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PrésentationSaison 2

Once Upon a Time

Saison 1


 1. IL ÉTAIT UNE FOIS
(PILOT)



Scénario : Edward Kitsis et Adam Horowitz

Réalisation : Mark Mylord

Le soir de son 28ème anniversaire, Emma Swan, recouvreuse de caution, reçoit la visite d’un petit garçon de 10 ans. Il s’appelle Henry et il est le fils qu’elle a abandonné à la naissance. Il lui demande de revenir avec lui à Storybrooke, dans le Maine. Selon lui, là, habitent tous les personnages de contes de fées envoyés dans notre monde par une malédiction !

« C’est un bon début d’histoire » dit Emma d’un ton un peu moqueur quand Henry lui raconte la vérité sur Storybrooke. Et nous ne pouvons qu’être d’accord avec elle !

Dès l’accroche, le spectateur est pris au piège : « Il était une fois une forêt enchanté où vivaient tous les personnages de contes. Nous les connaissons bien ou du moins nous le croyons. Un jour, ils se trouvèrent piégés dans un monde où les fins heureuses n’existaient plus. Notre monde. Voici comment tout a commencé. »

Après une première scène qui renvoie au conte originel de Blanche-Neige (le réveil par un baiser) et cette phrase qui deviendra le gimmick du couple (« je te retrouverai toujours »), on passe au mariage. Mais celui-ci est brutalement interrompu par l’arrivée de la Reine déchue. Si Lana Parrilla a une prestance vraiment royale, on a la première illustration de ce qui deviendra une constante de la série : son coiffeur et son habilleur sont à jeter aux lions ! Sa menace est on ne peut plus claire : « Bientôt, tout ce que vous avez, absolument tout ce que vous aimez, vous tous ici présent, vous sera enlevé pour toujours et de votre malheur, je tirerai ma plus grande victoire. Je jure de réduire à néant votre bonheur. Je jure de le faire quoi qu’il m’en coûte ».

Quand on a un problème dans ce monde, on va prendre conseil auprès de Rumpelstilskin, un être étrange, ambigüe. Robert Carlyle réussit son entrée : on assiste à la transe halluciné d’un prophète inspiré ! Mauvaise nouvelle : la malédiction est aussi puissante que la Reine l’a affirmé. Bonne nouvelle : il y a un espoir. Un seul. L’enfant que porte Blanche-Neige reviendra les sauver à son 28ème anniversaire. On a ici toutes les bases de la première saison. Le spectateur connaît donc toutes les cartes dès le début du jeu mais pas les protagonistes. Excellent moyen pour se mettre à leur place et ressentir leurs émotions. 

Emma et Henry arrivent à Storybrooke ; ville charmante mais guère enthousiasmante par son architecture d’un classicisme achevé. Outre les éléments que l’accroche a déjà révélés au spectateur, Henry va aussi énoncer aussi une des « lois » de Storybrooke : personne ne peut en partir. Cette règle sera rappelé constamment mais, à chaque fois, le réalisme apportera une explication plausible et, comme il n’est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir, Emma y croira à chaque fois.

Emma ramène donc Henry et fait la connaissance de Regina Mills, maire de la ville, et du shérif Graham. Deuxième constante de la série : les tenues de Regina sont d’une grande classe quoique sobre. Sa robe beige est seyante et la met en valeur. Coiffure simple mais de bonne facture. La rencontre entre la mère naturelle et la mère biologique se passe plutôt bien. Un mouvement de caméra moqueur nous montre sur la table basse un panier de pommes rouges, histoire que nous sachions bien à qui nous avons affaire et que sous les dehors affables de Mme Mills se cache la Reine. Ah ! Un détail en passant : jamais dans ces lignes vous ne lirez le qualificatif de « méchante » accolée à son titre (bien qu’il soit abondamment cité). L’auteur est un « royaliste » convaincu ! Cet épisode inaugure également ce qui deviendra un fil rouge, voire un lieu commun, les confrontations Emma/Regina. Si la première est une « prise de contact », la seconde se passera nettement moins bien. Mais Regina révèle aussi son caractère emporté – on découvrira plus tard d’où il vient – et elle se montre sa pire ennemie sur ce coup-là.

Emma aurait voulu repartir mais une suite d’événements (dont un loup !) vont l’en empêcher  Elle perd le contrôle de son véhicule, finit dans le poteau et se réveille…en prison ! Libérée par le shérif pour aider Regina à retrouver Henry qui a encore fugué, elle fait la rencontre de Mary Margareth Blanchard, son institutrice, une jeune femme très effacée. C’est elle qui a offert le livre de conte à Henry pour lui donner de l’espoir. Emma retrouve Henry à son « château », une vieille construction en bois. Il lui dit qu’elle est là pour rétablir les fins heureuses et lui pardonne de l’avoir abandonné pour qu’il ait toutes ses chances. La scène est poignante : l’horreur pour elle, c’est d’avoir été trouvé sur le bord d’une route. Jennifer Morrison nous prend aux tripes.

Dans le monde enchanté, la fée bleue amène un arbre magique : taillé par Gepetto et Pinocchio, il permettra de construire une armoire magique qui protègera de la malédiction. Charmant parviendra à y enfermer sa fille avant de succomber sous les coups des gardes de la Reine : « C’est la fin heureuse de mon histoire » assène celle-ci. C’est alors que la malédiction s’abat.

Dernière rencontre d’Emma pour cette soirée d’anniversaire, décidément inoubliable : M. Gold. Incarné par un Robert Carlyle à l’élégance toute britannique, il paraît simplement être un homme poli mais le ton avec lequel il lui parle semble vouloir en dire beaucoup plus. Le sourire est énigmatique, presque moqueur mais sans hostilité. La sobriété avec lequel Robert Carlyle incarne cet homme est plus révélateur qu’un long discours : M. Gold n’est pas à prendre à la légère.

La dernière scène est malicieuse : l’histoire peut commencer !

Informations supplémentaires :

  • Emma conduit une Coccinelle. Créé en 1938 par Volkswagen, ce modèle très populaire a été le sujet d’une série de cinq films produits par Disney entre 1968 et 2005 ainsi que d’un téléfilm (1997) et une série télé (1982).

  • Littéralement, « Storybrooke » signifie « Fin de l’histoire ». La Reine a été très inspirée sur ce coup-là !

  • Le conte de Blanche-Neige est connu dans la version recueilli par les frères Grimm en 1812. Dans la première version, la reine est la mère naturelle. L’idée du baiser qui réveille la princesse est une invention postérieure. Le conte se termine sur la mort atroce de la Reine condamnée à danser avec des souliers de fer chauffés à blanc jusqu’à ce que mort s’ensuive. Selon Pierre Saintyves (Les contes de Perrault), on peut y voir un conte se rapportant aux saisons. Pour Bruno Bettelheim (Psychanalyse des contes de fées, une lecture essentielle), on est en plein conflit œdipien. Blanche-Neige et les sept nains est aussi le premier long-métrage d’animation de Disney (1937).

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2. LE SORT NOIR
(THE THING YOU LOVE MOST)

Scénario : Edward Kitsis et Adam Horowitz

Réalisation : Greg Beeman

Dans le monde magique, la Reine comprend que réaliser sa menace ne sera pas aussi simple et que le coût en sera bien plus élevé. A Storybrooke, Emma décide de rester.

Cet épisode peut être vu comme la continuation du précédent.

Après un balayage des différents habitants de Storybrooke dans leur vie quotidienne, l’épisode commence par un coup de colère de Regina qui a lu le livre de contes. On devine ce qui la mise en boule ! Sur ce coup-là, le spectateur salue la performance de Regina : elle assène sa tirade sans broncher. Belle composition de Lana Parrilla qui passe en un instant de la colère à la stupéfaction (lorsque l’horloge sonne) puis au badinage avec Archie comme si de rien n’était.

Lorsqu’Emma ouvre sa porte et que Regina lui apporte des pommes, un frisson saisit le spectateur qui a évidemment en tête la fameuse scène du film de Disney et le geste de Regina est en tout point identique à celui de la sorcière. L’entendre parler de pomme sur un ton léger est proprement saisissant ! Emma reste mais la menace – dit d’un ton poli mais glacial – fait plus encore froid dans le dos. Dans ce duel, Lana Parrilla l’emporte largement sur Jennifer Morrison. A la décharge de celle-ci, Emma vit dans le réalisme et a des répliques de « série réaliste » quand les paroles de Regina ont un double sens. Durant la suite de la saison, ce réalisme s’effritera et ce processus de dévoilement (« apocalypse » en grec) sera un des moteurs de la série.

Dans le monde magique, la Reine doit remettre la main sur le « sort noir » détenu par la sorcière Maléfique. Celle-ci refuse et elles en viennent à se battre. C’est un beau combat ; les effets spéciaux sont bien faits – boules de feu, télékinésie, mur de glace – mais surtout le combat est bien orchestré. La réalisation est alerte et ne s’attarde pas, ce qui donne un réel effet de mouvement. Le décor est médiéval et l’éclairage à la cheminée apporte un cachet bienvenu. On a ainsi un effet de réel très bien rendu. Les effets spéciaux ne seront pas, loin de là, toujours aussi bien réussis ni aussi bien mis en scène ! Le conseil, avisé, de Maléfique résonnera longtemps aux oreilles du spectateur et reviendra lancinant tout au long de cette saison.

La scène suivante témoigne à nouveau du talent de Greg Beeman. Dommage qu’on ne le revoit plus ensuite. Réunissant un groupe de méchants, la Reine veut lancer le sort noir mais il fait pschitt et c’est un fiasco humiliant ! Après un plan large qui pose le décor, le réalisateur choisit de privilégier des plans à mi-corps de la Reine érigée en personnage majeur de ce moment qui doit consacrer sa gloire et réaliser sa vengeance. Ce stratagème évite de s’attarder sur les rochers (qui sont faux). Le mouvement lent mais modulé de la caméra souligne le déroulement de la cérémonie et l’importance qu’elle revêt. C’est pourquoi l’échec n’en est que plus retentissant et Lana Parrilla est fantastique quand elle nous montre toute l’humiliation ressentie par son personnage : aussi importante que l’immense orgueil d’une souveraine déchue qui a juré de détruire le bonheur de tout un royaume ! Mais elle refusera de s’avouer vaincue. Les dialogues sont magnifiques dans cet épisode et les scénaristes ont bien saisi la grandeur infernale du personnage. Cet être sème l’effroi autour d’elle.

Comment en est-elle arrivée là ? Pour trouver la solution, la Reine va trouver Rumplestiltskin. Contre une condition apparemment modique, il lui apporte une réponse. Une réponse terrible ! Toute la scène baigne dans une belle ambiance gothique, avec de beaux éclairages qui donne un clair-obscur caravagesque soulignant la nature sombre des deux protagonistes. Plus tard, on apprendra que Blanche-Neige a causé un tort à la Reine ; assez fort pour que celle-ci refuse de tourner la page. Elle avait le choix : le pouvoir ou l’amour. Rumplestiltskin aura une formule à ce sujet dans l’épisode « Le berger ». Lana Parrilla est une nouvelle fois éblouissante passant de l’émotion à un acte froid et pourtant elle fait ressentir la souffrance de son personnage. Oui, la Reine a un cœur mais trop de haine pour l’écouter. C’est son épisode et elle le porte sans trembler.

A Storybrooke, Henry a un plan pour combattre la malédiction. C’est le début de « l’opération Cobra » que l’on suivra pas à pas. La scène qui suit entre Emma et Henry a peu d’intérêt hormis qu’elle récapitule tous les éléments du premier épisode. Par contre, il a une formule heureuse : «      Au départ le héros veut jamais croire qu’il est le héros. Ça ne ferait pas une bonne histoire ». C’est bien vu, bien dit, c’est rigolo mais c’est tout. Quand Emma va trouver le psy d’Henry, Archie, pour comprendre d’où vient l’obsession de son fils pour les contes, c’est un bel essai de réalisme alors que le spectateur connaît la vérité. Cette ambivalence nous place dans une position intéressante : à la fois au-dessus (on connaît qui est qui) et dedans (à chaque moment, on attend le choc entre le « faux » réel et le « vrai » magique). Peu après, Emma est arrêtée pour un vol qu’elle n’a pas commis !

Deuxième passage par la case prison en deux épisodes ! Bel exemple pour un enfant ! Pour faire payer Regina – forcément derrière tout ça -  Emma s’en va couper un pommier à la scie ! La scène qui suit, assez cocasse quelque part,  est rendu tonique par une succession de gros plans alternés : colère, menace, tentative d’impressionner l’autre. Toute la panoplie est déployée dans les regards et les visages des deux actrices. Et là, Jennifer Morrison est grandiose. Quand Emma rend les coups, l’actrice sait hisser son jeu. L’adversaire est de taille, Votre Majesté ! Mais Emma n’a pas encore compris à qui elle a affaire : un entretien entre les deux femmes, commencé cordialement, normalement, comme entre deux personnes civilisées, se révèlera un piège et Emma tombera dedans comme une bleue ! L’apprentissage est décidément rude ! On est rassuré sur le talent de Jennifer Morrison qui passe de la tête d’idiote à celle de combattante. Cette touche réaliste fait tout le contraste avec le monde magique d’autant que, dans cet épisode, il fait jour dans le Maine et nuit dans l’autre monde. 

Informations supplémentaires :

  • Kristin Bauer est une actrice américaine qui a notamment joué dans True Blood (2008-2014).

  • Absence de Josh Dallas

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3. LE PONT DES TROLLS
(SNOW FALLS)

Scénario : Liz Tigelaar

Réalisation : Dean White

A Storybrooke, Mary Margareth est dépitée et ne croit plus trop en l’amour. Dans le monde magique, un carrosse est attaqué par un habile voleur.

Après le double épisode introductif, la série commence maintenant et le schéma narratif sera le suivant : l’action à Storybrooke se déroule de nos jours ; celles du monde magique en amont du sort pour nous montrer quelle était la situation au moment précis où tout a basculé et tous les faits, grands et petits, qui ont conduit à la catastrophe. Après une scène d’attaque bien menée sans plus, un zoom arrière montre le visage consterné de Mary Margareth dont le rendez-vous galant avec le docteur Whale est un fiasco. Trouvant Emma dans sa voiture, elle l’invite à venir chez elle. La scène entre les deux femmes ne manque pas d’humour, un élément peu présent jusqu’alors.

Lors d’une sortie de bénévolat à l’hôpital, Henry demande mine de rien à son institutrice si elle ne connaît pas un inconnu dans le coma (le prince Charmant, grièvement blessé dans le 1er épisode). Après un échange avec Emma, celle-ci conseille à Mary Margareth de faire la lecture à l’inconnu pour démontrer à son fils que les contes de fées n’existent pas. Jennifer Morrison montre un visage finaud ; celui de quelqu’un qui joue un bon tour à un autre. C’est une de ces scènes réalistes qui sont le quotidien d’Emma. Ce genre de scène appelé à se reproduire place le spectateur dans une position ambivalente. Il comprend ce qu’essaye de faire Emma sans pouvoir partager ce qu’elle ressent et on se prend à serrer les poings pour ne pas lui crier : Emma, écoute ton fils ! La vérité n’est pas la réalité. Ce décalage est à peine amorcé ici bien sûr. Dans une ambiance tamisée, on assiste à la dite scène de lecture. Le mouvement de la caméra est tout en douceur, épousant la voix de la conteuse. C’est un joli moment de tendresse…brusquement interrompu !

Le spectateur est presque aussi surpris qu’elle bien que le suspense ne soit pas loin s’en faut hitchcockien mais on s’en veut presque d’interrompre ce beau moment. Lorsque le docteur Whale prévient Regina,  le réalisateur reprend un mouvement déjà vu dans le premier : il zoom sur un panier de pommes avant d’ôter le flou de l’arrière-plan et de révéler qui l’on sait. Toujours élégante, Lana Parrilla, en retrait dans cet épisode, subjugue dès sa première scène. Quand, dans le même temps, David Anders ne nous épate pas vraiment avec un jeu assez fade. Storybrooke doit être pauvre en beaux mecs pour que Mary Margareth ait voulu sortir avec Whale !

Dans le monde magique, Blanche-Neige tombe dans le piège tendu par « le prince Charmant » (c’est elle-même qui l’appelle ainsi). L’échange entre eux est vif et plaisant surtout dans le portrait acide de la fiancée. Un moment drolatique ! Elle accepte de l’aider à retrouver une bague qui vient de la mère de Charmant. La bague a été vendue aux trolls, d’affreuses créatures violentes. En retrait jusque-là, l’acteur saisit parfaitement les enjeux du moment et il nous compose un prince courageux, souriant, d’abord agréable et à la langue bien pendue. Bref, charmant.

Par contre, la scène de tir à l’arc sent le montage à plein nez. La scène qui suit est toute en émotion entre ces deux êtres venus de deux mondes qui n’auraient pas dû se rencontrer. Ginnifer Goodwin et Josh Dallas jouent magistralement, tout en retenu et c’est parfaitement le jeu qui convient à ce moment. On apprécie en outre de superbes extérieurs. Les forêts de Colombie britannique sont magnifiques et l’épisode a tout l’air d’avoir été tourné en été, ce qui lui donne une belle luminosité tout à fait en accord avec le caractère solaire des personnages principaux. 

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La transaction avec les trolls échoue et nouvelle séquence de combats bien faite. Cette fois, on inverse les rôles ; c’est Blanche-Neige qui sauve le prince Charmant. Match nul, la bague au centre. « Cette rencontre fut un plaisir » dit-elle. Elle sera surtout déterminante ! La scène de séparation est un autre joli moment d’émotion. La scène est ni trop courte ni trop longue et l’on est pleinement d’accord avec Blanche-Neige : « Je préfère Charmant » quand il lui révèle son vrai prénom.

Par un bel effet de caméra, on passe sans transition du pont des trolls au…pont des trolls de Storybrooke ! (« pont à péage » en VF mais le panneau dit « Troll Bridge »). C’est là que l’inconnu est retrouvé en train de se noyer. C’est bien entendu Mary Margareth qui le sauve…grâce à un bouche à bouche. A l’hôpital, coup de théâtre : une femme surgit appelant notre inconnu « David » (un prénom de roi) et Regina la présente comme l’épouse de ce dernier ! A une Emma plutôt sceptique devant l’histoire de Kathryn Nolan, Regina répond avec une simple mais si crédible explication rationnelle. C’est une scène d’anthologie car les deux adversaires partagent sans le savoir une même obsession : faire de ce monde une réalité. La dernière réplique de Regina est d’une sublissime cruauté : « n’avoir personne est la malédiction la plus terrible ». A l’issue de ce premier véritable épisode, elle l’emporte haut la main sur Emma.

Informations supplémentaires :

  • David Anders: le docteur Whale: il a joué Julian Sark dans Alias (2001-2006). On l’a vu dans Heroes (2007-2010)

  • Anastasia Griffith : la princesse Abigail / Kathryn Nolan : actrice anglaise née à Paris, vue dans New York, unité spéciale (2007), Trauma (2009-2010), Cooper (2012).

  • Il n’y a aucun appartement à louer à Storybrooke. « C’est la malédiction » philosophe Mary Margareth. Mais celle-ci n’est pas propre à cette ville !

  • Ginnifer Goodwin a naturellement les cheveux courts. Elle a dû porter une perruque dans les scènes où elle joue Blanche-Neige.

  • Absence de Robert Carlyle.

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4. LE PRIX À PAYER
(THE PRICE OF GOLD)

 

Scénario : David H. Goodman

Réalisation : David Solomon

Pour change de vie, Cendrillon passe un marché avec Rumpelstilskin. A Storybrooke, Emma est engagé par M. Gold pour retrouver quelque chose de précieux qu’on lui a volé.

Alors que sa marraine « la bonne fée » allait lui permettre d’aller au bal, Rumpelstilskin survient et la détruit ! Belle entrée en matière qui dynamite l’adaptation de Cendrillon  qui partait mal (le décor fait mal aux yeux, les costumes sont atroces) mais ce dynamisme ne va pas durer. Par contre, cet épisode sera un florilège d’aphorismes comme « La magie c’est le mal » ; ce qui chez Rumpelstilskin est on ne peut plus savoureux ! Cendrillon passe un marché avec lui pour quitter sa vie misérable contre « quelque chose de précieux ». Chose rare : la robe qu’elle va porter pour aller au bal bien connu est plutôt jolie et ses cheveux savamment coiffés. Certainement que l’équipe habituelle n’était pas disponible. On savoure aussi le commentaire sur les pantoufles de verre qui étonne la jeune fille : « Ce sont les petits détails qui font les belles histoires ». On ne peut qu’être d’accord avec lui !

Le spectateur savourera d’autant plus la nouvelle confrontation Regina/Emma que le maire a la réplique de l’épisode : « Pour qu’un arbre pousse, il faut des racines et vous n’en avez pas ». A la fin de l’envoi, je touche ! On l’apprécie d’autant plus que Lana Parrilla n’aura qu’un temps de présence limité mais Regina maintient son ascendant sur son adversaire. Néanmoins, la scène est vaine car répétitive et sert de prétexte à l’incident du chocolat renversé qui amène Emma à devoir laver son chemisier. Quel snack met une machine à laver à la disposition de ses clients ? C’est totalement invraisemblable ! On apprécie le joli buste de Jennifer Morrison mais ça ne fait que meubler. Oh ! Et qui se trouve dans la buanderie ? Une jeune fille enceinte jusqu’aux yeux et prénommé Ashley. Là, on assiste à une belle scène sans pathos inutile et bien souligné par une musique discrète mais présente. Jennifer Morrison rattrape le côté attendu et convainc dans ce registre nuancé quand sa partenaire, Jessy Schram, n’est guère éblouissante. Cet épisode est le premier d’une série de « loners » destinée à présenter différents personnages de contes comme un catalogue. Ils ne réussiront en général qu’à plomber la saison. La mise en scène ne sera pas non plus inoubliable ici. 

C’est à 11’44 que démarre vraiment l’épisode : M. Gold vient trouver Emma pour l’engager. Il veut qu’elle retrouve Ashley qui lui a volé « un objet très précieux » sans plus de précision car il souhaite la discrétion. 

C’est la première vraie scène entre Jennifer Morrison et Robert Carlyle et elle est bien faite. Sans effets inutiles, elle est sobre, posée et entre dans la catégorie de ces scènes réalistes qui ancrent Storybrooke dans ce que Emma voit comme le réel. C’est d’ailleurs un point faible de l’épisode que la nette inscription de ce dernier dans le pur réalisme. Tout ici aurait pu arriver ailleurs et jamais la magie ne viendra titilier le réel. Ce n’est pas avec un épisode de cet acabit qu’Emma pourra comprendre que Storybrooke n’est qu’une apparence ! Pour son enquête, Emma va trouver Ruby. Cet épisode fournit les premières scènes conséquentes pour Meghan Ory qui sort enfin du cliché de la (très) jolie fille même si le maquillage est toujours aussi outrancier. Par contre, Emma découvre le secret de Gold.

Dans le monde magique, Cendrillon voit le bal pour son mariage gâché quand Rumpelstilskin vient réclamer son dû ! Le décor de la salle de bal est magnifique et les figurants lui donnent une belle atmosphère de conte de fée d’autant que la musique est joliment surannée. Par contre, la scène où Cendrillon raconte tout à son mari est assez mièvre. Le prince n’a pas l’allure de Josh Dallas et n’est guère crédible. Pour s’en sortir, le couple va recevoir l’aide de Charmant et la comparaison entre les deux princes n’est pas à la hauteur du beau gosse de Cendrillon. Pour vaincre Rumpelstilskin, Cendrillon prétend remplacer son contrat par un autre. Elle y parvient mais la réplique du monstre est une menace glaciale.

A Storybrooke, Emma retrouve Ashley qui n’a évidemment pas pu quitter la ville et l’emmène à l’hôpital. Jennifer Morrison est excellente dans l’échange entre les deux femmes qui fait écho à la scène de départ. Aucune exagération et cette justesse d’interprétation sauve cet épisode beaucoup trop linéaire. Tout le monde connaît le conte de Cendrillon. Il est facile de retrouver les éléments qui viennent du conte et donc de prévoir à peu de choses près ce qui va suivre. Le reste n’est que de l’habillage et du vent. 

A l’hôpital, M. Gold vient retrouver Emma. Celle-ci s’oppose à lui et nous avons droit à une scène excellente entre ces deux acteurs. C’est colère rentrée contre politesse froide. Pas de grands gestes. La posture des duettistes est nette. Le réalisateur se réveille de sa longue léthargie et nous livre une prestation honnête sur ce coup-là ; une succession de plans serrés au niveau des visages faisant ressortir la tension. Hiératique, Emma est nettement sur ses gardes et Gold laisse clairement voir qu’il est bien plus dangereux que son infirmité ne le laisse supposer. Robert Carlyle, très élégant, est une version maléfique de John Steed et Jennifer Morrison a l’âge et le courage des partenaires de ce dernier. Ce jeu serré où chacun s’observe tourne à l’avantage apparent d’Emma : Gold renonce à son contrat contre un autre conclut entre eux.

La chute est ensuite rude quand le beau gosse vient à l’hôpital voir Ashley. C’est d’une absolue mièvrerie ; absolument « cuculapralinesque » et le jeu des acteurs guère convainquant. On est plus dans le roman-photo que dans le conte de fée. Fin heureuse d’accord, niaiserie pas d’accord ! Les bons sentiments ne font pas de bonne littérature dit-on. Pas de bonne série non plus.

Informations supplémentaires :

  • Jessy Schram, née dans l’Illinois, a joué notamment dans Veronica Mars. On l’a vu aussi dans la série Life (2007-2009, avec Damian Lewis et Sarah Shahi).

  • Cendrillon ou la petite pantoufle de verre est un conte de Charles Perrault paru en 1697. Les frères Grimm l’ont aussi recueilli en 1812. Les différences sont multiples : l’héroïne pardonne à ses belles-sœurs pour le Français ; celles-sont punies pour les Allemands. Le carrosse en citrouille ne se trouve que chez Perrault. Le film récent Into The Woods (2015) est plus proche de la version des frères Grimm. La pantoufle est bien en verre et non en vair (fourrure d’écureuil gris) comme l’écrivait Balzac car le merveilleux n’a pas besoin de vraisemblance.

  • Le titre original a une subtilité que la version française, plus prosaïque, ne rend pas.

  • Dans le bêtisier proposé dans les bonus des DVD, lorsque Cendrillon présente son nouveau contrat à Rumpelstilskin, elle le fait à l’envers !

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5. LA PETITE VOIX DE LA CONSCIENCE
(THAT STILL SMALL VOICE)

Scénario : Jane Espenson

Réalisation : Paul Edwards

Une ancienne mine s’effondre à Storybrooke le jour même où Emma devient l’adjoint du shérif Graham. Dans le monde magique, Jiminy est las de la vie de malandrin et de bateleur qu’il mène avec ses parents.

Lorsqu’une ancienne mine s’effondre, le Maire annonce qu’elle va interdire l’accès du lieu et qu’à la place un nouveau projet verra le jour mais Henry est convaincu que cette mine cache quelque chose. Jared Gilmore restitue bien l’obstination de son personnage et le sérieux qu’il y met. Dans une série réaliste, on partagerait l’inquiétude de sa mère (la biologique ou la légale ? Toutes deux partagent une certaine inquiétude devant l’imagination de « leur » fils) mais ici on sait qu’il a raison. Regina se montre on ne peut plus clair avec le docteur Archie Hopper : il doit briser le monde imaginaire qu’il s’est construit sinon cela finira mal pour lui. Notez bien la menace qu’elle profère ; il y a un net écho du monde d’où ils viennent. La réalité vient frôler le réalisme.

Archie affirme crûment à Henry qu’il délire. C’est un moment très fort et Raphael Sbarge, jusque-là plutôt bridé et au temps de présence très limité, occupe l’espace de manière plutôt convaincante. Le personnage ne permet pas de tenir toute une histoire mais, concentré sur quelques scènes, il est important. Raphaël Sbarge joue la carte de l’émotion et de l’inquiétude et il parvient à nous toucher. Exceptionnellement, cet épisode présente une histoire plus intéressante à Storybrooke que dans le monde magique où, l’histoire de Jiminy lasse par son côté répétitif. Il n’en peut plus de sa vie. Difficile de lui donner tort. Lesdits parents sont une caricature certes haute en couleur mais sans profondeur. Ils sont truculents mais très limités. Quelque chose d’excentrique mais de malveillant aussi. Le spectateur n’éprouve aucune empathie pour eux. Mais la caméra les filme avec une certaine complaisance. S’ils sont là pour apporter une note d’humour c’est raté. C’est gentil à la scénariste d’avoir voulu développer son passé mais les personnages secondaires ne le sont pas pour rien. Jiminy n’a pas grand-chose à offrir et, malgré son talent, Jane Espenson mouline et ressasse.

Storybrooke ouvre aussi ici un arc narratif qui va se déployer inégalement : la relation entre Mary Margareth et David Nolan. Chacune des scènes est un petit concentré d’émotions. Celle de la balade jouit en plus d’une belle musique. C’est à David que l’on doit la réplique du jour : « toi seul paraît vrai ». Nous, nous savons pourquoi et, pour la deuxième fois dans le même épisode, la réalité est mise à mal. 

Après une nouvelle séance d’escroquerie croquignolesque, Jiminy veut se servir d’une potion obtenue chez Rumpelstilskin mais son maquignon de père a échangé sa potion contre leur fiole frelatée ! La douleur ressentie est remarquablement rendue par Raphael Sbarge qui a joué sur une gamme allant du récit en mode automatique à la douleur poignante. La musique est en adéquation : montant crescendo jusqu’à la révélation et hop ! Interruption ! Heureusement qu’il est là parce que les deux escrocs nous font mal aux yeux et aux oreilles et leur cynisme crapuleux est abject et surtout joué de façon outrancière. Grâce à la Fée Bleue, Jiminy devient un criquet et reçoit une mission.

A Storybrooke, Henry s’est rendu dans la mine abandonnée et Archie s’est retrouvé piégé avec lui. L’éclairage fait bien passer le décor de la mine qui est meilleur que les rochers du « sort noir ». Entre Raphaël Sbarge et Jared Gilmore, de beaux échanges qui font ressortir le respect mutuel entre Archie et Henry. En clair-obscur, mais plus « sage » que le côté caravagesque de la prison de Rumpelstilskin, les dialogues animent le huis-clos. Henry a les mots justes : Archie doit entendre la petite voix au fond de lui et devenir celui qu’il veut être. La sobriété du jeu donne un son juste à ce qui n’aurait pu être que banalités. Par contre, sans s’en douter, le psy résume la dualité de Once upon a time. Oui, Regina s’inquiète mais surtout que le rideau tombe et révèle que tout est faux. Oui, Henry a ses idées, apparemment fantasmagoriques mais ce qui inquiète bien sa mère (adoptive), c’est que le choc des unes avec les autres ne provoque une faille. Rarement autant depuis le début de la série, la paroi entre le réel et le magique n’aura été aussi questionnée. Message aux spectateurs : ne vous laisser pas prendre par le côté banal de Storybrooke. Ce dialogue au fond d’une mine est symptomatique : quelque chose bouge.

Le retour à la surface donne lieu à deux scènes fortes. La première, cinglante, lorsque Regina écarte sèchement Emma d’Henry. La jeune femme est interloquée. L’épreuve aurait pu rapprocher les deux femmes. On a pu le croire (merci mesdames) mais non, en fait. Une question vient pourtant à l’esprit ; elle taraude le spectateur depuis le tout début : Regina aime-t-elle sincèrement Henry ? Dans un autre registre, on regrettera son pantalon marron et son pull noir à col roulé qui manque de classe. Mme le Maire n’est pas en représentation certes mais Regina nous a habitués à bien mieux. La deuxième scène est d’orage : Archie s’oppose à Regina. Décidément, quelque chose bouge. 

Informations supplémentaires :

  • Raphael Sbarge tourne principalement pour la télé. On l’a vu dans Code Quantum, Arabesque, SeaQuest police des mers, Le Caméléon, Dharma et Greg, Will et Grace, Le Protecteur (2004-2007, avec Simon Baker), FBI : Portés Disparus, Les Experts, Urgences, The Closer, Ghost whisperer, Rizzoli & Isles…et bien d’autres encore.

  • La scénariste Jane Espenson est bien connue des fans de Buffy contre les vampires pour avoir écrit 23 épisodes pour cette série entre 1998 et 2003 et 2 pour Angel. Elle a été productrice déléguée et scénariste pour Battlestar Galactica (2006-2009).

  • Le chien d’Archie est un dalmatien nommé Pongo.

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6. LE BERGER
(THE SHEPHERD)

Scénario : Andrew Chambliss et Ian Goldberg

Réalisation : Victor Nelli

David Nolan ne dissimule plus qu’il a des sentiments pour Mary Margareth. Dans le monde magique, un simple berger devient le dernier espoir d’un roi.

Un épisode bien meilleur au deuxième coup d’œil. Le scénario est riche ; il ne néglige pas un monde au détriment d’un autre et surtout il mêle les références de l’un dans l’autre. Il poursuit la mise en abîme entamé dans le troisième dont il est autant la suite que le commencement. Seule la mise en scène déçoit. Ce sera d’ailleurs la seule de Victor Nelli sur la série.

Pendant la fête pour le retour de David chez lui, Henry explique à Emma pourquoi il est amnésique ; la malédiction n’a pas pu substituer des faux souvenirs en lui car il était blessé. Gardez cette remarque dans un coin de votre tête. Elle aura plus tard son importance. Le principal concerné préfère s’éclipser pour aller retrouver Mary Margareth qui n’a pas voulu venir. Bel éclairage de la scène, dans la pénombre mais non le clair-obscur comme pour signifier que les sentiments ne sont pas tout à fait dégagés de leur gangue. On a un joli – mais bref – mouvement de caméra lorsque David lui dit qu’il la choisit ; elle descend doucement de lui vers elle.

Et on l’apprécie d’autant plus qu’on a ensuite un des pires décors de toute la série ! Tout est faux, les trucages visibles et le duel très mal filmé. Lorsque la caméra passe des duettistes, le prince fils du roi George qui vient de terrasser une brute, aux spectateurs, l’estrade fait pitié et l’assistance donne franchement l’impression d’être là pour meubler un écran vert. Le roi Midas demande au roi George de l’aider à se débarrasser d’un dragon – un classique du conte de fée. Le fils du roi s’en chargera contre de l’or mais il est soudain tué par son adversaire qu’il avait pourtant laissé pour mort ! Le roi George fait alors appel à Rumpelstilskin. Lequel, après lui avoir dit que la magie ne guérit pas de la mort, glisse incidemment que le défunt avait un frère jumeau ! La ficelle est un peu grosse mais les contes de fées ne sont pas plus vraisemblables donc ça passe.

Le dit frère est un simple berger. Josh Dallas porte très mal le costume qui, de surcroît, est un peu ridicule. Mais l’acteur nous met d’emblée à l’aise avec sa composition de berger. On ouvre cette séquence par une « bergerie » ; ces scènes pseudo-champêtre des cours de jadis. La mère et son fils parlant de banalités dans un décor de carte postale. L’image même du Paradis…jusqu’à l’arrivée du serpent ! Rumpelstilskin vient chercher le berger pour en faire un prince. Rumpelstilskin a la réplique du jour : « Tout le monde a le choix mais il s’agit de faire le bon ».

De son côté, Mary Margareth est très perturbée par David mais elle a la surprise de voir débarquer Regina qui lui intime l’ordre de laisser tomber ce dernier. Regina domine outrageusement sa vis-à-vis (Ginnifer Goodwin rend parfaitement la soumission de son personnage) mais on a peine à saisir le motif de cette remontrance. La nouvelle « amie » de Kathryn Nolan a-t-elle si peu confiance dans les chances de cette dernière ? Regina est pourtant bien placée pour connaître la pruderie et le caractère effacée de Mary Margareth. Cette stratégie agressive ne lui a déjà pas réussi dans le passé quand elle a voulu pousser dehors une Emma qui ne demandait qu’à partir et qui a finalement décidé de rester ! Certes, la Reine-Maire a bien compris que son décor tangue mais rien ne laisse prévoir le prochainement écroulement de Storybrooke. On se répète mais de quoi a-t-elle peur à ce moment-là ? Cette séquence n’est vraiment pas très crédible. Conséquence : l’institutrice accepte de se rendre à un rendez-vous avec David qui a quitté sa femme.

Dans le monde magique, le Prince affronte et terrasse le dragon. Le décor est plutôt bien fait ici. Il est sinistre à souhait contrastant avec les belles montagnes (les Rocheuses) du plan précédent. Le dragon est une belle surprise aussi tant il est crédible et bien animé. Josh Dallas est convainquant de bout en bout ; dans son altruisme (on entend déjà son  futur « Il m’a semblé honorable d’agir ainsi »), dans son courage et son sens de la stratégie. Pas mal pour un simple berger ! La suite ressort de la plus pure tradition féérique : le roi Midas, ravi d’être débarrassé du monstre, propose de donner sa fille en mariage au héros ! Ladite fille est la princesse Abigaïl que l’on a déjà vu. On salue la prestation d’Anastasia Griffith qui rend son personnage aussi différent que possible de Kathryn.

Quand cette dernière est émotion, douleur et douceur ; Abigaïl est l’incarnation de la peste couronnée. Mais ici, ledit héros est à deux doigts de refuser !! « Heureusement » le roi George est là pour lui montrer où est son intérêt. Dans le cœur du souverain, il n’y a plus de place pour d’autres sentiments que la raison d’État. Soulignons la belle prestation d’Alan Dale. S’il n’est pas très démonstratif, l’acteur a su nous donner à voir le dernier moment d’émotion de son personnage. Il est cependant plus convainquant en homme dur. Quand le malheureux Prince (pas encore charmant) fera ses adieux à sa mère dans un moment très touchant, la réalisation sera inspirée : plus l’émotion étreint les protagonistes, plus le cadrage se fait serré. La mère lui offre sa bague et l’on dresse l’oreille quand elle ajoute que ce bijou le guidera vers le grand amour. Et puis, on ne peut que sourire quand il annonce à sa promise qu’ils vont passer par la forêt.

Se rendant à son rendez-vous, David passe par la boutique de M. Gold, qui est une pure merveille d’esthétique dans des tons rouge et or et il faut regarder chaque plan plusieurs fois car tous les objets qui la peuplent viennent du monde magique ! Ici, c’est un vieux moulin qui réveille des souvenirs chez David. Regardez bien le visage de Gold. Est-il attentif ou souriant ? Qu’est-ce qu’il pense ? Qu’est-ce qu’il sait et quel jeu joue-t-il ? Il est censé avoir tout oublié de son autre existence mais une anecdote antérieure (rappelez-vous du « s’il vous plaît » du 3ème épisode) laisse à penser qu’il n’en est rien. En tout cas, David ira retrouver Mary Margareth mais il lui dit qu’il se souvient de Kathryn, qu’il l’a aimé et que, par honnêteté, il retourne auprès d’elle. Le sentimental qui sommeille en nous sursaute. Mais non ! David ! Souviens-toi que…Et là, on se souvient. On se souvient de la petite phrase d’Henry. La malédiction est peut-être affaiblie mais il est manifeste qu’elle agit encore car elle vient d’ensorceler David. Nous, nous savons que ses souvenirs sont faux mais pas lui. Cependant, il reste qu’il éprouve des sentiments forts envers Mary Margareth (Ginnifer Goodwin nous montre une version blessée puis colérique de la gentille institutrice) et ces sentiments se sont ancrés en lui avant que la malédiction n’agisse. Ce « retour en arrière » qu’opère la série est très bien vue puisqu’il annonce que rien n’est fait et que rien ne sera facile. Les contes de fées ne disent pas autre chose.

On finira avec une scène humoristique quand Emma découvre le shérif Graham sortant par la fenêtre de chez Regina…dont il est l’amant ! Jamie Dorman rend très bien le pathétique de son personnage surtout que la scène ressort plus du vaudeville que du conte de fée. Jennifer Morrisson, plutôt en retrait sur cet épisode, donne plutôt l’impression que son personnage est déçu. Ce qui nous conduit directement à l’épisode suivant.

Informations supplémentaires :

  • Alan Dale : le roi George / Albert Spencer : acteur néo-zélandais, vu dans Urgences, The Lone Gunmen, The Practice (2002), JAG (2003), Lost (2006-2010). Il incarne Tom Morrow, 1er directeur du NCIS (saisons 1 et 2).

  • L’épisode est inspiré du conte Le Prince et le Pauvre écrit en 1882 par Mark Twain. L’histoire se passe au 16ème siècle : Édouard, fils du roi Henri VIII, rêve de s’amuser dehors avec d’autres garçons de son âge. Dans le même temps, Tom Canty, gamin des rues, rêve d’une vie meilleure. Les deux enfants se rencontrent et, profitant d’une ressemblance saisissante, échangent leurs identités. Sauf que le comte d’Hertford qui complote contre le Trône tente d’assassiner le Prince. Les studios Disney en ont fait un long-métrage en 1990 avec Mickey dans les rôles titres.

  • Midas est un roi de Phrygie (Turquie actuelle) au 8ème siècle avant notre ère. Il a donné lieu à plusieurs légendes dont celle de changer tout ce qu’il touchait en or. La mythologie grecque explique ce don par l’hospitalité accordée par le roi à Silène, « professeur » de Dionysos. Mais, incapable de boire et de manger, il supplia le dieu de le lui retirer. Dionysos lui indiqua d’aller se laver les mains dans le fleuve Pactole. Référence à Midas dans les New Avengers.

  • Alex Zahara, qui incarne Midas, est un acteur canadien. On a pu le voir dans Stargate SG-1, Andromeda, Dark Angel, Jeremiah, Battlestar Galactica, Smalville ; au cinéma dans Open Range (2004) de Kevin Costner. 

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7. LE CŒUR DU CHASSEUR
(THE HEART IS A LONELY HUNTER)

Scénario : Edward Kitsis et Adam Horowitz

Réalisation : David M. Barrett

Le shérif Graham commence à avoir d’étranges visions. Dans le monde magique, la Reine veut en finir avec Blanche-Neige.

Dans la continuité de la dernière scène de l’épisode précédent, on a droit à une explication orageuse entre Graham et Emma, soulignée par une mise en scène nerveuse. Quand il lui dit qu’il ne « ressent rien », Emma prend la formule au pied de la lettre et lui donne un conseil d’une grande banalité. Jennifer Morrison souligne bien l’état d’esprit de son personnage. Elle se raccroche à tout ce qui est « raisonnable » pour donner un sens appréhendable au monde qui l’entoure et dont elle perçoit confusément l’étrangeté. Mais quand Graham l’embrasse brusquement, c’est lui  qui a une vision.

Dans le monde magique, l’architecture du château de la Reine laisse perplexe. Est-ce de l’art contemporain ? C’est en tout cas hors de propos dans l’univers des contes de fées. Les producteurs ont peut-être voulu moderniser le traditionnel château mais cette bâtisse ressemble plus à une base secrète dans une aventure de Bob Morane. Par contre, une fois n’est pas coutume, la robe de deuil de la Reine – qui « pleure » son époux, le père de Blanche-Neige, est élégante. Lana Parrilla a l’occasion de nous régaler avec une large palette de jeu dans cet épisode : émue et compatissante avec sa belle-fille, dure et machiavélique devant le Miroir – qui suggère d’avoir recours à un homme « sans cœur » pour en finir avec Blanche-Neige- puis cruelle et violente.

A Storybrooke, Graham croise pour la première fois le loup qu’il a vu en rêve, pardon « pas un rêve une vision » ; un animal avec un œil noir et un œil rouge. Le caractère percutant de la scène est bien rendu par une musique plus variée et qui sait rendre la tension. Il y avait quelques épisodes qu’on n’avait pas eu tous les éléments du succès réunis ensemble. David M. Barrett (qui a officié sur FBI : Portés Disparus) est un réalisateur expérimenté et il sait magnifiquement varié les mouvements et les plans. Pas le temps pour le spectateur de s’ennuyer ; son regard est sans cesse sollicité.  On a droit en outre à des effets très maîtrisés quand Graham court dans la forêt. La sensation de dynamique ne tombe pas dans le flou et il y raccord entre ce que l’on voit et l’état d’esprit du shérif.

Quand la Reine convoque le Chasseur, la noirceur de la salle renvoie à l’horreur de ce qu’elle demande : tuer Blanche-Neige. La scène reprend la trame du conte de fée et en souligne la violence et, de l’âme et de la robe, le noir est la couleur qui va bien à la Reine. Blanche-Neige le démasque et lui échappe dans la forêt. Il faut remarquer qu’on aura rarement autant eu de contrastes entre des intérieurs sombres et des extérieurs lumineux, éclairés à la lumière naturelle en tout cas. En tout cas, grâce à eux, on peut respirer.

A Storybrooke, Graham cherche à savoir depuis quand il connaît Mary Margareth, bien entendu incapable de lui répondre. De tous les plans ou presque, Jamie Dorman, jusque-là largement confiné aux utilités, se montre très bon acteur. Il rend bien la déstabilisation profonde de son personnage dont le confort physique et moral a volé en éclat et qui cherche obstinément à comprendre. Il est à noter que Graham ne cherche pas à revenir à l’état précédent dont il a pris la mesure de l’insuffisance et de la profonde insatisfaction qu’il lui procurait. Jamie Dorman nous montre un homme perdu mais absolument pas pathétique ; il veut aller de l’avant quoi qu’il lui en coûte. On songe à cet aphorisme : « le monde ancien est en train de mourir mais le monde nouveau n’est pas encore né ». L’exactitude de la formule n’est pas garantie mais l’idée est bien celle-là.

Quand le Chasseur retrouve Blanche-Neige, elle demande à son assassin de remettre une lettre à la Reine…et il lui fait grâce. Là encore, le scénario reprend le conte mais il lui donne une force et une profondeur sans pareille. Il faut connaître et avoir réfléchi au conte pour en donner une interprétation d’une telle valeur. Le tandem de scénaristes – à qui on doit la série, ne l’oublions pas – domine son sujet sans l’ombre d‘un doute et avec David M. Barrett, ils ont trouvé le réalisateur propre à mettre en musique leur partition pour en faire une symphonie. La série avait besoin de ce coup de fouet après quelques épisodes à la réalisation plutôt quelconque. Barrett sait varier entre action (rarement un épisode aura été aussi dynamique) et émotion, sans jamais tomber dans la platitude. Il se pose lorsque Henry donne les explications fondamentales à Graham pour nous donner le temps de comprendre qu’il ne s’agit pas de banales informations ni même d’une redite sur ce que l’on sait déjà de Storybrooke. Le regard de Graham est plus éclairant qu’un long discours : il dispose maintenant d’une explication globale.

Et sa nouvelle certitude contraste puissamment avec celle d’Emma. Il est frappant de voir l’approche réaliste de celle-ci se confronter à celle du shérif. Le réel percute la réalité mais, cette fois, une brèche se fait et Emma voit elle aussi le loup ! Lequel les mène jusqu’à un caveau ; celui de Regina. Jennifer Morrison est impeccable dans son interprétation d’une Emma, paniquée, parce qu’elle sent qu’elle n’a plus pied et tente de se raccrocher à quelque chose de solide. On a de la peine pour elle quand on la voit à nouveau entrer dans le jeu de son vis-à-vis comme un médecin s’adresse à un déséquilibré qu’il ne veut pas exciter davantage. Triste mais terriblement humain.

Humain, la Reine en a l’apparence mais sa dureté, sans surprendre, a de quoi effrayer. Le visage dur de Lana Parrilla, une nouvelle fois parfaite, illustre l’absence du Bien en elle. Elle a bel et bien choisi le Mal ; elle l’incarne et le Chasseur, qui a voulu la tromper, en paiera le prix. C’est de la cruauté à l’état pur. Rien ne dit qu’elle jouit du mal qu’elle fait mais elle n’a absolument aucun remord et c’est bien cela le plus effrayant. La noirceur du décor, très oppressant, et le cadrage qui se resserre sur les protagonistes, nous plonge dans le monde tel que le conçoit la souveraine : un monde qui ne permet à personne de lui échapper. Storybrooke est déjà en gestation dans ce château sombre et dépourvu de fenêtres.

Un fondu enchaîné nous ramène brusquement – on souffle peu dans cet épisode – devant le caveau mais le couple est surpris par Regina. S’ensuit d’abord une explication violente entre les protagonistes puis une véritable altercation. Cette dernière est bien mise en boîte : le combat est bref mais absolument pas confus, nerveux ; véritable exutoire de colères et de rancœurs accumulés. Graham a la phrase de l’épisode : « Je vois les choses telles qu’elle sont ». Emma ne peut que la prendre au pied de la lettre mais pour Regina c’est on ne peut plus clair. On va la voir ouvrir un passage secret dans le caveau et descendre dans une salle à l’esthétique étrange baignant dans une semi-pénombre et une musique sinistre.

Peu après, on revient au réel selon Emma ; Graham s’excusant d’avoir pété les plombs.  Sauf que le second baiser qu’ils échangent – cette fois, sollicité par la jeune femme - rouvre les vannes des souvenirs mais Graham meurt soudain, tué à distance par Regina. Encore une fois la musique, bien meilleure que précédemment, nous plonge dans la détresse d’Emma. Mais, plus fondamentalement, cette mort est la première manifestation de la magie dans notre monde. C’est une triste victoire pour la Reine car cette victoire est en fait un aveu de faiblesse.

Informations supplémentaires :

  • Après une dizaine d’années comme mannequin, Jamie Dornan est devenu acteur. Après le film Marie Antoinette (2006), c’est Once upon a time qui le lance vraiment avec le rôle du shérif Graham. En 2014, il est Christian Grey dans le film Cinquante nuances de Grey.

  • Dans l’adaptation au cinéma Blanche-Neige et le Chasseur, réalisé par Rupert Sanders, c’est Liam Hemsworth qui incarne le Chasseur. Il aura droit à son propre film en 2016 (The Huntsman) où il retrouvera Charlize Theron. Le film prendra place avant la rencontre avec Blanche-Neige.

  • Le titre original fait référence au roman de Carson McCuller paru en 1940.

  • Le loup que voit Graham est le même qui a empêché Emma de quitter Storybrooke dans le premier épisode.

  • Absence de Josh Dallas.

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8. LE TÉNÉBREUX
(DESPERATE SOULS)

Scénario : Jane Espenson

Réalisation : Michael Waxman

Dans le monde magique, Rumplestiltskin cherche désespérément un moyen de sauver son fils. A Storybrooke, Emma défie Regina en voulant devenir shérif.

Dans le monde magique, la guerre contre les ogres requièrent des soldats de plus en plus jeunes et le fils de Rumplestiltskin n’est pas loin d’avoir l’âge requis. L’ouverture de l’épisode se fait ainsi dans un décor champêtre mais on est loin de l’Arcadie du « berger » : le ciel est rouge, les soldats brutaux et leur chef est un rustre. On est ici au plus près du petit peuple et non plus dans les châteaux. Du coup, même si la vision de la scénariste n’a rien de révolutionnaire – la fantasy a volontiers des airs médiévaux – cette élargissement de la trame qui, en outre, nous présente le Rumplestiltskin d’origine, est la bienvenue.

Comme nous l’apprend M. Gold – c’est l’épisode de Robert Carlyle qui ne faillira jamais – nous sommes deux semaines après la mort de Graham et il pousse Emma à revendiquer le poste de shérif. Mais Regina a l’intention de nommer Sydney Glass, le rédacteur en chef du Mirror, sa créature. Henry veut abandonner l’opération « Cobra » car il a peur pour elle. Les propos qu’il tient sont saisissants chez un gamin de dix ans ! Mais ils sonnent justes et Jared S. Gilmore est parfaitement dans le ton. Le ciel est bas sur Storybrooke (on devait être à l’automne lors du tournage car tout le monde est couvert et la luminosité est loin d’être la même que celle des premiers épisodes). Le visage fermé de Jennifer Morrison vaut tous les discours.

Emma veut garder son poste et elle reçoit l’aide inattendue de M. Gold. Grâce à lui, Emma est en mesure de faire échouer la nomination de Sydney et Regina contrainte d’organiser une élection. Dans le rôle de Sydney, Giancarlo Esposito se régale à composer une baudruche étonnée d’être candidat au poste auquel il allait être nommé ! Lana Parrilla et Jennifer Morrison ont l’occasion de se mesurer dans une nouvelle scène de confrontation mais celle-ci a un enjeu et n’est pas seulement une figure imposée. La Reine-Maire sourcille à peine quand son autorité est remise en question et Emma met dans ses propos une énergie qui dépasse la simple opposition au tyran. Le jeu retenu, sans outrance, sans mise en scène exagéré, sait fort bien rendre qu’on est au-delà d’une querelle de personne. Le revers de cette médaille, c’est que Storybrooke reprend une consistance que Graham avait fortement questionnée. On en revient au réalisme et si Emma y est à l’aise. On a beau savoir que Storybrooke n’existe pas, il faut bien faire avec et Jennifer Morrison est vraiment convaincante avec son Emma réaliste.

Dans le monde magique, Rumplestiltskin et Baelfire s’enfuient de nuit pour échapper aux soldats mais ils sont rattrapés et leur chef fait à ce dernier des révélations terribles sur son père. La composition de Robert Carlyle est remarquable : on voit un être tremblant, veule, pleureur. Rien à voir avec l’aristocratique Gold ou le Rumplestiltskin que l’on connaît. Un vieux mendiant qu’ils ont aidé, relève le père humilié et confie à ce dernier comment faire pour ne plus avoir peur. Peur, M. Gold ignore ce mot. Un montage rapide  (grâce à une flamme) nous ramène dans sa boutique et l’explication qu’il a avec Regina est un régal. Lana Parrilla varie son jeu à merveille : méprisant et agressif contre Jennifer Morrison ; feutré et venimeux contre Robert Carlyle. Tous deux manient l’ironie avec maestria. C’est aussi un beau duel vestimentaire. Le tailleur sombre et le chemisier mauve de Regina lui confèrent une autorité certaine. Quant au costume de Gold rehaussé de sa cravate noire et mauve, sans oublier la pochette de la veste, il est celui d’un homme respectable. C’est à lui que l’on doit la phrase du jour : « Ne sous-estimez pas quelqu’un qui agit dans l’intérêt de son enfant ». C’est d’une superbe force, en plus de jeter un pont entre les mondes.

Alors qu’Emma va se plaindre à Regina d’un article odieux paru sur elle – scène prévisible et annoncée mais heureusement brève et surtout rythmée par une marche tonique et énergique des deux actrices – un incendie se déclare. Regina est blessée et Emma l’aide à sortir. Les pompiers et les journalistes les attendent. Dans le monde magique, Rumpelstilskin est décidé à s’emparer de la dague qui commande au Ténébreux, un être terrifiant aux pouvoirs immenses, et il pourra protéger son fils. Comment entrer au château ? En provoquant un incendie. La ficelle scénaristique est un peu  mais la mise en scène est très efficace. A Storybrooke, un débat doit départager les candidats. Au discours plat de Sydney (mais au moins ça nous fait sourire tellement il est nul !) succède celui, plus percutant d’Emma qui révèle la supercherie de l’incendie. Jennifer Morrison a posé les vrais enjeux pour son personnage : « Je veux lui prouver [à Henry] que les gens biens peuvent gagner ». A-t-elle encore un rôle à jouer dans la vie de son fils autrement ? Cet enjeu humain transcende une scène qui aurait pu être banale et terriblement réaliste. Un vrai souffle parcourt ces brèves scènes.

Rumpelstilskin invoque le Ténébreux – au nom ridicule – mais celui-ci le presse et, sous l’insulte, son nouveau et tremblant maître le poignarde. L’identité du Ténébreux est révélée mais, en fait, elle n’est nullement surprenante et le suspense était largement éventé. On a par contre, pour sauver ce moment, une alternance dynamique de clair-obscur. La magie a un prix : tuer le Ténébreux c’est le devenir ! Et Rumpelstilskin donne à voir une métamorphose saisissante ; surtout il est débarrassé de la peur. Il est ivre de pouvoir et c’en est magnifiquement terrifiant.

Contrairement à ce qu’elle pensait, Emma est élue shérif ! Il faut voir la succession de visages de Regina lui remettant son insigne : fermé et contraint mais juste après arborant un magnifique sourire sardonique, présage de représailles et d’une lutte à mort. Et Henry veut reprendre l’opération « Cobra ». L’élection n’est pas grand-chose : Emma a surtout gagné le cœur de son fils. Mais, elle découvrira que Gold avait tout prévu : « Je sais reconnaître une âme désespérée ». Un souffle glacé parcourt la scène.

Informations supplémentaires :

  • Rumplestiltskin ou en allemand Rumpelstilzchen est connu en français comme le Nain Tracassin. Il apparaît dans un conte populaire allemand recueilli par les frères Grimm dans le premier volume des « Contes de l’enfance et du foyer » en 1812.

  • Il faut deux heures à Robert Carlyle pour se transformer en Rumpelstilskin. Pour l’interpréter, il dit s’être inspiré de la commedia dell’arte ainsi que de son fils de six ans !

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9. HANSEL ET GRETEL
(TRUE NORTH)

Scénario : David H. Goodman et Liz Tigelaar

Réalisation : Dean White

Deux orphelins sont menacés d’être remis aux services sociaux, ce qui révolte Emma. Dans le pays magique, la Reine demande à deux enfants de l’aider à trouver un objet qu’elle convoite.

On pouvait être perplexe devant l’association de Liz Tigelaar dont le « pont des trolls » était de bonne facture et de David H. Goodman dont le « prix à payer » l’était beaucoup moins. Et quelle côté pencherait la mise en scène de Dean White, réalisateur du « pont » ? Comme en économie où la mauvaise monnaie chasse la bonne, cet épisode penche du mauvais côté. Il relève de ces épisodes isolés mais, là où « La petite voix de la conscience » s’attachait quand même à un personnage lié au cœur de l’histoire, on est ici dans la périphérie. C’est un épisode « catalogue » absolument pas relié à la mythologie de Once upon a time sinon par des accroches minces. Seuls les interprètes nous évitent l’ennui mais ils ne peuvent rien contre l’absence d’enjeu ni de suspense.

Deux enfants orphelins – Ava et Nicholas – sont surpris à essayer de voler l’épicier avec la complicité involontaire d’Henry, dont on découvre le goût pour les comics. Après sa maturité précoce, cela fait du bien de le voir se comporter comme un enfant « normal ». Si Regina veut les punir, Emma – sa première mission de shérif -  veut les aider à retrouver leur père. Elle a une sainte horreur des services sociaux. Jennifer Morrison est très convaincante dans ces passages sur l’enfance douloureuse de son personnage. On ne naît pas héros, on le devient et Emma est loin d’être la perfection incarnée. On le verra plus loin quand elle ment à Henry qui l’interrogeait sur son père. C’est la première mention de ce dernier mais, au final, on ne sait rien de lui. Quant au père des enfants, il est forcément à Storybrooke puisque personne n’y entre ni n’en sort. Qu’Emma l’ait oublié en dit long sur le peu de cas qu’elle fait encore de la malédiction.

Dans le monde magique, le père d’Hansel et Gretel disparaît alors qu’ils sont dans la forêt. On profite de jolis extérieurs assez sombres. Ce sera la marque de cet épisode : lumineux à Storybrooke, sombre dans le monde magique. Les enfants sont capturés par la Garde royale mais leur courage détermine la Reine à leur confier une mission : récupérer un sac en cuir chez la méchante sorcière de la forêt. Une sorcière plutôt sexy, échevelée,  aveugle et qui se réveille d’un somme dont on devine sans oser y croire encore la cause quand Hansel croque un gâteau. On assiste alors à un pur moment d’horreur : la caméra glisse doucement de la sorcière à un véritable monceau de squelettes. L’éclairage est judicieux, soulignant par contraste la robe sombre du monstre et le foyer d’où vient l’unique et violente lumière. La suite de l’histoire est connue.

Pour retrouver le père, Emma ne dispose que d’un indice : une boussole. Elle va solliciter l’aide de M. Gold qui lui donne un nom mais lorsque la caméra descend sur la fiche celle-ci est blanche ! Par contre, la suite est d’un classicisme éhonté. Le père refuse d’abord de reconnaître la paternité qu’on lui offre ; le héros fait un discours émouvant puis trouve un stratagème pour réunir toute la famille et c’est la fin heureuse qu’on attendait. Rien ne manque. Heureusement, les interprètes sauvent un peu la mise. Le père c’est Nicholas Lea qui a assez de métier pour composer un personnage qu’on devine marqué et qui n’a pas besoin de mots, qu’il maîtrise assez mal car peu à l’aise avec les émotions, pour faire ressortir son trouble.

Jennifer Morrison est, on le sait, convaincante dans ce registre et c’est à elle que reviens la phrase du moment : « Un jour, les enfants vous retrouveront et vous aurez à leur répondre ». L’écho personnel est assez prégnant pour donner de la force à un mot qui aurait pu facilement tomber dans la banalité. Banale comme la mise en scène et la musique à Storybrooke. Nous sommes revenus dans une petite ville de province. Laquelle n’a pas d’orphelinat. D’où la nécessité d’aller à Boston. Comme Regina est la mieux placée pour savoir qu’on ne peut sortir de la ville, demander à Emma de la quitter ressemble fort à un piège. Dommage que le temps ne soit pas au machiavélisme, on aurait pu se consoler avec une scène d’action.

Dans le monde magique, les enfants apportent à la Reine l’objet convoité : une pomme ! Sa destination ne nous surprendra pas là aussi et on reste étonné qu’il ait fallu cette machination compliquée pour trouver une pomme empoisonnée. La Reine a une prédilection pour les pommiers et elle n’aurait pas pu en trouver un qui convienne ? Un sortilège très puissant (forcément) l’empêche, elle, de passer ? On se pince pour y croire vu tout ce qu’on nous a déjà dit sur ses pouvoirs. D’autant que, qu’est-ce que c’est que ce génie du Mal qui est totalement désarmé ? Le « sort noir » était chez Maléfique et maintenant la pomme chez la sorcière de la forêt !  Quel manque de respect pour Sa Majesté ! Le scénario n’a absolument aucune crédibilité. Absence de crédibilité qui atteint par ricochet Lana Parrilla qui doit batailler pour donner du contenu à tout ça. 

Heureusement qu’elle est aidée ici par Nicholas Lea. C’est un affrontement asymétrique et il ne nous touche que plus profondément pour cela. La notion de famille est martelée et elle travaille sérieusement la Reine qui a un de ses rares moments de doute. Elle ne peut se sortir de ses contradictions que par la force et Lana Parrilla excelle à donner l’image de la puissance souveraine. C’est d’autant plus méritant pour elle d’y parvenir que les bouchers qui font office de coiffeurs et de costumiers sont de retour et visiblement ils sont en forme. On ne sait pas ce qu’ils prennent mais c’est du lourd ! Tout est absolument atroce. Ça ferait vomir un gobelin.

Soudain, surprise, un motard entre dans Storybrooke avec l’intention d’y rester !

Informations supplémentaires :

  • Hansel et Gretel est un conte recueilli par les frères Grimm en 1812. Il a été adapté en 2013 au cinéma où les personnages sont adultes (Jeremy Renner et Gemma Arterton) et traquent les sorcières.

  • Nicholas Lea, qui joue le père, est bien connu des fans de X-Files pour avoir joué Alex Krycek.

  • Absence de Josh Dallas

  • Arrivée remarquée d’Eion Bailey, invité de luxe dans cette saison.

  • C’est le conte préféré de Lana Parrilla. 

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10. LE VOL DE LA COLOMBE
(7:15 A.M.)

 

 

Scénario : Daniel T. Thomsen, d’après une histoire d’Edward Kitsis et Adam Horowitz

Réalisation : Ralph Hemecker

Mary Margaret n’arrive pas à se sortir David de la tête. Dans le monde magique, le mariage du Prince approche.

Cet épisode marque un net redressement de la série après le trou d’air du précédent. Il poursuit et approfondit l’arc narratif constitué par l’histoire d’amour entre Mary Margaret et David ; c’est-à-dire les retrouvailles entre Blanche-Neige et le Prince Charmant puisque ce sont leurs sentiments passés qui expliquent leurs sentiments présents.

Prolongeant l’épisode précédent, la discussion entre Henry et l’inconnu inquiète Regina. On la comprend : la dernière personne – et la seule – à être arrivée à Storybrooke met son royaume de pacotille en péril. Donc cet inconnu doit être lié à leur ancien monde mais comment aurait-t-il échappé à la malédiction ? Plus tard, Emma interrogera cet inconnu mais n’en tirera rien de concluant. Il se dit écrivain et Storybrooke est « propice à l’inspiration ». Ces brèves scènes, avec un brin d’humour en plus, instillent une atmosphère de mystère bienvenue et ouvrent un nouvel arc narratif. La série a désormais plusieurs gammes sur lesquelles jouer.

La gamme majeure du jour c’est Mary Margaret et David. Quand Emma prend sa colocataire en flagrant délit de mensonge et d’espionnage, c’est drôle et touchant. Et puis, ce n’est pas tous les jours qu’une fille donne un conseil amoureux à sa mère ! Ginnifer Goodwin, en retrait ces derniers épisodes, montre qu’elle sait tenir son rang et qu’elle a parfaitement compris ses rôles. Ici, la prude institutrice du début s’est muée en une femme amoureuse travaillée par ses sentiments et placée entre le réalisme (il est marié à une autre) et l’idéalisme. La position est inconfortable mais, malgré le thème rabâché, jamais on n’a jamais l’impression d’une redite tant la justesse de l’actrice est impeccable. Et le sourire attendri d’Emma n’en est que plus communicatif.

Si Mary Margaret n’arrive pas à se sortir David de la tête, c’est bien parce que Blanche-Neige n’y est pas davantage parvenue. Le réalisateur parvient à enchaîner de façon dynamique les scènes dans un monde et celles dans un autre. Globalement, le tempo sera rigoureux et approprié. La confession  de Blanche à Scarlett est touchante et sa douleur à l’annonce du mariage avec Abigaïl poignante. Signalons que Meghan Ory doit apprécier de jouer Scarlett parce que, là au moins, elle peut montrer autre chose que ses atours. Scarlett a donné un avis pour soigner le mal d’amour : il faut aller voir Rumpelstilskin. Une potion et hop ! Plus  de souvenirs ! Bon, le scénario joue la facilité et transforme le croquemitaine du monde enchanté en supermarché de la magie, la scène sent le studio mais l’éclairage est approprié et surtout le jeu des acteurs lui donne assez de réalité. Et comment passer à côté de la phrase du jour : « L’amour a tué plus de personnes que n’importe quelle maladie » !

Le cœur de l’épisode commence lorsque Mary Margaret trouve une colombe blessée et l’amène au refuge. Il lui est dit que cet animal devrait retrouver les siens sinon il restera seul. Très touchée, la jeune femme part dans la forêt malgré la tempête qui s’annonce. Elle manque de tomber dans un ravin mais David survient et la sauve. Pris dans l’orage, ils se réfugient dans une cabane où ils peuvent vider leurs sacs et mettre leurs cœurs à vifs. Tous ces moments baignent dans une atmosphère romantique au sens premier du terme. Ce qui donne un petit côté cliché. Une nouvelle fois, ce sont les acteurs qui sauvent la mise. Jamais ridicules, ils donnent une vraie profondeur à des scènes milles fois jouées. Ginnifer Goodwin et Josh Dallas emportent notre conviction.

Si le romantisme sévit à Storybrooke, c’est l’orage par contre entre le roi George et Charmant. L’un parle le langage de la raison d’État, cœur glacé et regard de marbre. L’autre le langage de l’homme, cœur passionné et regard de feu. Dans leur jeu, les deux acteurs montrent clairement le fossé qui sépare leurs personnages et, plus grave, l’impossibilité de communiquer. On savait déjà qu’il n’y avait pas d’amour entre eux mais ici c’est bien au-delà. Charmant parvient à contacter Blanche mais celle-ci est capturée. Le roi lui met un horrible marché en main : qu’elle rompt avec son fils sinon il le tuera ! C’est d’un machiavélisme accompli. Un cynisme revendiqué. Alan Dale compose un personnage hiératique qui ne vit plus que pour son royaume. Toute la scène baigne dans une lumière ocre très dure et une musique douce qui n’en fait que plus ressortir la violence des propos du roi. C’est un passage obligé des amours romantiques : les obstacles sur la route des amants mais le scénario le renouvelle avec brio.

A Storybrooke, la tempête est passé (météorologiquement parlant, en tout cas) et Mary Margaret en profite pour libérer la colombe. C’est une très jolie scène tournée en plus en extérieur et les bois sont vraiment beaux. La lumière n’est pas encore celle d’hiver et c’est en fait une réelle atmosphère romantique qui est installée. Les regards qui se fuient mais les mains qui se cherchent ; tout cela est connu mais tout est nouveau quand même. Revenus à la ville, ils chercheront à s’éviter…ce qui bien entendu était voué à l’échec. Ce ne serait pas crédible évidement mais quand on sait qui est intéressé à ce que les amoureux ne se retrouvent jamais, le pire est à venir. Et nous avec parce que l’on est impatient de savoir comment ils vont triompher de ces obstacles car ils ne peuvent que triompher puisque telle doit être la « fin heureuse ».

Informations supplémentaires :

  • Très poétique, le titre français fait référence à une des scènes majeures de l’épisode et met l’accent sur l’aspect sentimental. Le titre original, tout aussi sentimental, se rapporte à l’heure à laquelle les amoureux se retrouvent chez Granny. Au vu de l’épisode, le titre français est plus juste.

  • Première fois que l’on fois une télévision à Storybrooke : on y entend la météo sur la ville. 

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11. LE GÉNIE
(FRUIT OF THE POISONOUS TREE)

  

Scénario : Ian Goldberg et Andrew Chambliss

Réalisation : Bryan Spicer

Dans le monde magique, un roi trouve une lampe d’où sort un génie. A Storybrooke, Emma trouve un allié inattendu pour lutter contre Regina.

Sans être dénuée d’intérêt, cette histoire n’est pas très convaincante. Très plate, elle évite le naufrage par une bonne réalisation et grâce à Lana Parrilla.

Toute la partie du scénario se déroulant à Storybrooke peine à nous intéresser. Après une énième « mauvaise » - mais justifiée d’un point de vue réaliste -  action de Regina, Emma voit Sidney lui proposer « d’exaucer son vœu ». Il a été viré par le Maire ; il veut se venger. Malgré sa volonté d’agir dans les règles, Emma se laisse tenter. Il est étrange de voir le héros d’un conte de fée se la jouer « côté obscur de la force ». Certes, ce n’est pas invraisemblable mais ça ne sonne pas tout à fait juste.

Dès le départ, l’affaire sent le coup fourré. Les retrouvailles des conspirateurs dans un tunnel sont ridicules tellement c’est cliché. Globalement, rien ne tient debout. L’action tient surtout dans des allées et retours et des discussions verbeuses et plates. Jennifer Morrison ne force pas son talent et ne parvient pas – un comble ! – à nous intéresser à ses manœuvres de basse police. Elle nous fait même involontairement sourire quand on l’entend vouloir lutter contre Regina car la lutte, dans son esprit, se fait sur un mode réaliste pour montrer le visage malfaisant du Maire. Elle n’a toujours pas compris à qui elle avait véritablement affaire !

Dans le monde magique, le roi Léopold trouve une lampe magique. Évidemment, il y a un génie dedans. Mais, comme il n’y a rien qu’il ne désire, le roi libère le Génie. Les acteurs sont bons pour donner de la crédibilité à une scène mille et une fois déjà vue. Par contre, leurs costumes sont très décalés par rapport au paysage : un roi au somptueux habit et un Génie vêtu à l’orientale dans un décor naturel de la Colombie-Britannique ; ça sonne quand même un peu faux ! Pour une fois, un petit effet spécial n’aurait sans doute pas été de trop. Le roi invite le Génie dans son palais : il y présente sa famille. Sa fille, Blanche-Neige et son épouse, la Reine ! Exceptionnellement, Lana Parrilla est magnifiquement habillée. Son habit de fourrure blanche est véritablement royal. On peut même étendre ce compliment à l’intégralité de l’épisode, et notamment sa robe de soirée. Un véritable exploit quand on repense en frémissant au code de la beauté pour le moins particulier mis en œuvre pour le monde magique.

Lors d’une soirée, le Génie remarque la tristesse de la Reine qui lui confie que le roi ne l’aimera jamais comme sa première épouse, la mère de sa fille, et qu’elle en souffre. Cette confession faite dans un décor magnifiquement mis en valeur par la lumière lunaire est poignante et constitue le cœur de l’épisode. Très bien écrite, bien jouée, la scène est encore mieux réalisée. Un plan large nous remontre ce belvédère puis se recentre très vite sur le visage de la Reine baigné de larmes avant d’alterner cadrage serré sur les visages et cadrage élargi pour donner de la place aux personnages pour se mouvoir et éviter une impression statique.

On apprécie de voir Giancarlo Esposito jouant bien et donnant de l’épaisseur à un personnage des plus connus et très facilement caricatural des contes et légendes. Autant Sidney est un clown, autant le Génie est…un homme. Humain, trop humain même dirons-nous car, dans cette belle lumière nocturne, on ne peut s’empêcher de sentir l’ombre se mouvoir en lisière. Certes, que la Reine puisse être malheureuse est très possible mais c’est son côté « faible femme en détresse » qui interroge. Et que cette « confession » ait lieu sous un pommier devrait aussi mettre le spectateur attentif en alerte.

A Storybrooke, Emma et Sidney accusent publiquement Regina d’abus de bien social (pour ceux qui ignore ce que c’est, on a au moins la définition) mais celle-ci confond ses inquisiteurs avec une facilité humiliante et elle abuse de sa victoire en écrasant un peu plus Emma. Fin de l’opération « Pieds Nickelés ». Le final est à peine une surprise et ne rehausse pas le niveau. Ça se confirme : quand Storybrooke donne dans le réalisme trivial,  le spectateur s’ennuie. Pendant ce temps, David et Mary Margaret badinent et M. Gold intrigue. Rien de nouveau sous…l’absence de soleil pour le coup.

C’est un peu plus intéressant dans le monde magique quoique sans surprise. En effet, le roi Léopold pense que sa femme a un amant et demande au Génie de découvrir qui c’est. Ce qui embarrasse bien le Génie, on s’en doute. Génie mis au supplice peu après puisqu’il découvre que la Reine a l’intention de se tuer en se faisant mordre par une vipère d’Agraba. La suite est on ne peut plus prévisible mais le réalisateur parvient à maintenir notre intérêt. D’abord, en faisant baigner la scène de l’assassinat dans une semi-pénombre ; ce bleu-noir est on ne peut plus approprié. Ensuite, en utilisant une musique qui souligne la tension précédant la mise à mort. Enfin, en alternant le plan serré sur l’atroce vipère et plan large sur la victime endormie vu par son meurtrier. Nous ne sommes pas surpris de la fin et nous sommes rassurés sur notre Reine bien-aimée ; elle est toujours aussi diabolique et la façon dont elle tombe le masque est d’une cruauté raffinée. Comme quoi, on peut être un génie sans être génial. Les scénaristes vont preuve pour finir d’un humour grinçant mais tout à fait dans le ton de la scène.

L’amour rend aveugle, c’est connu et cet aphorisme n’est pas trop mal rendu ici. Ce qui pêche surtout dans l’histoire c’est qu’elle met au premier plan un personnage secondaire à Storybrooke et très secondaire dans l’univers des légendes. Le génie est commun dans les contes orientaux mais n’existe pas en Occident. L’élargissement à d’autres cultures est méritant mais pas vraiment concluant. Et inclure le génie dans la trame de la série ressort par trop artificiel. Les scénaristes ont voulu piocher dans le riche catalogue Disney qui produit et diffuse la série mais le spectateur est un peu le dindon de la farce de cette preuve d’allégeance. Sidney est comme un Excentrique de Chapeau melon et bottes de cuir. Il est intéressant dans des scènes courtes mais lasse quand l’espace devient plus important. Giancarlo Esposito n’y est pour rien ; il n’a pas le personnage qui lui permettrait de donner sa pleine mesure comme on n’a pu s’entendre compte dans son interprétation du Génie. Once upon a time repose sur ses interprètes principaux ; les acteurs secondaires n’ont pas les moyens de jouer les premiers rôles. On se console en se disant que cet épisode aurait pu être pire.

Informations supplémentaires :

  • Giancarlo Esposito : le Génie / le Miroir magique / Sidney Glass : Né au Danemark, cet acteur américain a joué dans Recherche Susan désespérément (1985), Malcom X (1992), Usual Suspect (1995), Homicide (1998-1999), The Practice (2002), Breaking Bad (2008-2011, Gus Fring), Revolution (2012-2014).

  • Aladin ou la lampe merveilleuse est un des plus célèbres Contes des mille et une nuits traduits en français en 1710 par Antoine Galland. Il en existe plusieurs versions favorables ou pas à Aladin. Il symboliserait la recherche de la connaissance.

  • Richard Schiff qui incarne le roi Léopold, père de Blanche-Neige, est un acteur américain. Il a notamment tourné dans Bodyguard (1992), Speed (1994), Le monde perdu (1997), Docteur Dolittle (1998), A la Maison-Blanche (1999-2006), NCIS (2012, Harper Dearing).

  • Les « miroirs magiques » sont un élément du merveilleux remontant jusqu’au 5ème siècle en Chine. Si le miroir de la Reine est le plus célèbre, on en trouve un dans la Belle et la Bête.

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12. LA BELLE ET LA BÊTE
(SKIN DEEP)

Scénario : Jane Espenson

Réalisation : Milan Cheylov

Pour sauver les siens, Belle accepte de rejoindre Rumpelstilskin. A Storybrooke, M. Gold se montre particulièrement dur avec un fleuriste.

Un épisode magistral. Centré sur Gold/Rumpelstilskin, il permet à Robert Carlyle de faire un grand numéro d’acteur. Tour à tour charmeur, monstrueux, joueur, cruel, il enrichit ses personnages et nous en donne des facettes inexplorées. Il est d’autant meilleur qu’il a des partenaires féminines qui lui répondent avec talent. Un John Steed maléfique décidément !

Menacée par des ogres (décidément, l’Arlésienne menaçante de cette saison), une ville fait appel à Rumpelstilskin qui accepte de la sauver moyennant la fille du seigneur local prénommée Belle. Avec humour, Jane Espenson fait dire par le seigneur que leur sauveur est une « bête » et Robert Carlyle, qui a parfaitement saisi ce que la scénariste a écrit, nous offre une composition drolatique d’un Rumpelstilskin exagérément choqué. Lui affirme qu’il a besoin d’une gouvernante et la liste des tâches que Belle aura à accomplir est longue comme un jour sans pain mais cette présentation a quelque chose de léger.

A un moment, elle ébrèche une tasse. Détail qui aura son importance et pas seulement dans cette saison-ci. Émilie de Ravin est peu convaincante quand elle veut nous faire croire que Belle a peur et se montre soumise à son geôlier. Heureusement, l’actrice fera beaucoup mieux très vite. On retrouve le décor du salon – la seule pièce que l’on nous présente de « l’immense » château dit « des ténèbres », une dénomination vraiment peu originale pour le coup. Seule faute de mise en scène, quand Belle ouvre les rideaux, l’image devient floue. Dommage quand on veut nous faire croire que la lumière entre !

Si tout va bien dans le monde magique, ce n’est pas le cas à Storybrooke où, pour un défaut de paiement, le fleuriste Mo French, se fait confisquer sa camionnette par un M. Gold plus féroce que jamais. Regrettons ses lunettes à verre teintées qui lui donne un air de mafieux et qui jure avec son élégance habituelle. Quand le domicile du prêteur sur gage est cambriolé – première fois que l’on aperçoit sa maison qui est grande, meublée avec goût dans un style ancien mais raffiné, il affirme que le fleuriste est le coupable et, en effet, Emma retrouve « presque » tout le butin. Si Jennifer Morrison est en retrait sur cet épisode, elle est gâtée par les scènes qui lui ont été allouées. Presque toutes face à Robert Carlyle et ce sont des moments importants parce que, là,  tout résonne entre les mondes. Emma agit rationnellement mais, rarement, les deux univers se seront aussi bien confondus. Chaque mot, chaque geste de l’un se retrouve dans l’autre et les signifiants se renforcent. Avec un vieux routier des séries comme Milan Cheylov, Jane Espenson a trouvé le maestro pour composer l’opéra que requiert son livret.

On est par contre moins convaincu par l’ennuyeuse « soirée entre filles » qui réunit Mary Margareth, Ruby et Ashley dont la présence n’est justifiée que par le discours sur l’amour qui nous est seriné à longueur de répliques. L’épisode est précisément daté : il commence le 13 février, couvre la nuit et se termine le lendemain. Avec un scénariste moins inspiré, c’était le désastre. Heureusement, Jane Espenson a la bonne idée de répartir la soirée en courts moments entrecoupée de scènes avec Robert Carlyle et Émilie de Ravin, ce qui nous ravit aussi.

Gold a enlevé le fleuriste pour lui faire avouer « où elle est ». C’est un moment très dur et le visage de Robert Carlyle est marqué par la rage qu’il insuffle à son personnage. On savait que Gold était un serpent mais ici, c’est un véritable fauve qui déchaîne sa colère. Colère qui serait incompréhensible si le spectateur n’avait pas vu le début car, dans une approche réaliste de Storybrooke, elle n’est absolument pas justifiée. Pourquoi le prêteur sur gage s’en prendrait-il à un fleuriste mauvais payeur et cambrioleur de bas étage ? Oui, mais Rumpelstilskin ne peut-il pas s’en prendre au père de Belle ? Dans ce cas, mais nous sommes les seuls à le savoir car Emma reste étrangère à cette vérité, sa colère se comprend et sa rage s’explique parce qu’elle est profonde et ancienne. 

Une colère qui remonte au monde magique. Belle s’est bien acclimatée et son interprète lui donne un air enjoué et une mine pimpante. Même son seigneur et maître paraît s’attendrir. Les échanges entre les acteurs sont emplis de douceur mais sans guimauve. Il y a cet humour sous-jacent qui orne la tendresse. La réalisation est ici douce et délicate et la caméra se rapproche des visages au fur et à mesure que l’émotion emplit la salle. Vraiment, il faut souligner l’absence de mièvrerie. Se souvenant du conte, Jane Espenson nous place des détails révélateurs (la rose) mais aussi l’épreuve. Rumpelstilskin autorise Belle a sortir du château sous un prétexte futile.

Ce que le magicien n’avait pas prévu c’est la rencontre que ferait la jeune fille dans la forêt : la Reine ! La scène prend ici une double résonance. On pense bien sûr au loup et au chaperon rouge mais aussi à la Bible. En effet, il est facile de comprendre du coup comment le Serpent a pu convaincre Ève de croquer dans la pomme. Les conséquences en sont les mêmes : Belle est expulsée du Paradis qu’est devenu le château pour elle. Sans dévoiler le stratagème mis au point par la diabolique souveraine (pas trop mal habillée cette fois, profitons-en), disons qu’il entre dans la lutte tantôt ouverte tantôt feutrée entre ces deux êtres habités par une soif inextinguible de pouvoir et un appétit de puissance à la mesure de leur solitude. Rarement, la symétrie entre ces deux personnages n’aura été aussi bien soulignée. La colère de Rumpelstilskin (peut-être la seule fois où ce froid personnage perd son sang-froid justement) est symétrique avec celle de M. Gold.

Et Emma ? Elle ne se laisse pas faire et, retrouvant M. Gold, elle arrête celui-ci ! Si ce dernier veut se montre supérieur, il n’impressionne absolument pas le shérif mais ne semble pas s’en offusquer. Avoir fait trembler Storybrooke depuis 28 ans a dû cesser de l’amuser et il paraît apprécier d’avoir quelqu’un qui lui tienne tête même s’il n’a absolument pas peur d’elle. Jennifer Morrison donne l’image d’une Emma à l’aise dans sa tête et dans ses baskets. Ce qu’Emma ne comprend pas, le spectateur le ressent et avec plus d’acuité encore dans ces scènes « normales » où elle s’éclate : Storybrooke est un théâtre.

Que serait une Saint-Valentin à Storybrooke sans David et Mary Margareth ? Jane Espenson a la plume moqueuse avec l’histoire des cartes de Saint-Valentin. Les acteurs renouvellent leurs prestations avec justesse et émotion. Elle veut rompre car peut-on être avec quelqu’un si on ne peut pas être avec cette personne ? Au-delà du paradoxe apparent, une belle illustration des tourments de l’amour. La scène fait écho à leur pique-nique insouciant précédent. Filmée avec les lumières de la ville la nuit, la scène oscille entre tendresse, dépit et un certain humour pince-sans-rire qui plus est !

Le final est une apothéose car on retrouve nos duettistes machiavéliques dans des scènes semblables à travers le temps et les mondes. La Reine se délecte de la douleur qu’elle inflige à Rumpelstilskin. Elle est d’une cruauté sadique et la musique, quoique déjà précédemment entendue, souligne le décalage entre les horreurs dites et le ton employé. Contemple mon œuvre, O Tout-Puissant et désespère ! A Storybrooke, Regina avoue avoir ce que recherche M. Gold au terme d’échanges marqués par la haine éprouvée par les protagonistes l’un envers l’autre et qui devient de plus en plus palpable au fur et à mesure que le réalisateur prend son temps pour dérouler la scène. Mais, soudain, bas les masques ! Regina rend la tasse ébréchée mais exige en retour qu’il réponde : « Quel est ton nom ? ». Le passage du vouvoiement au tutoiement (en VF) souligne à merveille la masse de rancœurs et de haine rancie. Les choses changent à Storybrooke. Désormais, deux personnes (en plus d’Henry !) savent la vérité mais que vont-elles en faire ?

Informations supplémentaires :

  • Émilie de Ravin est une actrice australienne d’origine française. Elle a tourné dans la colline a des yeux (2006) ; dans la série Roswell (2000-2002), NCIS (2003), Lost (2004-2010). Pour les créateurs de la série, l’actrice était leur premier choix dans ce rôle.

  • A la ville, Émilie de Ravin est blonde coupée court.

  • Milan Cheylov, réalisateur canadien, a mis en scène des épisodes dans des séries aussi diverses que Les 4400, Dexter, Bones, Las Vegas, Les agents du SHIELD. On le retrouvera dans un autre épisode de cette saison 1 et trois autres de la saison 2.

  • Les frères Grimm ne retinrent pas le conte dans leur recueil car ils le trouvaient « trop français ».

  • Le conte de La Belle et la Bête – le titre français est plus explicite que l’énigmatique titre original – a connu de très nombreuses variations à travers l’histoire. En France, la version la plus populaire est celle de Mme Leprince de Beaumont, écrite en 1757 qui la résuma et la simplifia. Elle est la base de la plupart des adaptations.

  • Rumpelstilskin endosse le rôle de la Bête. L’idée était présente dès le départ pour les créateurs de la série.

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13. LE CHEVALIER D'OR
(WHAT HAPPENED TO FREDERICK)

Scénario : David H. Goodman

Réalisation : Dean White

Au pays magique, Abigaïl demande une faveur au Prince Charmant. A Storybrooke, les choses se tendent autour du triangle Mary Margareth-David-Kathryn

Un épisode assez plat conçu entre une crise amoureuse et un exploit chevaleresque mais sans que l’un interagisse avec l’autre. Josh Dallas est la figure centrale de cet épisode et on lui doit largement qu’il ne sombre pas complètement.

Pourtant le début était encourageant. Charmant s’enfuit de chez le roi George pour ne pas épouser Abigaïl. La chevauchée et la poursuite sont bien filmées et la musique épique souligne plaisamment l’action. Et voilà qu’il tombe entre les mains d’Abigaïl ! Sauf que la suite ne sera pas à la hauteur et, pour une fois dans cette saison 1, c’est la composante « magique » qui pèche.

La scène entre David et Kathryn est d’une grande trivialité (et la réplique de David un monument à la gloire de la platitude !) mais c’est ce qu’il fallait pour souligner la décalage, le fossé, entre un quotidien morose et les espoirs que mettaient la jeune femme dans le retour de son époux. Les Nolan n’ont rien à se dire. C’est d’une grande tristesse et le spectateur partage le malaise de David et la douleur de Kathryn car il sait pourquoi ce couple ne fonctionne pas. Par contre, quand David retrouve Mary Margareth, c’est du déjà-vu et du déjà-entendu. On passe de Marivaux à Shakespeare mais sans vraiment convaincre. Les acteurs ressassent et seul leur talent empêche l’ennui.

Si Abigaïl a enlevé Charmant, c’est qu’elle a une requête à lui soumettre et un aveu à lui faire. Son grand amour, Frédéric, a été changé en statue dorée et seule l’eau du lac Nostos pourrait lui rendre vie. Bien sûr, le lac est gardé par un monstre et bien des chevaliers ont péri en tendant cet exploit. Once upon a time s’aventure du côté de la Table Ronde et ne nous soulève pas d’enthousiasme. Des prouesses chevaleresques, on en a vu d’autres et qui peut croire que Charmant ne réussira pas ? La créature en question est une sirène et, évidemment, notre héros manque de succomber à son (ses) charme(s) mais, évidemment, il se reprend et se sauve en tuant la tentatrice. Il ramène l’eau pour le chevalier et le chevalier revient à la vie. Tout cela est banal et le lac sent le décor à plein nez. On appréciera le combat aquatique mais ça ne sauve pas une intrigue sans relief. C’est Charmant qui aura le mot du jour (ça manquait) : « Il faut accepter de se battre par amour. Quand on a trouvé l’amour de sa vie, rien ne peut le remplacer ». Cette phrase aura une résonnance toute particulière, dans un autre contexte, à l’épisode 19. 

A Storybrooke, Kathryn découvre que David a une aventure avec Mary Margareth. Blessée, la jeune femme fait une scène à l’école et gifle l’institutrice ! Laquelle décide de rompre avec David ensuite. Une remarque qu’elle fait est intéressante : leurs sentiments sont destructeurs. En vérité, c’est exact mais c’est Storybrooke qui est attaquée par leur amour. Cet amour vient du monde magique ; il n’a donc pas sa place dans l’univers de marionnettes conçu par la Reine et sa manifestation bien réelle menace tout l’édifice.

Comme tous les personnages sont prisonniers sans le savoir, c’est tout naturellement qu’ils se sentent mal. Anastasia Griffith livre une belle prestation tout au long de ses scènes. Une des plus fortes est l’annonce qu’elle fait à Regina qu’elle va quitter Storybrooke. Le sourire de Regina est un des plus beaux sourire de carnassier qu’on ait pu voir ! La garde-robe du maire est contrastée dans cet épisode. Un ensemble argenté gâché par un nouveau pull à col roulé. Quelqu’un peut dire à Lana Parrilla que ça ne lui va pas du tout ? Tout comme le foulard qu’elle arbore quand elle reçoit Anastasia Griffith la deuxième fois.

Storybrooke comporte, c’est inhabituel mais c’est une bonne idée, un second segment narratif autour du mystérieux inconnu joué par Eion Bailey, qui se nomme (c’est la première fois qu’on découvre son nom) « August W. Booth », avec décontraction et un sourire malicieux. Ce que l’on découvre sur lui dans cet épisode renforce encore le mystère qui l’entoure. Il s’intéresse au livre d’Henry (qu’il duplique) et semble vouloir convaincre Emma de croire à la magie. Mais, dans l’optique réaliste de cette dernière, c’est ni plus ni moins qu’une tentative de drague de plus et son sourire narquois montre assez ce qu’elle pense. Booth ne peut cependant pas être un simple dragueur car personne n’est censé pouvoir venir à Storybrooke or il l’a fait. Son intérêt pour Emma pourrait alors se lire comme le fait qu’il est au courant qu’elle est la Sauveuse et veut donc son éveil. Pourquoi ? On ne le sait pas encore mais on a envie de le savoir. 

Informations supplémentaires :

  • Première apparition d’une sirène dans la série.

  • Hans Christian Andersen est le premier à avoir fait d’une sirène un personnage de conte.

  • Le titre original se rapporte à une phrase prononcé par Midas dans l’épisode « Le berger ».

  • Absence de Robert Carlyle

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14. NOVA ET RÊVEUR
(DREAMY)

Scénario : Edward Kitsis et Adam Horowitz

Réalisation : David Solomon

Dans le monde magique, le Nain Rêveur s’éprend de la fée Nova. A Storybrooke, Leroy, agent d’entretien alcoolique, se met en quatre pour aider une religieuse, Sœur Astrid.

Un épisode paradoxal. S’il n’apporte rien à la mythologie de la série, il est tellement poétique qu’on ne peut le rejeter. En fait, c’est même un authentique conte de fée moderne.

Si vous ne saviez pas comment naissent les Nains, Edward Kitsis et Adam Horowitz vous apportent une réponse pour le moins originale ! Le décor de la mine est bien fait. Si le tunnel d’extraction est bête comme chou, le lieu de transformation du minerai extrait est ingénieux et d’une certaine complexité. Les scénaristes ont en outre la bonne idée d’expliquer le travail des Nains et de le replacer dans l’économie générale du monde magique. On a même droit à un thème musical original, plutôt guilleret. D’une manière générale, la musique est bien présente et on l’entend agréablement. D’autant que Mark Isham a la bonne idée de la varier et il se paye même le luxe de faire siffler par les Nains le thème bien connu extrait du film !

La vie des Nains est réglée comme du papier à musique mais un accident va modifier celle de Rêveur. Au lieu de faire ce pour quoi il est né sans rien dire, il se pose des questions. Son nom même le prédestine à ne pas avoir les pieds sous terre comme ses frères. C’est leur pioche qui les baptise lorsqu’ils la prennent en main et cette cérémonie a quelque chose de touchant et d’original.  Lorsqu’il rencontre Nova, venue chercher la poussière de fée, c’est le coup de foudre ! Il a de plus la phrase du moment : « Si on rêve de quelque chose, c’est qu’on est capable de le faire ». Cette belle déclaration est répétée à une autre reprise.

A Storybrooke, Mary Margareth peine à recruter des volontaires pour vendre des bougies pour la « fête des mines », un événement local. Écoutez bien l’interrogation d’Emma lorsque sa coloc’ lui en parle. C’est anecdotique mais révélateur. Le seul qui veut bien aider la malheureuse institutrice, brocardée par toute la ville, c’est Leroy, l’agent d’entretien de l’hôpital, alcoolique et grincheux. Mais il a été touché par la grâce ou plutôt par le sourire angélique de Sœur Astrid, une religieuse aussi attachante que maladroite. Souvent, lorsque la série veut mettre en avant ses seconds rôles, elle se gaufre lamentablement. Ce n’est absolument pas le cas ici ! Lee Arenberg occupe l’espace de manière très convaincante et son interprétation de Leroy/Rêveur est sans faute. L’homme est blessé, c’est évident et son mal-être est éloquent. Il est à la hauteur de ses homologues féminins. Ginnifer Goodwin campe une femme blessée mais pas une demoiselle en détresse. Elle souffre mais se bat ; elle tombe mais cherche à se relever même si c’est pénible. Pour sa seule participation à Once upon a time, Amy Acker nous convainc sans peine. Rieuse, espiègle, elle est une religieuse et une fée peu orthodoxe. Sa maladresse est touchante et on s’attache à ce personnage au grand cœur. 

Leroy et Mary Margareth doivent vendre toutes les bougies préparées par les religieuses sinon elles ne pourront honorer leur loyer car Sœur Astrid a gaffé en passant une commande. Mais voilà, qui va vouloir acheter des bougies « à l’ivrogne et à la traînée de la ville » ? Les voir faire en vain du porte à porte donne un certain comique de répétition car la scène est brève et filmée avec un entrain proportionnel à la déconvenue des duettistes !

Dans le monde magique, Rêveur retrouve Nova sur une colline et ils admirent les lucioles. C’est un moment de pure poésie et le décor est magnifique. Les deux amoureux s’inventent des projets d’avenir et c’est vraiment beau. C’est véritablement magique et la musique nous touche profondément. Par contre, sans doute frustrés de ne pas pouvoir exercer leurs talents d’équarisseurs sur la Reine, les bouchers modistes de la série se sont déchaînés sur les malheureuses fées ! La tenue de la Fée Bleue était déjà difficile à voir mais avec Nova ça laisse rêveur !

Il vaut mieux avoir emmagasiné de la poésie car le retour au réel est douloureux à Storybrooke. La journée s’avance et aucune bougie n’est vendue. La déception silencieuse d’Astrid est plus poignante qu’un long discours. Amy Acker est aussi excellente dans la sobriété que dans l’exubérance. Grâce à elle, Astrid échappe au cliché de la gentille fille maladroite et rigolote pour devenir une femme qui croit dans les autres, qui fait confiance mais n’est pas idiote. Elle a cru en Leroy et la faute de ce dernier la blesse profondément et le spectateur le ressent vivement. Par un effet miroir maintenant bien connu, la blessure est aussi dans le monde magique. Rêveur ne réalisera pas ses beaux projets et il ne s’en remettra pas. La scène de rupture est poignante, portée par une musique aussi tendre et douce que les mots sont durs. Le décor magnifique qui a révélé cet amour est cruellement le même que celui qui l’enterre. Symboliquement, Rêveur brise sa pioche et la nouvelle le baptise bien moins poétiquement. Le destin est-il tracé d’avance ? La réponse proposée ici est assez amère.

L’épisode ouvre également un arc narratif dramatique, qui prolonge le final de l’épisode précédent (un classique de la série) : la disparition de Kathryn Nolan. Emma mène l’enquête accompagnée de Sydney qui prétend bosser en freelance et vouloir faire son métier de journaliste. Il n’apporte en fait pas grand-chose et ne sert qu’à rappeler au spectateur qui est son maître et qu’Emma est sous surveillance. L’enquête en elle-même n’est guère intéressante puisque le suspect est forcément innocent et que nous savons que c’est un complot monté par Regina. On se demande juste où la diabolique régisseuse de ce théâtre qui s’ignore que constitue Storybrooke veut aller et quel est son but. Dans cet épisode, Lana Parrilla n’a que deux scènes brèves à défendre mais elle ne les passe pas par perte et profil. Sa garde-robe est classique, sobre et de bon goût. Le décor du bureau a vraiment été pensé pour lui servir d’écrin. Elle trône avec évidence quand d’autre serait écrasé par le solennel.

Le spectateur aura un dernier moment de poésie. Évidemment que nos héros vont réussir à vendre leurs bougies grâce à une idée…lumineuse ! 

Informations supplémentaires :

  • Amy Acker, née à Dallas, lança sa carrière en 2001 en intégrant le casting d’Angel où elle reste jusqu’à la fin de la série en 2004 (Winnifred Burkle). Vue aussi dans Alias (2005-2006, Kelly Peyton), Dollhouse (2009-2010) et Person of Interest où elle incarne la très ambigüe Root.

  • Lee Arenberg : Grincheux/Leroy : acteur américain, a tourné dans Waterworld (1995), Donjons et Dragons (2000) et Pirates des Caraïbes (2003, 2006, 2007). A la télévision, il a joué dans Scrubs (2003) et Californication (2013).

  • Keegan Connor Tracy: la Fée bleue / la Mère Supérieure du couvent de Storybrooke : actrice canadienne, vue dans Destination finale 2 (2003), Les 4400 (2004). Lui faire jouer une religieuse est quasiment hérétique car l’actrice jouit d’une plastique irréprochable !

  • Absence de Jared S. Gilmore

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15. LE GRAND MÉCHANT LOUP
(RED-HANDED)

Scénario : Jane Espenson

Réalisation : Ron Underwood

A Storybrooke, Ruby démissionne du restaurant de Granny. Dans le monde magique, Scarlett et Blanche-Neige tentent de débusquer un loup monstrueux qui sème la désolation.

L’épisode est entré sur le personnage de Ruby/Scarlett et l’expérience a montré que ce n’était pas souvent en mettant en avant ses seconds rôles que la série était la plus convaincante. Cependant, avec Jane Espenson a la baguette, c’est plus rassurant.

D’emblée, le ton est donné : il sera sombre. La disparition de Kathryn Nolan constitue désormais le fil rouge côté Storybrooke. Ce segment permet à Josh Dallas et Ginnifer Goodwin de présenter une facette plus tourmentée de leurs personnages mais ce n’est pas tout à fait réussi. L’interprétation de Josh Dallas nous ramène aux premiers temps de David sans guère marquer d’évolution. Sa partenaire s’en sort à peine mieux. Autre point sombre, à nouveau, Lana Parrilla joue les utilités et, cette fois, elle n’a rien de croustillant à se mettre sous la dent qu’une nouvelle scène d’hostilité envers Emma. Bien jouée certes mais déjà mille fois vue.

Par contre, Meghan Ory saisit la perche que lui tend le scénario pour développer enfin le personnage de Ruby. La serveuse sexy – quoique lourdement maquillée – en a assez de sa vie plan-plan (la conscience que prennent les habitants de Storybrooke du temps et de la banalité de leur quotidien semble marquer l’essoufflement de la malédiction) et veut vivre autre chose. Symétriquement, dans le monde magique, Scarlett souffre de l’enfermement dans laquelle la maintient sa Mère-Grand (une expression qui sonne agréablement aux oreilles des fans des Avengers !) alors qu’elle voudrait partir avec Peter, l’apprenti-forgeron qui la courtise. Mais il rôde un loup monstrueux qui fait des ravages dans les troupeaux et que les chasseurs n’arrivent pas à attraper. Scarlett rencontre Blanche – qui dit s’appeler Marie – et les deux femmes sympathisent. En allant au puits, elles tombent sur un carnage. 

Là, il faut reconnaître que le réalisateur a bien fait son travail. Le spectateur tombe soudainement sur la scène et le rouge ressort vraiment bien sur le blanc. C’est d’ailleurs un plus pour l’histoire « magique » que cette atmosphère hivernale alors que Storybrooke est plombé par un temps gris persistant. Lorsque Mère-Grand raconte une attaque précédente de loup, son histoire est éprouvante. Commencée sur un ton froid, démonstratif, elle se charge en émotion à mesure qu’avance l’histoire familiale. Beverley Elliott réussit elle aussi à développer son personnage. Dans les contes, le sien n’est guère plus qu’une silhouette. Du coup, l’actrice a une certaine latitude pour composer et elle nous propose une femme forte, expérimentée, qui vit sans amertume et en aimant profondément sa petite-fille.

L’incursion de l’épouvante dans l’univers de Once upon a time est une réussite mais cela vient du fait que c’est une composante essentielle des contes de fées ! Ceux-ci racontent des histoires de loup et de monstres pour exorciser nos craintes et affirmer que nous pouvons les vaincre. Scarlett, très émue par le récit, décide de tuer le loup de jour ! La recherche des empreintes avec « Marie » est un moment habile. L’incapacité de son amie à reconnaître les traces des animaux sur la neige fait sourire Scarlett alors qu’elle se débrouille avec aisance – une aisance à mettre en relation avec la facilité avec laquelle Ruby se débrouille dans la forêt - mais la découverte de celles du loup leur réserve de sacrés chocs ! Le chaperon blanc de l’une et le chaperon rouge de l’autre est d’un très bel effet sur la neige et fait penser à un autre conte, Rouge Rose et Rose Blanche.  La recherche des empreintes a révélé le secret du loup et on ressent avec Scarlett le froid qui la saisit quand elle s’imagine que son galant est ce loup ! Par contre, le coup qui consiste à zoomer progressivement sur les visages commence à devenir un cliché entre réalisateurs.

Quand Mère-Grand découvre que Scarlett n’est plus là, elle est choquée et furieuse à la fois car les deux jeunes femmes n’ont rien compris : ce n’est pas Peter le loup-garou c’est Scarlett ! Le second récit de la vieille femme à Blanche-Neige est aussi sobrement raconté qu’épouvantable car il retrace une généalogie sanglante marquée par le secret et la tragédie. Jane Espenson a eu l’idée géniale de fusionner les figures du Loup et du Petit chaperon rouge car ces deux aspects se renforcent mutuellement au sein d’une personnalité plus riche. Du coup, le spectateur repense à plein de petits détails des épisodes précédents. Si le rouge comme couleur des cheveux de Ruby ne surprend pas, la présence d’une figurine de loup dans sa voiture prend un autre sens. Néanmoins, un autre détail dessert le scénario ; l’insistance sur le chaperon rouge que Scarlett doit porter en permanence. L’explication donnée par Granny sent l’argument d’autorité et intrigue. La fausse piste du forgeron ne nous convainc guère non plus tant le soupirant de Scarlett manque d’épaisseur.

Ce qui n’enlève rien à l’horreur lorsque Mère-Grand et Blanche-Neige découvre le dernier repas du Loup/Scarlett. La bête est bien faite. Assez grande pour avoir une dimension mythique conforme au caractère monstrueux qu’on lui prête mais sans tomber dans le démentiel. « Grand comme un poney » est sans doute exagéré mais à côté de la Bête du Gévaudan, il n’aurait pas démérité. De plus, et là on est content des progrès des effets spéciaux, cette créature arbore une expression cruelle qui n’est pas celle d’un animal ordinaire. Le loup craint l’bomme sauf s’il est enragé mais, ici,  il se repaît d’avance de son repas. Les apparitions du Loup sont brèves comme il sied à un monstre. On en a bien plus peur quand on en parle. Petit manque d’originalité – ou respect de la tradition – lorsque, pour abattre la créature, Mère-Grand utilise…une flèche en argent. Le réveil de Scarlett, la conscience qu’elle prend de son crime et de sa nature profonde sont un moment très émouvant, traité avec sobriété et attention. La lumière nocturne est un autre point fort de l’épisode. La photographie n’aura pas fait de faute ici. La musique, par contre,  n’a rien qui retienne l’attention.

Comme tout conte de fée, on termine par un retour à la situation de départ. Ruby revient chez Granny forte de l’expérience accumulée. Emma n’aura pas manqué de louer ses qualités et l’aveu de l’explication du coup de colère de Ruby est aussi simple que touchant. En face, Granny ne sort qu’une brève expression mais qui en dit plus long d’un discours fleuve.  Cette sobriété révèle un attachement profond entre les deux femmes.

Informations supplémentaires :

  • Meghan Ory est Canadienne. Elle est principalement connue pour son rôle de Ruby dans Once upon a time et pour avoir joué dans la série  Intelligence (2013).

  • Beverley Elliott : la veuve Lucas / Granny : cette actrice canadienne est surtout apparue à la télévision dans MilleniuM, La nouvelle famille Adams, Mysterious Ways, V.

  • Le Petit Chaperon rouge fut publié en France par Charles Perrault en 1698 puis recueilli par les frères Grimm en 1812 mais c’est la version de 1857 – la plus édulcorée – qui est la plus connue. La différence majeure entre Perrault et les frères Grimm tient à la victoire du Loup chez le premier alors qu’il est tué par un chasseur chez les seconds.

  • Si le chien est le meilleur ami de l’homme, le loup est sans conteste son pire ennemi ! Les contes de fées le présentent plus souvent qu’à son tour comme le méchant. L’historien français Jean-Marc Moriceau, spécialiste de la ruralité, a écrit deux ouvrages excellents et d’une lecture facile sur les rapports entre l’homme et le loup : Histoire du méchant loup (Fayard, 2007) et L’homme contre le loup (Fayard, 2011).

  • Dans le film Into the Woods, c’est Johnny Depp qui incarne le loup !

  • Absence de Robert Carlyle

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16. LE CHEMIN DES TÉNÈBRES
(HEART OF DARKNESS)

Scénario : Andrew Chambliss et Ian Goldberg

Réalisation : Dean White

Le cœur privé d’amour, Blanche-Neige se laisse dominer par le désir de tuer la Reine. A Storybrooke, Mary Margareth est en prison pour le meurtre de Kathryn Nolan.

L’expression « côté obscur » aura rarement pris autant de relief que dans cet épisode qui, non seulement nous propose des histoires solides mais en prime nous gratifie d’aphorismes sur le Mal.

L’épisode prend chronologiquement la suite directe du « vol de la colombe » quand les soldats du roi George fondaient sur Charmant et Scarlett. Mais alors qu’il faisait grand jour dans ce dernier, ici, il fait nuit ! Par chance, c’est une nuit de pleine Lune donc un gentil Loup va aider le Prince Charmant. Donc maintenant Scarlett maîtrise sa métamorphose ?

Heureusement, la suite est bien plus intéressante et, cette fois, les deux mondes nous proposent des histoires de bonne qualité.

A Storybrooke se tient le segment principal. Mary Margareth est incarcérée pour le meurtre présumé de Kathryn Nolan. L’interrogatoire de la malheureuse est un moment fort. D’autant que Regina, présente comme « observatrice neutre » (on croit rêver !) cache mal une jubilation intense et muette suivie d’une non moins grande scène de pathos. Du grand art. Lana Parrilla maîtrise tous les ressorts de son personnage. Face à elle, Ginnifer Goodwin compose une Mary Margareth qui lutte pied à pied pour ne pas sombrer. Elle doit être forte car une nouvelle preuve est découverte par Emma.

Une scène doit être soulignée : David va trouver Regina dans son bureau ! La scène est un concentré de dialogues brillants. « On ne naît pas mauvais, on le devient » dit-elle et il lui rétorque qu’elle « ne sait pas ce qu’est le Mal » ! Il fallait oser même si on a un peu l’impression que la scène n’a été ajoutée au scénario que pour placer ces phrases magnifiquement ciselés. Dommage que l’effet ait été privilégié au fond. 

Qui dit suspect dit avocat et Mary Margareth en trouve un : M. Gold ! Remarquez la symétrie de cette scène avec la suivante. L’épisode est truffé de ces symétries. Le côté systématique du procédé – ce n’est pas la première fois dans la série – montre une montée en puissance ; une convergence des mondes ; une confusion des personnages. Emma reste la seule a être exclue de cet alignement des planètes mais elle fait une découverte troublante. L’accumulation des indices (un peu comme dans Trop d’indices de Chapeau melon) finit par convaincre Emma que son amie est la victime d’un coup monté. Et à Storybrooke, qui dit « coup monté » dit Regina surtout si c’est Emma qui le dit ! L’honnête shérif se laisse tenter par le côté obscur et elle va demander l’aide du maître ès fourberies, M. Gold. Jennifer Morrison rend parfaitement convaincant ce basculement. Tendre la joue gauche après la droite ça ne dure qu’un temps !

Alors la fin justifie-t-elle les moyens comme le suggérait Nicolas Machiavel ? D’un autre côté, August a révélé, mais de manière détourné, à Henry qu’il « a pris le parti de croire » aux histoires du livre de contes. Il a une façon plaisante de parler d’Emma. Eion Bailey se plaît à jouer cette anguille dont on se demande qui il est. La brièveté de ces scènes empêche l’installation d’une sensation de répétition. D’autant qu’il y a une subtile montée en puissance. On en a l’eau à la bouche !

Dans le monde magique, on ouvre vraiment le bal avec une scène hilarante : Blanche-Neige, avec un nœud dans les cheveux, chantonnant un balai à la main qui, soudain, tente d’écraser un petit oiseau ! Cette subversion du film de 1937 est un pure moment d’anthologie d’autant qu’il est mis au service d’une intrigue bien plus noire. Depuis qu’elle a bu la potion de Rumpelstilskin, Blanche-Neige est devenue dure et cruelle. Cruauté soulignée par la litanie comique des plaintes des Nains. Ginnifer Goodwin est très à l’aise dans les bottes de Blanche-Neige, sans doute davantage que dans les pantoufles de Mary Margareth.

C’est vrai que c’est plus exaltant de jouer le personnage le plus emblématique du Bien (voire le plus nunuche de l’histoire du cinéma) glissant dans le Mal. L’explication magique (elle n’a plus d’amour dans le cœur) nous invite à réfléchir sur la part de Bien et de Mal que nous portons en nous. Il y a un responsable à tout cela et Blanche-Neige décide soudain d’aller tuer la Reine ! Le meurtre est l’acte irréversible ; celui qui la condamnerait à jamais. Pour le coup, on y croit. Oui, il est crédible que Blanche-Neige tue la Reine. Jamais la bascule n’a été si proche. L’interprétation de Ginnifer Goodwin est sans faille.

Rumpelstilskin va même lui fournir les moyens de sa vengeance mais, jouant sur les deux tableaux, le maître magicien indique à Charmant comment conjurer le sort et où il trouvera sa princesse. Robert Carlyle s’éclate à jouer son personnage et il montre parfaitement comment il dissimule son objectif derrière une exubérance de façade. Autant Rumpelstilskin est déchaîné, autant M. Gold est mesuré. Au costume doré de l’un répond le costume noir de l’autre. Le rusé personnage est le même et il poursuit un but connu de lui seul. Point noir, le hall de son palais est clairement un décor numérique. Regardez l’extérieur derrière Charmant ; les drapeaux bougent de façon trop linéaire et, si vous vous reportez à l’épisode « La Belle et la Bête », vous constaterez que c’est exactement la même image. 

Signalons car ce n’est pas courant que la Reine est bien habillée. Son manteau rouge est bien assorti à son large chapeau noir et le tout ressort magnifique du fond neigeux.

Charmant est donc le héros de la deuxième partie du segment « magique » ; le Prince vient au secours de sa belle même contre la volonté de celle-ci. Il faut que Josh Dallas croit dans son personnage pour élever son discours à Blanche-Neige au rang de bijoux d’altruisme. Voilà une série où les apprentis scénaristes peuvent apprendre à éviter la banalité ou plutôt à la transcender. Le baiser fougueux qui s’ensuit scelle la réunion des amants mais, comme dans tout bon drame, c’est précisément ce moment que choisissent les troupes du roi George (certains ne sont pas sortis indemnes des griffes de Scarlett !) pour leur tomber dessus et enlever Charmant. C’est un peu gros mais on laissera filer cette ficelle d’autant que, chose unique, c’est Blanche-Neige qui prononce la phrase du couple : « Je te retrouverai. Je te retrouverai toujours ».

Informations supplémentaires :

  • Le titre original est celui d’un roman de Joseph Conrad paru en France sous le titre de « Au cœur des ténèbres ». Écrit en 1899, traduite en 1925, il raconte l’histoire d’un officier, Charles Marlow, de la marine marchande, qui remonte un fleuve au cœur de l’Afrique noire. Il doit relier contact avec un collecteur d’ivoire, Kurtz, dont on est sans nouvelle. Le roman présente l’éloignement progressif de la civilisation vers les aspects les plus sauvages de la nature humaine. L’histoire a été adaptée pour le film de Francis Ford Coppola, Apocalypse Now.

  • Dans les bonus des DVD, on découvre que le seul élément qui ne soit pas numérique chez Rumpelstilskin c’est la porte !

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17. LE CHAPELIER FOU
(HAT TRICK)

Scénario : Vladimir Cvetko et David H. Goodman

Réalisation : Ralph Hemecker

Dans le monde magique, la Reine passe un pacte avec un dénommé Jefferson. A Storybrooke, Emma rencontre un homme apparemment inoffensif mais qui se révèle tout autre et lui demande de faire quelque chose pour lui.

Pour son 4ème scénario, (dont 2 en collaboration), David H. Goodman arrive enfin à écrire un épisode remarquable et qui s’apprécie à chaque visionnage. Bien servi par une histoire solide, Ralph Hemecker livre une réalisation solide.

Si la série en revient à un schéma classique – une histoire à Storybrooke et une dans le monde magique – les deux segments sont de forces égales et se répondent parfaitement. Alors qu’il ne reste plus que six épisodes avant la fin, le monde « storybrookien » subit un nouvel assaut encore plus violent que les précédents mais, circonvenu à un point de l’espace, il ne peut ébranler la structure élaboré par la souveraine et, ironie tragique, c’est Emma qui permet au règne démoniaque de perdurer.

L’épisode prend directement la suite du précédent avec la fuite de Mary Margareth grâce à une clé opportunément découverte dans sa cellule. On saura formellement à la fin d’où elle vient mais le spectateur a de l’avance sur le shérif ! En la recherchant, Emma rencontre un promeneur apparemment égaré, Jefferson, qu’elle raccompagne chez lui. Après avoir pris le thé, elle s’évanouit. Lorsqu’elle revient à elle, c’est pour découvrir Mary Margareth ligotée et bâillonnée. Mais c’est à elle que Jefferson en veut. La rencontre d’Emma et de Jefferson se fait dans une atmosphère de brume, un paysage flou très prometteur. La demeure de ce dernier est monumentale, une sorte d’hôtel particulier très inquiétant. Sa décoration est étrange : les murs sont de couleur claire mais le choix de peintures abstraites très colorées laisse perplexe. Sébastian Stan est, lui, un excellent choix. D’abord simple, innocent, il joue à merveille le comportement « psychotique » qui s’élève. Lorsqu’Emma sombre dans le sommeil, la caméra nous montre le visage de Jefferson en contre-plongée (une vue assez rare globalement) ; l’éclairage clair-obscur lui confère un air authentiquement diabolique.

Dans le monde magique, Jefferson est un homme pauvre qui vit avec sa fille Grace. Lorsqu’il voit la Reine chez lui, il commence par refuser son offre de service mais se ravisera plus tard après une humiliation publique…à laquelle elle n’est pas étrangère. Notons que la robe de Sa Majesté n’est pas mal mais la collerette en plumes de corbeaux est immonde. Vestimentairement, Regina et La Reine ont une autre différence. Si le Maire préfère les pantalons et les chemisiers clairs, la Reine a une prédilection pour les robes noires copieusement échancrées.

Ce qui se passe chez Jefferson à Storybrooke est un concentré d’idées brillantes soutenues par une réalisation inspirée. Sébastian Stan confère une aura d’inquiétante étrangeté à son personnage (scènes des ciseaux). La musique et le point de vue subjectif à ce moment-là donnent froid dans le dos. L’ambiance est sinistre dans cette grande maison vide : la pièce où Emma retrouve Mary Margareth baigne dans une ambiance bleutée alors que le couloir est plongé dans une brillance jaune. Le contraste est tranchant. Rarement, la série aura su aussi bien distiller le malaise.

Ce que la Reine a demandé à Jefferson est de la conduire au Pays des Merveilles. Elle a quelque chose à y prendre. Décidément, elle ne peut rien faire sans les autres ! Si l’ouverture sur cet autre monde est bien faite et originale, le Pays des Merveilles en lui-même ressemble à un copier-coller numérique du dessin animé de 1983. Le labyrinthe sonne faux et le carrelage est psychédélique. La salle du trône avec ses courtisans masqués ressemble à une suite vénitienne de pacotille. En revanche, la poursuite devant les soldats de la Reine de Cœur est alerte, soutenue par une musique héroïque. Le combat est aussi bref que bien réalisé.

Mais le meilleur moment est bien à Storybrooke. La confrontation de Jefferson et d’Emma est un grand moment, un sommet de la série. Celui qui est « le Chapelier fou » sait tout de la malédiction. Il fait un discours remarquable sur la pluralité des mondes. Sébastian Stan nous restitue une version nouvelle de la « folie » de son personnage : son extrême lucidité. Avoir conscience de deux réalités peut rendre fou en effet. 

Jefferson a besoin d’Emma car il a bien vu que, depuis l’arrivée de celle-ci, tout bouge. Ce qu’il lui demande est simple : qu’elle apporte la magie à Storybrooke ! C’est lui qui a la phase de l’épisode : « Il faut être fou pour ne pas croire ce que l’on voit ». Sauf que c’est un dialogue de sourd car Emma se cabre devant lui. Jefferson, pour elle, n’est pas le Chapelier fou, il se prend pour le Chapelier fou ! La nuance est importante et rarement Jennifer Morrison nous aura montré une Emma plus rétive que jamais à ouvrir les yeux sur ce théâtre d’ombres. C’est platonicien : elle est plongée dans la caverne et refuse de croire que ce qu’elle voit bouger sur les parois n’est pas la réalité. Plus terre à terre que jamais, elle se cuirasse avec sa raison et s’accroche à tous les lambeaux du réalisme qu’elle peut trouver. Après tout, Jefferson est peut-être réellement fou ? Le jeu tantôt flamboyant tantôt sombre de Sébastian Stan ne plaide pas pour un Jefferson très équilibré en effet !

Le malheureux Jefferson a pourtant quelques raisons d’avoir perdu la tête. Au Pays des Merveilles, il a compris trop tard qu’il avait été joué par la Reine. Celle-ci se paye le luxe d’une réplique d’une cinglante cruauté : « On n’abandonne pas sa famille ». Le voici prisonnier dans ce monde aussi coloré qu’infernal. Pour rentrer, il n’a qu’à reproduire ce par quoi il est arrivé ! Une solution aussi simple qu’impossible !! Comment ne pas devenir fou après ça ? A Storybrooke, les passages les plus marquants sont ceux qui témoignent de la grande lassitude de Jefferson. Il attend depuis si longtemps ; il a tellement mis de forces, tellement consacré de temps qu’il n’en peut plus. Emma est son dernier espoir ; il s’y accroche avec une violence qu’on comprend très bien tout comme on comprend qu’elle effraye Emma. 

Informations supplémentaires :

  • Sébastian Stan : le Chapelier fou / Jefferson : il obtient son premier rôle en 2007 dans Gossip Girl. Il incarne le meilleur ami de Chris Evans dans les deux volets de Captain America.

  • Les aventures d’Alice au pays des merveilles furent publiées en 1865 par Lewis Carroll. Le livre a eu une suite, De l’autre côté du miroir en 1871.  Ce dernier est surtout connu pour sa partie d’échecs. Une série d’animation japonaise fut produite en 1983/1984. Tim Burton réalisa en 2010 une adaptation au cinéma avec Mia Wasikowska dans le rôle d’Alice et Johnny Depp dans celui du Chapelier fou.

  • Dans le roman Alice au pays des merveilles, le personnage n’est jamais appelé fou. C’est le Chat de Cheshire qui prévient Alice et l’excentricité du personnage prouve son état. Le Chapelier explique à Alice que lui et le Lièvre de mars prennent continuellement le thé car ils ont « battu le temps » ( ?) et que, donc, il est arrêté.

  • Le Pays des merveilles a inspiré une série dérivée : Once upon a time in Wonderland (inédite en France). Alice, enfermée dans un asile, est libérée par le Valet de Cœur et le Lapin blanc. Les événements prennent place avant la série-mère. Suite aux audiences décevantes, elle fut annulée au bout d’une seule saison de 13 épisodes.

  • Absence de Josh Dallas

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18. DANIEL
(THE STABLE BOY)

Scénario : Edward Kitsis et Adam Horowitz

Réalisation : Dean White

A Storybrooke, la situation de Mary Margareth devient critique. Dans le monde magique, Regina rencontre Blanche-Neige.

Contrairement au précédent, celui-ci résiste mal à un second visionnage. Les auteurs ont accordé trop de place à l’intrigue « magique » au détriment de Storybrooke. En revanche, il a le mérite d’expliciter les racines de la haine violente de la Reine envers Blanche-Neige.

« Quand on veut faire mal à quelqu’un, il faut souvent frapper quelqu’un d’autre » ; c’est le conseil cynique que Gold donne à Regina. Nous sommes une semaine avant les événements relatés dans les épisodes précédents. Dean White, qui a précédemment fait bien mieux, nous ressert le mouvement de caméra vers le panier de pommes que le Maire a toujours à portée de mains. Ça doit être une figure imposée.

L’entrée dans le monde magique se fait avec bien plus d’énergie par le biais de l’équitation ; ce qui nous vaut de belles scènes en plein air. A défaut d’extérieurs remarquables, on respire et la musique est bien accordée à la cavalcade qui s’ensuit lorsque Regina – puisque tel est son nom – se porte au secours d’une fillette dont le cheval s’est emballé. La fillette, c’est Blanche-Neige. A ce moment, aux côtés de la fillette, le sourire de Regina est franc et chaleureux. Il faut bien le garder en mémoire. Le spectateur a aussi le « plaisir » de rencontrer Cora, la mère de Regina, et le moins que l’on puisse dire est que « maternel » n’est pas l’adjectif qui vient spontanément pour la qualifier ! Froide, ironique, elle cravache sa fille avec des mots  - et avec la magie - comme d’autre avec un fouet. Barbara Hershey réussit son entrée. Il est vraiment stupéfiant de voir Regina ainsi dominée. Une Regina que l’on découvre amoureuse d’un palefrenier, Daniel. Pourquoi pas mais le choix de l’acteur est contestable. Noah Bean n’est pas foncièrement mauvais mais il manque de charisme. De plus, les scènes entre les amants sont filmées avec un pathos un peu lourd comme s’il fallait compenser une crédibilité un peu fragile. Lana Parrilla en fait beaucoup et ça dérange un peu. En revanche, elle est mieux habillée qu’elle ne le sera plus tard. Que n’a-t-elle pas emmené sa garde-robe avec elle !

Évidemment, le choix amoureux de Regina n’est pas connue de Cora mais Blanche-Neige surprend les amants. Une gamine stupéfaite car, peu de temps auparavant, son père a demandé la main de Regina pour avoir sauvé sa fille et Cora a accepté au nom de sa propre fille ! Une phrase nous interpelle : Regina affirme qu’elle ne veut pas être reine et sa sincérité ne fait pas de doute. C’est le point fort de l’épisode : nous faire découvrir Regina avant qu’elle ne devienne la Reine. Regina parvient à faire taire la fillette. C’est une belle scène nocturne et aux dialogues brillants sur le « véritable amour ».  On se doute bien de la suite et, en effet, sur ce plan-là, l’épisode est sans surprise, Blanche-Neige va tout déballer à Cora peu après. Baillee Madison, qui incarne Blanche-Neige jeune, est charmante mais sa naïveté exagérée et sa candeur exaspérante en font davantage un prototype de la godiche du film d’animation de 1937 qu’une préfiguration de celle dont Charmant tombera amoureux. De façon surprenante Regina – malgré un bon maquillage et une tresse peu seyante – ressemble trait pour trait à celle qu’elle est plus tard alors que Blanche-Neige est encore très jeune.

Gros point faible par contre, tout le segment « storybrookien ». Composé de beaucoup de va et viens, de dialogues sans intérêts, il a eu pour objet de nous dire combien la vie est dure pour Mary Margareth en ce moment et que ça ne prend pas le chemin de l’amélioration. Jennifer Morrison se démène beaucoup mais n’a pas grand-chose à défendre. Giancarlo Esposito cabotine avec un Sydney redondant. Eion Bailey sourit et August guide Emma mais tout cela ne mène pas loin. En revanche, Lana Parrilla déroule et se régale – et nous avec elle ! Elle a les meilleurs morceaux et les plus beaux dialogues.

C’est à elle que l’on doit le 2ème melon et qui nous évite l’ennui qui guettait. Face à Mary Margareth, elle est radieuse et nous compose une Regina qui savoure sa vengeance ; car cette fois c’est clair. Le complot qu’elle a monté n’a pour seul but que de faire expier son ennemie. Ginnifer Goodwin est magistrale dans sa composition d’une Mary Margareth désemparée, qui perd pied, qui sait que Regina la hait mortellement mais qui ne comprend pas pourquoi. C’est le drame des habitants de Storybrooke : ils ne sont pas maîtres de leur destin car ils ont oublié qui ils étaient. Lana Parrilla a droit aussi à une nouvelle confrontation avec Jennifer Morrison. Le coup de la double détente varie un peu le plaisir mais ça ne change pas le fond. Emma attaque mais c’est Regina qui gagne à la fin.

Dans le monde magique, la confrontation attendue éclate : Cora empêche les amants de s’enfuir. Barbara Hershey est magistrale : d’abord dure, elle semble s’adoucir face à la détermination des jeunes gens puis elle frappe comme un serpent à sonnette ! La maxime qu’elle assène à sa fille marquera celle-ci au fer rouge. Dans un décor couleur ocre éclairé à la flamme – on se croirait dans un dessin d’Yves Swolfes - , cette dame en noir révèle une nature profondément anxieuse et qui a perverti l’amour maternel. N’ayant plus le choix, Regina va épouser le roi Léopold mais, auparavant, suprême blessure, elle découvre la trahison de Blanche-Neige. Là, sous nos yeux attentifs et tendus, s’opère la métamorphose. Regina meurt dans sa robe blanche et la Reine naît alors. Ses paroles à la gamine nunuche sont faites sur un ton doucereux mais le regard dit autre chose. Cora ne s’y trompe pas, qui félicite sa fille pour sa dissimulation.

Un point qui ne convainc pas entièrement c’est la volonté d’expliquer le Mal. En nous présentant Regina avant la Reine, les scénaristes affadissent le personnage. Est-ce que l’on a vraiment besoin de savoir pourquoi la Reine hait Blanche-Neige ? Le conte de fée peut donner une réponse mais pourquoi ne pas dire « tout simplement » que l’une représente le Bien et l’autre le Mal ? C’est peut-être schématique, oui, mais avec de bons scénaristes, on peut écrire des milliers d’histoires là-dessus. La série commet un péché d’orgueil en prétendant donner un fondement logique à cette haine et, surtout, elle se met dans une position délicate puisque elle risque de priver les personnages de la possibilité d’évoluer en les enfermant dans une situation asymétrique : l’une hait et l’autre se sait coupable.

L’épisode se termine sur un coup de théâtre à Storybrooke.

Informations supplémentaires :

  • Noah Bean a notamment joué dans Damages et Nikita.

  • Première apparition de Cora, la mère de Regina, incarnée par Barbara Hershey. Celle-ci commence sa carrière dans les années 60, puis tourne sous la direction de Martin Scorsese (Bertha Boxcar, 1972 et surtout le rôle de Marie-Madeleine dans La dernière tentation du Christ, 1988). Palme de la meilleure actrice à Cannes pour Le Bayou (1987) et Un monde à part (1988). En 2010, on la voit dans Black Swan. On la retrouvera en saison 2.

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19. LE BON FILS
(THE RETURN)

Scénario : Jane Espenson

Réalisation : Paul Edwards

A Storybrooke, M. Gold se demande s’il n’a pas retrouvé quelqu’un de son passé. Dans le monde magique, Baelfire, fils du Ténébreux, cherche par tous les moyens à retrouver sa vie d’avant.

Un épisode très bavard ce qui lui enlève le dernier melon mais un épisode qui, par un habile jeu de duels et de duos, fait monter la pression.

Premier duo : August et Henry cherchent à jouer un tour à M. Gold. Pendant que l’un le  distrait, l’autre cherche quelque chose. Une ambiance légère entoure ce moment mais l’atmosphère va progressivement s’alourdir.

Second duo : l’explication entre Gold et Regina. Le réalisateur alterne les plans serrés sur les visages comme le renvoi d’une balle entre des partenaires. Le côté feutré de l’antiquaire-usurier ne fait que ressortir sa dangerosité et sa voix toujours polie quoique dénuée de chaleur éteint la colère du Maire qui n’a que trop compris que tout mène à elle mais qui ne saisit pas le but du traître. La musique souligne très bien l’intensité de l’action sans prendre le dessus. L’impression que l’on retire de la scène est celle d’un maître donnant une leçon à un élève qui s’est cru trop doué.

Troisième duo : la séparation à l’amiable entre David et Kathryn. C’est à elle que l’on doit la belle phrase de l’épisode : « Ce que l’on vivait n’était pas l’histoire qu’on attendait » ; ce qui est résumer Storybrooke ! Nouvel échec pour la souveraine dans ce monde. Sans que les personnages s’en rendent compte (sauf quelques-uns), c’est leur univers qui se fissure. Cette scène tendre aura son pendant entre David et Mary Margareth. La composition nuancée, subtile, profonde de Josh Dallas et Ginnifer Goodwin fait de cette scène un beau moment d’émotion et absolument pas une redite des scènes précédentes. Ce moment fait avancer leur histoire ; celle qu’ils devaient vivre.

Quatrième duo : la scène comique entre Sydney et Emma qui le démasque et comprend, atterrée, ce qui a motivé le journaliste. Giancarlo Esposito joue avec une grande dignité et il évite de faire sombrer son personnage dans le ridicule où il a souvent navigué.

Mais le duo/duel le plus fort, c’est Robert Carlyle qui va le jouer dans deux situations différentes.

La  première se passe dans le monde magique et met aux prises Rumpelstilskin et son fils Baelfire. Lequel vit très mal le noircissement progressif de son père. Il a bien saisit que c’est la magie qui a transformé le faible fermier en cruel magicien. Pressé de renoncer à son pouvoir, ce dernier concède que seul le bonheur de son fils l’intéresse. C’est un moment fort réalisé sans effets inutiles où la caméra se contente de passer la parole et de révéler les sentiments. Rumpelstilskin en privé n’est plus le même. Il n’a pas la gouaille qu’il manifestera devant ceux qui viendront le consulter. Il ne vit pas dans un château mais se contente d’une chaumière. Robert Carlyle compose un Rumpelstilskin encore pétri de bonté et qui ne veut que le bonheur de son fils. On y croit sans peine. Dylan Schmid qui lui donne la réplique fait mieux que se défendre.

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La seconde oppose Gold et August Booth. Une confrontation avec la Mère Supérieure trouble le redoutable propriétaire de tout Storybrooke (il ne pourra pas dire que la Reine n’a pas été généreuse !) qui va s’épancher auprès d’Archie ! Jamais nous n’aurons vu cet homme aussi peu sûr de lui. Robert Carlyle lui donne une épaisseur, une crédibilité dans une facette de son personnage encore inédite. Rien n’est décidément absolu et Rumpelstilskin qu’on pouvait croire dédié au Mal a de quoi nous surprendre et on sait que son interprète ne faillira pas. Mais, pour tout duel, il faut un adversaire à sa taille. Eion Bailey n’a pas tout à fait le même talent mais il n’a pas non plus la même expérience. Jusque-là, August avait le profil d’un perturbateur, toujours souriant mais fuyant. Le voilà beaucoup plus sérieux et il est parfaitement crédible lorsqu’il dit qu’il est mourant et que son salut repose sur Emma mais qu’il a perdu tout espoir en ce qui la concerne. La révélation qu’il fait à Gold est stupéfiante : il est Baelfire !

Un Baelfire qui a trouvé le moyen de sauver son père : l’envoyer dans un monde dépourvu de magie. Mais, le magicien ne partira pas. On le savait déjà mais nous savons désormais pourquoi il acceptera d’aider la Reine. Il n’a jamais travaillé que pour lui. Lorsque Baelfire part, Rumpelstilskin se dérobe. Son fils le traite de lâche et c’est exactement ce que nous donne à voir Robert Carlyle. Dans une atmosphère violemment contrastée, c’est un être pathétique qui se révèle. Jamais le Ténébreux n’est apparu si pitoyable et, d’ailleurs, plus jamais il ne le sera.

Un Baelfire que son père n’a jamais cessé de chercher. C’est la confession surprenante et émouvante que fait Gold à Booth. La scène du pardon est magnifique et les deux acteurs contiennent leur émotion pour n’en donner que plus de poids à leurs paroles. Gold va jusqu’à remettre sa dague mais, là, coup de théâtre ! Booth n’est pas celui qu’il prétend être et le spectateur, qui a gobé son histoire, voit le visage de Robert Carlyle se métamorphoser ; de chaleureux et compatissant, il devient dur et cruel. En une scène, ce grand acteur nous montre les deux faces de Rumpelstilskin. Cruel, et joueur, car il laisse la vie sauve au mourant à cause d’Emma. 

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Cinquième duo : celui, plein de haine et de peur entre Rumpelstilskin et la Fée Bleue. On y découvre les racines de l’hostilité (pour rester modéré) que vouera le premier à la seconde et aux fées en général ;  à mettre en relation avec « Nova et Rêveur ». La série ne cesse de faire des liens et, dans l’essentiel des épisodes, tout se tient, rien ne se perd.

Le sixième et dernier duo est un lieu commun désormais puisqu’il oppose Emma à Regina. Cette fois, malgré le sourire qu’arbore la seconde, elle n’a pas le dessus. Emma peut bien la traiter de « sociopathe » (ce qui prouve qu’elle n’a encore rien compris à ce qu’est Storybrooke), le coup le plus dur qu’elle peut lui porter, et qu’elle a bien l’intention de porter, est une sorte de variation à l’axiome que M. Gold avait exposé à Regina dans l’épisode précédent.

Informations supplémentaires :

  • Eion Bailey : acteur américain, il a joué dans Fight Club (1999) mais l’essentiel de sa carrière est à la télévision. On a ainsi pu le voir dans Buffy contre les vampires (1997), Frères d’armes (2001), Urgences (2004), Cold Case (2009), Stalker (2014).

  • Baelfire jeune est incarné par Dylan Schmid. Cet acteur canadien a aussi joué dans Fringe et dans la série américano-canadienne L’Heure de la peur (R.L. Stine's The Haunting Hour en VO) entre 2012 et 2014.

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20. LA PROMESSE DE PINOCCHIO
(THE STRANGER)

Scénario : Ian Goldberg et Andrew Chambliss

Réalisation : Gwyneth Horden-Payton

A Storybrooke, August tente d’ouvrir les yeux d’Emma. Dans le monde magique, on découvre le secret de l’armoire qui a protégé la Sauveuse.

Un épisode majeur qui amorce le final de cette première saison. Tout est clairement expliqué et les enjeux sont on ne peut plus clair.

August va tenter de faire comprendre à Emma qui elle est vraiment et qu’elle est son rôle. C’est le segment « storybrookien ». S’y ajoute deux autres moments concernant cette fois Regina. La malheureuse vit des moments difficiles. Tout d’abord, Mary Margareth lui pardonne ! Avec un ton calme, posé, dénué de malice ou de méchanceté, elle lui tient un discours de sincérité profondément émouvant : Regina doit se sentir terriblement seule pour que sa seule joie soit de détruire le bonheur des autres !! Impassible, Regina n’a rien à répondre. Notons que, tout au long de cet épisode, qui couvre une journée entière, elle arbore avec classe une somptueuse robe bleu roi qui fait ressortir son collier doré.

L’autre moment c’est un dîner auquel elle parvient à convier David. L’hésitation de ce dernier pour savoir s’il doit rester ou partir est rendu par une succession de flou et de clarté, tantôt sur l’un et tantôt sur l’autre des protagonistes. Regina lui raconte l’histoire touchante expliquant comment elle l’a « découvert ». C’est cousu de fil blanc mais raconté avec conviction. Par contre, son entreprise de séduction tourne court. Décidément, Le Maire sent la situation lui échapper. C’était une manœuvre grossière et, pour tout dire, désespérée. Il suffirait d’un rien désormais pour que Storybrooke vole en éclat.

L’intrigue dans le monde magique s’insère totalement dans ce qui précède car nous sommes là au pire moment du Royaume, entre la menace et la malédiction. Pour sauver les habitants du sort noir, la Fée Bleue (toujours vêtue d’une robe dessinée par un modiste fou) vient trouver Gepetto et son fils Pinocchio, qui est un vrai petit garçon depuis que la fée l’a sauvé suite à un naufrage. Elle lui demande de construire une armoire magique qui protégera Blanche-Neige et sa fille. Seules deux personnes en effet peuvent y entrer. Mais le vieux charpentier exige que son fils soit une de ces deux personnes.

Face à sa fermeté, la Fée capitule. L’égoïsme de Gepetto n’est jamais montré comme un défaut mais comme l’exacerbation de l’amour qu’il porte à Pinocchio. Tony Amendola apporte de la crédibilité à un personnage qui affirme qu’il a déjà tant perdu. On y croit et on a la gorge serré. Un royaume pèse peu face à l’amour d’un père. Gepetto nous donne une leçon de politique : aussi grands soient les enjeux, ils concernent des hommes. L’abstraction assèche le cœur. N’oublions pas que la Reine et Rumpelstilskin ont tout sacrifié à une entité qui s’appelle le Pouvoir et on voit le résultat. Lorsque Blanche-Neige est sur le point d’accoucher, Gepetto va plus loin encore. Il trahit la Fée Bleue pour pouvoir sauver son fils ; c’est à Pinocchio qu’incombera la tâche de protéger Emma et de l’instruire de son destin.

C’est hors de Storybrooke qu’August raconte la vérité à Emma et révèle sa véritable identité. Mais la jeune femme refuse de le croire et, même lorsqu’il veut lui montrer sa jambe (« mourir » pour lui signifie redevenir un pantin de bois), elle ne voit rien. S’ensuit une scène magistrale et capitale et très bien éclairée…trop pour une scène nocturne. Tout se déverse : espoir, colère, peur ; il est vital pour August qu’Emma accepte son destin mais celle-ci ne veut pas être responsable du bonheur de tout le monde. Elle rejette son « destin » parce qu’elle a peur des responsabilités. Cette fois, elle va plus loin que chez Jefferson. Tout ce qui compte pour elle c’est Henry. Emma a été seule trop longtemps. Elle n’a pas été préparée à ça. Pinocchio en est bien conscient : il a failli. Jennifer Morrison compose une Emma qui passe d’une femme dubitative et perplexe à une petite fille effrayée, écrasée par le fardeau qu’on lui présente comme une obligation. Sa liberté c’est de refuser. 

La colère et les reproches d’August viennent de la conscience de sa faute. Tout un royaume a été sacrifié parce que, lui le premier, il n’a pas voulu endosser les responsabilités qu’on lui avait confié. Eion Bailey donne une interprétation de grande classe. Pinocchio n’a pas été le garçon honnête, sincère et altruiste qu’il devait être. Cette vérité le brûle et l’acteur donne chair à cette douleur. L’amour démesuré d’un père aboutit à un désastre complet. Contre toute attente, Storybrooke a survécu et, à la fin de l’épisode, paraît plus fort que jamais.

La dernière scène d’August est poignante. Il passe devant l’échoppe de Marco, le charpentier et se fait engager. Il a l’allure d’un mourant qui veut passer ses derniers moments auprès de quelqu’un qu’il aime.

Informations supplémentaires :

  • Pinocchio est un conte moderne écrit en 1881 par l’écrivain italien Carlo Collodi (1826-1890). Il raconte l’histoire d’un pantin de bois créé par le menuisier Gepetto. Il n’arrête pas de faire des tours et il lui arrive de multiples aventures dont celle de se retrouver dans le ventre d’une baleine où il retrouve Gepetto ! Il finira par s’assagir et se réveille un jour devenu un vrai petit garçon. Le fait que son nez s’allonge chaque fois qu’il ment est devenu proverbiale.

  • Tony Amendola : Geppetto / Marco : on a pu voir cet acteur dans de nombreuses séries comme Columbo (1989), Ally MacBeal (1998), Les Experts (2001, 2006), Mentalist (2014).

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21. LA POMME EMPOISONNÉE
(AN APPLE RED AS BLOOD)

Scénario : Jane Espenson et David H. Goodman

Réalisation : Milan Cheylov

Dans le monde magique, Blanche-Neige veut à tout prix sauver le Prince Charmant. A Storybrooke, Emma renonce à affronter Regina.

« La fin heureuse de mon histoire » ; c’est ainsi que dans le premier épisode la Reine avait défini la malédiction. Cet avant-dernier épisode fait encore monter la pression. Le scénario astucieux soutenu par une réalisation alerte nous plonge dans les arcanes de la victoire de la Reine.

D’entrée de jeu, le spectateur est saisi : on est plongée dans une scène de rage et de violence qu’on a rarement vu dans la série mais qui s’avère n’être qu’un cauchemar de Regina. Lana Parrilla étincelle d’emblée et nous fait sentir la fragilité de son personnage. Archie le dira plus tard : tout ce qu’elle a fait c’est se défendre mais le brave psychologue ignore que c’est une peur viscérale, profonde qui tenaille la maîtresse de l’État-théâtre de Storybrooke. Nous, nous la voyons, nous la sentons et nous en savons les racines. Comment ne pas la partager tout en sachant ce qu’elle a fait mais, surtout, en sachant ce qu’elle peut faire ?

Pourtant, le combat est bien proche de s’achever, faute de combattants. Emma veut quitter la ville d’abord avec Henry qui refuse. Jared S. Gilmore est l’autre satisfaction de cet épisode. Henry est le dernier à croire en sa mère biologique, à croire qu’elle peut briser la malédiction et son jeune interprète, absolument lumineux,  lui donne une force de conviction particulièrement prenante. L’épisode compte deux scènes entre la mère et le fils et toutes deux sont intenses portées par deux interprètes qui ont saisi la gravité de la situation dans laquelle sont plongés leurs personnages. La pièce n’a que trop duré. Ils ont l’intuition qu’il faut que quelque chose survienne, que les choses ne peuvent rester comme elles sont. La seconde est portée en outre par le choc de deux convictions diamétralement opposées. Pour Emma, la malédiction n’existe pas. Elle n’y a jamais cru et n’a fait que bercer son fils de l’illusion qu’elle partageait sa conviction dans le but, très louable et réaliste, de passer du temps avec lui et de vivre quelque chose avec lui.

Jennifer Morrison fait exploser l’hypocrisie d’Emma en montrant une femme accrochée au réalisme parce qu’il lui procure la sensation d’avoir un peu de sécurité – mais qui préfère fuir plutôt que d’admettre la vérité - , qui a peur de perdre son fils et qui ne veut plus se battre. Jared S. Gilmore nous montre à ce moment un Henry conscient de la portée de sa croyance, des implications qu’elle recouvre. L’enfant a acquis une force mentale qui manque à l’adulte. Emma n’a jamais cru en rien parce qu’elle n’a jamais pu faire confiance. Tout cela nous est rendue par son interprète. Signalons une dernière chose : Emma et Regina se ressemblent beaucoup : elles ont peur l’une de l’autre et toutes deux aiment Henry. 

Storybrooke vit peut-être encore mais le pommier de Regina est en train de mourir ; signe selon elle que la malédiction s’affaiblit. Au cours d’une discussion très âpre (la marque de l’épisode : les personnages vident leurs sacs), Regina s’en prend à M. Gold qui lui conseille de fuir. Dans son tailleur pantalon noir, pénétrée par la colère et la volonté de puissance, Regina irradie de majesté. On n’en dira pas autant des différentes tenues qu’elle arbore dans le monde merveilleux des modistes et des coiffeurs en plein délire.

Dans le monde magique, Blanche-Neige lance l’attaque contre le château pour retrouver Charmant. Elle est aidée par les Nains, les fées (qui font un bruit de mouche quand elles attaquent !), Scarlett et Granny. Le spectateur peut alors se régaler d’une suite de scènes de combats filmées avec dynamisme, soutenues par une musique gaillarde et des interprètes qui « mouillent le maillot ». Ginnifer Goodwin est plus que convaincante en combattante acharnée et sa conviction fait oublier que le château est un décor et des effets spéciaux. Tout cela en vain car le Prince n’est pas là mais la Reine demande à Blanche-Neige de venir la retrouver. Évidemment que c’est un piège mais jamais nous n’avons l’impression d’être pris pour des cloches à qui on servirait une histoire cousue de fil blanc. Ginnifer Goodwin confère une dimension tragique à son personnage qui sait qu’elle va vers une mort certaine mais qui accepte le sacrifice pour une cause plus grande qu’elle. 

L’entrevue entre les deux adversaires se passe dans une atmosphère mélancolique. C’est d’abord une belle scène en extérieur. Le temps est couvert, venteux mais tout cela s’accorde à merveille avec les dialogues. La musique, quoique rythmée, a un timbre glaciale et le regard de Blanche-Neige mangeant la pomme empoisonnée est emplie de désespoir : « Je vous félicite, vous avez gagné ». Symétriquement, la jouissance de la Reine fait écho à la souffrance de Charmant. Grâce à un montage tonique, renforcé par l’usage de la contre-plongée lorsque Blanche-Neige tombe, nous partageons la victoire de la Reine qui s’affirme en majesté triomphante.

A Storybrooke, Regina se trouve un bras armé : Jefferson. Contre l’écriture d’une nouvelle histoire avec sa fille (la famille est le thème central de Once upon a time), il accepte de l’aider à récupérer une arme décisive : la pomme dans laquelle Blanche-Neige a mordu ! La façon dont elle la prépare en vue de la faire manger à Emma nous confirme qu’elle est machiavélique mais aussi excellente cuisinière ! Il est d’ailleurs pour le moins surprenant qu’une femme en vue telle que le maire de Storybrooke n’ait pas le moindre domestique. On mesure la portée de la peur qu’Emma lui inspire. Pourtant, cette dernière lui annonce qu’elle s’en va et reconnaît Henry comme le fils de Regina. C’est une allégeance en bonne et due forme !

Storybrooke va demeurer le royaume imaginé par la Reine mais c’est compter sans Henry qui reproduit le geste fatal de Blanche-Neige.

La roche Tarpéienne est proche du Capitole.

Informations supplémentaires :

  • La pomme a mauvaise réputation depuis que la Bible raconte qu’Adam et Ève en mangèrent une au jardin d’Éden. La traduction latine est fautive ; en hébreu, c’est un « fruit » sans plus de précision.

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22. LE VÉRITABLE AMOUR
(A LAND WITHOUT MAGIC)

Scénario : Edward Kitsis et Adam Horowitz

Réalisation : Dean White

Dans le monde magique, le Prince Charmant doit vaincre un dragon pour sauver Blanche-Neige. A Storybrooke, Emma ouvre les yeux.

L’épisode a l’intelligence de ne pas se perdre en digression. On entre tout de suite dans le vif du sujet. De là où elle est, Emma est obligée d’admettre la réalité de la malédiction même si la rompre n’est toujours pas à l’ordre du jour. Toute une année d’illusions disparaît en une fraction de seconde. La gravité de la situation contraint Emma même si le corps médical s’avoue un peu vite dépassé. L’ultime confrontation entre Regina et Emma est la plus violente de toutes. Regina doit avouer que tout ce que disait Henry était vrai. On a là une scène splendide illuminée par deux interprètes au firmament ; deux femmes blessées, éprouvées, désespérées.

Quand il y a un problème à Storybrooke, il faut aller voir M. Gold. Plus retors que jamais, Rumpelstilskin a bien la solution : le véritable amour (le titre français est cette fois plus pertinent et plus percutant que le titre original). Machiavélique, il avait pris « une assurance en cas d’orage » et le regard de Regina en dit long sur son envie de l’étrangler ! Mais elle n’est plus en position de force et Lana Parrilla met dans son regard toute la hargne impuissante de son personnage. De son côté, Emma change après sa visite à August : d’abord désarçonnée par ce qui lui arrive, elle prend soudain une résolution. Jennifer Morrison donne à voir le retour de la volonté de se battre dans le regard d’Emma. La fille de Blanche-Neige et du Prince Charmant ne saurait se montrer lâche !

Pour trouver la solution, il faut qu’Emma descende sous la bibliothèque de Storybrooke pour tout simplement…tuer un dragon !

Ce même dragon, la sorcière Maléfique, Charmant l’a déjà affronté pour le compte de Rumpelstilskin. Si la grotte de Storybrooke ou le château de Maléfique font décors, le dragon se défend relativement bien. Les deux combats sont de belle allure. Le montage, serré, passe d’un monde à l’autre au détour d’un pilier, d’une pirouette ou d’un coup d’épée. Le combat de la fille reproduit celui du père. L’héroïsme se teinte aussi d’humour lorsqu’Emma prétend terrasser la bête à coup de revolver ! Sauf erreur, le geste par lequel Emma tue le dragon est le même que celui du prince dans le film d’animation de Disney.

Regina paye son crime mais en refusant de payer Jefferson, elle s’ouvre des représailles. Elle aurait pourtant dû se méfier d’un homme qui n’a plus rien à perdre. Il va libérer Belle, prisonnière sous l’hôpital ! Là, par contre, le scénario paraît peu crédible. Certes Jefferson a pu observer la Reine avec son télescope mais comment a-t-il su qu’elle avait emprisonné la jeune femme ? Comment la connait-il ? Ils ne se sont jamais rencontrés dans le monde magique. Toujours est-il qu’Émilie de Ravin va nous offrir un autre sourire lorsque son personnage retrouve Gold. Lui est bouleversé, il la serre dans ses bras (avouant plus tard à haute voix ce qu’il n’avait jamais admis dans le monde magique) alors qu’elle ne le connaît pas ! Ému mais toujours lucide, il se joue des deux mères d’Henry pour récupérer l’objet que protégeait le dragon.

Emma et Regina n’ont pas le temps de le poursuivre : Henry est mort ! La scène est poignante. La musique triste, tout est au ralenti, le blanc s’impose visuellement. Jennifer Morrison nous montre une Emma que l’émotion submerge petit à petit à mesure qu’elle se rapproche d’Henry. Dans un geste symétrique à celui de son père, elle embrasse son fils et le réveille !

La malédiction est rompue !

Les souvenirs reviennent aux habitants ! Les retrouvailles entre Charmant et Blanche, deux êtres qui, même sans le savoir, n’ont jamais cessé de s’aimer et de se chercher est un beau moment de romantisme. Tout est bien qui finit bien. C’est la conclusion un peu guimauve de nos contes de fées certes mais qui n’a jamais voulu croire que tout ne s’arrangerait pas un jour ? Les contes de fées nous apprennent l’espoir.

Storybrooke est mort et la Reine est déchue par ses anciens sujets. C’est d’un ton glacial et sans la regarder que la Fée Bleue – Keegan Connor Tracy se montre hiératique et son dédain est violent à la mesure de la violence que son personnage a subi – prononce la sentence et exile la souveraine. Lana Parrilla ne rate pas la sortie de son personnage : en larmes, Regina fait une déclaration d’amour à Henry véritablement émouvante, profondément sincère. C’est un point sur lequel elle n’a jamais varié et l’on se doit de reconnaître la profondeur de son amour. Comment ne pas être sensible à sa douleur ? Elle a tout perdu : sa couronne, son fils, son prestige. Seule et abandonnée, la Reine n’en a plus que le nom.

Mais voilà, Rumpelstilskin, comme à son habitude, rabat les cartes et conclut la saison 1 par un cliffhanger qui peut inspirer bien des inquiétudes aux habitants de Storybrooke !

Informations supplémentaires :

  • Retour de Jamie Dorman pour cet épisode.

  • La sorcière Maléfique est un personnage du film d’animation La Belle au bois dormant sorti en 1959. Pour barrer la route au prince, elle se change…en dragon. Au cinéma, elle est incarnée par Angelina Jolie dans le film sorti en 2014.

  • Le dragon est un symbole du mal dans le christianisme. En terrasser un était une preuve de sainteté comme le montre l’histoire de Saint George ou celle de Saint Michel ; dans ce dernier cas le dragon est explicitement identifié au Diable. Le dragon représenté dans l’épisode est conforme à l’image traditionnelle occidentale. En Orient, bien que dangereux, ils ne sont pas foncièrement hostiles.

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