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PLAIDOIRIE POUR UN MEURTRE

( BRIEF FOR MURDER)

Tournage : septembre 1963

Diffusion : ITV, 29 septembre 1963 – 13ème Rue, 2 avril 1998

Scénario : Brian Clemens

Réalisation : Peter Hammond

Harold Scott (Miles Lakin), John Laurie (Jasper Lakin), Helen Lindsay (Barbara Kingston), Alec Ross (Westcott), June Thody (Dicey), Anthony Baird (Wilson), Alice Fraser (Miss Prinn), Fred Ferris (Marsh), Michael Goldie (Bart), Robert Young (Judge), Pamela Wardel (Maise), Walter Swash (Foreman of the Jury).

Résumé

Depuis quelques temps de nombreux assassins voient leur procès pour meurtre se conclure par un acquittement, malgré les lourdes charges pesant sur eux. Tous ont bénéficié des conseils du cabinet juridique des frères Lakin. En réalité ceux-ci, grâce à leurs vastes connaissances juridiques, planifient à chaque fois un crime contenant de multiples faits permettant l’acquittement de leur client, qui peut dès lors commettre son crime sans risques. Cathy Gale ayant découvert les relations de Steed avec la pègre, celui-ci fait appel aux frères Lakin, afin de l’assassiner. La machination réussit, Steed est acquitté après avoir accompli son forfait… puis, en compagnie d’une Mrs Gale ressuscitée, met fin aux activités du duo, tout ceci se révélant un stratagème destiné à faire tomber les frères Lakin dans leur propre piège !


CRITIQUES


Estuaire44 4 janvier 2008

Après le succès de Concerto, la saison 3 se poursuit idéalement avec ce magnifique épisode, appartenant assurément aux meilleurs de la série. En effet, après ses premières armes lors de la saison 1, Brian Clemens réalise ici un authentique coup de maître pour son premier scénario de la période Cathy Gale. Il conçoit une intrigue remarquablement intelligente, au déroulement aussi astucieux qu'implacable. La progression de l'histoire apparaît tout à fait originale, tranchant nettement avec le schéma traditionnel de la série.

Si le procédé paraît particulier, l'histoire en elle-même rejoint les meilleurs thèmes des Avengers. C'est avec une grande joie que l'on y retrouve les ingrédients du succès unique de la série : humour et fantaisie sont bien présents, ainsi qu'une succession de lieux insolites comme le cabinet hors du temps des frères Lakin ou le club de yoga aux multiples miroirs. Surtout, par sa critique caustique et particulièrement amusante d'un des piliers traditionnels de la société britannique, son système judiciaire, l'épisode annonce très clairement la tonalité de la brillante saison 4. Tout juste pourrait-on regretter une conclusion un tantinet accélérée, avec en particulier un retour bien rapide des frères Lakin lors du dénouement. Toutefois il ne s'agit que de peccadilles, face à l'excellence de ce scénario, l'un des plus astucieux et brillants de son prolifique auteur.

La qualité de cet épisode hors normes tient également à la rencontre de plusieurs talents, l'imagination brillante de Clemens se voyant particulièrement mise en valeur par la réalisation inspirée de Hammond. Ce dernier nous offre ici une de ses plus belles réussites, avec une caméra aussi fluide qu’alerte, trouvant toujours à coup sûr le meilleur angle de vue possible. Certaines scènes constituent d’authentiques exploits, comme le gigantesque chapeau melon coiffant Steed, l’apparition de Catherine Gale dans le public, ou l’exploitation des miroirs de la salle de yoga. La longue scène en extérieur du faux assassinat de Catherine Gale s’avère particulièrement spectaculaire et nerveusement filmée, malgré l’image demeurée de médiocre qualité et l’absence de son partiellement compensée par les traditionnels bruitages.

La mise en scène apparaît également rehaussée par les décors particulièrement évocateurs de James Goddard, que cela soit le pub très vivant, le tribunal présenté comme une arène, le cabinet encombré de meubles et de livres des frères Lakin ou les rues de leur quartier, que l’on imagine volontiers envahies par le brouillard londonien.

La réussite de Plaidoirie pour un meurtre ne serait pas totale sans ses magnifiques rôles secondaires, eux-mêmes incarnés par de splendides acteurs.

L’ensemble reste dominé par l’impayable duo des frères Lakin. Délicieusement excentriques, leur drôlerie fait véritablement merveille après une saison 2 marquée principalement par des adversaires très ancrés dans un grisâtre réel. Supérieurement intelligents et érudits, le dévoiement de leur art demeure d’essence ludique et mégalomane. La motivation crapuleuse demeure accessoire, cette pétillante originalité provoquera d’ailleurs leur perte du fait du diabolique stratagème de Steed ! Leur subtil procédé flirtant agréablement avec l’absurde rappelle irrésistiblement les Diabolical Masterminds des saisons suivantes, ce qui n’étonnera finalement guère de la part de Brian Clemens !

Il faut les voir dans leur repaire, supputant avec délices à quels obscurs précédents ils vont pouvoir recourir ou tissant leurs scenarii avec délectation… Un authentique régal ! Le vertige de la virtuosité qui finit par les saisir s’avère par contre inquiétant au possible, grâce à l’intensité qu’insufflent les talentueux comédiens. Le trouble saisit alors le spectateur qui se surprend à se demander si tout ceci demeure bien loin de la vérité…

Harold Scott est excellent dans le rôle du bredouillant mais toujours malicieux Miles (fasciné par la Bossa Nova !). Mais c’est surtout John Laurie qui impressionne, incarnant avec son panache coutumier le flamboyant Jasper, la tête pensante et le plus sombre membre de la fratrie. Il s’impose véritablement comme l’un des plus grands comédiens de la série !

Miss Prim représente quant à elle une excentrique encore peu expansive, mais tout de même sympathique. Helen Lindsay campe avec talent et conviction une ardente avocate, représentative de cette époque où les femmes commencent à accéder à des professions traditionnellement réservées aux hommes. Wescott et son écervelée compagne demeurent plus anecdotiques.

Nos deux héros sont à la hauteur de cet excellent épisode. Cathy Gale ne s’est guère adoucie d’une saison à l’autre, n’hésitant pas à réveiller son partenaire à coup de pied ! Elle continue à ne pas lui épargner sa cinglante ironie, pour notre plus grand plaisir ! Honor Blackman arbore toujours aussi élégamment ses jolis chapeaux, mais la perruque brune lui va aussi bien que la blonde à Linda Thorson… Elle donne toujours autant de présence et de crédibilité à son personnage.

Toutefois Catherine Gale reste relativement en retrait dans cet épisode, dont la grande vedette demeure John Steed. C’est avec une grande joie et une authentique délectation que nous voyons le spadassin parfois abrupt de la saison précédente prendre ici les traits du brillant personnage que nous connaissons. Steed développe en effet un brillant humour durant tout l’épisode et montre toute sa classe proverbiale, notamment lors des face-à-face avec les frères Lakin. Patrick Macnee nous offre un brillant numéro, très dans le ton de la quatrième saison là aussi. Il triomphe sans brutalité, en utilisant la ruse et un machiavélisme de bon aloi des plus réjouissants ! Ce passage d’étape se voit symbolisé par le triomphe du chapeau melon, qui supplante définitivement le triste feutre trop souvent aperçu durant la deuxième saison. Même si, en compagnie de sa partenaire, il fête encore son succès autour d’un alcool fort plutôt que d’une coupe de champagne, c‘est bien le Steed définitif qui transparaît ici, à l’orée d’une saison trois s’annonçant ainsi très prometteuse !

EN BREF : Plaidoirie pour un meurtre constitue un épisode exceptionnel, auquel il ne manque sans doute que d’appartenir à une saison plus popularisée pour constituer un grand classique des Avengers. Steed se révèle particulièrement affûté au début d’une saison 3 qui ne pouvait rêver meilleur commencement !


VIDÉO


Le procès de John Steed !


INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES

Tournage


Continuité

o Un bruit de chute se fait distinctement entendre quand Steed rejoint Wescott et Dicey au bar (8’51’’).

o L’encrier doit être vide, car la plume utilisée par Cathy Gale pour signer son contrat ne fait visiblement qu’égratigner le papier, sans déposer d’encre ! (41’03’’) :

 


Détails

o Steed lit The Sollicitors Gazette ; l’équivalent de ce côté-ci de la Manche en est La gazette du Palais, journal suivant l’évolution doctrinale et jurisprudentielle du droit français depuis 1881. Sollicitor ne désigne pas un plaignant mais un avocat-conseil, soit exactement le rôle tenu par les frères Laskin dans l’épisode. L’avocat à la cour, réalisant la plaidoirie, (Barbara Kingston, ici) est nommé barrister. En droit anglais les deux fonctions sont clairement distinguées.

o Le journal que lit Mrs Gale s’intitule North London Weekly.

o Dans le pub, un panneau indique We regret any inconvenience caused to patrons during redecoration.

o L’ancienne réglementation évoquée par Cathy (44’20’’) contraignant les "pubs" (public houses) à fermer de bonne heure (souvent 21h30) a été levée en 2005, devant les troubles causés par les ruées vers le bar en fin de périodes autorisées et les migrations vers les établissements bénéficiant d’horaires plus tardifs selon les quartiers de Londres. L’interdiction de fumer est par contre promulguée en juillet 2007…

o Bizarrement Steed présente Cathy Gale comme une géologue et non pas une anthropologue.

o Fin gastronome, Steed varie le nombre de sucres selon les breuvages : ici deux avec le thé (India, of course), tandis qu’il en prend trois avec le café, comme révélé dans Ne m’oubliez pas, saison 6.

o Au lieu des inserts assurant les liaisons entre diverses scènes, l’épisode a recours à des diaporamas de Londres, montrant des scènes de rue et des bâtiments, dont l’Old Bailey.

o Miles Lakin se passionne pour la Bossa Nova, alors en vogue parmi la jeunesse. Effectivement ce genre musical naît au Brésil à la fin des années 50 mais triomphe réellement en 1963, année de l’épisode, avec le succès mondial de The girl from Ipanema, d’Astrud Gilberto. L’album Getiz/Gilberto, sorti la même année, contient tous les standards du genre (Corcovado, O grande amor, Desafinado…), jamais détrônés depuis. En France, c’est Henri Salvador qui contribue au succès de la Bossa Nova durant les années 60. À ce titre il est décoré en 2005 par le Président Lula ! La Bossa Nova est un dérivé de la Samba, avec moins de percussions et des harmonies davantage développées.

o L’avocate Barbara Kingston nomme le juge « My Lord » : seuls les magistrats du siège de l’Old Bailey et des autres Hautes Cours du Royaume ont droit à ce privilège. L’appellation normale est « Your honor », voire simplement « Sir » pour les tribunaux de plus petite instance.

o La phrase apparaissant au fronton de l’Old Bailey (30’18’’) existe réellement, son intitulé complet est "Defend the Children of the Poor & Punish the Wrongdoer"

o Old Bailey Désigné avec fierté par Wescott au début, et lieu où se déroulent les procès de l'épisode, il s'agit du surnom populairement attribué à la Haute Cour Criminelle de Londres. Le terme Old Bailey [Vieux chemin de ronde], nom de la rue où il se situe, fait référence à l'origine médiévale de l'institution. L'édifice actuel, situé près de la cathédrale St-Paul, en plein cœur historique de Londres, a été inauguré en 1907, sur le site de la tristement célèbre prison de Newgate (en activité de 1188 à 1904). On y traite des crimes les plus graves commis dans l'enceinte du Grand Londres. Le célèbre dôme est surmonté d'une grande statue dorée, aperçue dans l’épisode, représentant la Justice, avec ses traditionnels attributs de l'épée et de la balance. L'Old Bailey, un des bâtiments les plus célèbres de Londres, apparaît à de multiples reprises dans la culture populaire anglaise. La série Rumpole of the Bailey (1975-1992) s'inspire d'un célèbre avocat y ayant accompli de nombreuses plaidoiries.

Acteurs – Actrices

o John Laurie (1897-1980), a connu une brillante carrière de comédien shakespearien au théâtre. Ami très proche de Laurence Olivier, il apparut ainsi régulièrement à l’Old Vic. Laurie a également joué dans de nombreux films dès les années 30, dont Les 39 marches et Q Planes qui a inspiré le personnage de Steed à Patrick Macnee. Il a participé à trois autres épisodes de la série : Mort d’un grand danois (saison 2), Une petite gare désaffectée (saison 5) et Pandora (saison 6). Son rôle le plus populaire demeure James Frazer, personnage récurrent dans Dad’s Army (1968-1977).

o Harold Scott (1891-1964) Le rôle de Miles Lakin fut pratiquement le dernier de cet acteur dont la carrière avait débuté au début des années 30. À travers de nombreux rôles, il participa avant-guerre aux premières adaptations théâtrales de la télévision britannique. Il demeure surtout dans les mémoires pour son rôle récurrent de Duffy Clayton dans 18 épisodes de Dixon of Dock Green (1956-1962).

o Helen Lindsay est également apparue dans Nightmare (saison 1). Elle participa à de nombreuses séries tout au long e sa carrière, dont Police Surgeon, Public Eye, Armchair Theatre, Thirty-minute Theatre, Poirot... Elle interprète également de nombreux rôles aux théatre.

o Alec Ross est également vu dans Le document disparu (saison 6). Après avoir servi dans la RAF durant la guerre, il participe à de nombreuses séries des années 60 (Detective, No hiding place, Gideon's way, Dixon of Dock Green, Z Cars...). Il décède d'un cancer en 1971. Depuis 1956 il était l'époux de Sheila Hancock, prestigieuse comédienne du West End, apparaissant souvent également à la télévision.

 

À noter que…

o Les personnages du Dr. King et de Vénus Smith disparaissent dans cette saison, au profit de Catherine Gale qui devient l’unique partenaire de Steed.

o La saison 3 débute ici avec un nouveau générique, où les visages des personnages sont remplacés par une silhouette courant dans la lettre G du titre The Avengers. Les noms des interprètes principaux apparaissent ensuite sur fond noir. La musique évolue également, avec l’introduction de quelques percussions insufflant davantage de rythme. Il ne s’agit toutefois pas du générique définitif. Celui-ci, plus long, apparaît à l’épisode suivant et voit la silhouette parcourir toutes les lettres du titre se découpant sur un fond noir. Les dessins de ce personnage remplacent également ceux des personnages sur les cartons séparant les différents actes.

o Les opinions diffèrent à propos du choix de l’épisode débutant cette saison, Concerto est parfois cité. En effet si Plaidoirie pour un meurtre constitue bien le premier épisode diffusé de la saison 3 (le 29 septembre 1963, contre le 02 mars 1964 pour Concerto), la question paraît moins tranchée quant aux dates de tournage. Si le 26 avril 1963 demeure clairement établi pour Concerto, les dates fluctuent entre le 12 avril et le premier mai pour Plaidoirie pour un meurtre, sans doute du fait de la réalisation distincte des scènes extérieures. Merci à Marc pour ces précisions.

o James Goddard débute comme dessinateur de décors au commencement des années 60 (City beneath the sea, 1962). Il travaille alors principalement pour les Avengers, dont il conçoit les décors de 10 épisodes : Dance with Death, Double Danger, The tunnel of fear, A change of Bait (saison 1), Festin de pierres, Le grand penseur, Missive de mort, L’argile immortelle, Le clan des grenouilles (saison 2) et Plaidoirie pour un meurtre (saison 3). À partir des années 70 il devient réalisateur pour diverses séries, sous le pseudonyme de Jim Goddard (Inspecteur Morse, Rumpole of The Bailey, Callan, Public Eye…).

o Peter Hammond (1923-2011) est une figure importante de la série car il a réalisé pas moins de 19 épisodes, durant les saisons 1 (neuf épisodes, dont Passage à tabac), 2 (Warlock, Le point de mire, Mort d’un grand danois, Les œufs d’or, La loi du silence) et 3 (Plaidoirie pour un meurtre, La toison d’or, Ne vous retournez pas, Le piège à rats idéal, Seconde vue). Il a participé à de nombreuses autres séries (Rumpole of The Bailey, Shades of greene…). Plus récemment il a tourné neuf épisodes du Sherlock Holmes de Jeremy Brett.

Fiche de Plaidoirie pour un meurtre des sites étrangers :

En anglais
http://theavengers.tv/forever/gale2-1.htm
http://www.dissolute.com.au/avweb/ gale/302.html
http://deadline.theavengers.tv/GaleS2-01-BriefForMurder.htm

En flamand
http://home.scarlet.be/~pvandew1/avengers/gale28.htm

 

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