Un singe en hiver (1962) Résumé : Années 1940 sous la France occupée par l'Allemagne, Lucien Esnault et Albert Quentin, deux vieux alcooliques sont en train de boire dans leur bar favori, lorsque la grande offensive des forces alliées fait irruption. Revenu chez lui, Albert Quentin fait alors une promesse à sa femme tandis que les bombardements s'intensifient : si ils s'en sortent vivants, il arrêtera de boire. 15 ans plus tard, un jeune homme arrive dans l'établissement d'Albert Quentin qui ne boit plus. Très vite, Albert et sa femme constatent que le jeune homme, Grabriel Fouquet, est un buveur. Un soir, Albert rechute et prend une cuite mémorable avec Gabriel, ils mettent alors le village sens dessus/dessous, et qui se termine en feu d'artifice. Le lendemain, Gabriel récupère sa fille, et Albert part sur la tombe de son père. Les deux hommes se séparent comme si rien ne s'était jamais passé entre eux. Critique : Film quasiment mythique, on pourrait le résumer par cette simple phrase : « Des films comme ça, on en verra plus ! ». Que dire d'un tel monument, qui est pratiquement indémontable, tant il est réussi. « Un Singe en Hiver » c'est tout d'abord la rencontre de deux monstres sacrés du cinéma : Jean-Paul Belmondo, qui à l'époque commençait à être connu : il avait déjà tourné « À bout de Souffle » & « Classe Tous Risques » ainsi que « Cartouche » qui fut un beau succès avec plus de 3 millions d'entrées pour ce dernier. Et bien entendu Jean Gabin au sommet de sa gloire, il avait déjà tourné « Touchez pas au Grisbi », « La Traversée de Paris », « Les Misérables », « Le Président », « Razzia sur la chnouf », etc., etc. Le duo fonctionne à merveille à l'écran et on sent beaucoup d'affection de la part de Gabin pour Belmondo, il suffit de voir le regard de Gabin lors de la scène avec Belmondo dans sa chambre lorsque Gabriel Fouquet est saoul et qu'il explique à Albert Quentin qu'il est matador, on voit plein de tendresse dans les yeux de Gabin lorsqu'ils sont devant l'armoire avec un miroir. Gabin est simplement impressionnant en alcoolo : on croirait un vrai à l'écran ! Cela donne le tournis. Et Belmondo n'est pas en reste ! Ce film est également un casting technique de haut niveau et invraisemblable, et c'est ce qui fait je pense qu'il est d'une telle réussite et d'une telle force. À la réalisation nous avons Henri Verneuil qui pour moi a réalisé pratiquement les meilleurs « Belmondo » : « Le Casse », « Peur Sur La Ville »... , assisté de François Boyer pour le scénario (« Jeux Interdits », « La Guerre des Boutons », « Des Gens sans Importance »), pour les dialogues nous avons Michel Audiard. Est-il encore nécessaire de présenter ce monsieur ? C'est « Les Tontons Flingueurs », « Ne nous Fâchons pas », « Tendre Poulet », « Le Cave se Rebiffe », etc. Avec un tel casting derrière la caméra, comment voulez-vous que le film soit raté ? Il aurait vraiment fallu y mettre du sien. Le film est adapté d'un roman d'Antoine Blondin, lui-même alcoolique, je n'ai pas lu le livre et ne peux pas dire si il est fidèle au roman, néanmoins Blondin a dit beaucoup de bien du film à l'époque de sa sortie. Nous retrouvons aussi beaucoup d'acteurs de talent dans les seconds rôles qui finalisent la distribution exceptionnelle, comme Suzanne Flon (« La Porteuse de Pain », « Le Silencieux », « Si j'étais un Espion ») dans le rôle de la femme d'Albert, qui apporte un atout charme indéniable : elle est vraiment très très jolie dans la scène qui se déroule dans la cave pendant le bombardement. Vient ensuite Noël Roquevert en Landru (« Fanfan La Tulipe », « L'Assassin habite au 21 », « Cartouche ») et enfin Paul Frankeur en Lucien Esnault (« Le Gentleman d'Epsom », « Razzia sur la Scnouf ») et grand ami dans la vie de Jean Gabin. Le film n'a que peu de temps mort, un peu au début lorsqu'il pose le contexte de l'histoire et de la France occupée (avec d'ailleurs une affiche de propagande de « toute beauté » et qui écorche bien! Comme l'autre scène où le nom de la rue « Maréchal Pétain » qui est renommée après la guerre en « Rue du Général De Gaulle »), mais très vite les scènes et les dialogues percutants s'enchaînent à un rythme effréné et qui ne ralenti pas pendant les 1H40 du film, c'est juste de la folie. Comme toujours avec Audiard, c'est ciselé : par exemple lorsque Belmondo et Gabin vont boire chez Esnault, et qu'avant de partir Gabin dit : « vous demanderez à l'intendance, nous, arrivés à une certaine heure, on ne salut plus, on ne paie plus » et Belmondo de finir « On méprise ! », ou bien encore la phrase que dit Belmondo devant le commissariat de Police à propos du « public ingrat ». La mise en scène de Verneuil est impressionnante de maîtrise, il suffit de voir les plans, que ce soit de la ville ou sur les acteurs eux-même, l'image est vraiment très belle, le tout rehaussé par les superbes paysages de la côté normande. Et la pellicule jouit d'un excellent contraste. J'ai d'ailleurs souvent pensé que le noir & blanc dans certains cas était vraiment plus agréable à l'œil et pouvait rendre beaucoup mieux que la couleur : c'est le cas dans ce film. J'ai toujours trouvé que le Noir & Blanc rendait une ambiance particulière, comme par exemple dans les vieux films de science-fiction américain des années 60 (« Le Village des Damnés », « The Thing », etc.). Ce dernier monte crescendo en puissance, avec une prestation extraordinaire du duo Gabin/Belmondo pour le final dans les rues du village, puis sur la plage avec le feu d'artifice ! Mais pas seulement, le film offre aussi des scènes de la vie de tous les jours de cette époque, comme par exemple les vieux radoteurs et mauvaises langues qui sont autour de la table du bistro chez Lucien Esnault, le film offre aussi un ou deux petits gags visuels qui appuient un autre et qu'il faut voir : par exemple, lorsque Gabin et Belmondo après avoir méprisé l'assistance du bistrot de Lucien Esnault, et qu'ils sortent complètement saouls, on peut voir une pancarte sur le mur d'en face du bar : « Véritable petit beurre : LU ». Et que dire de la scène de danse de Gabin dans la rue du village ? Bref, ce serait vraiment trop trop long, de tout détailler, mais ce film est un chef-d'œuvre, comme je l'ai dit il y a des films inspirés, celui-ci en fait parti. Il y aura forcément à un moment, une scène qui vous décrochera fatalement un rire. Je trouve juste dramatique de voir ce qu'est devenu à l'heure actuelle le cinéma français, quand on voit que l'on partait avec de telles pépites qu'est « Un Singe en Hiver ». Bref, en tous cas vous l'aurez compris : « Un Singe en Hiver » est un film incontournable, et qui vous décrochera fatalement un fou rire ! À consommer sans modération ! Anecdotes :
Séquences cultes : Nous allons repeindre l'Asie d'une couleur tendre Arrière les esquimaux!
A Manoleté et à Gédéon
Nous on ne paie plus, on méprise C'est le bonheur rangé dans une armoire Hola carabineros!
Honneur à l'autochtone!
Les petits singes
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