 juillet 2010, lui a dit que le véritable nom était un 'échandon'. Plus tard, au repas, l'acteur sortit une bouteille de …'Moët & Chandon' ! Le réalisateur, qui prenait tout au premier degré, fit la gueule pendant deux jours. Une autre fois, Vicas cherchait un acteur pour jouer Clemenceau et demanda conseil au trio qui fit venir… un acteur de couleur !

La série manquait terriblement de moyens et toutes les mémorables scènes entre Valentin et M. Faivre ont été tournées, non pas en studio, mais dans les locaux de la production. Juste à côté, les acteurs jouaient à la pétanque entre deux prises et, parfois, lors des scènes d'intérieur, on peut entendre les carreaux ! Il pouvait y avoir aussi quatre épisodes tournés en même temps car si un lieu était intéressant, on en profitait pour tourner plusieurs scènes (Jean-Claude Bouillon a répondu lui-même à cette question que j'ai posée). Les tournages en extérieur ont eu lieu dans la région d'Orléans, Namur (ndlr : La Main noire), La Rochelle (ndlr : Le vampire des Karpates, Le réseau Brutus) et vers Carpentras (ndlr : Le réseau Brutus). Le remplacement de François Maistre est dû à la coproduction avec l'Allemagne mais les scènes n'avaient plus la même envergure. Il régnait, en effet, une complicité parfaite entre François Maistre et les trois acteurs, Jean-Claude Bouillon, Jean-Paul Tribout et Pierre Maguelon. Cela fut facile à Jean-Claude Bouillon de se raser la moustache pour les deux dernières saisons car c'était le seul à porter un postiche !

L'épisode préféré de Jean-Claude Bouillon semble être Le cas Valentin, et l'acteur a évoqué le fan canadien qui lui a écrit plusieurs fois. Après trois/quatre lettres, il l'invitait chez lui en lui envoyant des photos et en lui disant qu'il changerait dans le logement ce que l'acteur voulait. Il a reçu des lettres de toutes sortes, Pierre Maguelon recevait surtout des spécialités culinaires.

Joe Dassin aurait souhaité interpréter la célébrissime chanson, mais cela n'a pu se faire pour des raisons de maisons de disques (c'est Philippe Clay qui la chanta), et Jean-Claude Bouillon précise que certaines personnes lui entonnent les airs de la musique en le rencontrant, preuve que le générique est toujours dans les mémoires. Claude Bolling précisa que la musique était composée après le tournage ce qui lui laissait la possibilité d'avoir accès aux images. Victor Vicas était friand de certaines compositions (Somnifère entre autres) et il était prêt à la glisser très souvent. Le compositeur a fait évoluer sa musique au rythme des époques.

Les comédiens ont reçu un entrainement pour les techniques de combat avec le champion de boxe française de l'époque Claude Simonot ; Jean-Claude Bouillon s'est souvenu du nom sans consulter le livre, précisant qu'après tout, quarante ans, ce n'était pas si vieux ! Les combats se sont modifiés suivant la période et ils sont devenus de plus en plus violents. Lors d'une scène de bagarre, Jean-Paul Tribout fut bien amoché, mais Victor Vicas insista pour terminer de tourner la scène (de l'autre côté) avant qu'il ne soit recousu !

Les automobiles étaient des vedettes à part entière et les louer coûtait aussi cher qu'un acteur (dixit Jean-Claude Bouillon). À la fin de la journée, cela faisait les biscotos et Pierre Maguelon était le spécialiste de la manivelle de ces vieux tacots.

Il n'y eut aucune relation entre les comédiens et Antenne 2. Ils ne connaissaient que leur employeur Telecip, une filiale de Phillips à l'époque. Bouillon a d'ailleurs été surpris quand il a vu les DVD puisque ceux-ci commencent par « TF1 et AB productions présentent ». Jean-Claude Bouillon a précisé qu'il touchait quelque chose des ventes DVD et qu'il en vit encore, mais que son salaire à l'époque, bien que confortable dans les années 70, n'avait rien de comparable avec ceux pratiqués maintenant ; un peu la différence entre le franc et l'euro a-t-il précisé.

Une septième saison était en préparation et Claude Bolling a encore les scénarii qui tenaient la route, mais le changement de directeur de chaîne (déjà la médiocrité du service public) a jugé le projet dépassé alors que les acteurs s'attendaient à reprendre du service. Un retour dans les années 90 avait été envisagé : Valentin aurait pris la place de Faivre, Pujol aurait ouvert un cabinet de privés et Terrasson aurait été cafetier et il aurait demandé de l'aide à ses anciens collègues. Ce projet n'a pas vu le jour.

Jean-Claude Bouillon a dit qu'il avait été sollicité pour le film (une scène d'entrainement de boxe) mais il a décliné devant les imperfections du scénario. Il donna beaucoup d'explications sur le bide prévisible du film, notamment par le rejet de la série dont il prétendait s'inspirer. Dès le début, la voix-off fait mention de Moscou comme capitale russe (alors que c'est Saint-Pétersbourg), les moteurs des voitures d'époque avaient été modifiés pour que la vitesse soit perceptible et les armes faisaient des gros trous. Le scénario écrit par Desailly n'a pas été pris en compte et l'auteur a demandé que son nom n'apparaisse pas au générique. En voyant le film, Jean-Claude Bouillon a compris pourquoi. Tout cela ne respectait pas l'époque contrairement à la série. L'acteur a fait mention de son passage à Plus belle la vie où rien n'est coordonné : quatre réalisateurs pour quatre scènes différentes et tous les liens se font au montage. Jean-Claude Bouillon a d'ailleurs précisé que les tournages ont changé : avant, l'acteur était au centre du tournage, maintenant, chacun fait ce qu'il a à faire de son coté et on leur tourne le dos car tout est surveillé sur écran. Tout est maintenant formaté. Il a d'ailleurs cité un exemple révélateur : durant un tournage, un metteur en scène a eu l'idée de mettre une caméra au balcon d'un immeuble surmontant la scène, pour donner un effet adéquat. Fureur de la production devant ce coût imprévu et lettre comminatoire lui sommant de se justifier. Aucune marge de création n'est permise durant ces tournages à la chaîne. Apparemment des stagiaires sont là en permanence, avec pour mission de rapporter à la production la moindre liberté prise par le réalisateur.

À la fin de la réunion, séance de signatures et j'en ai profité pour faire dédicacer mon livre par Jean-Claude Bouillon et François Maistre (c'est devenu un collector avec trois dédicaces) et le double CD de la musique par Claude Bolling. Une excellente après-midi. La rencontre a été un très beau et chaleureux moment et donnait une véritable envie de redécouvrir cette série mémorable.

Bonus : la septième saison

Évoquée lors de la réunion, voici les ébauches de cette septième saison :

Le roi de pique

1931   Les brigades vont avoir à faire avec une bande de jeunes bourgeois agissant sous les ordres d'un mystérieux chef…

Maria et les oustachis

1934  Des terroristes yougoslaves prennent en otages les membres de l'ambassade à Paris. Parmi les personnes retenues contre leur gré se trouve… Valentin…

Pickpocket saga

1931  Valentin va affronter une famille de pickpockets très particulière…

Le coup du six février

1934  Profitant que la police est occupée par des émeutes, une bande de malfaiteurs veut commettre le casse du siècle. Mais Valentin, Pujol et Terrasson veillent…

Stratagèmes

1935  Les brigades doivent protéger un savant, spécialiste des fusées, qui a fui l'Allemagne…

Les disparus de Ville-d'Avray

1933 Des enlèvements liés à une mystérieuse clinique forcent les brigades à envoyer sur place pour enquêter… Madame Terrasson… 

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2. LES BRIGADES DU TIGRE :
LES LIMIERS DES TEMPS MODERNES

Écrit par Didier Liardet et Michelle Roussel et préfacé par Jean-Claude Bouillon.

Publié en octobre 2008 aux Éditions Yris ; 256 pages, 350 photos couleur et noir & blanc, format 17 x 24,5 cm.  

Cet ouvrage est le premier livre de référence consacré à la série culte française diffusée pour la première fois à Noël 74 et qui occupera nos petits écrans pendant une décennie (du 21 décembre 1974 au 11 novembre 1983).

Attendu par les fans encore nombreux, ce livre a beaucoup de qualités, mais également, malheureusement, des défauts récurrents, mais il constitue le seul et unique ouvrage de référence sur cette série française mythique. J'ai eu l'explication des imperfections lors du 8ème salon de séries TV et cinéma du 19 novembre 2011. J'ai eu en effet la chance de m'entretenir longuement avec Michelle Roussel. Les erreurs de syntaxe sont dues aux impératifs de production : le livre devait sortir du vivant de Claude Desailly qui était déjà très malade lorsque Michelle Roussel l'a interviewé. Il n'y a donc pas eu de relecture contrairement aux autres ouvrages, et vu que le livre s'est bien vendu mais sans plus, il n'y a pas eu de nouvelle édition. Avec ces explications, le lecteur est beaucoup plus indulgent pour ce livre qui reste, malgré ces erreurs, un ouvrage de référence et de qualité.

Points positifs

- Un découpage clair en six chapitres correspondant aux six saisons avec un récit chronologique des évènements de tournage pour chaque saison. Les personnalités importantes de la série ont des passages propres : Claude Desailly, Victor Vicas, Claude Bolling, François Maistre… Chaque chapitre se termine par les résumés et anecdotes des épisodes, un guide commenté très intéressant.

- Les témoignages passionnants de Jean-Claude Bouillon (avec préface), Jean-Paul Tribout et François Maistre.

- Les nombreuses photographies en n&b et couleur de l'ouvrage, très souvent inédites ou peu utilisées. Un véritable régal pour les yeux ! Tous les épisodes sont ainsi richement documentés en photographies.

- On apprend beaucoup de choses sur les véhicules utilisés, le tournage (qui durait trois mois par saison avec deux premières semaines consacrées au tournage de toutes les scènes en intérieur), le peu d'humour de Victor Vicas, l'engueulade Vicas/Maistre (qui aboutit au remplacement du commissaire Faivre)… une quantité d'anecdotes qui étaient restées inconnues des fans, pour la plupart, pendant plus de trois décennies !

- La critique du film sans langue de bois. Jean-Claude Bouillon refusa, avec juste raison, d'en faire la promo au journal de 20h.

- Le chapitre 8 intitulé 'Les hommes du Tigre' retrace la carrière des trois acteurs principaux.

- L'annexe sur tous les produits dérivés sortis sur la série depuis 1974.

Points négatifs

- Le défaut le plus dérangeant concerne les nombreuses fautes de syntaxe et d'orthographe. C'est assez surprenant pour une édition qui se veut de référence et de qualité, mais l'explication des auteurs fait 'passer la pilule'.

- Les seconds rôles sont passés au crible avec une liste fastidieuse et rébarbative de leurs films et participations TV. Connaître, par exemple, tous les films de Jacques Legras (sans que sa participation à La caméra invisible ne soit mentionnée) lasse. Il aurait été plus intéressant de retrouver les acteurs encore vivants et de recueillir un témoignage succinct de leur participation à la série (comme Jean-Pierre Julémont).

- Le chapitre 7 est quelconque. On aurait préféré une partie plus détaillée concernant les Brigades Mobiles et leurs nouvelles techniques évoquées dans la série plutôt que des leçons d'histoire concernant le Maroc, les Balkans, la révolution bolchevique…Ce chapitre est aux deux tiers du remplissage n'ayant qu'un rapport lointain avec la série. Une évocation détaillée des lieux de tournage dans le Loiret, La Rochelle ou en Région Parisienne aurait été beaucoup plus intéressante.

Conclusion

Un ouvrage au potentiel de 4 étoiles sans les nombreuses fautes d'orthographe et de syntaxe. Plus d'anecdotes pour chaque épisode et un chapitre consacré aux lieux de tournages aurait été la perfection. En l'état actuel, il reste néanmoins le livre de référence sur cette prodigieuse série et les fans peuvent s'estimer heureux qu'il ait vu le jour. Lors du salon, Didier Liardet m'expliqua les difficultés d'écrire un livre sur les séries en France. Par exemple, de nombreuses photos sur Les Brigades du Tigre dorment dans des archives, mais les ayant-droits refusent qu'on les utilise contrairement aux anglo-saxons, beaucoup plus conciliants. Jean-Claude Bouillon fut d'ailleurs stupéfait qu'un livre aussi épais ait pu être élaboré à partir de l'interview. Un livre sur les séries françaises est donc une réalisation proche de Mission : Impossible, et ne gâchons pas notre plaisir !

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3. LES BRIGADES DU TIGRE DANS GÉNÉRATION SÉRIES

Numéro 14 de Génération Séries (été 95) avec un dossier consacré aux Brigades du Tigre.

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Ce numéro est épuisé et il est très difficile de se le procurer étant donné que cet excellent magazine a cessé sa publication. Il serait dommage néanmoins que les fans de la série ne puissent pas avoir accès aux cinq témoignages des participants à la série. Les propos de Claude Desailly, Jean-Claude Bouillon, Pierre Maguelon, Jean-Paul Tribout et Claude Bolling ont été recueillis par Christophe Petit, Stéphane Lerouge et Marc Georges dans un dossier de vingt-cinq pages. Outre les cinq interviews illustrées de nombreuses photos couleur et n&b, le dossier comprend un article sur l’épopée des vraies Brigades du Tigre et un guide des 36 épisodes avec distributions, résumés et anecdotes.

Vous trouverez ci-dessous un résumé des thèmes abordés lors des cinq interviews citées ci-dessus.  

Claude Desailly

Le père des Brigades, qui a écrit les 36 épisodes, raconte qu’il a trouvé l’idée dans un livre que lui avait offert sa mère sur le commissaire Belin. La pagaille dans la police du début du XXe siècle avait amené à fonder les Brigades Mobiles.

Claude Desailly raconte la genèse des Brigades du Tigre que j’évoquais dans la présentation de la série, et les différentes personnes impliquées (positivement ou négativement) sur plusieurs années : Alain Decaux, Pierre Bellemare, Roland Gritti, Pierre Sabbagh et Claude Désiré. On retrouve aussi les évocations de la septième saison écrite mais jamais tournée, et du snobisme de la presse de gauche telle Libération.

Par contre, ce que j’ai appris et qui ne figure pas sur le site, est la pointe de frustration de Desailly de voir ses histoires réduites à moins d’une heure alors que le scénario aurait pu les faire durer une heure et demie.

Le remplacement de François Maistre était double pour Desailly. La dispute avec Vicas mais aussi la volonté de prendre un acteur allemand pour la coproduction. Desailly s’était mis en colère car Jean-Paul Tribout, pas très apprécié par la production, devait être sacrifié ! Le personnage écrit pour Pinkas Braun n’a pas été respecté et l’acteur était pâlot à côté des autres pour le scénariste.

Desailly évoque aussi le coup de poker avec le journaliste de France-Soir à qui il révèle que la série pourrait passer sur TF1 pour une cinquième saison et cela fait changer d’avis les dirigeants d’Antenne 2. Le scénariste insiste sur les restrictions de budget malgré le succès de la série et des difficultés rencontrées sur L’ange blanc par exemple et les rapports tendus avec la production avec l’imposition (éphémère) d’un coscénariste. Une production qui voulait faire ‘évoluer les choses’ et modifier le cours de la série – en fait, un peu comme dans les séries contemporaines – ce qui a fait dire à Desailly : « J’avais à faire à des commerçants qui n’ont aucune fibre poétique. »

« Chaque épisode ne transforme pas l’Histoire mais s’en sert ».

http://theavengers.fr/index.php/hors-serie/annees-1970/les-brigades-du-tigre/presentation

Jean-Claude Bouillon

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Le commissaire Valentin à l’écran raconte comment il fut choisi après que Li Erben, la femme de Victor Vicas, l’a vu dans la série Alexandre bis à la télévision. Cette anecdote, ainsi que quelques autres, a été évoquée par Jean-Claude Bouillon lors du salon des séries en novembre 2011. Ainsi, les plaisanteries cocasses endurées par Victor Vicas de la part du trio (œilleton de la caméra enduit de cirage, la ‘mouette-échandon’ de Maguelon) figurent aussi dans l’entretien du magazine. Victor Vicas est dépeint comme lors de cette réunion : tel un instituteur avec ses élèves, sans humour, très anxieux et stressé par le tournage et le timing, ce qui ne lui permettait pas de parler aux acteurs.

L’acteur raconte ensuite qu’il a accepté le rôle sans trop se poser de questions, qu’il connaissait un peu Jean-Paul Tribout mais pas du tout Pierre Maguelon. Il pensait que la série devait durer six épisodes et elle fut reconduite à chaque fois. De cette période, Bouillon ne connaissait que les récits de son grand-père maternel.

Lors de la première saison, les personnages avaient un côté déshumanisé, un peu comme des robots. Claude Desailly expérimentait ses personnages et les dialogues n’étaient pas équilibrés. Ensuite, la complicité entre les acteurs a déteint sur l’écriture. Valentin a évolué : il est devenu plus humain avec de l’humour, il regardait les femmes… cela convenait mieux à l’acteur. François Maistre était exceptionnel, le côté hors-norme du personnage a contribué au succès de la série. Il eut souvent des disputes avec Victor Vicas, et son remplacement par Pinkas Braun a fait que cela ne fonctionnait plus pareil.

Le tournage d’un épisode durait entre 11 et 13 jours, 14 au grand maximum, et les contraintes budgétaires ont imposé des restrictions. Lorsqu’on accordait 20 ou 30 figurants pour une scène lors de la première saison (ndlr : voir la première scène de Ce siècle avait 7 ans…), on en accordait plus que 10 lors de la quatrième pour un tournage équivalent.

Victor Vicas faisait changer de veste aux figurants pour les faire paraître plus nombreux (ndlr : personnellement, j’ai lu un peu la même chose sur Les Incorruptibles). Pour Bouillon, le contraste entre la première et la sixième saison reste néanmoins acceptable.

Pour le décor, Vicas était très minutieux, une équipe était dédiée à la décoration. Il fallait dans le vieil Orléans cacher les antennes TV et les passages cloutés et mettre de gros arbres en plastique pour camoufler ce qu’on ne pouvait pas bouger. Vicas consultait souvent Desailly pour la reconstitution.

Pour Jean-Claude Bouillon, le succès de la série est dû à l’histoire proche, des époques des grands-parents ou des arrière-grands-parents, d’intrigues bien écrites et de la complicité entre les trois personnages. Des sortes de leçons d’histoire très agréables.

Au moment de l’interview (1995), Bouillon est prêt comme ses acolytes à reprendre leur rôle pour une septième saison se situant vers 1935. Cela fermerait la boucle et donnerait une cohérence à l’ensemble disait-il.

Il ne se passe pas un jour sans qu’on lui parle des Brigades (il l’a encore dit à la réunion de 2011 et lorsque je l’ai eu au téléphone en 2013), la série a marqué la mémoire populaire, chacun a sa référence précise liée à une période de sa vie. C’est touchant pour tous ceux qui ont contribué à la réussite de cette formidable série.

Ce qui est valable après 20 ans est donc valable après 40…

http://theavengers.fr/index.php/hors-serie/annees-1970/les-brigades-du-tigre/bonus#1

Pierre Maguelon

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Claude Desailly a écrit le personnage de Terrasson pour l’acteur. Le seul aspect qui l’ennuyait était qu’il l’avait surnommé ‘le colosse de Rodez’ alors qu’il ne ressemblait pas trop à cette description. Il trouve néanmoins que c’est le personnage que Desailly a le plus mal servi. À la demande des acteurs, le scénariste a écrit des épisodes pour chaque personnage. Celui de Terrasson est Le village maudit.

Pierre Maguelon explique son absence lors de la seconde saison par ses prestations au théâtre à Paris. Il ne pouvait donc pas se rendre tous les jours sur le tournage en extérieurs. Il cite La Rochelle et Carpentras (alors que je pense que ces deux villes n’ont pas été des lieux de tournage avant la cinquième saison). Pour les épisodes à Vierzon (ndlr: c’est la première fois que j’entends parler de cette ville comme lieu de tournage de la série) et Orléans, Maguelon faisait le trajet tous les jours au risque de s’endormir dans le train.

Pour l’acteur, c’est dans Faivre que Desailly a mis sa personnalité, et il fut navré par l’éviction de François Maistre dont il ne connaît pas le véritable motif. Avec Pinkas Braun, ce n’était plus le même humour.

Il raconte que pour entrer dans leur vieux tacot, il y avait un ordre précis et qu’après, on ne pouvait plus bouger. Il évoque aussi le budget de la production et la nécessité dans un épisode de se passer un révolver dans le dos car la production n’en possédait qu’un ! C’était pourtant un épisode de la fin de la série, mais plus la série avait du succès, moins on lui accordait de moyens. Il précise aussi que la complicité des personnages était le retranscrit de celle des acteurs.

Vicas voyait Les Brigades du Tigre comme Les Incorruptibles : sérieux et sans connivence entre les acteurs. Pour Maguelon, la série était un peu moins sérieuse et un peu plus française.

Lors des blagues aux répétitions, Vicas les appelait à tour de rôle pour connaître le coupable ! Il les amusait beaucoup. Maguelon avait collé dans sa veste un article de presse stipulant que les grosses vedettes acceptaient les petits rôles et le cameraman le filmait à chaque fin de prise. Il y avait une mauvaise compréhension avec Vicas au début, une barrière de la langue, mais cela s’est arrangé avec le temps.

Maguelon a tout de suite eu la certitude que la série allait marcher car il la comparait aux Incorruptibles et il refusa un beau rôle dans un téléfilm.

Il avait la satisfaction d’avoir un travail et il évoque ensuite le projet de Desailly intitulé Bureau 407 dans lequel il devait interpréter le petit-fils de Terrasson enquêtant sur des phénomènes expliqués.

Comme Bouillon, Pierre Maguelon était prêt en 1995 à repartir pour six nouvelles aventures mais il ne se montrait pas très optimiste soulignant que la télévision ne produisait plus ce genre de séries. C’est pour cela qu’il s’était tourné vers le théâtre. 

Jean-Paul Tribout

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L’acteur avait une trentaine d’années au début du tournage avec déjà 7-8 ans de métier. Il avait déjà travaillé pour la société de production Telecip (La demoiselle d’Avignon, L’homme qui revient de loin). Lors de la seconde production, Tribout rencontra pour la première fois Claude Desailly. C’est Michel Wynn qui devait réaliser les Brigades. Tribout a hésité car il devait jouer dans deux épisodes d’Arsène Lupin et il ne pensait pas que la série allait s’étaler sur dix ans. Ce fut un succès énorme avec six épisodes tous les deux ans, ce qui permettait de ne pas être cantonné dans la série. Pour le public, le trio a l’étiquette Brigades du Tigre jusqu’à la fin de leurs jours, mais c’était une télé de qualité et les Brigades font partie d’un passé culturel commun comme Tintin ou ‘Y a bon Banania’. Personne n’a pu échapper à la série et Tribout a revu quelques épisodes (en 1995) et cela fonctionne toujours bien. Cela est dû à l’unité dans les acteurs, réalisateur, scénariste, musicien.

Au début de la série, l’écriture était concentrée sur l’histoire et moins sur les personnages. Les seconds rôles étaient même plus intéressants que les rôles réguliers.

Pour Tribout, le trio était en fait un seul personnage. Valentin était le héros, beau et c’est le chef. Mais deux morceaux de lui s’étaient détachés : Terrasson la force, le bon sens, la France rurale  et Pujol  l’astuce, l’héritier de Gavroche, et le séducteur de la bande. Desailly a scindé le personnage en trois pour le rendre plus humain. À partir de la deuxième saison, Desailly a commencé à écrire pour les acteurs, car il savait comment le trio jouait la comédie. C’est aussi à partir de cette saison que trois épisodes sur six présentaient des rôles équivalents pour le trio et que les trois épisodes restants étaient dédiés à chacun des personnages. Tribout avoue avoir une préférence pour ceux où il est le plus impliqué.

Tribout connaissait un peu Bouillon et il n’y a jamais eu de rapports conflictuels en dix ans, personne n’a jamais cherché à tirer la couverture.

Faivre était un peu comme le capitaine Haddock dans Tintin. Le remplacer par Braun fut une erreur. ‘Bravo Valentin’ était une création et l’absence de Faivre fut un plus qui manque. Desailly écrivait seulement : ‘Bravo Valentin etc., etc.’ et François Maistre faisait le reste. Néanmoins, Maistre était moins lié avec le trio car il participait essentiellement qu’aux scènes en studio qui étaient tournées en huit jours, alors que les trois acteurs restaient ensemble trois mois. Il était par conséquent moins intégré contrairement à Vicas, le souffre-douleur, qu’ils considéraient comme un oncle.

Les acteurs se sentaient comme des gamins à 30 ans et il y avait un côté potache. Tribout n’envisageait pas d’être une vedette mais un comédien qui vit de son métier.

Pour une éventuelle septième saison, Tribout n’était pas contre mais il émettait des réserves et il pensait que la déception risquait d’être plus grande pour le public.

Il n’a pas d’épisode préféré mais il trouve que le duo Desailly/Vicas était plus à l’aise dans les épisodes de comédie et il cite Les demoiselles du Vésinet et La couronne du Tzar (ndlr : deux des épisodes que j’aime le moins !!).

Jean-Claude Bouillon recevait des lettres de femmes, Pierre Maguelon de la correspondance des gens du troisième âge (avec souvent du pâté fait maison) et Jean-Paul Tribout des lettres d‘enfants avec des dessins.

Pierre Maguelon, qui était surnommé ‘le colosse de Rodez’, devait défoncer les portes dans les premiers épisodes jusqu’au moment où il a dit : « Arrêtez, je me fais mal. »

Il n’a pas obtenu le statut de vedette avec Les Brigades du Tigre mais cela lui a permis de participer à des coproductions européennes. Il n’a aucun regret car il a eu la notoriété pour devenir metteur en scène de théâtre. 

Claude Bolling

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La complainte des apaches est un véritable emblème musical des Brigades. À l’époque, on pensait souvent à Claude Bolling pour les films de style rétro à cause du succès de Borsalino. Avant le tournage de la première saison, Telecip, la société de production, avait demandé un projet sur les caractères, l’époque et l’atmosphère de la série. Robert Velin, le producteur délégué, voulait quelque chose d’aussi bien que Borsalino et il fut enchanté car c’était pour lui mieux que Borsalino (Claude Bolling a raconté l’anecdote lors du salon des séries de novembre 2011).

Victor Vicas a demandé d’écrire toute la musique à partir de ce thème avec des motifs secondaires pour chaque épisode. Vicas était quelqu’un de méticuleux, il voulait une couleur musicale spécifique pour chaque épisode. Grâce à des combinaisons orchestrales particulières et à une très bonne prise de son, Bolling a pu donner l’impression de densité quand la situation l’exigeait. Il n’y avait pas de synthétiseur à l’époque, et il trouve que le son des instruments acoustiques apporte aux Brigades une chaleur réjouissante.

Le piège était de faire du ‘faux vieux’, la musique devait avoir un charme d’époque avec une écriture actuelle afin d’avoir une idée de modernité à l’intérieur de ce parfum rétro. Bolling avait aussi recours à des instruments modernes dans certains thèmes de suspense.

L’évolution dans le temps est un des points forts des Brigades du Tigre pour le musicien. Passer de 1907 aux années 20 offre un renouvellement. Néanmoins, Vicas utilisait souvent les thèmes qui lui plaisaient comme Inquiétude pour le suspense, ce qui pouvait donner l’impression d’un manque d’imagination ! Bolling a demandé à changer le générique au fur et à mesure de l’évolution de la série, et il adaptait le thème Valentin pour chaque époque. La demande serait la même pour une septième saison (ndlr : en 1995, le projet n’est pas enterré) avec une musique pour les années 30-35. Claude Bolling précise que les Brigades est une expérience privilégiée par sa longévité et son ambition et l’échange permanent qui le liait à Victor Vicas. 

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